Médecine d'Afrique Noire : 1991, 38 (4)
Après avoir montré que ce nouveau système antigène-
anticorps est bien distinct des trois systèmes connus asso-
ciés aux infections par le virus de l'hépatite B (VHB) : HBs
Ag - anti HBs, HBc Ag - anti -HBc, HBe Ag - anti HBe,
les auteurs le dénomment système antigène - anticorps
delta.
La preuve du caractère pathogène d\e l'agent delta, et de la
nécessité pour lui de ne pouvoir se répliquer qu'en présence
d'une infection par le VHB est fournie par les expériences
de transmission expérimentale au chimpanzé (63).
Dans ces expériences(63),on injecte à des chimpanzés
ayant différents statuts pour le VHB, un inoculum composé
par le sérum de deux patients ayant une hépatite chronique
B et de grandes quantités d'antigène delta (HDAg) dans le
foie. On obtient les résultats suivants :
- Tous les animaux susceptibles (c'est-à-dire n'ayant pas
de marqueurs sérologiques pour VHB avant l'inocula-
tion) font une infection au VHB et au VHD.
- Les animaux immuns (porteurs de l'anti-HBS avant
l'inoculation) demeurent asymptomatiques et ne déve-
loppent pas d'infection delta.
- Les animaux porteurs chroniques de l'Ag HBs avant
l'inoculation développent une hépatite delta qui peut
devenir chronique.
Ces expériences mettent en évidence deux faits d'une impor-
tance capitale :
-l'infection par le VHD nécessite une infection concomi-
tante ou antérieure par le VHB pour se développer.
- le pouvoir pathogène du VHD est distinct de celui du
VHB, mais dépend de l'expression du VHB. En effet,
l'inoculation d'un sérum infectant mais très dilué (dilu-
tion 10-8) aboutit à une perte du pouvoir infectant de
l'agent delta chez les animaux susceptibles, alors que
celui du VHB est conservé.
Ces notions sont corroborées par des enquêtes sérologiques
menées à grande échelle (58) grâce a la mise au point d'un
test radioimmunologique (65) pour l'anticorps anti delta
(anti-HD). Elles révèlent une corrélation étroite entre la
détection des anti-HD et certains foyers géographiques ou
L'AGENT DELTA, VIRUS DE L'HEPATITE D
Propriétés physico-chimiques, structure, pouvoir pathogène
Données pathogéniques et épidémiologiques
N. KODJOH*, C. BUFFET**
* Hépatogastroentérologue, Chef de clinique, Assistant à la Faculté, CNHU, BP 386,
Cotonou (République du Bénin).
** Professeur d'hépato-gastroentérologie, Service des Maladies du Foie et de
l'Appareil digestif, Centre Hospitalier de Bicetre, 78 rue du Général Leclerc, 94275
Le Kremlin Bicetre Cédex.
L'agent delta, troisième virus des hépatites, n'a été identifié
qu'en 1977. Depuis, il a fait l'objet de nombreux travaux
qui ont permis d'en préciser la nature, le pouvoir patho-
gène, l'épidémiologie et le mécanisme des lésions qu'il
détermine. Ce travail se propose de faire le point sur nos
connaissances actuelles en ce qui concerne ce nouveau-
venu dans le monde des virus hépatotropes.
1 - HISTORIQUE
En 1977, RI ZETTO et Coll. (61) étudient, par la technique
de l'immunofluorescence directe, des biopsies de foie de
patients séropositifs pour l'antigène HBs (HBs Ag). Ils
remarquent qu'un anti-sérum anti-HBc colore les fragments
de foie dans lesquels les particules antigéniques HBc
peuvent être mises en évidence. Le même anti-sérum réagit
avec des fragments de biopsie dépourvus de particules
antigéniques HBc. Ceci suggère qu'il y a deux spécificités
antigéniques, et que l'anti-sérum utilisé contenait deux
anticorps : l'un, I'anti-HBc ; l'autre, Jusque là inconnu, qui
réagit avec un antigène nouveau que les auteurs se pro-
posent d'appeler delta.
RESUME
Les auteurs, à partir de la revue de la littérature, font
le point sur nos connaissances actuelles en ce qui
concerne les propriétés physico-chimiques, la struc-
t u re, le pouvoir pathogène, et l'épidémiologie de l'agent
delta, troisième virus des hépatites identifié en 1977
par RIZZETTO et coll.
Les mécanismes pathogéniques sont discutés. Du fait
que l'infection par l'agent delta exige une atteinte
préalable ou concomitante par le virus de l'hépatite B
(VHB), sa prévention passe obligatoirement par la
vaccination contre le VHB.
Médecine d'Afrique Noire : 1991, 38 (4)
certains groupes de malades (poly-transfusés, toxicomanes)
connus pour leur forte prévalence pour le portage du VHB.
Les travaux ultérieurs aboutiront à l'isolement et à la purifi-
cation de l'agent delta, d'abord dans le foie humain obtenu
à l'autopsie de sujets décédés porteurs de l'HDAg (65), puis
dans le sérum de chimpanzé'(64) et d'humains (5). C'est
ainsi qu'ont pu être établies les propriétés physico-
chimiques de l'agent delta.
Durant ces dernières années, des études décisives achèvent
de caractériser l'agent delta ; BONINO et Coll. (4) décou-
vrent la composition chimique de l'antigène delta et de son
enveloppe, tandis que WANG et Coll. (82) effectuent le
clonage et établissent la séquence des nucléotides constitu-
tifs du génome du VHD.
Quelle est donc la structure de ce nouveau virus hépato-
trope et que savons-nous de son pouvoir pathogène, de son
épidémiologie et du mécanisme des lésions qu'il détermine ?
2 - STRUCTURE DE L'AGENT DELTA
L'agent delta a été initialement extrait de noyaux
d'hépatocytes humains (65). Le composé obtenu est stable
à la chaleur, à l'acide, et n'est pas altéré par les traitements
par l'EDTA, les détergents ou l'éther. Il est inactivé par les
alcalins et les protéases, mais non par les nucléases et les
glycosidases, ce qui suggère que sa nature est protéique. Il
est stable à pH 2,4 pendant 30 mn, mais est inactivé à pH
10,6. Sa densité de flottaison en chlorure de césium est de
1,28 g/cm3.
Dans les expériences de centrifugation en gradient de
sucrose en présence de guanidine hydrochloride, l'agent
delta se comporte comme nue protéine soluble. Son poids
moléculaire est de 68.000 daltons en présence de guanidine
hydrochloride 1,5 M. ; aux concentrations moindres,
l'antigène delta montre une nette tendance à s'aggréger, ce
qui suppose qu'à ces concentrations, le composé existe
sous forme polymérique.
La mise en évidence de l'agent delta à partir du sérum
humain (5) ou de chimpanzé (6,64) nécessite un traitement
préalable par des détergents non ioniques (Nonidet P - 40 à
la concentration de 0,05 % à 0,3 %).
La centrifugation en gradient de densité montre que l'agent
delta migre comme une sous-population de particules HBs
Ag, avec un coefficient de sédimentation intermédiaire
entre les formes HBs Ag de 22 nm et les particules de
Dane de 42 nm,. En microscopie électronique, l'agent delta
purifié par ultra centrifugation isopicnique zonale apparaît
composé de particules de 35 à 37 nm au sein desquelles
aucune structure organisée analogue à la capside du VHB
ne peut être mise en évidence après action de détergents.
Les particules delta contiennent l'HBs Ag à leur périphérie,
puisque elles peuvent être agglutinées par un sérum anti-
HBs, mais non par un sérum anti-HD, anti HBc ou anti-
HBe. Ces observations indiquent que l'antigène delta est un
composant interne d'une sous-population de particules HBs
AG.
En définitive : le virus de l'hépatite D est une particule de
36 nm (4) :
- dont le constituant externe est une enveloppe dérivée de
l'enveloppe du VHB coinfectant. On retrouve dans cette
enveloppe les 6 protéines constitutives de HBs Ag (4)
mais leur composition se rapproche plus de celle des
particules HBs Ag de 22 nm que de celle de VHB complet,
puisque les polypeptides de petite taille (P 24 et GP 27 )
représentent la grande majorité (95 %) des protéines (4),
- dont le constituant interne est l'antigène delta propre-
ment dit, qui tient lieu de nucléo-capside mais qui n'a
pas d'organisation ultrastructurale particulière. Il est
associé à deux protéines de 27 et 29 kilodaltons qui
précipitent spécifiquement les anticorps anti-HD, mais
non les anticorps spécifiques du VHB. Parce que ces
protéines sont les composants structuraux de l'HDAg et
qu'elles sont très probablement codées par VHD, elles
sont désignées P 27d et p 29d (4).
Enfin un autre constituant est identifié à l'intérieur des
particules delta de 36 nm il s'agit d'un ARN de faible poids
moléculaire 500.000 (64) qui a été cloné et séquencé (82).
C'est un ARN monocaténaire circulaire (43, 82) à un seul
brin d'environ 1678 nucléotides. L'observation selon
laquelle un Fragment d'ADN complémentaire cloné à partir
de l'ARN du VHD code pour un antigène qui agglutine
spécifiquement l'antisérum de patients atteints d'hépatite
chronique D confirme bien sa qualité de génome (82).
Plusieurs particularités font du VHD une particule unique
parmi tous les virus du monde animal :
- C'est le premier virus animal identifié dont le génome
contient un ARN circulaire (43), de tels virus sont
jusqu'alors uniquement rencontrés chez les plantes.
- Bien que la taille du VHD dépasse de 3 à 7 fois celle des
viroïdes, elle ne représente que le quart de la taille des
plus petits virus rencontrés chez l'homme (43).
- Enfin le génome présente des homologies de structure
avec les viroïdes, notamment par sa richesse en liaisons
guanidine-cytosine et par les séquences d'appariement de
L'AGENT DELTA, VIRUS DE L'HEPATITE D 293
Médecine d'Afrique Noire : 1991, 38 (4)
ses nucléotides (82). Toutes ces constatations apparentent
plutôt le VHD aux virus des plantes, ce qui pose le pro-
blème de son origine (43). Des études ultérieures doivent
chercher à élucider la question de l'origine de l'agent delta
qui apparaît hautement pathogène pour l'homme et de
nombreux animaux.
3 - POUVOIR PATHOGENE DE L'AGENT DELTA
3.1 - Pouvoir pathogène expérimental
Le pouvoir pathogène de l'agent delta a été démontré par
de nombreuses études effectuées chez le chimpanzé (63).
L'administration d'un inoculum infectant à des animaux
susceptibles entraîne une hépatite aiguë limitée caractérisée
par une antigénémie HBs Ag et la présence transitoire de
l'HD Ag dans le sérum, suivie de la seroconversion en anti-
HBs, antiHBc et anti-HD. La transmission de l'agent delta
à des chimpanzés porteurs chroniques de HBs Ag engendre
une hépatite delta chronique (26)
Outre le chimpanzé, il est raisonnable de penser que le
VHD peut se développer chez toutes les espèces animales
appartenant à l'ordre des primates et capable de contracter
le VHB : orangs-outans, gorilles et gibbons (62). La
gamme des animaux susceptibles de contracter l'infection
delta peut s'étendre aux espèces réceptives aux hépadnavi-
rus, nouvelle famille de virus qui ont les mêmes caracté-
ristiques et le même tropisme tissulaire que le VHB (80).
La démonstration en a été faite chez la Marmotte d'Amé-
rique qui a été infectée expérimentalement par un agent
delta prélevé chez un chimpanzé (52), dans ce cas l'enve-
loppe de surface est celle du virus de la Marmotte et la
particule delta est identique à celle isolée chez l'homme et
le chimpanzé. L'atteinte delta chez l'homme ou l'animal se
traduit par l'apparition d'antigènes et d'anticorps que
d i fférentes méthodes se proposent de mettre en évidence
dans le foie ou le sérum.
3.2 - Méthodes de détection de l'infection delta
3.2.1 - Détection de l'antigène delta dans le foie
L'antigène delta se détecte dans le foie par des méthodes
immunocytochimiques utilisant la technique d'immuno-
fluorescence (I. F.) (61, 79) ou d'immunopéroxydase (57).
Il se localise surtout dans le noyau des hépatocytes, et
accessoirement dans le cytoplasme. Il donne une fluores-
cence granulaire, globulaire ou diffuse. L'antigène delta
peut être coloré sur les biopsies congelées ou fixées. Les
biopsies congelées contenant l'antigène delta réagissent
avec l'anti-sérum marqué à la fluorescéine et fixent le C'
chez l'homme et chez l'animal in vitro (61). Ce phénomène
est dû à la formation de complexes immuns entre l'HD Ag
et son anti-HD (66), phénomène qui empêche la recherche
de l'HD Ag par la technique d'immunofluorescence
indirecte sur tissu congelé. Au contraire, sur tissu fixé, du
fait que la fixation dénature l'immunoglobuline, on peut le
rechercher tant par la technique d'I.F. directe qu'indirecte.
Détection de l'HD Ag et de l'anti-HD dans le sérum
L'HD Ag et l'anti-HD peuvent être mis en évidence dans le
sérum par des méthodes radio-immunologiques (65) ou
immuno-enzymatiques dites ELISA (14). Ces réactions
peuvent utiliser l'antigène delta d'origine hépatique (65) ou
sérique (69). Les méthodes utilisant l'antigène sérique sont
plus sensibles. Enfin on dispose d'un test spécifique pour la
détection de l'anti-HD de classe Ig M (77).
3.2.3 - Mise en évidence du R N A viral
On peut détecter le R N A de VHD dans le foie et dans le
sérum de patients atteints d'hépatite D aiguë ou chronique
par la technique de l'hybridation moléculaire grâce à une
sonde d'ADN complémentaire cloné (cDNA) (9, 75). Cet
examen peut être positif même si la recherche de l'HD Ag
dans le sérum est négatif. C'est la technique de détection la
plus sensible d'une virémie delta. Ces différentes méthodes
permettent le diagnostic des infections delta aiguës ou
chroniques chez l'homme. Comment se manifeste l'atteinte
delta en pathologie humaine ?
3.3 - L'infection delta en clinique humaine
Comme il a été démontré chez l'homme et chez l'animal,
l'infection par l'agent delta ne peut se produire qu'en cas
d'une infection préalable ou concomitante par le VHB, le
virus B jouant alors un rôle facilitateur (helper virus).
Deux situations sont donc à considérer :
- soit infection simultanée par le virus B et l'agent delta
(coinfection), - soit infection par l'agent delta chez un
porteur chronique du VHB (super-infection).
3.3.1 - Coinfection par VHB et VHD
Incubation
La période d'incubation n'est pas connue chez l'homme.
Elle a pu être établie dans les expérimentations animales
N. KODJOH, C. BUFFET
294
Médecine d'Afrique Noire : 1991, 38 (4)
297
L'AGENT DELTA, VIRUS DE L'HEPATITE D
(63). La durée d'incubation, c'est-à-dire le délai écoulé
entre l'inoculation et l'apparition de l'HD Ag dépend de la
virulence de l'inoculum. Un sérum hautement infectieux
induit une antigénémie HBs Ag presque immédiatement et
une hépatite avec apparition de HD Ag dans le foie en
5 semaines. L'inoculation d'un sérum moins virulent
entraîne une antigénémie HBs Ag seulement après 9 semai-
nes suivie de l'antigénémie delta, ou de la séroconversion
anti-HD.
Manifestations cliniques de la coinfection
L'infection simultanée aiguë par le VHB et le VHD se
présente habituellement comme une infection aiguë par le
VHB seul (11, 62). Parfois (25 % des cas), deux pics de
transaminases sont observés (10, 11, 31, 41, 72) mais ne
semblent pas toujours en rapport avec une replication
séquentielle des 2 virus (31).
Dans les cas habituels, l'infection par le VHB guérit
normalement, et l'agent disparaît obligatoirement puisque
ce dernier ne peut se repliquer sans l'aide du VHB. Dans
ces conditions, la réplication du virus s'éteint avec la
disparition du virus B (11, 16). Ainsi l'infection simultanée
par le VHB et le VHD ne semble pas augmenter le risque
de passage à la chronicité. En revanche, si l'hépatite B
devient chronique, l'infection par l'agent delta peut durer
tant que persiste le virus B.
Enfin la coinfection augmente le risque d'hépatite fulmi-
nante (10, 32, 72, 74) dont la prévalence peut atteindre 21 à
50 % (62). On explique ce phénomène par l'effet cumulatif
des lésions hépatiques provoquées par les 2 virus (62, 72).
Le diagnostic de l'infection simultanée par le VHB et le
VHD est assuré d'une part par la présence de l'HBs Ag
et/ou de l'anti-HBc de type IgM (40, 51) d'autre part par la
présence de l'HD Ag le sérum (8, 20, 31, 35). L'apparition
de ce dernier est fugace car il disparaît habituellement en
quelques jours, (l à 4 semaines) et n'est pas décelé dans les
prélèvements tardifs (8, 11, 31). Il est alors remplacé par
les anti-HD.
Ceux-ci apparaissent après 2 à 5 semaines d'évolution
( 8 , 11). Les anti-HD de classe IgM prédominent pendant
une à deux semaines puis sont remplacés par les anti-HD
de classe Ig G. Ces derniers persistent en cas de guérison,
mais à des titres faibles (1, 8, 11). La disparition des anti-
HD de classe Ig M au cours de l'évolution d'une hépatite
aiguë delta est un élément de bon pronostic et d'évolution
favorable (24, 77).
Du fait du caractère transitoire des Ig M et du faible titre
des Ig G que l'on observe une fois que l'HBs Ag disparaît,
le diagnostic rétrospectif d ' une coinfection est diff i c i l e
(41). Enfin l'apparition des anti-HD ne suit pas la cinétique
classique dans certains cas : dans le premier cas, l'HD Ag
apparaît, mais les Ig G ne suivent pas l'apparition des Ig M
(20, 77) ; dans le second cas, l'infection delta se traduit
uniquement par l'apparition transitoire d'Ig M anti-HD (23,
31).
3.3.2 - Superinfection aiguë delta chez un porteur
chronique de VHB
Incubation
Elle est seulement connue en expérimentation animale.
Après inoculation de l'agent delta à des chimpanzés
porteurs chroniques de HBs Ag, l'antigène delta est détecté
dans le foie 3 semaines après l'inoculation, et est suivi par
une poussée d'hépatite avec apparition transitoire de l'HD
Ag à de hautes concentrations dans le sang (63).
La superinfection en clinique humaine
L'infection aiguë delta chez un porteur chronique de VHB
détermine :
- soit une rechute au cours de l'évolution d'une hépatite
aiguë virale B (31)
- soit un épisode d'hépatite virale aiguë chez un porteur
chronique d'HBs Ag asymptômatique jusque là méconnu
(23).
- soit une poussée aiguë
- sur une hépatite chronique connue dûe au VHB et sta-
bilisée (12).
- soit une hépatite fulminante (16, 36, 45, 74)
- soit, et c'est l'éventualité la plus fréquente (90 % des
cas), une hépatite delta chronique qui vient compliquer
l'hépatite chronique B (9, 16, 23, 59). Le pronostic de
cette hépatite chronique est particulièrement redoutable,
avec évolution rapide vers l'hépatite chronique active
et/ou la cirrhose (25, 39).
Le diagnostic d'une superinfection delta est assuré par la
présence de l'HBs Ag, l'absence de l'anti-HBc de type IgM
et la présence de l'HD Ag dans le sérum (1). Ce dernier est
détecté dans le sérum de façon plus inconstante et plus
transitoire que dans la coinfection (1, 8, 20), sa disparition
rapide est suivie de la séroconversion anti-HD, d'abord de
classe Ig M, puis de classe Ig G (1, 11, 20).
Après une superinfection delta, la persistance des anti-HD
de classe Ig M est un signe de mauvais pronostic (24, 77) et
Médecine d'Afrique Noire : 1991, 38 (4)
N. KODJOH, C. BUFFET
298
témoigne du passage à la chronicité. Dans ce cas, les anti-
HD de classe Ig G sont également présents à des titres
élevés. Mais l'antigène delta ne peut pas être détecté dans le
sérum par les techniques usuelles radioimmunologiques ou
immunoenzymatiques, il peut l'être uniquement dans le foie
par les techniques immunocytochimiques (57, 61, 79).
Enfin, dans tous les cas d'infection delta, le RNA viral peut
être détecté dans le foie et dans le sérum grâce à l'utilisa-
tion des techniques d'hybridation moléculaire grâce à une
sonde d'ADN complémentaire cloné (19, 75).
Il faut savoir qu'il n'est pas toujours possible de mettre en
évidence l'HBs Ag dans la phase aiguë aussi bien dans la
coinfection (18) que dans la superinfection (29). Ce
phénomène s'explique par l'inhibition de la replication du
VHB par le VHD. Dans ces cas, l'infection B est affirmée
par la présence des anti-HBc de classe Ig M dans la coin-
fection (18), des anti-HBc de classe Ig G dans la superin-
fection, et ceci de façon inconstante.
Enfin et pour la même raison évoquée précédemment, il
faut souligner qu'en cas de surinfection delta, les marqueurs
de replication virale B, en particulier le DNA viral sérique,
les titres d'HBs Ag et les quantités d'HBC Ag dans le foie
sont moins souvent présents qu'en l'absence de surinfection
delta (37).
L'infection par l'agent delta s'accompagne toujours de
lésions hépatiques. Quelle est l'histopathologie de ces
lésions et quels sont les mécanismes qui les déterminent ?
4 - HISTOPATHOLOGIE ET PATHOGENIE
DES LESIONS INDUITES PAR L'AGENT DELTA
En microscopie optique, la coinfection se traduit par des
aspects d'hépatite virale aiguë sévère avec nécrose
hépatocytaire massive ; la superinfection objective plus
souvent des aspects d'hépatite chronique active ou de
cirrhose (16)
Chez les porteurs chroniques de l'antigène delta atteints
d'hépatite chronique active avec présence d'antigène delta
dans le foie, on note plus souvent une importante inflam-
mation portale et périportale, des lésions parenchymateuses
à type de nécrose hépatocytaire, des altérations nucléaires
avec aspects polypoïdes et dysplasiques (42).
La superinfection delta chez un porteur chronique du VHB
précipite l'évolution vers l'aggravation. Des biopsies
répétées montrent que la superinfection aiguë engendre une
nécrose hépatocytaire sévère et des signes inflammatoires
durables (15 mois) qui conduisent à la fibrose ou à la
cirrhose en très peu de temps (24 mois) chez la grande
majorité des patients (33).
En ce qui concerne l'ultrastructure, il existe très peu d'infor-
mations mais l'infection à virus delta chez l'homme serait
associée à des particules intranucléaires qui ressemblent à
celles qui ont été décrites dans les infections à virus NON-
A NON-B.
Chez le chimpanzé (34), l'ultramicroscope objective une
infiltration cellulaire dense à prédominance macrophagique
et lymphocytaire, des anomalies hépatocytaires avec
vacuolisation, prolifération du réticulum endoplasmique et
de microtubules semblables à ceux que l'on observe dans
les hépatites post transfusionnelles NON-A NON B.
Les mécanisme des lésions induites par l'agent delta est
encore très discuté. PURCELL et Coll. (53) dans leur
travail expérimental chez le chimpanzé observent le déve-
loppement d'une maladie biphasique lors d'une coinfection,
le second pic de transaminases coincidant avec l'antigé-
némie delta. Ils concluent que le premier pic de transa-
minases est en rapport avec la nécrose hépatocytaire causée
par le VHB et que le second pic est à rattacher à l'eff e t
cytopathogène de l'agent delta provoquant la nécrose.
Dans le travail de GOVINDARAJAN et Coll. (31) le
premier pic de transaminases correspond au contraire à la
phase d'antigénémie delta. Si l'on accepte que cette
première cytolyse est en rapport avec l'antigène delta, il
faut alors admettre que la nécrose hépatique responsable du
second pic de transaminases est en rapport avec l'eff e t
pathogène à médiation immunitaire du virus B. Mais
l'apparition de l'anti-HD coïncidant également avec le
second pic de transaminases chez 14 des 18 malades étu-
diés par cet auteur, on peut supposer que cet anticorps est à
la base de la deuxième lésion de nécrose par un relais
immunitaire.
Pourtant, l'observation selon laquelle l'infection delta chez
les porteurs chroniques sains d'HBs Ag entraîne toujours
des lésions d'hépatite (23) contrairement à la seule infection
par le VHB, suggère un rôle cytopathogène direct.
En définitive, pour SMEDILE et Coll. (74), les lésions
hépatocytaires provoquées par le VHB sont sous la dépen-
dance d'une réponse immunitaire de l'hôte comme le
prouvent les travaux de BIANCHI et GUDAT (3), tandis
que les lésions delta résultent d'une action cytopathogène
directe sur les hépatocytes comme le suggèrent les travaux
de GERIN et Coll. (30).
Connaissant la gravité et les risques de l'infection par
l'agent delta, il reste à déterminer sa distribution géogra-
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