I De la matière à l’antimatière, et maintenant aux positons, en...

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De la matière à l’antimatière, et maintenant aux positons, en médecine
Le mot “antimatière” est utilisé dans la langue française depuis 1958. Qui ne se souvient des célèbres Antimémoires d’André Malraux ? En 1930, Paul Dirac théorise l’antimatière. En 1932, Carl Anderson découvre les positons, particules analogues aux électrons mais de charge opposée. En 1952, le CERN est créé à Genève. En 1999,
l’antimatière entre en médecine.
Le sens métaphysique de la matière, qui s’oppose à l’esprit, de même que son sens philosophique et théologique,
évolue donc au rythme des découvertes de la chimie et de la physique modernes. Le rapport entre matière et énergie bouleverse certainement le matérialisme philosophique (A. Rey, Dictionnaire historique de la langue française.
Dictionnaires Le Robert, Paris, 1998), mais les révolutions qui s’annoncent dans le domaine médical sont probablement d’un autre ordre.
L’article de l’équipe des hôpitaux militaires de Clamart et du Val-de-Grâce est passionnant, mais il ne rapporte
qu’une (!) application de ces nouvelles technologies qui permettent de fabriquer de l’antimatière. Il annonce par
ailleurs de nouveaux traitements, maintenant disponibles grâce à des laboratoires comme le CERN de Genève.
Ph. Godard
Une révolution en pneumologie :
la tomographie par émission de positons
● F. Vaylet*, O. de Dreuille**, P. Maszelin**, J. Guigay*, H. Foehrenbach**, C. Marotel*, J.M. Dot*, F. Grassin*,
J. Margery*, J.F. Gaillard** et P. L’Her*.
L’
intérêt des émetteurs de positons en médecine
nucléaire est connu depuis de nombreuses
années. Les émetteurs de positons sont des isotopes radioactifs qui s’incorporent facilement à des molécules
sans en altérer les propriétés biologiques.
Il est ainsi possible d’étudier des mécanismes biochimiques
intracellulaires. Grâce au développement de nouveaux radiopharmaceutiques, la médecine nucléaire apporte à la pratique
oncologique un examen qui modifiera la prise en charge des
malades : la tomographie par émission de positons (TEP).
Celle-ci existe depuis trente ans. La possibilité de réaliser une
imagerie métabolique, véritable cartographie biochimique in
vivo, a d’emblée séduit les chercheurs. Les applications en
neurologie et en cardiologie ont été les premières étudiées. Ce
n’est que tout récemment que cette technique est sortie de
l’univers confidentiel des centres de recherche et que l’orientation clinique oncologique s’est développée grâce à la possibilité d’une exploration du corps entier.
Les radio-éléments émetteurs de positons permettent une quantification tridimensionnelle de leur répartition. Le 18fluor est
actuellement l’émetteur de positons le plus facilement utilisable en raison de sa demi-vie de 109 minutes, longue pour un
positon, qui permet son transport depuis son lieu de production, un cyclotron, jusqu'à son site d’utilisation, un service de
* Service des maladies respiratoires, hôpital d’instruction des armées Percy,
Clamart.
** Service de médecine nucléaire, hôpital d’instruction des armées du Val-deGrâce, Paris.
La Lettre du Pneumologue - Vol. II - n° 6 - décembre 1999
médecine nucléaire. Le positon, une fois émis, parcourt
quelques millimètres dans les tissus et, lors de la rencontre
d’un électron du milieu biologique, s’annihile en libérant deux
photons de 511 keV émis simultanément et en direction opposée (à 180°). Cette propriété permet une localisation du lieu
d’émission (figure 1).
couronne de détecteurs
individuels
γ
γ
β
détection en coïncidence
collimation électronique
+ logiciels de correction de l'atténuation
et de quantification SUV
Figure 1. Anneau de cristaux scintillateurs avec détection en coïncidence de photons gamma de 511 keV émis lors de l’annihilation d’un
positon, par un radio-élément, avec un électron négatif du milieu exposé.
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La détection de ce rayonnement nécessite des systèmes dont
les caractéristiques, à savoir la géométrie, la taille, le nombre
des détecteurs, la nature des cristaux de scintillation (actuellement iodure de sodium ou germanate de bismuth), les
méthodes informatiques de reconstruction des images, expliquent les différences de performance. On définit ainsi des
caméras dites dédiées (TEP) ou de haute performance, et des
caméras dites à coïncidence (CDET), caméras traditionnelles
de médecine nucléaire modifiées pour capter ce rayonnement
biphotonique de haute énergie. Leurs caractéristiques techniques différentes se traduisent par des images et des résultats,
en termes de détectabilité et de sensibilité, différents en faveur
des caméras dédiées (1, 2) (figure 2), mais au prix d’un coût
très supérieur.
Depuis les travaux de Warburg dans les années 30 (3), les perturbations du métabolisme glucidique des cellules tumorales
sont connues. Des études plus récentes ont montré qu’il existe
une augmentation de captation liée à une activation des transporteurs membranaires, GLUT 1, non spécifique des cellules
cancéreuses, et des modifications enzymatiques de la glycolyse avec production de lactates au détriment de la voie oxydative (4) (figure 3). Le déoxyglucose, analogue du glucose, est
Sensibilité
(relative)
TEDC
TEP moyenne
performance
TEP haute
performance (HR+)
Taux de
NECR Concentration
comptage maximum radioactive
coïncidence
(kcps)
maximale
maximum
(kBq/ml)
(kcps)
1
3-5
20-40
100-150
1-5
30-50
1-10
10-20
20-30
500-600
100-150
20-40
Figure 2. Performances relatives des différentes caméras disponibles.
Glucose
6-phosphogluconate
G-6-P
Ribose 5-P
Fructose 6-P
Ribose 5-P
+
Hexokinase
mitochondriale
GLUT 1
C-myc
C-fos...
mARN
ATP
(-)
Fructose 1,6-bi-P
P-ribose PP
Glycéraldéhyde 3-P
+ dihydroxyacétate P
Acétyl-CoA
NUCLÉOTIDES
Ras
Phosphoénolpyruvate
Transduction
(MAP kinase...)
Pyruvate
Lactate
O2
CO2 + H2O
FGF
PDGF...
Figure 3. Schéma des modifications de la glycolyse dans les cellules
tumorales. (Ph. Vuillez, Revue de l’ACOMEN, mars 1998).
236
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transporté à l’intérieur de la cellule, puis son métabolisme est
bloqué après la phosphorylation en déoxyglucose-6-phosphate
par l’hexokinase. Ce blocage conduit à l’accumulation du
déoxyglucose dans la cellule. Son possible marquage par le
18
fluor permet ainsi d’envisager une imagerie des tumeurs,
toute accumulation étant le témoin de la modification métabolique cellulaire. Ces propriétés ont été étudiées dans tous les
domaines de l’oncologie (5).
Le 18fluor-déoxyglucose (18FDG) a obtenu en 1998 l’autorisation de mise sur le marché en France pour les indications suivantes :
– diagnostic différentiel des masses pulmonaires ;
– bilan d’extension des cancers bronchiques non à petites cellules, des lymphomes hodgkiniens ou non, des mélanomes, des
cancers colorectaux et des cancers du rhinopharynx ;
– suivi des lymphomes malins et recherche des masses résiduelles.
Cet examen de médecine nucléaire nécessite le respect de
quelques règles pour obtenir des images de qualité. Les patients
doivent être à jeun depuis au moins 6 heures pour éviter toute
interférence glucidique et pour minimiser la fixation physiologique myocardique. Les diabétiques non équilibrés sont habituellement exclus, en raison de la mauvaise pénétration intracellulaire du 18FDG, responsable d’images de mauvaise qualité.
Après injection intraveineuse du 18FDG, les patients doivent
rester au repos afin de réduire l’activité musculaire. Certaines
équipes associent une prémédication afin d’induire une relaxation des muscles squelettiques (myorelaxant) et des muscles du
tube digestif (antispasmodique) et un traitement diurétique pour
favoriser l’élimination rénale et vésicale du traceur. Après une
heure (temps de métabolisation du FDG), les malades sont
positionnés sur la table d’examen, en décubitus dorsal, bras en
abduction. Un examen explorant un patient du menton au pelvis
inclus dure de 45 à 60 minutes avec une caméra dédiée et deux
heures avec une caméra CDET.
Dans le cadre de la pathologie thoracique, le 18FDG présente
un intérêt considérable qui devrait conduire à une modification
des modes de raisonnement et des attitudes thérapeutiques
dans les circonstances suivantes :
– pour différencier un nodule bénin d’une tumeur maligne,
– pour préciser l’envahissement ganglionnaire locorégional
des tumeurs bronchopulmonaires,
– pour rechercher des métastases à distance,
– pour évaluer le pronostic,
– pour différencier masses résiduelles post-thérapeutiques et
tissu tumoral actif,
– pour mettre en évidence une rechute,
– pour évaluer l’efficacité d’une chimiothérapie ou de la radiothérapie.
Nous envisagerons ces différentes indications en commençant
par celles considérées comme validées, puis en présentant
celles en cours de développement et porteuses d’avenir.
La Lettre du Pneumologue - Vol. II - n° 6 - décembre 1999
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DIAGNOSTIC DE MALIGNITÉ OU DE BÉNIGNITÉ
DEVANT UN NODULE
Les nodules ou masses pulmonaires sont diagnostiqués par la
radiographie thoracique et le scanner thoracique (TDM). Toutefois, en l’absence de critères d’imagerie de certitude, une
ponction transpariétale sous scanner ou échographie, voire un
abord chirurgical sous thoracoscopie ou lors d’une thoracotomie, s’impose pour obtenir une certitude histologique. Compte
tenu de la morbidité respective de ces différentes techniques et
du fait qu’environ 50 % des nodules sont bénins, le dogme
d’une thoracotomie systématique peut être rediscuté, car les
apports de la TEP sont maintenant bien documentés (figures 4
et 5). Sur un collectif de 1 214 patients étudiés issus de
20 séries de la littérature, la sensibilité est de 90 %, la spécificité de 83,2 %, la valeur prédictive positive de 91,9 % et la
valeur prédictive négative de 89,6 % (tableau I) (7). Les faux
négatifs sont liés à la petite taille des lésions, le seuil de résolution des caméras TEP étant estimé à 5 mm. Certaines tumeurs
à faible métabolisme peuvent prendre en défaut cette technique, notamment les carcinomes bronchiolo-alvéolaires et les
tumeurs carcinoïdes typiques. Les faux positifs sont en rapport
avec des processus inflammatoires et sont fonction de la prévalence des affections granulomateuses responsables de nodules :
en Europe, il s’agit le plus souvent de mycobactériose,
d’aspergillose et d’anthraco-silicose ou de sarcoïdose ; en
Amérique, histoplasmose et coccidioïdomycose représentent
les deux principales étiologies. L’amélioration des systèmes de
reconstruction des images en réduira la fréquence (8).
Dans l’étude diagnostique des nodules, les résultats de la TEP
apparaissent supérieurs à ceux des analyses mathématiques de
type bayésien (9).
Figure 4. Nodule bénin lobaire
supérieur droit ne fixant pas le
18
FDG et aspect TDM.
Figure 5. Cancer bronchique
épidermoïde lobaire supérieur
droit fixant le 18FDG et aspect
TDM (découverte fortuite
d’une tumeur maligne colique).
Tableau I. Données bibliographiques concernant l’exploration des
nodules pulmonaires solitaires (novembre 1999).
Auteurs
Année Effectif
SB (%)
SP (%)
VPP (%)
Kubota
Dedashti
Rege
Khonsary
Slosman
Patz
Lowe
Coleman
Hubner
Dewan
Paulus
Weber
Bury
Gupta
Hagsberg
Orino
Prauer
Graeber
Malik
Percy -Valde-Grâce
TOTAL
1990
1992
1993
1993
1993
1993
1994
1994
1995
1995
1995
1996
1996
1996
1997
1998
1998
1999
1999
1999
46
13
8
23
36
51
93
237
23
33
45
46
50
61
49
23
50
96
158
73
83
90
100
100
94
89
97
96
100
100
100
90
100
93
93
88
90
97
95
89,3
90
100
86
92
60
100
89
90
67
78
93
73
88
88
70
67
83
89
89
84,2
89
92
94
92,6
91
78
20
1 214
90
83,2
91,9
89,6
92
93
98
88
94
92
VPN (%)
100
79
100
SB : sensibilité ; SP : spécificité ; VPP : valeur prédictive positive ;
VPN : valeur prédictive négative.
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BILAN D’EXTENSION DES CANCERS BRONCHIQUES
Le bilan d’extension conditionne le pronostic mais également
les modalités de la prise en charge du cancer bronchique. En
l’absence de critères radiologiques pathognomoniques de
l’envahissement malin ganglionnaire, celui-ci est évoqué en
cas d’adénomégalie en tomodensitométrie. À la valeur seuil de
10 mm pour la mesure du plus petit diamètre, la sensibilité est
de 80 %, et la spécificité de seulement 65 %. L’imagerie en
résonance magnétique nucléaire donne des résultats similaires,
dans l’attente d’essais de caractérisation tissulaire par de nouvelles substances paramagnétiques. Aussi le recours à un geste
invasif par médiastinoscopie ou thoracoscopie s’impose-t-il
pour affirmer ou infirmer l’intégrité histologique, au prix
d’une morbidité faible mais certaine.
La TEP permet d’étudier cette extension avec des valeurs de
sensibilité et de spécificité de 86 % et 90 % sur un collectif de
991 patients. Ces chiffres sont constamment supérieurs à ceux
donnés par le TDM dans toutes les séries comparatives
(tableau II) (7). Ces données sont confirmées par une métaanalyse récente : sensibilité de 87 % pour la TEP et de 66 %
pour le TDM, spécificité de 95 % pour la TEP et de 81 % pour
le TDM (figure 6) (12).
1992
1993
1994
1994
1994
1994
1995
1995
1995
1996
1996
1996
1996
1996
1997
1997
1998
1999
1999
1999
1999
1999
3
20
26
62
22
23
42
30
20
46
29
30
82
99
47
18
68
66
97
84
54
53
100
80
93
94
90
82
83
78
100
80
76
87
100
83
89
67
93
98
71
93
80
73,7
22
991
86
93
80
64
43
56
50
65
56
63
57
56
75
20
60
59,9
▲ ▲
fixation tumorale
▲
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Strauss
Grimmel
Buchpiguel
Scott
Berlangieri
Wahl
Patz
Chin
Nadar
Guhlman
Sasaki
Bury
Sazon
Valk
Steinert
Hagberg
Vansteenkiste
Graeber
Saunders
Bishop
Pieterman
Percy - Valde-Grâce
TOTAL
▲
La plupart des études concernent les cancers dits non à petites
cellules, car l’importance du bilan d’extension y est jugée
considérable, mais les quelques séries concernant les cancers
dits à petites cellules retrouvent le même intérêt pour la TEP,
dans l’analyse de l’extension tant locorégionale que générale.
Année Effectif Sensibilité Sensibilité Spécificité Spécificité
TEP
TDM
TEP
TDM
83
94
100
81
82
81
100
100
98
78
52
94
99
100
95
94
97
94
81
88,3
89,6
42
80
44
85
86
75
87
64
73
94
100
63
90
62
74,6
▲
Compte tenu de l’excellente valeur prédictive négative,
l’absence de fixation du 18FDG témoigne du non-envahissement
tumoral ganglionnaire, permettant d’envisager une chirurgie
curative. En cas de fixation catégorisant une adénopathie N3,
en raison de l’importance des conséquences thérapeutiques, un
contrôle par biopsie transbronchique, par médiastinoscopie ou
par thoracoscopie vidéo-assistée reste à discuter afin d’éliminer
un faux positif d’origine inflammatoire.
Auteurs
▲
La TEP a également un intérêt dans le diagnostic des lésions
pleurales. La mise en évidence d’une fixation intense du
18
FDG traduit l’existence d’une lésion tumorale primitive ou
secondaire permettant, selon le contexte radio-clinique, d’affirmer un diagnostic, tel que celui d’un mésothéliome, ou de guider un geste biopsique (10, 11).
Tableau II. Données bibliographiques concernant le bilan d’extension
des cancers bronchopulmonaires (novembre 1999).
▲
Si une lésion pulmonaire mesure plus de 10 à 15 mm et si
elle ne fixe pas le 18FDG, l’abstention chirurgicale peut être
proposée au profit d’une surveillance clinique et radiologique de 6 à 12 mois par sécurité, pour s’assurer de
l’absence d’évolutivité.
Cet examen devrait aussi trouver un intérêt dans le diagnostic
des lésions pulmonaires sur poumon unique et dans le bilan
des lésions bifocales.
fixation cardiaque
physiologique
adénopathies médiastinales
et sus-claviculaires
Figure 6. Adénopathies médiastinales et sus-claviculaires satellites d’un
cancer bronchique lobaire inférieur droit révélées par la TEP et aspect
TDM.
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BILAN DE L’EXTENSION MÉTASTATIQUE
La fréquence et la diversité des sites métastatiques dans le
cadre du cancer bronchique imposent la réalisation de plusieurs examens. Grâce à l’utilisation de caméras corps entier,
la TEP permet, en un examen, de faire une véritable cartographie tumorale (figure 7).
Une revue récente (13) regroupant trois séries de la littérature
montre que, chez 10 à 29 % des patients explorés, la TEP a
mis en évidence des lésions métastatiques méconnues par un
bilan en imagerie traditionnelle. Dans une étude personnelle,
chez 38 patients jugés opérables après un bilan carcinologique
classique et classés M–, nous avons trouvé trois nouveaux sites
métastatiques (14).
La TEP permet en outre de rectifier des faux positifs du TDM,
notamment au niveau des surrénales, où celui-ci met souvent
en évidence des hypertrophies bénignes (15, 16). Cependant,
l’exploration du cerveau est difficile en raison de la fixation
physiologique du glucose dans cet organe.
Figure 7. Cartographie métastatique corps entier.
Figure 8. Mise en évidence d’une hyperfixation intense après pneumonectomie gauche pour cure d’un cancer bronchique témoignant d’une
rechute médiastinale.
● Pour évaluer le pronostic de la maladie. Deux publications
récentes concernant 280 malades (17, 18) évoquent un parallélisme possible entre l’intensité de la fixation du 18FDG et la
survie des patients, la survie étant d’autant plus courte que
l’index de fixation (standard uptake value) est élevé, donnée
indépendante du stade et de la taille de la tumeur. Toutefois,
une autre étude sur 38 patients considère que le TNM reste
plus prédictif (19).
● Pour évaluer l’efficacité d’une chimiothérapie et de la
radiothérapie. La TEP permet d’évaluer la réponse thérapeutique. En effet, la fixation du 18FDG peut diminuer ou être totalement abolie après une ou deux cures de chimiothérapie, et ce
bien avant qu’une diminution de la masse tumorale ne soit
détectée par les méthodes d’imagerie actuelles. L’observation
de cette modification du métabolisme glucidique de la tumeur
permet d’évaluer l’efficacité probable du traitement (23). A
contrario, l’absence de réponse indique une résistance thérapeutique. La reconnaissance précoce de celle-ci devrait permettre une modification plus rapide de la stratégie (24). Des
études comparables ont été faites après radiothérapie (25).
● Pour différencier les masses résiduelles des tumeurs et pour
mettre en évidence une rechute. Pour ces problèmes fréquemment rencontrés en clinique après traitement initial d’une
tumeur bronchique, la TEP semble pouvoir apporter une
contribution importante permettant de déceler, avec succès, les
récidives tumorales au sein de tissus fibreux postchirurgicaux
ou postradiques, sous réserve que les processus inflammatoires
contingents à ces traitements se soient résorbés, soit au moins
deux mois après un abord chirurgical et six mois après une
irradiation (figure 8) (20-22).
Malgré l’intérêt clinique évident de cette méthode, le principal
obstacle à sa diffusion est aujourd’hui d’ordre économique.
Elle est onéreuse tant du point de vue de la production du traceur, qui nécessite la disponibilité d’un cyclotron et une fabrication en grande quantité en raison de la faible durée de vie
des émetteurs de positons, que de celui de la détection, qui
nécessite un appareil spécifique. Certains pays ont néanmoins
choisi cette voie d’équipement : États-Unis, Allemagne, Belgique, Grande-Bretagne, Japon, etc. La diffusion de la technique aux États-Unis et en Allemagne a permis la réalisation
À côté de ces indications reconnues, d’autres sont en cours de
validation ou de développement et semblent très prometteuses :
240
La Lettre du Pneumologue - Vol. II - n° 6 - décembre 1999
des premières études de coût-utilité. Celles-ci ont montré que
l’introduction de la TEP dans la prise en charge des néoplasies
bronchopulmonaires permet, à l’échelle de la population des
États-Unis, la réalisation d’une économie de l’ordre de 1 000 à
2 000 dollars par patient grâce à la réduction des actes invasifs
et à la suppression d’actes chirurgicaux inutiles du point de
vue carcinologique (26). En Allemagne, une réduction des
coûts du même ordre est relevée dans la prise en charge des
nodules pulmonaires solitaires (27).
Ces travaux en oncologie ont eu pour conséquence la prise en
charge de ces investigations par des compagnies d’assurances
et des organismes sociaux dans ces pays.
En France, le coût en situation clinique est estimé à 7 000 francs
par examen. Cette somme doit être mise en perspective avec le
prix d’une journée d’hospitalisation en chirurgie.
Plus de 100 caméras sont installées aux États-Unis, 70 en Allemagne, 15 en Belgique, 15 en Italie et 20 en Grande-Bretagne.
Le retard déjà accumulé par rapport à nos voisins se comblera
ou s’aggravera selon les décisions des autorités de tutelle.
Actuellement, en France, à côté des quatre centres de
recherche (Orsay, Caen, Lyon, Toulouse) disposant de caméras dédiées, une seule caméra dédiée en utilisation clinique est
opérationnelle depuis avril 1999 à l’hôpital d’instruction des
armées du Val-de-Grâce, à Paris (figure 9). Deux centres ont
reçu une autorisation d’installation : l’hôpital Tenon (AP) à
Paris et l’hôpital de Rennes. Quatre centres disposent de caméras CDET : l’hôpital Tenon (Paris), l’hôpital Avicenne (Bobigny), le centre René-Hugenin (Saint-Cloud), l’hôpital de
Limoges.
Figure 9. Caméra TEP installée à l’HIA Val-de-Grâce (Paris).
Les examens ne sont pas codifiés par la Sécurité sociale et ne
sont donc pas remboursables. Malgré tous ces obstacles, la
prise de conscience d’un grand nombre de spécialistes en
médecine nucléaire et de cliniciens laisse entrevoir le développement rapide de cette nouvelle technique. Il semble préférable de privilégier l’installation de caméras dédiées, même si
La Lettre du Pneumologue - Vol. II - n° 6 - décembre 1999
leurs prix s’avèrent aujourd’hui supérieurs, car leurs performances et les résultats obtenus sont meilleurs que ceux obtenus par des caméras CDET, notamment pour les lésions de
petite taille (2, 28).
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