Informations I nformations Première rencontre de la Société française de cardiologie et de la Société française de radiologie sur l’imagerie en coupes du cœur et des vaisseaux M.C. Aumont*, J.M. Serfaty**, J.P. Laissy** L’ imagerie non invasive du cœur et des artères coronaires s’est considérablement développée durant ces trente dernières années, et cela d’autant mieux que les cardiologues s’y sont investis. Les progrès, qu’il s’agisse des ultrasons ou de la médecine nucléaire, ont été très rapides. Plus récemment sont apparues les applications en cardiologie de la tomodensitométrie (ou scanner à rayons X) et de l’imagerie par résonance magnétique (IRM). Grâce à des progrès technologiques rapides, elles vont très probablement modifier la prise en charge diagnostique et guider le traitement de nombreux patients, notamment dans la maladie coronaire. P. Guéret (Créteil), au nom de la Société française de cardiologie, et F. Joffre (Toulouse), au nom de la Société française de radiologie, ont organisé une première rencontre sur l’imagerie en coupes du cœur et des vaisseaux, qui s’est tenue à Paris en novembre 2005. Ils doivent être remerciés de cette excellente initiative, car les progrès pour une utilisation clinique optimale seront d’autant plus rapides que la collaboration sera étroite. La compétence des radiologues est indispensable dans l’acquisition et le traitement de l’image. Une bonne connaissance de la physiologie et de la physiopathologie cardiovasculaire est nécessaire, ainsi qu’une mise à jour permanente concernant les apports des différentes modalités d’imagerie. Ainsi, une étroite collaboration entre cardiologues cliniciens, échocardiographistes, spécialistes en médecine nucléaire, coronarographistes et radiologues est indispensable pour définir ensemble des stratégies d’exploration dans les différentes situations cliniques rencontrées quotidiennement. L’angioscanner multibarrette et l’IRM sont deux techniques susceptibles de bouleverser à très court terme la prise en charge des problèmes cliniques quotidiens : exploration d’une douleur thoracique, stratification du pronostic de la maladie coronaire, aide à l’évaluation des indications de revascularisation myocardique, bilan préopératoire. * Département de cardiologie, hôpital Bichat, Paris. ** Service de radiologie, hôpital Bichat, Paris. La Lettre du Cardiologue - n° 398 - octobre 2006 IMAGERIE DES ARTÈRES CORONAIRES Les trois techniques (coronarographie, scanner et IRM des artères coronaires) ont été présentées avec leurs avantages et inconvénients propres. La coronarographie reste la technique de référence. Son principal avantage est une haute résolution spatiale et temporelle. Ses principaux inconvénients sont son caractère invasif, son risque néphrotoxique et ses renseignements limités à la lumière artérielle, conduisant à une sous-estimation de l’extension de la maladie athéroscléreuse (H. Eltchaninoff, Rouen). Le scanner multicoupe permet de visualiser en routine la lumière et la paroi des artères coronaires dans leur portion proximale (figure 1). La valeur prédictive négative élevée est intéressante en clinique dans des populations à faible prévalence. D’autres indications sont en cours de validation clinique dans des populations à haute prévalence de maladie coronaire. Le scanner est particulièrement intéressant dans les sténoses du tronc commun, qu’il est souvent difficile de bien dégager Figure 1. Coro-scanner : reconstruction 3D des branches coronaires sans sténose visible. 9 Informations I nformations à la coronarographie. Il peut, dans certains cas, guider la décision thérapeutique en complément (et non encore en substitution) de la coronarographie : angioplastie avec stent ou pontage. Il est potentiellement très utile dans le bilan coronaire préopératoire des valvulopathies ainsi que dans le bilan des cardiomyopathies chez les patients ayant peu de facteurs de risque vasculaire. En postopératoire ou en postinterventionnel, le scanner est en cours d’évaluation. Les premières études dans le contrôle à distance des pontages coronaires montrent une valeur prédictive négative élevée. En revanche, son utilité est discutée dans le contrôle des stents devant une suspicion clinique ou scintigraphique, la coronarographie étant à la fois diagnostique et interventionnelle. Dans le cadre des anomalies congénitales : anomalies d’implantation, fistules, ponts intramyocardiques, le scanner s’avère très utile. Les limites de la technique sont : – la synchronisation obligatoire à l’électrocardiogramme (ECG) nécessitant un rythme sinusal et une fréquence cardiaque lente (intérêt des bêtabloquants) ; – la résolution spatiale insuffisante ; – la tendance à la majoration de la taille des structures très denses comme les calcifications ; – l’irradiation importante : de une à trois fois l’irradiation due à une coronarographie standard ; – cet examen n’est pas recommandé chez la femme de moins de 50 ans en raison de la radiosensibilité des glandes mammaires. Malgré ces limites, le scanner est actuellement la technique non invasive la plus performante pour explorer les artères coronaires (J.M. Pernes, Antony). IRM Cette technique n’est pas irradiante et ne nécessite pas l’injection d’un produit de contraste iodé. Elle permet d’étudier dans les mêmes temps la fonction ventriculaire, la perfusion et la viabilité myocardique. Le protocole le plus utilisé est l’acquisition en apnée en fin d’expiration. En plusieurs apnées successives, les principaux segments coronaires sont visualisés. Les artères coronaires sont sinueuses et ont un trajet complexe à la surface du cœur. Même en acquisition 3D, seules de petites portions de certaines coronaires sont visibles sur chaque reconstruction (figure 2). Afin d’améliorer l’analyse du réseau coronaire, un post-traitement est indispensable grâce à des logiciels de plus en plus perfectionnés. Actuellement, l’IRM est moins performante que le scanner et insuffisamment reproductible pour être proposée dans l’imagerie des artères coronaires, mais elle peut fournir beaucoup d’autres renseignements, notamment sur l’ischémie et la viabilité myocardique. Rappelons qu’elle reste contre-indiquée en cas de stimulateur intracorporel ou de défibrillateur (J.P. Laissy, hôpital Bichat, Paris). 10 Figure 2. Coro-IRM montrant le tronc commun, l’IVA et la première diagonale. IMAGERIE DE LA PLAQUE D’ATHÉROME La composition de la plaque d’athérome est déterminante dans le risque de survenue d’un syndrome coronaire aigu. Les plaques vulnérables ou à haut risque sont petites, mais très riches en lipides, avec une fine chape fibreuse. Le scanner permet de détecter des plaques non visibles à la coronarographie. On peut définir différents types de plaques en fonction de leur morphologie et de leur densité : – la plaque riche en lipides, non calcifiée, est hypodense. Il n’est pas possible avec les scanners actuels de distinguer une éventuelle ulcération ou dissection ; – la plaque fibreuse est isodense, le plus souvent concentrique ; – la plaque mixte excentrée a une composante hypodense ou isodense et une composante calcifiée ; – la plaque calcifiée a une densité supérieure à celle de la sténose et sa taille paraît artificiellement augmentée ; – l’hyperplasie intimale d’une resténose intrastent se traduit par une hypodensité, la paroi du stent étant hyperdense. Les mesures de diamètre, ou de surface, de sténose permettent en théorie de quantifier automatiquement son degré. La précision des mesures dépend cependant de la qualité de l’acquisition, notamment de la résolution spatiale (C. Caussin, Le PlessisRobinson). IRM DE LA PLAQUE L’imagerie des protons permet de différencier les tissus riches en graisse de ceux riches en eau. Mais les protons du cœur lipidique des plaques (riche en cholestérol) ne donnent pas La Lettre du Cardiologue - n° 398 - octobre 2006 d’hypersignal en pondération T1, contrairement à ceux de la graisse sous-cutanée (riche en triglycérides). C’est, en fait, l’imagerie en T2 qui permet de différencier les cœurs lipidiques des chapes fibreuses. L’eau contenue dans ces chapes donne un signal élevé en T2, alors que l’eau moins mobile au sein de la graisse donne un hyposignal. L’IRM permet de visualiser les calcifications au sein des plaques d’athérosclérose, puisqu’elles ne donnent pas de signal (les calcifications sont pauvres en eau et solides). Enfin, l’IRM permet de dépister des hémorragies en phase aiguë, donnant un hypersignal en T1. L’imagerie T1 après injection de gadolinium améliore la différenciation en contraste entre chape fibreuse et cœur lipidique. En pratique, la petite taille des plaques rend l’interprétation difficile, d’autant qu’elles sont développées sur des artères mobiles (battements cardiaques et mouvements respiratoires). De ce fait, l’acquisition doit être synchronisée au rythme cardiaque et la plus courte possible pendant la diastole afin de minimiser le déplacement des artères. La synchronisation respiratoire doit également être réalisée. Les acquisitions sont donc courtes et la résolution spatiale est insuffisante pour permettre une utilisation en routine clinique (G. Helft, Paris). Informations I nformations Figure 3. IRM cardiaque : séquence de perfusion de premier passage, hypoperfusion sous-endocardique inféro-latérale. IMAGERIE DE L’ISCHÉMIE MYOCARDIQUE Actuellement, la scintigraphie myocardique de perfusion au thallium ou au sestamibi constitue la méthode de référence pour l’exploration de la perfusion myocardique. L’IRM apparaît comme une technique alternative sans l’inconvénient de l’irradiation et sans injection de produit néphrotoxique. Après l’injection du traceur (chélate de gadolinium) en bolus, l’étude de la perfusion au cours du premier passage constitue la première étape, complétée par la séquence de perfusion tardive (ou rehaussement tardif ) [figures 3 et 4]. Des images morphologiques sont obtenues à partir de séquences en écho de spin rapide (séquences en “sang noir”). Des images fonctionnelles en ciné-IRM sont obtenues pour la fonction ventriculaire gauche globale et segmentaire, la mesure des épaisseurs et des volumes. Les acquisitions peuvent être complétées par des images dynamiques avec des grilles (tatouage ou tagging) qui permettent de quantifier la fonction contractile segmentaire. Après la perfusion au cours du premier passage est étudiée la perfusion 10 à 20 minutes après l’injection de gadolinium (rehaussement tardif ). Enfin, des séquences d’angio-IRM coronaire peuvent compléter le bilan. Sur les séquences de perfusion de premier passage, les zones d’hypoperfusion donnent un hyposignal. Une dizaine de minutes après l’injection, la zone infarcie non viable donne un hypersignal (rehaussement tardif ). L’IRM permet de définir l’extension transmurale de l’infarctus et de reconnaître les petits infarctus sous-endocardiques. La Lettre du Cardiologue - n° 398 - octobre 2006 Figure 4. IRM cardiaque : séquence 10 minutes après injection. Infarctus inféro-latéral visualisé sous la forme d’un rehaussement tardif sous-endocardique. L’hypersignal tardif ne permet pas de distinguer infarctus récent et ancien. Un remodelage ventriculaire avec amincissement focal et dilatation segmentaire est en faveur d’un infarctus ancien. 11 Informations I nformations La technique de rehaussement tardif aide à prédire la récupération fonctionnelle après revascularisation. Un hypersignal inférieur à 25 % de l’épaisseur de la paroi est en faveur d’une récupération, tandis qu’un hypersignal supérieur à 75 % traduit un segment non viable. Entre 25 et 75 %, la récupération fonctionnelle est proportionnelle à l’extension transmurale de l’infarctus. L’IRM de stress ou dobutamine est intéressante pour étudier la viabilité dans ces cas intermédiaires (J. Garot, Créteil). Le scanner permet aussi d’étudier l’ischémie myocardique. La sémiologie radiologique est proche de celle décrite en >>> IRM, mais la résolution en contraste du scanner est inférieure à celle de l’IRM. L’infarctus du myocarde apparaît sur le premier passage comme une zone de densité diminuée par rapport au myocarde adjacent. L’hypodensité peut être sous-endocardique ou transmurale. Les travaux sont en cours pour étudier la viabilité myocardique en scanner (J.F. Paul, Le Plessis-Robinson). En conclusion, l’imagerie du cœur et des vaisseaux par scanner et IRM fait des progrès très importants et continue d’évoluer. Tout cardiologue se doit de suivre ces progrès pour utiliser au mieux ces techniques non invasives. ■ Petites annonces Pour réserver cet emplacement, Ta r i f s P e t i t e s A n n o n c e s MODULES 1/16 de page contactez dès maintenant 43 mm L x 58 mm H le service 90 mm L x 58 mm H 43 mm L x 125 mm H Annonces professionnelles 1/8 de page 1/4 de page COLLECTIVITÉS PARTICULIERS 289,65 144,83 579,30 289,65 1082,39 541,20 90 mm L x 125 mm H Tél. : 01 46 67 62 76 Fax : 01 46 67 63 10 *Abonnés particuliers-: profitez d’une deuxième insertion gratuite. *Collectivités-: dégressif à partir de deux insertions, nous consulter. *Quadri offerte. ÉTUDIANTS ABONNEZ-VOUS : VOS ANNONCES SERONT GRATUITES 12 La Lettre du Cardiologue - n° 398 - octobre 2006