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Correspondances en médecine - n° 3-4, vol. IV - juillet-décembre 2003
douleurs chroniques. Si l’intervention doit
réduire la symptomatologie douloureuse, il est
préférable de diminuer de moitié la dose jour-
nalière dès le premier jour postopératoire.
L
ES MOYENS THÉRAPEUTIQUES
Quelle que soit la technique d’analgésie choi-
sie, il faut l’associer à l’administration de la
dose quotidienne habituelle de morphiniques.
Les morphiniques par voie générale
Les agents de type agoniste-antagoniste et
agoniste partiel (nalbuphine, buprénorphine,
péthidine...) doivent être évités en raison d’une
puissance souvent insuffisante, dans ce
contexte, et des difficultés de titration des
besoins analgésiques. Le tramadol – par voie
orale ou injectable – peut être intéressant en
association et/ou en relais, en raison de son
mode d’action double, sur les récepteurs mor-
phiniques d’une part, et par renforcement des
contrôles inhibiteurs sérotoninergiques d’autre
part.
Si la chirurgie a un objectif antalgique, la dose
quotidienne de morphiniques doit être dimi-
nuée de 50 % dès le premier jour postopéra-
toire. S’il s’agit d’un dispositif transdermique,
la réduction de dose débute le matin même de
l’intervention car ce produit est encore actif
12 à 24 heures après son retrait et la décrois-
sance ne débute que quelques heures après
l’ablation du patch.
L’analgésie contrôlée par le patient (ACP)
Si la voie intraveineuse est nécessaire, il est
préférable de privilégier l’administration sur ce
mode car il permet un ajustement rapide et per-
manent aux besoins analgésiques du malade.
En règle générale, dans la phase postopératoire
immédiate, une perfusion continue de mor-
phine est programmée, sur la base de la
consommation quotidienne habituelle du
patient. Il s’agit d’ailleurs, à l’heure actuelle,
quasiment de la seule indication à employer
une perfusion continue en association aux
bolus autoadministrés. À cette perfusion, desti-
nées à couvrir les “besoins de base”, les bolus
prescrits sont en moyenne supérieurs de 50 %
à 100 % par comparaison aux doses habi-
tuelles. La durée de la période d’interdiction
reste, en revanche, le plus souvent conforme
aux réglages habituels (6 à 8 minutes).
Les voies locorégionales
L’analgésie péridurale, utilisant les opiacés et/ou
les anesthésiques locaux, paraît tout à fait adaptée
à ces malades, en privilégiant si possible, l’admi-
nistration continue aux bolus itératifs. Les indica-
tions principales sont la chirurgie abdominale, du
bassin et des membres inférieurs. L’analgésie péri-
durale contrôlée par le patient (PCEA), si les condi-
tions matérielles de mise en œuvre et de sur-
veillance sont réunies, paraît représenter une
alternative intéressante. Si les morphiniques sont
utilisés, les besoins de base en morphine sont cal-
culés sur 25 % de la consommation quotidienne
du malade (en équivalent de morphine). Si seuls
les anesthésiques locaux sont utilisés, un complé-
ment morphinique par voie générale est néces-
saire afin de prévenir la survenue d’un syndrome
de sevrage (25 % de la consommation quotidienne
du malade).
L’analgésie multimodale
Elle associe plusieurs agents (exemple : AINS +
opiacés) ou modalités analgésiques (exemple :
cathéter locorégional périphérique + ACP intra-
veineuse) et doit être employée le plus souvent
possible car elle permet, dans une certaine
mesure, de réduire les doses de morphiniques.
La coprescription de benzodiazépines est fré-
quemment utile pour traiter la composante
anxieuse. La prescription de clonidine peut éga-
lement contribuer à réduire le risque de syn-
drome de sevrage, dont elle réduit la compo-
sante hyperadrénergique.
POUR EN SAVOIR PLUS...
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ment. In : Brasseur L, Chauvin M, Guilbaud G (eds)
Douleurs. Paris : Maloine, 1997 : 629-52.
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– Manfredi PL, Weinstein SM, Chandler SW, Payne R.
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