http://www.grio.org Rubrique coordonnée par T. Thomas, Saint-Étienne Ostéopathies fragilisantes, risque fracturaire et intervention thérapeutique : la densitométrie osseuse par rayons X reste-t-elle la méthode de référence ? P lus de quarante ans après la mise au point du premier appareil (1) et quinze ans après la conférence de consensus de l’OMS (Hong Kong, 1993) établissant la définition densitométrique de l’ostéoporose, la densitométrie osseuse par rayons X ou absorptiométrie biphotonique par rayons X (DXA) a-t-elle encore sa place ? Cette question, que certains pourraient trouver provocatrice tant cette technique est diffusée, mérite d’être posée du fait de l’apparition de nouvelles techniques d’évaluation du tissu osseux comme les ultrasons, le scanner X, l’IRM ou les techniques d’analyse de l’architecture osseuse. À la vérité, la réponse à la question ne fait pas de doute, la DXA reste la technique de référence. Passons en effet en revue les techniques concurrentes : Les différentes méthodes fondées sur l’imagerie radiologique conventionnelle, comme la photodensitométrie ou la radiogramétrie, n’ont pas fait leur preuve, notamment pour le squelette axial. Le scanner X, longtemps en concurrence avec l’absorptiométrie biphotonique, reste d’un usage limité même s’il permet seul de séparer os trabéculaire et cortical. Il est handicapé par son coût, son irradiation non négligeable et sa calibration parfois délicate, et actuellement très peu d’appareils en service permettent de réaliser ce type de mesure. Les travaux portant sur la quantification osseuse en IRM restent quant à eux encore embryonnaires que se soit par spectro-IRM ou IRM paramétrique. Les techniques par ultrasons jouent depuis des années un rôle incontestable d’outsider et nombreuses sont les publications qui soulignent leur intérêt dans l’évaluation du risque fracturaire. Un grand nombre de pays ont intégré les techniques ultrasonores dans leur schéma diagnostique, à telle enseigne * Service de médecine nucléaire, centre hospitalier GastonDomergue, 5, rue Hoche 30000 Nîmes. 42 IP P.O. Kotzki* que des milliers d’appareils sont exploités de part le monde. Et pourtant, les ultrasons n’ont pas su s’imposer. En effet, il n’existe pas de stratégie d’utilisation claire en pratique clinique. Cela s’explique par l’hétérogénéité des techniques proposées, le caractère exclusivement périphérique des mesures (calcanéum), les corrélations imparfaites avec les mesures de densité osseuse en DXA et la difficulté à appliquer les seuils de définition OMS de l’ostéoporose. Certains proposent cependant d’inclure ces méthodes dans le dépistage des sujets âgés à haut risque. En effet, dans cette population, l’évaluation par DXA est souvent difficile à interpréter (arthrose rachidienne, antécédents chirurgicaux au niveau de la hanche…) et le suivi densitométrique n’est pas crucial. Par ailleurs, le problème du suivi reste le point faible des techniques ultrasonores du fait d’une reproductibilité insuffisante en regard des modifications de mesures attendues, alors que les mesures DXA permettent un suivi utile à la prise en charge thérapeutique des patient(e)s. Une métaanalyse récente (2) conclut que les mesures par ultrasons au calcanéum ne permettent pas de confirmer ou d’exclure avec certitude une ostéoporose densitométrique et que de nouvelles études sont nécessaires avant d’en recommander l’usage. Formation et contrôle de qualité Malgré tout, la DXA ne doit pas se reposer sur ces lauriers, car mal utilisée elle peut conduire à des prises de décisions inopportunes. C’est tout le sens des évolutions technologiques des dernières années avec l’apparition de systèmes de mesure dont la reproductibilité est devenue le critère de qualité fondamental. Cela passe à la fois par une amélioration de la résolution spatiale, notamment par l’utilisation de multi-détecteurs, et par le développement d’outils logiciels robustes. Notons, cependant, que toute évolution logicielle proposée par un constructeur ne doit en aucun cas altérer la comparaison avec les mesures antérieures. La formation des utilisateurs et le contrôle de qualité des appareils constituent deux autres piliers pour que la DXA demeure la méthode de référence. À ce titre, le GRIO a toujours joué un rôle pionnier, en initiant de nombreuses actions de formation et en proposant le contrôle de qualité obligatoire des appareils. Ce n’est qu’à ce prix que le remboursement de l’examen – qui prend en compte cette évolution dans sa qualité technique et la justesse de ses indications – a un sens. Référence pour la densité mais pas d’information sur l’architecture La DXA est à ce jour la méthode de référence en termes d’évaluation de la densité osseuse. Mais l’ostéoporose ne peut se limiter à une simple définition densitométrique. La DXA n’apporte aucune information sur l’architecture osseuse. Dans ce domaine, aucune méthode ne peut encore être proposée en routine. Les techniques ultrasonores, longtemps porteuses d’espoir dans ce domaine n’ont toujours pas convaincu. Quant aux méthodes d’évaluation de l’architecture ou de la texture osseuse fondée sur l’analyse (analyse fractale, etc.) de clichés radiologiques, scanner haute résolution ou IRM, elles restent à l’état de recherche bien que l’on entrevoit désormais certains développements cliniques, au niveau du calcanéum, et de l’avant-bras en particulier. n Références bibliographiques 1. Cameron JR, Sorenson J. Measurement of bone mineral in vivo: an improved method. Science 1963;11,142:230-2. 2. Nayak S, Olkin I, Liu H et al. Meta-analysis: accuracy of quantitative ultrasound for identifying patients with osteoporosis. Ann Intern Med 2006;144(11):832-41. La Lettre du Gynécologue - n° 326 - novembre 2007