Différences liées au sexe de l’ajustement prémorbide

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L
Psychopathologie et sexe
E. Bacon
Inserm, Strasbourg
Différences liées au sexe de
l’ajustement prémorbide
de patients lors du premier
épisode psychotique
Fremantle (Australie)
L
es modèles explicatifs des troubles
psychiatriques prennent de plus en
plus en considération les différences
liées au sexe en ce qui concerne l’ajustement prémorbide, la forme clinique
et le décours longitudinal des psychopathologies. Cela est particulièrement
valable pour la schizophrénie. Il semblerait que les hommes soient plus
sujets à une forme d’installation précoce, du type dementia praecox. Des
chercheurs australiens ont cherché à
identifier les variations liées au sexe et
les interactions entre sexe et type de
diagnostic dans trois tranches d’âges :
l’enfance, le début et la fin de l’adolescence. Ils ont également étudié la
relation entre l’ajustement prémorbide,
le sexe et la psychopathologie évaluée
à l’aide de la PANSS et du SCL-90
(Symptom Checklist-90) (Preston N,
Orr K, Date R et al. Gender differences in premorbid adjustment of
patients with first episode psychosis.
Schizophrenia Research 2002 ; 55 :
285-90). Ils ont vérifié toutes ces
caractéristiques pour 58 patients
(38 hommes et 20 femmes). Les
patients de sexe masculin présentaient
un ajustement prémorbide plus mauvais que ceux de sexe féminin à la fin
de l’adolescence, en particulier pour
les items examinant les performances
scolaires, l’adaptation à l’école, les
intérêts sociaux et le développement
socio-sexuel. Les patients masculins
présentaient, par ailleurs, des taux plus
élevés de symptômes négatifs. Les
symptômes positifs (selon la PANSS)
ne différaient pas selon le sexe. On
n’observait pas de différence non plus
dans les indices globaux de psychopathologie de la SCL-90 obtenus à partir
des déclarations des sujets. Ces ajustements prémorbides moins bons, observés chez les patients de sexe masculin,
pourraient contribuer aux taux élevés
de symptômes négatifs observés chez
ces derniers.
Mots clés. Psychopathologie – Sexe –
Premier épisode psychotique.
Caractéristiques régionales
de l’activité cérébrale (EEG)
chez des adultes ayant une
histoire de dépression d’installation juvénile : différences liées
au sexe et variabilité clinique
Pittsburgh (États-Unis)
U
n certain nombre de mesures d’électroencéphalographie quantitative
ont cherché à relier l’émotion, le tempérament et la dépression à des différences individuelles reposant sur une
asymétrie des ondes alpha. Une hypothèse a été avancée, selon laquelle les
scores d’asymétrie reflétant des activités cérébrales plus intenses dans les
zones frontales droites et plus faibles
dans les zones frontales gauches pourraient être le signe d’une vulnérabilité
particulière à l’humeur négative et aux
troubles dépressifs. Le programme de
recherches sur les facteurs de risques
pour la dépression du Dr Miller et de
ses collaborateurs a testé cette hypothèse auprès d’un groupe de jeunes adultes
souffrant de troubles de l’humeur ayant
débuté dans l’enfance (Miller A, Fox N,
Cohn J et al. Regional patterns of brain
activity in adults with a history of childhood onset depression: gender differences and clinical variability. Am J
Psychiatry 2002 ; 159 : 934-40). Des
Act. Méd. Int. - Psychiatrie (20), n° 1, janvier-février 2003
es femmes viennent de Vénus,
les hommes de Mars, prétend un
livre à succès. Existe-t-il aussi des différences selon le sexe pour les risques
de psychopathologies, et peut-on
désigner des troubles psychiatriques
plus spécifiques à un sexe qu’à
l’autre ? La littérature sur le sujet
semble unanime pour répondre oui à
ces deux questions, comme le confirment
nombre de publications récentes.
mesures EEG de suppression de l’asymétrie des fréquences alpha ont été
analysées chez 55 jeunes adultes
(27 hommes et 28 femmes), de 26 ans
d’âge moyen, présentant une histoire
clinique de dépression d’installation
juvénile et comparés à des sujets
contrôle. Les caractéristiques des EEG
ont été examinées en relation avec les
diagnostics opérationnels de troubles
mentaux de l’enfance et de l’âge adulte.
Les résultats révèlent que les différences dans l’asymétrie des EEG relevées entre les patients et les sujets de
comparaison varient avec le sexe, l’histoire du diagnostic et les symptômes
actuels. Les femmes avec une histoire
de dépression infantile présentaient une
suppression alpha plus grande au
niveau frontal médian droit que celle
des sujets du groupe contrôle. Les
hommes avec une histoire de dépression infantile présentaient, quant à eux,
une suppression des ondes alpha plus
élevée au niveau frontal médian
gauche. Par ailleurs, les femmes présentaient une puissance alpha inférieure
aux hommes, quel que soit l’endroit
examiné. Les patients présentant un
décours bipolaire de la dépression présentaient l’asymétrie frontale médiane
la plus intense. Enfin, cette asymétrie
était plus marquée chez les patients qui
présentaient des symptômes dépressifs
au moment de l’examen que chez ceux
qui n’en présentaient pas à la période
de test. L’activité cérébrale régionale est
donc influencée par le sexe et l’évolution du trouble de l’humeur.
Mots clés. Activité cérébrale – EEG –
Sexe – Dépression.
5
Revue de presse
Revue de presse
Incidence liée au sexe
et à l’âge de survenue
de la première apparition
d’un trouble psychiatrique
Utrecht (Pays-Bas)
L
es études prospectives constituent
un outil précieux pour l’obtention
de données fiables concernant l’incidence des troubles mentaux en population générale et pour identifier les facteurs de risque. Parce que les taux
d’incidence sont en général très
faibles, des échantillons importants de
population sont nécessaires, ce qui
explique sans doute la rareté des
études prospectives à grande échelle
qui établissent l’incidence de psychopathologie dans la population générale.
Un groupe de chercheurs hollandais a
étudié, sur une période de 12 mois, les
taux de première incidence dans la
population générale de quinze troubles
psychiatriques (selon le DSM III). Ils
se sont tout particulièrement intéressés
aux effets de l’âge et du sexe (Bijl R,
de Graaf R, Ravelli A et al. Gender
and age-specific first incidence of
DSM-III-R psychiatric disorders in the
general population. Results from the
Netherlands mental health survey and
incidence study (NEMESIS). Soc
Psychiatry Epidemiol 2002 ; 37 : 372-9).
Les troubles psychiatriques à l’étude
incluaient la schizophrénie, des
troubles de l’humeur, des troubles
anxieux, des toxicomanies et des
troubles des conduites alimentaires.
L’étude était fondée sur un échantillon
représentatif de la population hollandaise. Les 5 618 personnes suivies
étaient âgées de 18 à 64 ans. Le taux
de première incidence pour n’importe
lequel des troubles psychiatriques
considérés était de 5,68 pour 100 personnes et par an. Ce taux passait à 4,45
pour les hommes et 6,94 pour les
femmes. Tant chez les hommes que
chez les femmes, les taux les plus élevés se situaient dans la catégorie d’âge
18-24 ans. Chez les hommes, l’inci-
dence déclinait avec l’âge, cependant
que chez les femmes, on pouvait
constater une baisse aux âges moyens
suivie d’une reprise de l’incidence
dans la catégorie des 55-64 ans. Par
ailleurs, les femmes avaient plus de
risque de présenter des troubles de
l’humeur et des troubles anxieux,
cependant que chez les hommes, on
observait un risque plus élevé de toxicomanies. Le trouble dont l’incidence
était de loin la plus fréquente chez les
hommes était l’abus d’alcool, avec un
taux de 4,09, suivi de loin par la
dépression grave (1,72), puis la phobie
simple et la dépendance alcoolique.
Chez les femmes, les troubles les plus
fréquents étaient la dépression grave
(3,9) et la phobie simple (3,17), suivies à distance par les troubles
paniques, l’agoraphobie et la phobie
sociale. Ces observations montrent la
rareté des premiers épisodes de
troubles mentaux. Par ailleurs, elles
révèlent que l’incidence des divers
types de pathologies mentales varie
considérablement en fonction du sexe
et des différentes étapes de la vie.
Elles devraient permettre de mettre au
point des actions de prévention plus
ciblées selon l’âge et le sexe.
Mots clés. Étude de population –
Troubles mentaux – Incidence – Sexe.
Relations entre sexe,
psychopathologie,
et facteurs de risque chez
des jeunes délinquants
San Diego (États-Unis)
L
es femmes constituent une minorité
parmi les jeunes délinquants étant
passés en justice, mais leur nombre
tend à augmenter. Par exemple, aux
États-Unis, les arrestations pour agressions violentes ont proportionnellement plus augmenté chez les filles,
avec un taux de 85 % plus élevé en
1997 qu’en 1987. Malgré cela, les
recherches ont continué à se focaliser
principalement sur les délinquants de
sexe masculin. Une équipe californienne a entrepris de tester l’hypothèse selon laquelle les jeunes filles
délinquantes auraient des taux plus
élevés de symptômes psychiatriques
(selon le DSM IV), de toxicomanies,
de perturbations de fonctionnement et
de facteurs de risque familiaux que les
délinquants masculins (McCabe C,
Lansing A, Garland A et al. Gender differences in psychopathology, functional impairment, and familiar risk factors among adjudicated delinquents. J
Am Acad Child Adolesc Psychiatry
2002 ; 41 : 860-7). Un échantillon de
725 adolescents délinquants étant passés en justice a été obtenu à partir des
bases de données administratives du
comté de San Diego. Il se composait
de 513 garçons et de 112 filles, avec
un âge moyen de 16 ans. Les symptômes psychologiques, les diagnostics
et les risques familiaux ont été établis
entre octobre 1997 et janvier 1999.
Certaines données ont été obtenues
auprès des parents et 66 % des jeunes
sujets ont participé à des entretiens.
Les jeunes filles délinquantes avaient
des scores plus élevés sur les échelles
remplies par les parents, mais aussi sur
celles obtenues à partir de leurs
propres déclarations, pour les symptômes psychologiques. Elles présentaient également des taux plus élevés
de troubles mentaux que les garçons.
En outre, elles avaient plus fréquemment subi des violences physiques,
émotionnelles et sexuelles, et présentaient des taux plus élevés pour la
négligence physique, et pour une histoire familiale de maladie mentale.
Les évaluations faites par les parents
des perturbations de fonctionnement
des jeunes, de leur toxicomanie, de
comorbidité ou d’histoire parentale de
comportement antisocial ne différaient
pas en fonction du sexe des jeunes
délinquants. Les jeunes filles, lorsqu’elles ont été en contact avec la justice pour des actes de délinquance,
présentent donc des taux significativement plus élevés de psychopathologie,
6
Revue de presse
Revue de presse
de passé de maltraitance, et de facteurs
de risque familiaux. La santé mentale
des jeunes filles délinquantes devrait
donc faire l’objet d’attentions particulières.
Mots clés. Délinquance juvénile – Sexe –
Psychopathologies – Adolescence.
Vit-on de la même manière
avec une schizophrénie
selon qu’on est femme
ou homme ? Une étude
européenne
Londres (Grande-Bretagne), Vérone (Italie),
Santander (Espagne) et Amsterdam (Pays-Bas)
D
u fait de l’incidence élevée de cette
pathologie, la qualité de la vie des
patients schizophrènes et de leurs
proches doit être une préoccupation de
premier ordre. Le projet EPSILON
(European Psychiatric Services :
Inputs Linked to Outcomes and Needs)
est une étude à l’échelle européenne
des caractéristiques cliniques et
sociales, des besoins, de la satisfaction
vis-à-vis des soins, de la qualité de la
vie, de l’utilisation des services et des
coûts pour les patients schizophrènes.
EPSILON a été menée dans cinq sites
européens et s’est attachée à tester cinq
hypothèses :
1) les hommes doivent avoir globalement plus de besoins et présenter plus
de besoins non satisfaits que les
femmes pour le logement, la toxicomanie, les symptômes psychotiques,
les préjudices à autrui et l’expression
sexuelle. Les femmes doivent avoir
plus de besoins et de besoins insatisfaits dans les domaines du soin à
apporter aux enfants et des préjudices
infligés à soi-même ;
2) les personnes ayant en charge des
patients mâles vont présenter une
détresse psychologique plus intense et
des scores plus élevés de situations
d’urgence ;
3) les patients des deux sexes vont pré-
senter des niveaux équivalents de
satisfaction vis-à-vis des services ;
4) les patients de sexe masculin vont
présenter une qualité de vie objective
moins bonne, mais le ressenti subjectif de la qualité de la vie sera similaire
pour les deux sexes ;
5) l’utilisation des services va varier
en fonction du sexe.
Les 404 patients inclus dans cette
étude étaient âgés de 18 à 65 ans, avec
43 % d’hommes. Les résultats ont
confirmé l’hypothèse 3 et en partie
l’hypothèse 1. Les hypothèses 2, 4, et
5 n’ont pas trouvé de confirmation
expérimentale. En effet, femmes et
hommes présentent un score équivalent des qualités de vie objective et
subjective. Le fait de s’occuper d’un
patient homme ou femme ne constituait pas une charge différente, quel
que soit le sexe de la personne qui
veillait sur le (la) patient(e). Les différences dans l’utilisation des services
de soin n’étaient pas liées au sexe. Les
résultats de cette modélisation ont permis, de surcroît, de générer deux
hypothèses supplémentaires : les traitements qui réduisent la sévérité des
symptômes sont également susceptibles d’améliorer la qualité de vie des
moments de “loisir” et de réduire les
préjudices portés à soi-même chez les
hommes comme chez les femmes. Un
type d’intervention qui facilite les
activités de loisirs est susceptible
d’améliorer la qualité de vie familiale
et professionnelle (et vice versa) pour
les deux sexes, et est également susceptible d’avoir un effet spécifique,
d’une part, sur les patients du sexe
masculin et, d’autre part, sur les
patients, en diminuant les préjudices
portés aux autres et les préjudices infligés à soi-même (Thornicroft G, Leese
M, Tansella M et al. Gender differences in living with schizophrenia. A
cross-sectional european multi-site
study. Schizophrenia Research 2002 ;
57 : 191-200).
Mots clés. Qualité
Schizophrénie – Sexe.
Act. Méd. Int. - Psychiatrie (20), n° 1, janvier-février 2003
de
vie
–
Comportement suicidaire
des jeunes selon le sexe
Christchurch (Nouvelle-Zélande)
D
ans les pays occidentaux, les
jeunes filles sont deux fois plus
que les jeunes gens susceptibles de
rapporter des idées de suicide et
d’avoir des comportements de tentative
de suicide. Toutefois, si les jeunes
filles font plus de tentatives de suicide,
les jeunes gens ont trois à quatre fois
plus de chances de mourir suite à un
suicide. Le Dr Beautrais a passé en
revue les données épidémiologiques
concernant les différences liées au
sexe en ce qui concerne les idées suicidaires, les tentatives de suicide et les
suicides accomplis (Beautrais AL.
Gender issues in youth suicidal behaviour. Emergency Medicine 2002 ;
14 : 35-42). Elle a exploré également
les raisons susceptibles d’expliquer les
différences observées entre garçons et
filles. Parmi ces raisons, on relève tout
particulièrement la différence dans les
méthodes employées, l’intention, la
détermination, les psychopathologies
(toxicomanie, troubles de l’humeur,
comportements d’externalisation et
propension à la violence) et, enfin, les
différences psychosociales entre garçons et filles (dont, notamment,
l’acceptabilité sociale du suicide).
Ainsi, l’opinion souvent évoquée
selon laquelle la différence du taux de
suicide en fonction du sexe serait due
uniquement ou majoritairement au
choix de la méthode employée ne
résiste pas à un examen approfondi qui
révèle une situation plus complexe. En
fait, dans bon nombre de domaines, les
jeunes filles pourraient bénéficier de
plus de facteurs de protection contre le
suicide que les jeunes gens.
Mots clés. Suicide – Adolescence –
Sexe.
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