Première rencontre de la Société française de cardiologie et

La Lettre du Cardiologue - n° 398 - octobre 2006
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Figure 1. Coro-scanner : reconstruction 3D des branches coronaires
sans sténose visible.
Première rencontre de la Société fraaise de cardiologie et
de la Société française de radiologie
sur l’imagerie en coupes du cœur et des vaisseaux
 M.C. Aumont*, J.M. Serfaty**, J.P. Laissy**
* Département de cardiologie, hôpital Bichat, Paris.
** Service de radiologie, hôpital Bichat, Paris.
L
imagerie non invasive du ur et des arres coro-
naires s’est considérablement développée durant ces
trente dernières années, et cela d’autant mieux que les
cardiologues s’y sont investis. Les progrès, qu’il s’agisse des
ultrasons ou de la médecine nucléaire, ont été très rapides.
Plus récemment sont apparues les applications en cardio-
logie de la tomodensitométrie (ou scanner à rayons X) et
de l’imagerie par résonance magnétique (IRM). Grâce à des
progs technologiques rapides, elles vont très probablement
modifier la prise en charge diagnostique et guider le traite-
ment de nombreux patients, notamment dans la maladie
coronaire. P. Guéret (Cteil), au nom de la Société française
de cardiologie, et F. Joffre (Toulouse), au nom de la Société
française de radiologie, ont organisé une première rencontre
sur l’imagerie en coupes du ur et des vaisseaux, qui sest
tenue à Paris en novembre 2005. Ils doivent être remerciés
de cette excellente initiative, car les progrès pour une utili-
sation clinique optimale seront dautant plus rapides que la
collaboration sera étroite.
La compétence des radiologues est indispensable dans l’acqui-
sition et le traitement de l’image. Une bonne connaissance de
la physiologie et de la physiopathologie cardiovasculaire est
nécessaire, ainsi qu’une mise à jour permanente concernant
les apports des différentes modalités d’imagerie. Ainsi, une
étroite collaboration entre cardiologues cliniciens, échocar-
diographistes, spécialistes en decine nucléaire, corona-
rographistes et radiologues est indispensable pour définir
ensemble des stratégies dexploration dans les difrentes
situations cliniques rencontrées quotidiennement.
L’angioscanner multibarrette et l’IRM sont deux techniques
susceptibles de bouleverser à très court terme la prise en
charge des problèmes cliniques quotidiens : exploration d’une
douleur thoracique, stratification du pronostic de la maladie
coronaire, aide à l’évaluation des indications de revasculari-
sation myocardique, bilan préopératoire.
IMAGERIE DES ARTÈRES CORONAIRES
Les trois techniques (coronarographie, scanner et IRM des
artères coronaires) ont été présentées avec leurs avantages et
inconvénients propres.
La coronarographie reste la technique de référence. Son prin-
cipal avantage est une haute résolution spatiale et temporelle.
Ses principaux inconvénients sont son caractère invasif, son
risque néphrotoxique et ses renseignements limités à la lumière
artérielle, conduisant à une sous-estimation de l’extension de
la maladie athéroscléreuse (H. Eltchaninoff , Rouen).
Le scanner multicoupe permet de visualiser en routine la
lumière et la paroi des artères coronaires dans leur portion
proximale
( gure 1)
. La valeur prédictive négative élevée est
intéressante en clinique dans des populations à faible préva-
lence. D’autres indications sont en cours de validation clinique
dans des populations à haute prévalence de maladie coronaire.
Le scanner est particulièrement intéressant dans les sténoses
du tronc commun, qu’il est souvent diffi cile de bien gager
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Figure 2. Coro-IRM montrant le tronc commun, l’IVA et la première
diagonale.
à la coronarographie. Il peut, dans certains cas, guider la
décision thérapeutique en complément (et non encore en
substitution) de la coronarographie : angioplastie avec stent
ou pontage. Il est potentiellement très utile dans le bilan
coronaire préopératoire des valvulopathies ainsi que dans
le bilan des cardiomyopathies chez les patients ayant peu
de facteurs de risque vasculaire.
En postopératoire ou en postinterventionnel, le scanner est
en cours d’évaluation. Les premières études dans le contrôle
à distance des pontages coronaires montrent une valeur p-
dictive négative élevée. En revanche, son utilité est discutée
dans le contrôle des stents devant une suspicion clinique ou
scintigraphique, la coronarographie étant à la fois diagnos-
tique et interventionnelle.
Dans le cadre des anomalies congénitales : anomalies d’im-
plantation, fistules, ponts intramyocardiques, le scanner
s’avère très utile.
Les limites de la technique sont :
la synchronisation obligatoire à lélectrocardiogramme
(ECG) nécessitant un rythme sinusal et une fréquence car-
diaque lente (intérêt des bêtabloquants) ;
– la résolution spatiale insuffisante ;
– la tendance à la majoration de la taille des structures très
denses comme les calcifications ;
– l’irradiation importante : de une à trois fois l’irradiation
due à une coronarographie standard ;
– cet examen nest pas recommandé chez la femme de moins
de 50 ans en raison de la radiosensibilité des glandes mam-
maires.
Malgré ces limites, le scanner est actuellement la technique
non invasive la plus performante pour explorer les artères
coronaires (J.M. Pernes, Antony).
IRM
Cette technique n’est pas irradiante et ne nécessite pas l’in-
jection dun produit de contraste iodé. Elle permet d’étudier
dans les mêmes temps la fonction ventriculaire, la perfusion
et la viabilité myocardique. Le protocole le plus utilisé est
l’acquisition en apnée en fin d’expiration. En plusieurs apnées
successives, les principaux segments coronaires sont visua-
lisés. Les arres coronaires sont sinueuses et ont un trajet
complexe à la surface du cœur. Même en acquisition 3D, seules
de petites portions de certaines coronaires sont visibles sur
chaque reconstruction
(figure 2)
. Afin d’améliorer l’analyse
du réseau coronaire, un post-traitement est indispensable
grâce à des logiciels de plus en plus perfectionnés.
Actuellement, l’IRM est moins performante que le scanner
et insuffisamment reproductible pour être proposée dans
l’imagerie des artères coronaires, mais elle peut fournir beau-
coup dautres renseignements, notamment sur l’iscmie et
la viabilité myocardique. Rappelons qu’elle reste contre-indi-
quée en cas de stimulateur intracorporel ou de défibrillateur
(J.P. Laissy, hôpital Bichat, Paris).
IMAGERIE DE LA PLAQUE DATHÉROME
La composition de la plaque dathérome est déterminante dans
le risque de survenue d’un syndrome coronaire aigu. Les plaques
vulnérables ou à haut risque sont petites, mais très riches en
lipides, avec une fi ne chape fi breuse.
Le scanner permet de tecter des plaques non visibles à la
coronarographie. On peut défi nir diff érents types de plaques
en fonction de leur morphologie et de leur densité :
– la plaque riche en lipides, non calcifi ée, est hypodense. Il
nest pas possible avec les scanners actuels de distinguer une
éventuelle ulcération ou dissection ;
– la plaque breuse est isodense, le plus souvent concentrique ;
– la plaque mixte excentrée a une composante hypodense ou
isodense et une composante calcifi ée ;
– la plaque calcifi ée a une densisupérieure à celle de la sténose
et sa taille paraît artifi ciellement augmentée ;
– l’hyperplasie intimale d’une resténose intrastent se traduit par
une hypodensité, la paroi du stent étant hyperdense.
Les mesures de diamètre, ou de surface, de sténose permettent en
théorie de quantifi er automatiquement son degré. La précision
des mesures dépend cependant de la qualité de l’acquisition,
notamment de la solution spatiale (C. Caussin, Le Plessis-
Robinson).
IRM DE LA PLAQUE
Limagerie des protons permet de différencier les tissus riches
en graisse de ceux riches en eau. Mais les protons du cœur
lipidique des plaques (riche en cholestérol) ne donnent pas
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Figure 3. IRM cardiaque : séquence de perfusion de premier
passage, hypoperfusion sous-endocardique inféro-latérale.
Figure 4. IRM cardiaque : séquence 10 minutes après injection.
Infarctus inféro-latéral visualisé sous la forme d’un rehaussement
tardif sous-endocardique.
d’hypersignal en pondération T1, contrairement à ceux de
la graisse sous-cutae (riche en triglycérides). Cest, en
fait, l’imagerie en T2 qui permet de différencier les cœurs
lipidiques des chapes fibreuses. L’eau contenue dans ces
chapes donne un signal élevé en T2, alors que l’eau moins
mobile au sein de la graisse donne un hyposignal. L’IRM
permet de visualiser les calcifications au sein des plaques
d’athéroscrose, puisquelles ne donnent pas de signal (les
calcifications sont pauvres en eau et solides). Enfin, l’IRM
permet de dépister desmorragies en phase aig, donnant
un hypersignal en T1. Limagerie T1 après injection de gado-
linium améliore la différenciation en contraste entre chape
fibreuse et cœur lipidique.
En pratique, la petite taille des plaques rend l’interprétation
difficile, d’autant quelles sont veloppées sur des arres
mobiles (battements cardiaques et mouvements respiratoires).
De ce fait, l’acquisition doit être synchronisée au rythme
cardiaque et la plus courte possible pendant la diastole afin
de minimiser le déplacement des artères. La synchronisation
respiratoire doit également être réalisée. Les acquisitions
sont donc courtes et la résolution spatiale est insuffisante
pour permettre une utilisation en routine clinique (G. Helft,
Paris).
IMAGERIE DE L’ISCHÉMIE MYOCARDIQUE
Actuellement, la scintigraphie myocardique de perfusion au
thallium ou au sestamibi constitue la méthode de référence
pour l’exploration de la perfusion myocardique.
LIRM apparaît comme une technique alternative sans l’in-
convénient de l’irradiation et sans injection de produit néphro-
toxique. Après l’injection du traceur (chélate de gadolinium)
en bolus, l’étude de la perfusion au cours du premier passage
constitue la première étape, complétée par la séquence de per-
fusion tardive (ou rehaussement tardif)
[figures 3 et 4]
.
Des images morphologiques sont obtenues à partir de séquences
en écho de spin rapide (séquences en “sang noir”).
Des images fonctionnelles en ciné-IRM sont obtenues pour
la fonction ventriculaire gauche globale et segmentaire, la
mesure des épaisseurs et des volumes. Les acquisitions peu-
vent être complétées par des images dynamiques avec des
grilles (tatouage ou tagging) qui permettent de quantifier la
fonction contractile segmentaire.
Après la perfusion au cours du premier passage est étudiée
la perfusion 10 à 20 minutes après linjection de gadolinium
(rehaussement tardif).
Enfin, des quences d’angio-IRM coronaire peuvent com-
pléter le bilan.
Sur les séquences de perfusion de premier passage, les zones
d’hypoperfusion donnent un hyposignal. Une dizaine de
minutes après l’injection, la zone infarcie non viable donne un
hypersignal (rehaussement tardif). L’IRM permet de définir
l’extension transmurale de l’infarctus et de reconnaître les
petits infarctus sous-endocardiques.
L’hypersignal tardif ne permet pas de distinguer infarctus
récent et ancien. Un remodelage ventriculaire avec amin-
cissement focal et dilatation segmentaire est en faveur d’un
infarctus ancien.
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La technique de rehaussement tardif aide à prédire la récupé-
ration fonctionnelle après revascularisation. Un hypersignal
inrieur à 25 % de lépaisseur de la paroi est en faveur d’une
récupération, tandis qu’un hypersignal supérieur à 75 % tra-
duit un segment non viable. Entre 25 et 75 %, la cupération
fonctionnelle est proportionnelle à l’extension transmurale de
l’infarctus. LIRM de stress ou dobutamine est intéressante
pour étudier la viabilité dans ces cas intermédiaires (J. Garot,
Créteil).
Le scanner permet aussi d’étudier l’ischémie myocardique.
La sémiologie radiologique est proche de celle décrite en
IRM, mais la résolution en contraste du scanner est infé-
rieure à celle de l’IRM. L’infarctus du myocarde apparaît sur
le premier passage comme une zone de densité diminuée
par rapport au myocarde adjacent. Lhypodensi peut être
sous-endocardique ou transmurale. Les travaux sont en cours
pour étudier la viabilité myocardique en scanner (J.F. Paul,
Le Plessis-Robinson).
En conclusion, l’imagerie du cœur et des vaisseaux par scanner
et IRM fait des progrès très importants et continue d’évoluer.
Tout cardiologue se doit de suivre ces progrès pour utiliser au
mieux ces techniques non invasives.
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