6 | La Lettre d’ORL et de chirurgie cervico-faciale • n° 317 - avril-juin 2009
ÉDITORIAL
Pathologies thyroïdiennes et ORL :
actualités et prise en charge
Thyroid and ENT: what is new in diagnosis and treatement?
J.F. Papon*
* Service d’ORL et de chirurgie cervico-
faciale, groupe hospitalier Henri-Mondor –
Albert-Chenevier, Créteil, service d’ORL et de
chirurgie cervico-faciale, hôpital intercom-
munal, Créteil et université Paris-XII, faculté
de médecine, UMR s841, Créteil.
“V
ous utilisez bien un laser pour
m’opérer la thyroïde, docteur ?”
C’est à la suite de cette question
d’un patient angoissé mais confiant dans la
technologie moderne que l’idée m’est venue
de proposer un numéro spécial sur la thyroïde
au comité de rédaction de La Lettre d’ORL et
de chirurgie cervico-faciale. Au risque de déce-
voir ce patient, le laser n’est pas encore utilisé
en pratique quotidienne dans la chirurgie
thyroïdienne ; toutefois, la prise en charge des
pathologies thyroïdiennes a considérablement
évolué au cours des quinze dernières années
avec l’apparition de nombreuses nouveautés
diagnostiques et thérapeutiques.
D’une part, la recherche des facteurs de
➤
risque de cancer thyroïdien a bénéficié de
l’apport des études génétiques qui ont iden-
tifié des mutations du gène RET permettant
de proposer une chirurgie préventive à certains
patients qui en sont porteurs.
D’autre part, la scintigraphie thyroïdienne,
➤
considérée autrefois comme le pivot du bilan,
s’est progressivement effacée au profit du
trépied TSH (thyréostimuline hormone)-écho-
graphie-cytoponction.
Ces méthodes permettent actuellement,
lorsqu’elles sont réalisées dans les règles de l’art,
de déterminer des paramètres objectifs utilisés
pour chiffrer le risque de cancer dans le but de
mieux sélectionner les nodules chirurgicaux. Le
seul moyen de diagnostiquer le cancer thyroï-
dien reste en effet l’examen histologique, qui
met parfois en évidence certaines tumeurs rares
(oncocytome, cancer médullaire, tératome, par
exemple), dont le traitement est spécifique.
La chirurgie garde donc une place centrale dans
le diagnostic et le traitement des pathologies
nodulaires et, dans certains cas, dysfonction-
nelles de la thyroïde. Parmi les chirurgiens
de la thyroïde, les ORL ont parfois une place
ingrate. En effet, à l’image de certains hommes
politiques qui souhaiteraient en finir avec l’es-
prit de Mai 68, les ORL aimeraient mettre un
terme à leur réputation de demi-chirurgiens,
voire d’arracheurs d’amygdales, qui les pour-
suit parfois. Combien de fois ai-je entendu de
la bouche des patients : “Mais, les ORL font
aussi de la chirurgie, docteur ?”, ou de celle de
mes collègues non-ORL : “Je ne savais pas que
les ORL opéraient aussi la thyroïde.” Les ORL
ont pourtant une approche particulière de la
chirurgie thyroïdienne, du fait de leur sensi-
bilisation aux conséquences récurrentielles
et surtout à leur prise en charge, mais aussi
de par leur formation à la chirurgie carcino-
logique cervicale. Dans un souci constant de
faire progresser les conditions chirurgicales,
les ORL français se sont investis dans l’amélio-
ration de l’information aux patients ainsi que
dans le développement de la neurostimulation,
des nouvelles méthodes de fermeture cuta-
nées et de la chirurgie de certains nodules par
endoscopie, qui constitue probablement une
première étape vers la chirurgie endoscopique
systématique.
Ce numéro spécial ne prétend pas dresser
une liste exhaustive de toutes les nouveautés
dans la prise en charge des pathologies thyroï-
diennes, dont il montre bien qu’elle doit être
pluridisciplinaire, mais plutôt répondre aux
problèmes fréquemment rencontrés par les
praticiens face à ces pathologies.
Je tiens à remercier chaleureusement tous
les auteurs qui, malgré maintes obligations
professionnelles, ont accepté de participer à
la rédaction de ce numéro.
J’espère que vous aurez autant de plaisir à le
lire que nous en avons eu à l’écrire ! ■