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La Lettre du Sénologue - n° 9 - juin 2000
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●Mai 1998 : communication orale à l’ASCO de l’analyse de
l’incidence des cancers du sein chez les femmes ménopausées
ostéopéniques ayant participé à l’étude de l’effet du raloxifène
sur la densitométrie osseuse. On note une diminution impor-
tante de l’incidence des cancers du sein invasifs.
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●Juillet 1998 : publication des résultats négatifs de deux
essais de prévention européens qui ont voulu tester l’intérêt de
la prise de tamoxifène. L’essai préliminaire du Royal Marsden
Hospital de Londres s’adressait à des femmes à risque élevé
(histoire familiale pour la plupart), et l’essai italien de l’Institut
de cancérologie de Milan s’adressait à des femmes qui avaient
subi une hystérectomie souvent associée à une ovariectomie
bilatérale, au risque plutôt faible. Ces résultats n’empêchent
pas l’étude anglaise IBIS de continuer (Powles T, Eeles R,
Ashley S et al. Interim analysis of the incidence of breast can-
cer in the Royal Marsden Hospital Tamoxifen Randomised
Chemoprevention Trial. Lancet 1998 ; 352 : 98-101 ; Veronesi
U, Maisonneuve P, Costa A et al. Prevention of breast cancer
with tamoxifen : preliminary findings from the Italian rando-
mised trial among hysterectomised women. Italian Tamoxifen
Prevention Study. Lancet 1998 ; 352 : 93-7).
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●Septembre 1998 : publication par le NSABP, en 18 pages,
des résultats complets de l’essai P1. L’incidence des cancers
invasifs diminue de 49 % (p < 0,00001) et celle des cancers
non invasifs de 50 % (p < 0,002). Ces auteurs constatent que le
taux de cancers de l’endomètre et d’accidents thromboembo-
liques augmente. Ces effets délétères ne concernent que les
femmes ménopausées (Fisher B, Costantino JP, Wickerham
DL et al. Tamoxifen for prevention of breast cancer : report of
the National Surgical Adjuvant Breast and Bowel Project P1.
J Natl Cancer Inst 1998 ; 90 : 1371-88).
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●Octobre 1998 : approbation par la FDA de l’indication du
tamoxifène pour la réduction de l’incidence des cancers du
sein des populations à risque élevé.
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●Décembre 1998 : communication orale à San Antonio, par
le NSABP, des résultats préliminaires de l’essai B24, qui
démontrent que le tamoxifène prescrit au décours du traite-
ment locorégional des cancers du sein non invasifs (carcinome
in situ) diminue le taux de cancers dans le sein controlatéral
(Wolmark N, Dignam J, Fisher B et al. The addition of tamoxi-
fen to lumpectomy and radiotherapy in the treatment of ductal
carcinoma in situ [DCIS] : preliminary results of NSABP pro-
tocol B24 [abstract]. Breast Cancer Res Treat 1998 ; 50 :1).
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●Juin 1999 : publication des résultats définitifs de l’essai
B24 s’adressant à des cancers canalaires in situ, démontrant
que 20 mg/j de tamoxifène pendant cinq ans diminuent de
43 % (p = 0,004) le taux de rechutes dans le sein controlatéral
(Fisher B, Dignam J, Wolmark N et al. Tamoxifen in treatment
of intraductal breast cancer : National Surgical Adjuvant
Breast and Bowel Project B24 randomised controlled trial.
Lancet 1999 ; 353 : 1993-2000).
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●1999 : publication des résultats de l’essai MORE montrant
la diminution de 76 % de l’incidence des cancers du sein inva-
sifs après la prise de raloxifène (Cummings SR, Eckert S,
Krueger KA et al. The effect of raloxifene on risk of breast
cancer in postmenopausal women : resuls from the MORE
randomized trial. JAMA 1999 ; 281 : 2189-97).
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●Mai 1999 : lancement de l’essai STAR, qui compare l’effet
du tamoxifène 20 mg/j et celui du raloxifène 60 mg/j donnés
pendant cinq ans à 22 000 femmes ménopausées ayant un
risque élevé.
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●Septembre 1999 : le tamoxifène n’altère pas la qualité de
vie des femmes de l’étude NSABP P1. Elles ne signalent pas
de perturbation de leur sexualité. Elles ne présentent pas
d’augmentation de poids. Elles ne sont pas plus déprimées.
Certaines femmes non ménopausées ont des perturbations du
cycle ou des kystes aux ovaires (Day R, Ganz PA, Costantino
JP et al. Health-related quality of life and tamoxifen in breast
cancer prevention : a report from the NSABP P1 study. J Clin
Oncol 1999 ; 17 : 2659-69).
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●Novembre 1999 : publication des résultats de l’essai italien
évaluant l’effet de la prise de fenretinide sur le devenir des
cancers du sein opérés. Cet analogue de rétinoïde a été respon-
sable d’une diminution de 34 % du taux des cancers du sein
controlatéraux et de 35 % du taux de rechutes du sein homola-
téral chez les patientes non ménopausées ayant eu un cancer
du sein N–. Ces deux chiffres sont à la limite de la significati-
vité (Veronesi U, De Palo G, Marubini E et al. Randomized
trial of fenretinide to prevent second breast malignancy in
women with early breast cancer. J Natl Cancer Inst 1999 ;
91 : 1847-56).
La conclusion de ces quelques réflexions peut se résumer
ainsi : le cancer du sein est une pathologie fréquente et grave
de la femme. Il n’existe pas de prévention primaire. Il n’existe
pas de prévention par des traitements non hormonaux. Les
seuls résultats positifs ont été obtenus avec la prise de tamoxi-
fène. Cette prise augmente le taux de cancers de l’endomètre et
de manifestations thromboemboliques. En chiffres absolus, le
nombre de cancers du sein évités est plus grand que le nombre
d’événements indésirables constatés.
À ce jour, deux essais en cours, IBIS en Angleterre et STAR
aux États-Unis, permettront d’améliorer nos connaissances
dans ce domaine par une évaluation de la survie de la popula-
tion traitée et par la recherche de l’hormone qui aura le
meilleur rapport efficacité/toxicité. ■
ÉDITORIAL