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Congrès de la Société française d’ORL
Paris, 12-15 octobre 1998
● M. François*, I. de Gaudemar**, N. Noël-Petroff*
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ette année encore, le Congrès de la Société française d’ORL a été riche en communications. Nous
avons sélectionné pour vous une table ronde
concernant l’aérosolthérapie [1], et des communications qui
s’articulaient autour de trois thèmes principaux : l’ORL pédiatrique, la rhinologie et les explorations fonctionnelles.
L’AÉROSOLTHÉRAPIE EN ORL
Les aérosols sont utilisés à des fins thérapeutiques depuis fort
longtemps. Toutefois, il y a encore trop peu d’études sur leur
efficacité par rapport aux thérapeutiques de référence. Les
ORL doivent faire rapidement un effort d’évaluation et de validation de l’aérosolthérapie dans leur spécialité, comme l’ont
fait les pneumologues dans la mucoviscidose et dans l’asthme
(A. Emonot, Saint-Étienne), faute de quoi cette modalité thérapeutique sera supprimée (J.M. Klossek, Poitiers).
En préambule, C. Martin (Saint-Étienne) a rapporté les résultats de deux enquêtes récentes sur la pratique de l’aérosolthérapie en ORL en France.
La première était l’enquête INSERM de Faurisson auprès de
490 ORL (1996). Cette enquête a montré que les ORL restaient très attachés à l’aérosolthérapie, puisque 46 % d’entre
eux en prescrivaient plusieurs fois par mois et 20 % plusieurs
fois par semaine ; 6 % seulement des ORL consultés n’en prescrivaient jamais, et 28 % n’en prescrivaient que quelques fois
dans l’année. La principale indication était la sinusite (53 %
des prescriptions), suivie par les laryngites (22 %) et les rhinites (13 %). Les otites restaient une indication rare (2 %).
L’aérosol était en général prescrit avec un antibiotique, qui
était dans 70 % des cas un aminoside (nétilmicine 32 %, framycétine 23 %) et dans 20 % des cas de la lincomycine. Dans
85 % des cas, il y était adjoint un autre médicament, essentiellement corticoïde, mucolytique ou huile. L’aérosol était la
seule thérapeutique prescrite dans 35 % des cas. Il était associé
à une antibiothérapie par voie générale dans 54 % des cas. La
tolérance était estimée excellente par 95 % des praticiens, mais
beaucoup le jugeaient moins efficace qu’une administration
par voie générale.
* Service ORL, hôpital Robert-Debré, Paris.
** Service ORL, hôpital Saint-Vincent-de-Paul, Paris.
La deuxième enquête, effectuée en 1997, a été coordonnée par
L. Gilain (Clermont-Ferrand) et M. Topéza (laboratoires Jouveinal). Elle a porté sur 2 985 praticiens français (2 034 généralistes, 475 pédiatres et 476 ORL). Soixante-quinze pour cent
de ces praticiens prescrivaient des aérosols chez l’adulte et
57 % chez l’enfant. Les principales indications étaient les sinusites aiguës (71 % des praticiens) et chroniques (71 %), suivies
par les bronchites aiguës (39 %) et chroniques (45 %). Il
s’agissait, dans trois quarts des cas, d’aérosols d’antibiotiques,
de corticoïdes et/ou de mucolytiques. Dans la moitié des cas,
les praticiens y adjoignaient un antibiotique par voie générale.
Un aérosol comporte une phase dispersée stable composée de
particules solides ou liquides dans une phase dispersante
gazeuse (J.M. Prades, Saint-Étienne). La formation et la dispersion des particules à partir de la solution thérapeutique se
fait soit par un jet d’air comprimé (appareil pneumatique), soit
par vibration d’un cristal piézoélectrique (appareil ultrasonique). En rhinologie, l’adjonction d’une source sonore (appareil pneumatique sonique) de 100 Hz augmente les impacts sur
l’ensemble des parois des fosses nasales et favorise la pénétration des particules dans les sinus. Cela a pu être prouvé grâce à
un modèle en verre avec des particules de fluorescéine : l’ajout
de vibrations sonores augmente l’impact sur les parois en verre
et permet le passage des particules dans la cavité annexe
(figure 1). Dans les appareils à aérosol manosonique, utilisés
pour les problèmes tubaires, il y a en plus un système capable
de générer à certains moments une légère surpression.
L’efficacité potentielle d’un aérosol dépend de quatre
éléments :
– la cible, et il est important, en rhinologie, de tenir compte de
l’anatomie des cavités nasosinusiennes, qui peut être étudiée
sur des pièces anatomiques fixées ;
– le type de nébuliseur ;
– les conditions de pression, de ventilation (nasale ou buccale),
l’adjonction ou non de vibrations sonores, le temps de nébulisation ;
– la granulométrie. Si les particules font plus de 100 µ, elles
vont rapidement sédimenter : c’est le cas des poussières ; si
elles font moins de 0,01 µ, elles s’évaporent rapidement. Un
Table ronde organisée par C. Martin, de Saint-Étienne, sous l’égide du
SNITEM, de la Diffusion technique française et des laboratoires Jouveinal.
[1]
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aérosol médical doit donc avoir des particules de taille intermédiaire et, en pratique, la taille optimale des particules pour
un usage ORL se situe entre 0,1 et 5 µ (tableau I). Les particules les plus grosses se déposent par impaction sur les
parois des voies aérodigestives supérieures et par sédimentation dans les bronches et les bronchioles. Les particules les
plus fines gagnent, par diffusion, les alvéoles. L’importance
du dépôt dépend de la taille des particules et de la distance
aux lèvres et au nez. La vitesse de déposition dépend du diamètre des particules.
La prescription. La rédaction de l’ordonnance doit préciser le type
d’appareil à louer, appareil d’aérosol pneumatique sonique pour les laryngites et les sinusites, ou appareil manosonique pour la pathologie tubaire,
et mentionner la nécessité d’acheter le kit pour nébuliseur sonique ou
manosonique (qui comporte le masque facial ou l’embout narinaire, la
chambre de nébulisation et les tuyaux, tous ces éléments devant être
propres au patient). Sur une ordonnance séparée seront indiqués le rythme
et la durée des aérosols, ainsi que les médicaments à mettre dans la
chambre de nébulisation.
vibration sonore
vers le patient
arrivée d’air comprimé
A
vers le patient
arrivée d’air comprimé
B
Figure 1. Effet de l’adjonction d’une source de vibrations sonores sur
les dépôts de particules de fluorescéine dans un modèle nasosinusien en
verre (J.M. Prades, Saint-Étienne) : (A) sans source sonore, (B) avec
source sonore.
Tableau I. Granulométrie de divers produits (J.M. Prades, SaintÉtienne). Il est à noter que l’adjonction de vibrations sonores ne
modifie pas la granulométrie.
Diamètre des particules (en microns)
Sérum physiologique
Budésonide
Colistine
Tobramycine
Amiloride
3,5
2,2
2,3
2,2
2,4
Des expériences sur des préparations anatomiques avec des
aérosols de sérum physiologique marqué avec du technétium
ont montré qu’il y a une diffusion dans les sinus maxillaires
aussi intense que dans les fosses nasales elles-mêmes. Cependant, in vivo, l’obstruction des voies aériennes peut modifier
ce schéma idéal (J.M. Prades, Saint-Étienne). Chez six
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adultes normaux, une nébulisation pendant une dizaine de
minutes, avec un appareil à aérosol sonique, de sérum physiologique teinté au bleu de méthylène a montré un dépôt très précoce au niveau de la tête des cornets et, au bout de 10 minutes,
un dépôt plus loin dans les fosses nasales, ainsi qu’au niveau
des méats et des sinus maxillaires. La même expérience effectuée chez des patients ayant une sinusite maxillaire n’a pas
permis de retrouver la moindre trace de bleu dans les sinus
maxillaires. Autrement dit, ce qui marche chez les sujets sains
ne marche pas forcément chez les patients que nous avons à
traiter, justement du fait de leur maladie, et l’efficacité des
aérosols dans ces cas reste à prouver.
Les aérosols en laryngologie (E. Reyt, Saint-Gervais)
L’aérosol a l’avantage, sur les autres modes d’administration
d’un médicament, d’agir très rapidement et de permettre un
dépôt de principe actif directement sur la muqueuse à traiter,
avec, de ce fait, une action locale privilégiée. Pour être efficace, il faut tenir compte du dépôt oropharyngé, de l’ordre de
10 % lorsque les gouttelettes font 10 µ de diamètre, et optimiser les conditions de ventilation lors de l’inhalation pour optimiser le dépôt au niveau laryngé (et éviter le passage dans
l’atmosphère ambiante).
Certains produits ne doivent pas être utilisés pour ces aérosols : les huiles, car elles peuvent provoquer une pneumonie
lipidique, et les produits dont l’excipient comporte des sulfites
(comme la dexaméthasone), car ils peuvent être responsables
de bronchospasme. Il faut savoir aussi que les aérosols contenant des corticoïdes peuvent favoriser l’apparition d’une candidose oropharyngée.
L’aérosolthérapie dans les laryngites aiguës sous-glottiques a
fait l’objet de controverses dans les années 70-80, certains
auteurs contestant l’efficacité de ce type de traitement. Depuis,
des études randomisées en double aveugle ont confirmé l’intérêt et la bonne tolérance des aérosols dans ces indications.
Westley, en 1978, en comparant l’épinéphrine racémique au
placebo chez 20 enfants souffrant d’une laryngite aiguë sousglottique dyspnéisante, a montré l’efficacité rapide, en une
vingtaine de minutes, des aérosols d’adrénaline et a battu en
brèche la notion de rebond : l’efficacité de l’aérosol cesse au
bout de deux heures, et l’on se trouve à nouveau dans la situation initiale, mais il n’y a pas d’aggravation par rapport à l’état
avant le traitement. Husby, en 1993, et Klassen, en 1994, ont
trouvé une amélioration clinique, avec raccourcissement de la
durée d’hospitalisation sans effet secondaire après aérosol de
budésonide, beaucoup plus nette qu’après un aérosol de sérum
physiologique.
En résumé, les aérosols sont indiqués dans les laryngites
aiguës de l’adulte et de l’enfant et dans les suites de la microchirurgie laryngée. Les produits utilisés sont essentiellement
l’adrénaline et les corticoïdes.
L’aérosolthérapie en rhinologie (J.M. Klossek, Poitiers ;
R. Jankowski, Nancy)
Ont actuellement une AMM pour usage local en rhinologie :
des corticoïdes, des anti-H1, des anticholinergiques, des vaso-
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constricteurs, des antibactériens, des huiles simples et mentholées. Après pulvérisation dans le nez, un produit ne reste pas
forcément dans le tiers antérieur des fosses nasales. Il a été
montré pour les corticoïdes, par exemple, qu’il y a une diffusion vers le sinus frontal. Par ailleurs, le produit actif peut rester sur place longtemps et, dans le cas des corticoïdes, il en
reste dans les fosses nasales plus de deux heures après la pulvérisation. Les aérosols peuvent être intéressants pour traiter
une sinusite aiguë ou chronique. Il y a un projet d’évaluation
des aérosols dans ces indications, en comparant l’efficacité
d’une antibiothérapie par voie générale seule à celle d’une
antibiothérapie associée à des aérosols biquotidiens pendant
une semaine.
L’aérosolthérapie en otologie (C. Dubreuil, Lyon)
C. Dubreuil a présenté les résultats d’une étude multicentrique
de l’efficacité des aérosols manosoniques dans les otites
séreuses et les poches de rétraction. Quatre-vingt-dix patients
ont été inclus dans cette étude, 36 enfants (moyenne d’âge :
8 ans et demi) et 54 adultes, totalisant 50 otites séreuses et
40 poches de rétraction, dont 8 étaient fixées. Les patients
devaient faire deux séances d’aérosol manosonique de
15 minutes tous les jours pendant un mois, avec un mucolytique. Le traitement se faisait complètement en ambulatoire.
Au bout de deux mois, 38 % des otites séreuses des enfants et
55 % des otites séreuses des adultes étaient guéries ; parmi les
poches de rétraction, 33 % des enfants et 12 % des adultes
étaient guéris. Aucune poche de rétraction fixée n’avait
répondu au traitement. Le traitement a été très bien toléré, sans
effet secondaire et sans douleur.
Les aérosols manosoniques ont un effet bénéfique sur les otites
séreuses et les poches de rétraction mobiles. Cette méthode
thérapeutique n’est pas invasive (à la différence de la pose
d’un aérateur transtympanique ou de la chirurgie de renforcement du tympan) et est d’utilisation facile dès l’âge de 2-3 ans.
Elle a trois actions : pressionnelle, kinésithérapique (au fur et à
mesure des séances, le patient arrive à diminuer la surpression
nécessaire pour faire passer l’air dans l’oreille moyenne) et
médicamenteuse (en fonction du produit utilisé, tableau II).
ORL PÉDIATRIQUE
Les urgences
● Les brûlures œsophagiennes
L’attitude face à une brûlure de l’œsophage ne sera pas la
même chez l’adulte que chez l’enfant, en particulier en ce qui
concerne les modalités d’alimentation et la sonde nasogastrique. Les brûlures chez l’enfant sont rarement le résultat d’un
acte délibéré, à visée suicidaire, mais le plus souvent accidentelles. Dans tous les cas, il est important de faire un bilan initial des lésions ; en effet, en cas d’évolution défavorable, le
chirurgien se fondera, pour faire son anastomose supérieure,
sur le niveau supérieur initial des lésions et non sur le niveau
de la sténose (M. François, hôpital Robert-Debré, Paris). Les
lésions doivent donc être détaillées dans le compte rendu opératoire de la première endoscopie. On distingue plusieurs
stades selon le type et l’étendue des lésions (tableau III).
À partir d’une série de 21 cas, P. Fontaine et coll. (hôpital
Édouard-Herriot, Lyon) proposent une conduite à tenir en
fonction du stade des lésions (tableau IV). Les six enfants de
leur série qui étaient de stades 0, 1 et 2A ont guéri sans
séquelle, de même que les quatre enfants de stades 2B et 3A.
Les onze enfants de stade 3B ont eu une sténose œsophagienne, qui a été guérie après séances de dilatation dans 4 cas
et a nécessité une intervention chirurgicale de remplacement
œsophagien par un transplant colique dans 7 cas. L’intervention chirurgicale a été décidée après échec des dilatations, en
moyenne un an après l’accident initial. Il faudrait en fait avancer la date de la chirurgie.
L’adjonction de corticoïdes est controversée. Selon
Y. Manac’h (hôpital Necker-Enfants malades, Paris), il ne
faut pas en donner dans les premières 48 heures ; cependant,
leur prescription peut être discutée ensuite, dans le but de
diminuer la synthèse de collagène.
Tableau III. Classification des lésions des brûlures œsophagiennes par
caustique.
Stade 0
Stade 1
Stade 2
Stade 3
Stade 4
aucune lésion
brûlures superficielles
fausses membranes non circulaires (A), circulaires (B)
brûlures profondes non circulaires (A), circulaires (B)
perforation
Tableau II. Produits utilisés en aérosols (J.P. Fontanel, Poitiers).
Antibiotiques
Corticoïdes
Mucofluidifiants
Vasoconstricteur
ORL et pneumologie
ORL
amikacine
gentamicine
tobramycine
nétilmicine
colistine
amphotéricine
budésonide
lincomycine
bêtaméthasone
hydrocortisone
dexaméthasone
Tableau IV. Conduite à tenir en fonction des lésions œsophagiennes
constatées lors de la première endoscopie.
Stade 1 :
alimentation semi-liquide pendant 24 à 48 heures,
endoscopie 6 mois plus tard
Stade 2A :
alimentation semi-liquide pendant 4 à 5 jours,
endoscopie à J15, TOGD à 2 mois
Stades 2B et 3 :
sonde nasogastrique pendant 8 à 9 semaines,
alimentation entérale ou, si celle-ci est impossible,
alimentation parentérale, anti-H2 et antibiotiques,
TOGD à J20, endoscopie à J21
bromhexine
mesna
acétylcystéine
adrénaline
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● Les corps étrangers des voies aériennes inférieures
Des enfants meurent de l’inhalation d’un corps étranger. Les
manœuvres de ressuscitation, telles que la manœuvre de Heimlich, ne marchent pas toujours, et même à Paris ou en banlieue
parisienne, où les secours peuvent arriver très vite, ils arrivent
parfois trop tard tant l’asphyxie est rapide. La communication
de I. Kerurien-Lebret et coll. (Le Kremlin-Bicêtre) était à cet
égard très impressionnante. Les auteurs ont repris les dossiers
des enfants hospitalisés en réanimation à la suite de l’inhalation d’un corps étranger. En une dizaine d’années, 26 enfants
ont été recensés, dont l’âge moyen était de 3,4 ans. Il y avait
un pic de fréquence entre 1 et 3 ans, mais certains enfants
étaient nettement plus âgés (8 ans pour le plus âgé). L’accident
était survenu à la maison dans plus de la moitié des cas, chez
la nourrice dans 19 % des cas, et à l’école dans 12 % des cas.
Le plus souvent, l’enfant était en train de manger ou de jouer.
Chez 9 enfants, la manœuvre de Heimlich avait échoué ; chez
5 autres, un adulte assistant à la scène avait tenté en vain
d’extraire le corps étranger au doigt. Les secours sont arrivés
en moyenne 11 minutes après l’alarme ; 13 enfants étaient en
arrêt cardiorespiratoire, 4 étaient en coma anoxique, 1 était
cyanosé, les autres étaient dyspnéiques mais toussaient encore.
Dans un cas, l’enfant a réussi à expulser le corps étranger dans
un effort de toux ; dans 19 cas, le corps étranger a été retiré à
la pince de Magill ; dans 5 cas, il a fallu, pour le retirer, faire
une endoscopie ; enfin, dans un cas, le corps étranger a été
retrouvé à l’autopsie. Au total, sur ces 26 enfants, 15 sont
morts et 1 a gardé des séquelles neurologiques de son anoxie à
type d’épilepsie.
La série présentée par R. Diouf et coll. (Dakar, Sénégal) était
aussi frappante. Le Sénégal est un pays de près de 8 millions
d’habitants. Le seul centre hospitalier susceptible de procéder
à l’extraction d’un corps étranger des voies aériennes inférieures est dans la capitale. Il y a bien un ORL d’astreinte,
mais pas d’anesthésiste et, quelquefois, la seule solution pour
sauver la vie d’un enfant est de faire une trachéotomie pour
attendre le lendemain et pouvoir effectuer une endoscopie
réglée. Entre 1981 et 1996, 145 enfants ont été reçus pour
inhalation de corps étranger dans les voies aériennes inférieures, dont 65 corps étrangers laryngés. Dans ces 65 derniers
cas, les enfants étaient âgés de 7 mois à 14 ans (moyenne :
36 mois) et il y avait une forte majorité de garçons (71 %). Le
syndrome de pénétration était retrouvé dans 9 cas sur 10, et la
dyspnée laryngée présente dans 83 % des cas. Le problème
peut se poser du diagnostic différentiel avec une diphtérie, un
asthme ou une papillomatose laryngée dyspnéisante. Près des
trois quarts des enfants ont été vus plus de 48 heures après
l’inhalation du corps étranger. Plus de la moitié des enfants ont
été trachéotomisés. Tous ont pu être décanulés, mais après un
délai moyen de 10 jours. Dans cette série, les auteurs ont eu a
déplorer trois décès.
Audition et vertiges
La conférence de consensus sur le dépistage des troubles auditifs en période néonatale qui s’est tenue à Milan au printemps
dernier avait conclu à l’intérêt d’un dépistage par les otoémissions provoquées chez tous les nouveau-nés, s’opposant ainsi à
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la politique de dépistage ciblée sur facteur de risque habituellement pratiquée faute de moyens.
E. Panosetti (Luxembourg) a pratiqué un dépistage systématique des troubles auditifs par les otoémissions acoustiques
provoquées (OEP) chez tous les nouveau-nés hospitalisés en
unité de soins intensifs au centre hospitalier du Luxembourg.
En un an, il a examiné 617 nouveau-nés. L’examen était réalisé chez tous les enfants dès qu’ils avaient plus de
35 semaines d’âge gestationnel et que leur état général leur
permettait d’être transportés au service ORL, à l’étage au-dessus de la réanimation. Si les OEP étaient présentes des deux
côtés, l’enfant avait, comme tous les enfants luxembourgeois,
un examen auditif à 12 mois, 30 mois puis 60 mois. Si les OEP
étaient absentes d’un ou des deux côtés, l’examen était renouvelé avant la sortie de l’enfant et éventuellement une troisième
fois avant l’âge de trois mois. En cas d’OEP absente au troisième essai, l’enfant avait un examen ORL avec impédancemétrie et enregistrement des potentiels évoqués auditifs (PEA).
Lors du premier test, 82,7 % des enfants avaient des OEP présentes des deux côtés ; 90,1 % des enfants avaient des OEP
présentes avant leur sortie de l’hôpital. Ce programme de
dépistage a débouché sur 12 diagnostics de surdité de perception (soit 19,4 ‰ enfants hospitalisés en soins intensifs néonatals). Sur ces 12 enfants, 1 est décédé, 3 avaient une surdité
profonde et 8 un seuil supérieur à 60 dB. Beaucoup de ces
enfants avaient une pathologie neurologique associée, ce qui
explique que, malgré un dépistage précoce de la surdité, seuls
2 enfants sur 11 ont été appareillés.
En fin de maternelle, le dépistage des troubles auditifs se fait
bien souvent à la voix chuchotée. Avant d’acheter un audiomètre de dépistage, les PMI d’Indre-et-Loire ont demandé une
évaluation comparative de la sensibilité et de la spécificité de
ces deux méthodes de dépistage des surdités. Une centaine
d’enfants âgés de 4 à 5 ans ont été inclus dans l’étude rapportée par E. Lescanne (hôpital Gatien-de-Clocheville, Tours) : la
moitié était réputée normo-entendante et l’autre moitié était
suspecte de surdité. Les enfants qui avaient une surdité de perception connue ou qui refusaient de participer à l’examen
audiométrique ont été exclus de cette étude. Les enfants ont
passé les deux tests et les résultats ont été comparés à ceux de
l’audiométrie tonale classique. Sur les 200 oreilles testées, il y
avait 99 oreilles normales et 85 surdités de transmission, dont
64 étaient légères. L’examen à voix chuchotée avait une spécificité de 74 % et une sensibilité de 64 % ; l’audiovérificateur
avait une spécificité très médiocre, de 46 %, et une sensibilité
de 79 %. Le couplage des deux examens permettrait ainsi
d’obtenir une sensibilité de 93,8 %, mais il faut alors beaucoup
plus de temps, et cela coûterait très cher. Toutes les surdités
moyennes (> 40 dB) ont été dépistées à la voix chuchotée. En
conclusion, l’examen à la voix chuchotée, pour peu que l’examinateur soit bien entraîné, et surtout s’il peut contrôler
l’intensité de sa voix avec un sonomètre, reste un excellent
moyen de dépistage des troubles auditifs de l’enfant.
N. Noël-Petroff (hôpital Robert-Debré, Paris) a attiré l’attention sur quelques pièges en audiométrie chez l’enfant. Certains
enfants distraits ou authentiquement simulateurs donnent des
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réponses audiométriques qui font croire à tort à une surdité
bilatérale ou à une cophose unilatérale. En deux ans et demi, le
diagnostic de surdité porté à tort a été redressé chez 32 enfants
à la consultation d’audiophonologie de l’hôpital Robert-Debré.
Certains de ces enfants avaient déjà eu des examens coûteux
tels qu’un scanner ou une prescription de prothèses auditives,
alors qu’ils entendaient en fait très bien, ou étaient adressés
pour une hospitalisation en vue du traitement en urgence d’une
surdité brusque qui n’existait pas. La plupart des enfants
avaient entre 8 et 10 ans, âge auquel les réponses à l’examen
audiométrique tonal sont habituellement précises et fiables. En
cas de seuils audiométriques élevés en audiométrie tonale, il
est sage de compléter, par une audiométrie vocale, la discordance entre une vocale relativement conservée et une tonale
avec une courbe aérienne plate à 50-60 dB, et une courbe
osseuse un peu décalée à 40-50 dB doit faire suspecter l’irréalité de la baisse d’audition. De même, on se méfiera des
enfants qui affichent une cophose unilatérale sans courbe fantôme. La réalité d’une surdité bilatérale est a priori douteuse
chez les enfants qui ne lisent pas sur les lèvres, ou qui communiquent avec leurs parents en chuchotant. Le diagnostic peut
être redressé par les OEP, par des tests audiométriques à deux
canaux si la pseudo-surdité est unilatérale, et par bien d’autres
petits “trucs” que les audiométristes connaissent bien.
S. Tronche, par exemple, demande à l’enfant de dire “oui” s’il
entend le son et “non” s’il ne l’entend pas : s’il dit “non”,
c’est, bien sûr, qu’il l’a entendu !
Les vertiges sont rares chez l’enfant. Le diagnostic de vertige
paroxystique bénin (VPBE) est évoqué dès l’interrogatoire
(S. Imbaud-Genieys et coll., hôpital Robert-Debré, Paris).
Il s’agit d’épisodes très brefs de vertiges rotatoires, isolés, en
général sans signe neurovégétatif. L’âge moyen des enfants
lors de la première crise, dans une série de 29 enfants examinés à l’hôpital Robert-Debré, était de quatre ans. La fréquence
des accès était variable d’un enfant à l’autre ; les crises vertigineuses finissaient par disparaître, mais certains enfants ont
développé une migraine. Le diagnostic de VPBE ne peut être
retenu que si l’examen clinique neurologique et vestibulaire
est strictement normal. Les examens complémentaires coûteux
et invasifs, tels qu’IRM et scanner, sont inutiles en cas de
VPBE. Le VPBE est, avec les équivalents migraineux, une des
causes les plus fréquentes de vertiges chez l’enfant. Cette
pathologie est cependant rare, puisque seuls 29 cas ont été
observés en 7 ans dans cette consultation spécialisée de vestibulométrie pédiatrique.
A. Uziel (hôpital Saint-Charles, Montpellier) a présenté une
étude extrêmement intéressante sur les performances scolaires
des enfants implantés : l’un des objectifs de la prise en charge
des enfants malentendants est une scolarisation aussi proche
que possible de celle des autres enfants du même âge, afin de
leur donner le maximum de chances pour le choix et l’exercice
d’un métier. L’auteur a étudié les performances scolaires de
30 enfants qui avaient été implantés pour une surdité profonde
prélinguale. Dix-huit enfants avaient été implantés avant 4 ans
et 12 entre 5 et 8 ans. Avant l’implantation, 7 enfants étaient
en école spécialisée, 13 étaient en intégration scolaire avec
soutien, et 2 en intégration partielle. Cinq ans plus tard,
21 enfants étaient à l’école primaire et 9 au collège. Tous les
enfants sauf un étaient capables de parler avec un interlocuteur
connu, 13 enfants pouvaient parler avec un inconnu sans le
faire répéter et 8 en le faisant répéter, 25 enfants pouvaient
téléphoner à un interlocuteur connu et 5 pouvaient même téléphoner à un inconnu. Vingt-six enfants sont entrés au cours
préparatoire à l’âge normal. Vingt enfants sur 30 n’ont pas
redoublé de classe. Les enfants qui, au moment de l’évaluation, étaient au collège avaient des performances en orthographe et expression écrite françaises moins bonnes que leurs
condisciples, mais d’aussi bonnes performances en mathématiques et en anglais (14/20 en moyenne !). En conclusion,
l’implant cochléaire a permis, chez la plupart de ces enfants
sourds profonds, une scolarité proche de la normale.
Les opérateurs aimeraient pouvoir restaurer l’audition, en cas
d’aplasie majeure, en créant un conduit et un tympan. Mais il
faut être réaliste : la caisse est souvent mal placée par rapport à
l’articulation temporo-mandibulaire, les osselets sont malformés, et, en cas non exceptionnel d’ankylose stapédovestibulaire, l’accès à la fenêtre ovale est barré par le nerf facial. Les
suites opératoires sont très difficiles, le conduit auditif externe
se sténose, l’oreille suinte... Y. Manac’h (hôpital NeckerEnfants malades, Paris) propose une autre approche : créer un
conduit auditif sec et continent qui puisse permettre l’appareillage par voie aérienne avec une prothèse peu visible et
moins instable qu’un vibrateur sur serre-tête.
Le conduit auditif externe est foré à l’occasion du deuxième
temps opératoire, le premier temps étant un temps esthétique
selon la technique de Nagata. Pour favoriser la cicatrisation, le
néo-conduit est tapissé d’un lambeau galéal ou sous-galéal.
Sur les 21 plasties qu’il a réalisées selon cette technique, 14
ont permis d’obtenir d’emblée un conduit sec et large. Cinq
enfants ont été repris pour sténose méatale, reprise qui a été
couronnée de succès dans 4 cas. Dans les deux derniers cas, il
y a eu un comblement du fond du conduit auditif externe. Sur
les 9 enfants qui avaient une aplasie majeure bilatérale, un ne
porte plus de prothèse auditive, 5 sont appareillés par voie
aérienne et les 3 derniers sont appareillés avec une prothèse à
ancrage osseux (BAHA).
Aux frontières de la spécialité
Intérêt de la méatotomie lacrymale par voie endoscopique
dans les obstructions récidivantes du canal lacrymo-nasal
de l’enfant (J.P. Sibel, hôpital Gatien-de-Clocheville, Tours)
À la naissance, il existe une dysperméabilité des voies lacrymales chez 6 à 20 % des enfants, avec une prédominance féminine. Cela se traduit par des conjonctivites purulentes répétées
dès les premiers mois de vie, un épiphora, plus rarement des
dacryocystites ou une dacryocystocèle. Au cours de la première
année de vie, tout s’arrange avec un simple traitement médical
dans 9 cas sur 10. En cas d’échec, les ophtalmologistes pratiquent un sondage des voies lacrymales qui résout définitivement le problème dans 73 à 97 % des cas. En cas d’échec du
sondage, l’attitude, jusqu’à ces dernières années, était de propo-
La Lettre d’oto-rhino-laryngologie et de chirurgie cervico-faciale - n° 241 - mars 1999
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ser soit une intubation prolongée des voies lacrymales (réalisée
par l’ophtalmologiste), soit une dacryocystorhinostomie (réalisée par l’ophtalmologiste ou par l’ORL). Les auteurs proposent
comme alternative à ces traitements un examen sous anesthésie
générale à double équipe : pendant que l’ophtalmologiste catéthérise les voies lacrymales, l’ORL examine, dans la fosse
nasale, la région du méat pour préciser la cause de l’obstacle et
la traiter. Ils ont ainsi traité 37 dysperméabilités des voies lacrymales, chez 29 enfants âgés de 3,5 mois à 7 ans (moyenne
24 mois). Il y avait une imperforation de la membrane de Hassner dans 31 cas et une hypertrophie muqueuse autour du méat
dans un cas, qui ont été guéries par méatotomie à la pince. Dans
5 cas, il y avait une hypertrophie du cornet inférieur, qui a été
traitée par luxation de celui-ci.
Fermeture endonasale endoscopique des fistules bucconasales antérieures séquellaires de fente labio-palatine chez
l’enfant (T. Van den Abbeele, hôpital Robert-Debré, Paris)
Le traitement des fentes labio-palatines laisse, dans 10 à 40 %
des cas, un pertuis palatin antérieur. Celui-ci entretient localement un foyer d’infection et est cause de reflux nasal des aliments. Une reprise chirurgicale par voie palatine est difficile
du fait de la position très antérieure du pertuis et de son caractère anfractueux. Par ailleurs, les parents sont souvent réticents
à l’idée d’une nouvelle intervention endobuccale aux suites
douloureuses avec une reprise difficile de l’alimentation.
T. Van den Abbeele (hôpital Robert-Debré, Paris) propose,
pour les pertuis de moins de 5 mm de large, une fermeture par
voie rhinologique. L’orifice est repéré à l’optique, les bords
sont avivés. Un greffon libre de muqueuse de cornet est
ensuite appliqué sur l’orifice, éventuellement soutenu par un
taquet osseux prélevé sur le cornet inférieur, et maintenu en
place par de la colle biologique et un calibrage en silastic
armé, qui sera retiré ultérieurement en consultation. L’auteur a
ainsi opéré 10 enfants. Ils ont pu être réalimentés le soir même.
L’hospitalisation a été en moyenne de trois jours. Il n’y a eu
qu’un seul échec, chez l’un des premiers enfants de la série,
qui avait une fente particulièrement large. Par ailleurs, 7 des
10 enfants ont signalé en postopératoire une amélioration de la
respiration nasale, bénéfice secondaire intéressant de la septoplastie et de la turbinectomie partielle !
M. François
LA PATHOLOGIE RHINO-SINUSIENNE
Les signes fonctionnels
La cacosmie est une illusion olfactive nauséabonde. Le but de
l’étude présentée par B.K. Moll (Mayence, Allemagne) était
d’évaluer la fonction olfactive de 12 patients présentant une
cacosmie. Le test subjectif (Sniffin’Sticks) mesurant le seuil de
détection et d’aptitude d’identification de différentes odeurs
était normal chez tous les patients, sauf deux qui présentaient
une hyperosmie.
Les potentiels évoqués olfactifs recueillis par olfactométrie
étaient normaux chez tous les patients.
La fonction olfactive des sujets présentant une cacosmie isolée
est strictement normale.
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La pathologie tumorale
Les tumeurs nasosinusiennes sont d’une extrême variété.
A. El Kohen (Rabat, Maroc) en rapporte une série de 36 cas.
Les signes d’appel sont dominés par l’obstruction nasale et les
épistaxis. Les tumeurs bénignes les plus fréquentes sont les
papillomes inversés (22 %) et les angiomes (22 %). Les
tumeurs malignes les plus fréquentes sont les carcinomes épidermoïdes (19,5 %) et les mélanomes malins (14 %).
D. Stoll (Bordeaux) rapporte une série de 63 adénocarcinomes
de l’ethmoïde (âge moyen : 59 ans). Tous les sujets avaient eu
une longue exposition antérieure (26 ans en moyenne) aux
particules de bois. Dans les formes limitées (28 cas) sans lyse
osseuse (T1 et T2), la voie d’abord chirurgicale était transfaciale ; dans les formes évoluées (31 cas), elle était mixte :
transfaciale et neurochirurgicale. Une radiothérapie complémentaire a été réalisée dans 55 % des cas (stade T3 et T4).
Seize récidives ont été constatées avec un délai moyen de
30 mois et un délai maximal de 7 ans.
La survie était à 5 ans de 64,8 %, à 10 ans de 55,6 %.
Les facteurs de mauvais pronostic sont les infiltrations duremériennes, intracrâniennes ou sphénoïdales.
Les facteurs n’influençant pas l’évolution sont l’âge du patient,
l’infiltration de la lame orbitaire et la voie d’abord chirurgicale
transfaciale ou mixte.
Les auteurs proposent, dans les formes étendues de stade 4, de ne
réaliser qu’une chimiothérapie ou une radiothérapie palliative.
Les mélanomes malins nasosinusiens sont rares (3 à 7 % des
tumeurs nasosinusiennes) et de pronostic effroyable.
J.Y. Duclos (Bordeaux) rapporte une série de 15 cas (âge
moyen : 70 ans), dont quatorze formes locales pures et une
forme avec extension métastatique. Le traitement était chirurgical à visée curative dans 13 cas, à visée palliative dans 2 cas.
Une radiothérapie ou une chimiothérapie n’était pas systématique ; elles étaient proposées en présence d’une métastase
ganglionnaire ou viscérale. Le facteur de mauvais pronostic
était la localisation initiale sinusienne. La survie à 5 ans était
de 42 %, la survie à 10 ans de 0 %. Parmi les deux mélanomes
malins cités dans la série de A. El Kohen, les patients étaient
N0 et les curages ganglionnaires N+.
De même, les esthésioneuroblastomes sont exceptionnels.
Quatre cas sont rapportés par C. Zumegen (Cologne, Allemagne). Leur localisation et leur vitesse de croissance sont
extrêmement variables. Il n’existe aucun facteur pronostique
identifié. Le traitement associe chirurgie et radiothérapie. Le
taux de survie à 5 ans est de 72 %.
L’ostéome sinusien se situe, dans 75 à 90 % des cas, au niveau
du sinus frontal. Son étiopathogénie reste inconnue. La plupart
du temps, il est asymptomatique. À propos d’un cas clinique,
J. Vialard (Saint-Denis) rappelle les indications chirurgicales
d’exérèse : une localisation proche du récessus nasofrontal,
une extension au-delà du sinus frontal, une croissance rapide,
une association à une sinusite chronique. Le lien entre la
céphalée et l’ostéome sinusien est inconnu, souvent inexistant.
Ce dernier doit rester un diagnostic d’élimination dans le bilan
des céphalées.
La Lettre d’oto-rhino-laryngologie et de chirurgie cervico-faciale - n° 241 - mars 1999
Le syndrome de Gardner est une forme clinique particulière. Il
s’agit d’une maladie autosomique dominante associant des
ostéomes multiples de la face, une polypose colique, un épaississement des os longs et une fibromatose disséminée.
La prise en charge des fibromes nasopharyngiens est maintenant bien standardisée. L’autotransfusion et l’angiographie
avec embolisation préopératoire sont devenues systématiques.
O. de Montredon (Bordeaux) a rapporté une série de
35 fibromes dont 3 avec extension intracrânienne. Le taux de
récidive était de 25,7 %, avec un recul moyen de 25 mois.
Parmi les complications : un ramollissement sylvien postembolisation, une ophtalmoplégie, deux dacryocystites et deux
fistules palatines.
Les techniques chirurgicales
L’accroissement de la chirurgie endonasale a fait réapparaître
le problème des sténoses du canal nasofrontal postopératoires.
Leur prise en charge reste un problème difficile. L’incidence
en est inconnue.
J.M. Klossek (Poitiers) rapporte une série de 15 patients qu’il
a été amené à traiter entre 1985 et 1997.
Les indications opératoires initiales étaient une pathologie
infectieuse (3 cas), une pathologie inflammatoire non polypeuse (4 cas), une polypose nasosinusienne (2 cas). Il n’y avait
pas de pathologie dans 6 cas.
Le TDM préopératoire retrouvait un sinus frontal sain dans
10 cas.
Le cornet moyen avait été conservé totalement dans 4 cas et
partiellement dans 5 cas.
L’échelle thérapeutique proposée était d’abord un traitement
médical, puis, en cas d’échec, des irrigations frontales. En cas
d’échec et en fonction de l’étendue des lésions, une reprise
chirurgicale pouvait être envisagée par voie endonasale ou par
voie externe, ou encore par voie combinée. Aucun calibrage du
canal n’était réalisé.
Plus la sténose du canal est tardive et la pathologie initiale
bénigne, plus la prise en charge est difficile.
Cependant, la taille du canal nasofrontal initial ne préjuge en
rien de la possibilité d’une sténose postopératoire.
E. Racy (Le Kremlin-Bicêtre) suggère une autre alternative à
proposer dans les formes sévères de sténose du canal nasofrontal : la technique de Lothrop Draf type 3.
Elle consiste à réaliser, sous endoscopie et monitorage radiologique, un fraisage du plancher du sinus frontal situé sous les os
propres du nez, de la cloison intersinusienne et de la lame perpendiculaire de l’ethmoïde. Aucun calibrage n’est utilisé. Une
série de 11 patients est rapportée (1 pathologie primaire et
10 pathologies iatrogènes). Les suites opératoires ont été
simples, sans complications. Les orifices nasofrontaux sont
restés perméables chez tous les patients avec recul postopératoire moyen de 22 mois.
La voie externe du sinus frontal avec un abord cutané frontosourcilier reste toujours d’actualité. Elle offre une grande sécu-
rité et un grand confort opératoire. A. Manceau (Tours), à propos d’une étude rétrospective de 22 cas, a rappelé la technique
chirurgicale. Les points importants sont la réalisation d’un
volet osseux, un fraisage large du canal et un calibrage prolongé (3 à 6 mois) avec une sonde en silicone.
Une guérison fut obtenue dans 100 % des cas avec un recul
moyen de 4 ans. La rançon esthétique était considérée comme
mineure par 20 patients. Parmi les complications, 2 patients
présentaient une anesthésie sus-orbitaire.
Trois communications portaient sur le guidage endoscopique
assisté par ordinateur de la chirurgie endonasale. À partir
d’une reconstruction tridimensionnelle des coupes de TDM, le
chirurgien est renseigné en temps réel sur la position de son
instrument dans le champ opératoire.
Le but de cette aide opératoire est d’éviter certaines complications de la chirurgie endonasale qui sont difficilement acceptables dans le cadre d’une prise en charge de pathologies
bénignes. Elle permet un repérage des balises chirurgicales et
augmente la précision du geste. Elle est très utile dans la chirurgie de la base du crâne, les reprises chirurgicales particulièrement hémorragiques et la formation des nouveaux chirurgiens. La limite de ces machines est leur coût, actuellement
très élevé (environ 1,4 MF).
Deux techniques sont actuellement sur le marché :
– le système électromagnétique,
– le système à infrarouges.
Le premier système (Inta Track), dont le fonctionnement a été
rapporté par E. Serrano (Toulouse), consiste à opérer dans un
champ magnétique avec un capteur placé à l’extrémité de
l’instrument chirurgical. Le deuxième capteur est un casque
posé sur la tête du patient et autorisant les mouvements peropératoires.
La marge d’erreur est de 1 à 2 mm. Le temps opératoire n’est
pas allongé, malgré un temps d’installation du dispositif de 10
à 15 minutes.
Le deuxième système (Flashpoint et Steak), expérimenté par
S. Schmerber (Grenoble) et L. Gomulinski (Bourg-la-Reine),
consiste en une série de caméras infrarouges de détection et un
émetteur placé sur un instrument qui doit obligatoirement être
rigide. Un casque avec des capteurs diodes est installé sur la
tête du patient et un repérage de la surface cutanée faciale est
réalisé. À chaque changement d’instrument, la machine doit
être reparamétrée. Le casque est plus volumineux que dans la
technique précédente et le temps d’installation plus long. La
durée de vie des diodes est de 60 passages à l’autoclave. La
marge d’erreur est de 1,5 mm.
Devant une rhinite chronique corticorésistante de l’enfant,
F. Postec (Lyon) propose une turbinectomie inférieure. Dans
la série de 16 cas (8 à 14 ans) rapportée, la technique opératoire a consisté en une turbinectomie inférieure partielle aux
ciseaux laissant un reliquat postérieur afin de prévenir tout
risque de lésion de l’artère sphénopalatine. Une cautérisation
de la tranche de section et un méchage de 48 heures ont été
systématiques. Le déméchage a été réalisé sous anesthésie
La Lettre d’oto-rhino-laryngologie et de chirurgie cervico-faciale - n° 241 - mars 1999
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générale. Parmi les enfants opérés, 7 étaient allergiques,
8 asthmatiques, et un enfant était porteur du gène de la mucoviscidose.
Trois complications hémorragiques sont survenues : deux au
déméchage et une au 5e jour postopératoire. Cette dernière a
nécessité un passage en réanimation et une transfusion sanguine.
L’obstruction nasale a été améliorée dans tous les cas ; en
revanche, la rhinorrhée est restée inchangée dans 15 cas. Le
recul de la série présentée était d’un an.
En période de pleine évolution de la responsabilité médicale,
B. Feger (Brest) a rappelé les aspects médico-légaux de la chirurgie nasosinusienne endoscopique. Rappelons qu’elle
s’adresse à une pathologie bénigne. Selon les données de la littérature, le taux de complications mineures est de 7 à 15 % et
le taux de complications majeures de 2 %. Ces chiffres non
négligeables devraient amener à revoir le droit de la responsabilité médicale et son financement.
La septoplastie au laser CO2, toujours associée à une turbinectomie inférieure, se réalise sous anesthésie locale. Le laser doit
être équipé d’un mode superpulse et d’un procédé Swiftlase.
Ses indications sont une déviation limitée au pied de la cloison
nasale. Parmi les 653 patients opérés par Y.V. Kamami
(Saint-Cloud), le taux de guérison était de 90,8 %. Parmi les
complications, 12 hémorragies bénignes sont survenues,
nécessitant un simple méchage antérieur, et il n’y a eu aucune
perforation de la cloison nasale.
LES EXPLORATIONS FONCTIONNELLES
Une série de 359 patients atteints de polypose nasosinusienne
et traités par laser Yag a été rapportée par Y. Jakobowicz
(Paris). Trois à six séances sont nécessaires sous anesthésie
locale.
Les résultats sont excellents dans 63 % des cas, bons avec persistance d’une anosmie dans 31 % des cas. La fréquence des
récidives est de 41,5 % dans un délai moyen de 11 mois.
La recherche
La sensation d’obstruction nasale pourrait être secondaire à
une mauvaise stimulation des récepteurs trigéminés de la
muqueuse nasale. Le projet de recherche présenté par F. Chometon (Arts et Métiers, Paris) et l’équipe de l’hôpital SaintMichel (Paris) était d’analyser la trajectoire de l’air et de quantifier, en parallèle avec des explorations fonctionnelles, la
notion d’obstruction nasale. À partir de coupes tomodensitométriques, une modélisation de la fosse nasale a été réalisée.
Les vitesses maximales enregistrées se situaient au niveau de
la valve nasale et du méat moyen ; les vitesses minimales
étaient au niveau de la fente olfactive.
Le flux présentait une rotation autour du cornet inférieur, sans
effet de tourbillon ni de sillage.
Ce projet de recherche permettrait de mieux comprendre
l’aérodynamisme nasal et pourrait être une aide dans la décision thérapeutique des patients atteints d’obstruction nasale.
Les microsphères biodégradables sont des polymères microscopiques qui peuvent être des supports de principes actifs.
Ces derniers sont ainsi libérés de manière prolongée et contrôlée. A. Croue (Angers) a étudié la biocompatibilité de ces
microsphères injectées dans la muqueuse sinusienne du lapin.
Le but était d’imaginer l’utilisation de ce support galénique
dont le principe actif serait des corticoïdes, dans la pathologie
nasosinusienne inflammatoire.
Ces microsphères entraînent une réaction limitée de la
muqueuse et sont toujours présentes au 21e jour.
16
I. de Gaudemar
Les implants cochléaires
À l’occasion de ce 105e congrès de la Société française d’ORL
et de chirurgie de la face et du cou, plusieurs communications
ont fait état des avancées concernant les indications et l’évaluation des implants cochléaires (IC) ainsi que la recherche
dans ce domaine.
Le profil psychologique des patients implantés joue un rôle
très important dans la réussite d’une implantation. Mme
Paperman (Bobigny) a rappelé que, si la majorité des patients
s’adaptent à leur implant, un certain nombre d’entre eux présenteront des problèmes d’ordre psychologique : dépression,
agressivité, hypertrophie du moi… Une anxiété ou un enthousiasme excessifs peuvent faire reculer le moment du premier
réglage. La représentation et l’image du corps, perturbées par
la surdité, puis par la récupération d’une audition et des problèmes familiaux, peuvent engendrer des plaintes vis-à-vis de
l’IC qui ne sont alors que d’ordre psychologique, dues à un
manque de confiance en soi, à une modification de la perception de soi. En restant à l’écoute et ouverte aux plaintes formulées, l’équipe médicale doit adapter sa prise en charge.
Sur le plan chirurgical, l’équipe de Toulouse (Dr Shin) s’est
intéressée au devenir des restes auditifs après pose d’IC chez
20 adultes sourds sévères postlinguaux et 50 sourds profonds.
L’insertion du porte-électrodes est connue comme pouvant
entraîner des lésions de la fenêtre ronde, des fractures ou ruptures de la lame spirale du tour basal. Une audition résiduelle a
été retrouvée chez 50 % des patients sourds sévères et 32 %
des sourds profonds un mois après la pose de l’IC. Parmi les
facteurs généraux (âge, sexe, côté, étiologie) et chirurgicaux
(rampe d’insertion, longueur d’insertion, voie d’abord) étudiés,
aucun ne s’est révélé comme favorisant les restes auditifs.
Devant l’élargissement des indications d’IC aux surdités
sévères avec restes auditifs mesurables, la technique chirurgicale doit demeurer la plus conservatrice possible, une audition
résiduelle semblant prédictive d’un meilleur pronostic.
En ce qui concerne la prise en charge et les résultats de sujets
implantés, le Dr Truy (Lyon) a présenté l’étude des aires
d’intégration corticale du langage (avec la caméra à émission
de positons) sur une population de 6 adultes postlinguaux
implantés maîtrisant bien la langue française (intelligibilité
d’une liste dissyllabique supérieure à 80 %) et une population
de 6 adultes témoins. La langue anglaise était étudiée par les
La Lettre d’oto-rhino-laryngologie et de chirurgie cervico-faciale - n° 241 - mars 1999
deux groupes depuis au moins quatre ans. Les patients étaient
confrontés à plusieurs situations d’écoute : 1 = voyelles ; 2 =
mots français ; 3 = phrases en français ; 4 = texte en français ;
5 = phrases en anglais ; 6 = phrases dans une langue inconnue
(norvégien). Pour la première épreuve, les zones corticales
activées étaient les mêmes dans les deux groupes (légèrement
plus étendues pour le groupe implanté). Dès que la tâche devenait plus complexe, une activation des aires pariétales supérieures (attention) apparaissait dans le groupe implanté, mais
était absente dans le groupe témoin. Les aires du langage activées étaient les mêmes quelle que soit la langue dans le groupe
implanté et correspondaient à celles activées par les phrases en
anglais dans le groupe témoin (zone différente de celle de la
langue maternelle). Dans le groupe implanté, le traitement
phonologique plus intense se fait donc aux dépends du traitement sémantique. L’équipe de Lyon (Dr Truy) a également
étudié le passage de la mimo-gestualité à l’oralité dans un
groupe de 30 enfants sourds profonds congénitaux implantés à
l’aide de tests de désignation d’image (Nelly-Carole et Chevrier-Müller). Le type de dénomination de l’image était noté :
mot exact, phonétiquement proche, vocalisation, geste,
absence de réponse. Une augmentation de la désignation par
geste a été notée lors des 24 premiers mois (de 25 % à plus
de 50 %), avant une chute vers le 36e mois (18 %). Parallèlement, la désignation par les mots exacts augmentait régulièrement. En fonction du moment d’implantation, si la dénomination par le mot exact émergeait plus tôt chez les enfants
implantés tard, la tendance s’inversait après 24 mois, avec des
scores qui progressaient plus vite chez les enfants implantés
tôt : les résultats sur l’oralisation sont donc d’autant meilleurs
que l’enfant aura été implanté précocement.
À l’aide de matrices de confusion (discrimination fréquentielle) et d’un test d’identification de clicks (discrimination
temporelle), l’équipe de Lille (Dr Vincent) a cherché à évaluer la valeur individuelle des IC sans aide de la suppléance
mentale chez 13 adultes sourds postlinguaux. Le test des
matrices de confusion (présentation de 34 phonèmes différents) montrait une reconnaissance de 50 % pour les voyelles
(sourdes > sonores et orales > nasales) et de 33 % pour les
consonnes (constrictives > liquides > occlusives > semivoyelles > nasales ; palatales > dentales < labiales). Les
erreurs sur les consonnes concernaient essentiellement le lieu
d’articulation et, pour les voyelles, des voyelles fréquentiellement proches. Pour le test d’identification de clicks, la discrimination normale est un intervalle de 25-50 ms entre 2 clicks.
Chez les patients implantés, les résultats sont considérés
comme bons lorsque l’intervalle repéré est inférieur à 150 ms ;
entre 150 et 300 ms, le pronostic fonctionnel est moins bon.
L’apprentissage peut toutefois avoir un effet favorable sur la
discrimination.
À Marseille (Dr Desmet), une analyse des troubles de la perception de la parole chez 10 sujets sourds postlinguaux
implantés depuis plus d’une année a été réalisée à l’aide des
paires minimales. Six paires étaient utilisées : +/- voisé ;
+/- interrompu ; +/- vocalique ; +/- nasal ; grave-aigu ; compact-diffus. Dix-huit mots (répétés deux fois) et 54 paires
(chaque consonne avec 9 voyelles) étaient présentés au patient.
Les résultats ont montré une fragilité des traits grave-aigu et
compact-diffus ; en revanche, le trait interrompu-non interrompu s’est révélé très résistant et bien codé par les IC (Digisonic et Nucleus). Les principaux facteurs ayant influencé les
résultats ont été le pourcentage d’électrodes fonctionnelles et
la charge électrique délivrée au niveau des premières électrodes. Pour ces IC, le codage temporel se révèle donc bon et
le codage fréquentiel plus imparfait.
Après implantation, la demande concernant le téléphone et la
télévision augmente. L’équipe de Bobigny (Dr Vormes) a
donc envoyé un questionnaire à 14 adultes sourds postlinguaux
implantés depuis plus de six mois pour évaluer leur utilisation
de ces appareils. En ce qui concerne les appels téléphoniques,
plus de 70 % appellent la famille, 46 % des amis et moins de
30 % des personnes inconnues. La présence d’un entourage
joue beaucoup : 100 % des célibataires (4/4) appellent et
répondent ; pour les personnes entourées, seulement 33 %
(3/9) appellent et 22 % (2/9) répondent. La majorité des
patients regardent la télévision avec une compréhension des
émissions estimée à 60 %. Les variétés sont les émissions les
moins regardées. Les patients ayant un télétexte utilisent beaucoup les sous-titres et considèrent qu’ils comprennent mieux
les émissions avec sous-titre que sans, alors que les patients
sans télétexte disent avoir une bonne compréhension avec IC
et lecture labiale seuls.
Le bruit
Une table ronde portant sur le bruit a eu lieu.
Le Pr Pujol (Montpellier) a expliqué la neurophysiologie du
traumatisme sonore (TS). S’il est bien connu que le TS est responsable de dégâts mécaniques (cils arrachés, perte de CCE du
premier rang…), il est moins connu que 50 % des dégâts touchent à la neuropharmacologie et sont en partie réversibles. Un
TS important entraînera une perte de cellules par apoptose irrémédiable, mais un TS plus léger bousculera les cils. Une récupération est possible dans les 15 jours, après quoi les séquelles
sont définitives. Pourtant, immédiatement après le TS, les
synapses des CCI sont explosées : il existe une composante
synaptique avec libération de grandes quantités de glutamate.
La perfusion d’un antagoniste du glutamate peut éviter la moitié des pertes cellulaires, car les synapses sont réparables
(médications aidant à la repousse). Cet excès de relargage de
glutamate va stimuler les récepteurs NMDA et pourra être responsable de décharges spontanées anarchiques au niveau des
fibres nerveuses, pouvant expliquer les acouphènes contemporains d’un TS. Un TS répété pourra cependant léser le neurone.
Le Pr Dauman (Bordeaux) a présenté quelques cas cliniques
de patients ayant subi un TS, en expliquant la gêne ressentie
dans leur vie quotidienne, tant au travail que dans les loisirs.
L’audiométrie tonale peut être très peu perturbée alors qu’il
existe une gêne sociale réelle. L’hyperacousie et les acouphènes
sont à surveiller. En cas d’atteinte auditive dans le cadre d’un
TS aigu, la prise en charge comprend hémodilution, carbogène,
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vasodilatateurs, anti-ischémiques en intraveineux puis per os.
Une voie d’administration in situ serait plus efficace.
En ce qui concerne la surdité professionnelle, le Pr Geraud
(Nantes) a rappelé les quatre problèmes les plus fréquents :
– Fournir au patient des documents médicaux exploitables :
audiométries tonale et vocale faites en cabine avec un audiomètre calibré, en employant les symboles classiques pour CA,
CO droits et gauches, ce qui permet leur lecture sur les photocopies (pas d’utilisation de couleurs) ; il faut donner des
chiffres de déficit très précis. Il est à noter que le déficit auditif
lié à l’âge (aléatoire) n’est pas pris en compte dans le calcul.
– Donner un avis pertinent aux sujets pour qui il existe un
risque de TS : les jeunes atteints de surdité de perception peuvent voir leur surdité s’aggraver en cas d’exposition à des TS.
Le problème est de prendre aussi en compte la motivation et le
risque de perte d’emploi…
– Déclarer dans les règles une maladie professionnelle : il faut
un certificat détaillé, rédigé en utilisant les termes du tableau.
Le travail en cause doit être stipulé en reprenant sa dénomination dans le tableau (liste limitative). Le patient a l’obligation
d’adresser personnellement sa déclaration dans le délai requis,
à la Sécurité sociale ou à son organisme d’assurance.
– Aider le patient à faire un recours : dans le cas d’un refus
pour diagnostic douteux, il faut demander une nouvelle expertise médicale par un expert désigné par l’ORL ou la caisse.
Lorsque l’exposition au risque ne fait pas partie de la liste du
tableau, il faut saisir le comité régional de reconnaissance des
maladies professionnelles. Dans le cas d’un désaccord sur le
taux d’IPP, le tribunal du contentieux de l’invalidité de la
DRASS restatuera. L’ORL peut être présent pour aider son
patient ou l’employeur. En cas de désaccord persistant, c’est la
Commission nationale technique qui est alors saisie.
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Le Pr Frachet (Bobigny) a rappelé l’importance de la prévention pour diminuer le chiffre actuel de 800 réparations/an pour
TS. Pour cela, il faut sélectionner (exclure les sujets fragiles),
protéger (au niveau industriel) et prévenir en informant et
éduquant.
La sélection des travailleurs se fait sur la base de l’interrogatoire médical (antécédents, comorbidité…), du résultat des
audiométries et du TTS (audiométrie après 8 heures d’exposition au bruit). Il y a des susceptibilités individuelles (rôle de la
pigmentation).
Deux types de protections existent :
– Passive : bouchons d’oreille à atténuation non linéaire ou en
mousse (efficaces si bien positionnés) ; casques anti-bruit (plus
efficaces mais moins bien tolérés).
– Active : par création d’une inversion de phase du bruit résiduel dans une coque anti-bruit. Ce système peut être utilisé
chez les porteurs de prothèse.
Ces systèmes ne doivent toutefois pas empêcher la perception
des bruits signalant un problème (système d’alarme possible
par vibreur).
Le problème essentiel est le manque de motivation : même
avec une incitation forte, seules 50 à 60 % des personnes exposées se protègent du bruit. Il est impératif d’expliquer l’agression sonore, son risque sur la santé et l’efficacité des protections.
Après TS, une prévention de l’atteinte peut être tentée par des
médicaments anti-radicaux libres (glutathion). Un entraînement par conditionnement sonore peut également rendre
l’appareil auditif plus résistant, par modification des cellules
ciliées.
N. Noël-Petroff
La Lettre d’oto-rhino-laryngologie et de chirurgie cervico-faciale - n° 241 - mars 1999
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