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Incompétence labiale et sensation d’obstruction nasale
● D. Salvan*
L’
examen d’un patient consultant pour obstruction
nasale doit prendre en compte l’ensemble de la
morphologie faciale. En effet, en l’absence
d’occlusion labiale, le flux aérien respiratoire est essentiellement buccal du fait d’une résistance moindre au passage de
l’air. Cela entraîne une sensation d’obstruction nasale puisqu’il
n’y a plus de stimulation inspiratoire des capteurs trigéminés
des fosses nasales. En outre, l’absence ou la diminution du
flux aérien dans les fosses nasales peut aboutir à une véritable
rhinite congestive du fait de l’absence d’évaporation des sécrétions rhinosinusiennes.
On entend par incompétence labiale l’absence de contact entre
les lèvres, le sujet étant en position de repos mandibulaire.
Remarquons que, à l’inverse, une obstruction nasale entraîne
souvent, non pas une incompétence labiale, mais une inocclusion labiale secondaire à l’ouverture buccale nécessaire à la
respiration.
Une compétence labiale satisfaisante nécessite des arcades
dentaires en bonne position et congruentes, ainsi qu’un équilibre entre les muscles de la sangle orojugale (peauciers des
lèvres et du menton) et les muscles linguaux.
L’incompétence labiale est liée soit à une dysmorphose
maxillo-dentaire (anomalies de l’os alvéolaire ou des bases
osseuses) entraînant une dysfonction de la sangle orojugale,
soit à un déséquilibre musculaire (macroglossie, amputation
labiale), les deux mécanismes pouvant s’associer.
– examen endobuccal, qui analyse l’articulé dentaire, le
volume et la position de la langue.
L’occlusion idéale dans le sens antéropostérieur est la classe I
d’Angle : première molaire supérieure en arrière de la première molaire inférieure d’une demi-cuspide, canine supérieure en arrière de la canine inférieure, surplomb de l’incisive
supérieure d’environ 2 mm. Dans le sens transversal, l’arcade
inférieure est normalement circonscrite par l’arcade supérieure. Dans le sens vertical, le recouvrement incisivo-canin
est d’environ 2 mm.
L’occlusion dynamique est également étudiée lors de la fermeture et lors de la relation centrée des condyles (position des
condyles la plus haute et la plus postérieure). L’occlusion
idéale correspond à une intercuspidation maximale lors de
l’occlusion en relation centrée des condyles.
En cas de dysmorphose maxillo-dentaire, le bilan sera complété par des moulages dentaires et une téléradiographie de
profil.
La téléradiographie de profil permet une analyse morphométrique (figure 1), notamment la mesure de :
– l’angle ANB. Il est normalement de 0° à 2°. Il apprécie la
relation antéro-postérieure des bases osseuses ;
– l’angle GoGn/SN. Il est normalement égal à 32°. Il apprécie
la hauteur faciale.
EXAMEN CLINIQUE
Avant l’examen rhinoscopique ou de l’oropharynx, l’examen
clinique doit comporter une analyse morphologique du visage
et un examen endobuccal :
– examen des lèvres, en notant leur tonus, leur longueur, leur
position (pro- ou rétrochéilie) ;
– examen du sourire pouvant découvrir la gencive supérieure
(sourire gingival) ou au contraire ne pas découvrir les dents ;
– examen du profil, en notant les modifications éventuelles des
reliefs (projection des lèvres, menton, nez), des angles cervicomentonniers et labiocolumellaires, des sillons nasogéniens et
labiomentonniers. En cas d’incompétence labiale, le muscle
orbiculaire des lèvres et les muscles du menton sont souvent
hypertoniques et hypertrophiés (menton en boule) pour tenter
d’obtenir une occlusion labiale ;
* Service d’ORL et de chirurgie cervico-faciale, hôpital Lariboisière, Paris.
Figure 1. Schéma de l’analyse d’une téléradiographie de profil.
La Lettre d’Oto-rhino-laryngologie et de chirurgie cervico-faciale - n° 243 - mai 1999
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CAUSES PRINCIPALES D’INCOMPÉTENCE LABIALE
Excès vertical du menton isolé
L’articulé dentaire est satisfaisant (classe I), souvent associé à
un manque de projection du menton. Le traitement est une
génioplastie de diminution de hauteur et souvent d’avancée
(figures 2 et 3).
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● Dysmorphoses des bases osseuses classe III. Par définition,
l’angle ANB est inférieur à 0° (figure 4). Il existe une position
trop mésiale des molaires et canines inférieures par rapport aux
supérieures, ce qui correspond soit à une promandibulie, soit à
une rétromaxillie. Cliniquement, il existe une prochéilie inférieure et une saillie du menton.
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b
Figure 2. Schéma d’une génioplastie.
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d
Figure 3. Génioplastie d’avancée.
Déséquilibre musculaire
Il est en général secondaire à une macroglossie (congénitale,
lymphangiome, etc.) ou encore à une amputation labiale traumatique ou congénitale. Le traitement repose sur celui de la cause.
Le plus souvent, il existe, secondaire à ce déséquilibre musculaire, une anomalie des axes dentaires ou une véritable dysmorphose maxillo-dentaire nécessitant un traitement spécifique.
Dysmorphoses maxillo-dentaires
● Dysmorphoses des bases osseuses classe II. Par définition,
l’angle ANB est ici supérieur à 2°. Il existe une position trop
mésiale des canines et molaires supérieures par rapport aux inférieures, ce qui correspond soit à une rétromandibulie, soit à une
prognathie maxillaire. Cliniquement, il existe une prochéilie
supérieure et une éversion labiale inférieure, une hypertrophie
des muscles du menton avec sillon labio-mentonnier marqué.
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Figure 4. Classe III hyperdivergente. Aspect préopératoire (a et b)
et postopératoire (c et d) après chirurgie bimaxillaire associée à
une génioplastie.
● Pro-alvéolies. L’angle ANB est normal, mais il existe une
position trop antérieure du bloc incisivo-canin supérieur ou
inférieur, qui se traduit cliniquement par une prochéilie supérieure ou inférieure sans décalage des bases osseuses.
● Béances. Il s’agit d’une absence de contact entre arcades
supérieure et inférieure au niveau incisif, canin, prémolaire ou
molaire. L’angle GoGn/SN est augmenté, ce qui correspond à
l’aspect de “face longue”, avec hypotonie et brièveté labiale
supérieure, sillon labio-mentonnier marqué, effacement de
l’angle cervico-mentonnier.
La Lettre d’Oto-rhino-laryngologie et de chirurgie cervico-faciale - n° 243 - mai 1999
Figure 5. Ostéotomie de type Lefort I.
La prise en charge de l’incompétence labiale en cas de dysmorphose maxillo-dentaire passe bien sûr par le traitement de cette
dysmorphose, afin de retrouver un articulé correct et stable et
une bonne compétence labiale. Il repose le plus souvent sur
l’association des techniques orthodontique et chirurgicale.
– Traitement orthodontique. Préalable à tout geste chirurgical,
il a pour but d’obtenir des arcades dentaires congruentes et un
articulé stable après chirurgie. Il consiste en un nivellement
des arcades avec harmonisation de la courbe de Spee et une
décompensation dentaire avec correction des axes dentaires,
qui majore souvent les anomalies en préopératoire.
– Traitement chirurgical. En fonction des situations, sont
envisagées : une ostéotomie type Lefort I (avancée ou recul,
abaissement ou impaction du maxillaire) (figure 5) ; une
ostéotomie sagittale de la mandibule avec avancée ou recul
(figure 6) ; éventuellement l’association des deux, chirurgie
bimaxillaire. Une génioplastie est souvent associée afin
d’obtenir le meilleur contact labial possible et une harmonisation du profil. Plus rarement sont réalisées des ostéotomies
partielles des blocs incisivo-canins supérieur (Wassmund) ou
inférieur (Kole).
Figure 6. Schéma d’une ostéotomie sagittale.
On entend par incompétence labiale l’absence de contact
entre les lèvres, le sujet étant en position de repos mandibulaire. Du fait de cette absence d’occlusion labiale le flux
aérien inspiratoire devient essentiellement buccal, ce qui
entraîne une sensation d’obstruction nasale.
L’incompétence labiale est liée soit à une dysmorphose
maxillo-dentaire (anomalies de l’os alvéolaire ou des bases
osseuses) entraînant une dysfonction de la sangle orojugale,
soit à un déséquilibre musculaire (macroglossie, amputation
labiale), les deux mécanismes pouvant s’associer.
Le traitement vise à restaurer un équilibre musculaire. En cas
de dysmorphose maxillo-dentaire, il repose le plus souvent
sur l’association des traitements orthodontique et chirurgical.
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❐
Benoit M. Traité de techniques chirurgicales stomatologique et maxillofaciale. Masson, Paris.
❐ Delaire J. Analyse architecturale et structurale craniofaciale de profil. Rev
Stomatol 1978 ; 79 : 1-33.
❐ Thévenin J. Manuel d’orthondontie pratique. Maloine, Paris.
❐ Négrier B., Deffrennes D., Hadjean E. Ostéotomies maxillomandibulaires.
Encycl Méd Chir Techniques chirurgicales - Chirurgie plastique, 45601-6, 1992.
La Lettre d’Oto-rhino-laryngologie et de chirurgie cervico-faciale - n° 243 - mai 1999
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