La Lettre du Cardiologue - n° 295 - mai 1998
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ÉCHOCARDIOGRAPHIE
Un rôle diagnostique, pronostique et thérapeutique en cas de FA
La cardioversion des fibrillations atriales est associée à un risque
embolique d’environ 2 %. La cardioversion guidée par ETO est
une alternative à l’anticoagulation conventionnelle pour mini-
miser les accidents emboliques et simplifier le protocole. Le
registre ACUTE permet d’étudier 417 patients (dimension OG :
50 mm, fraction d’éjection : 44 %) ayant eu une ETO avant car-
dioversion pour FA (durée moyenne : 179 jours) et suivis un
mois ; 86 % sont anticoagulés (en moyenne 5 jours avant choc).
Des thrombus de l’OG sont détectés dans 7 % des cas, amenant
à annuler la cardioversion, qui est réalisée avec succès dans 364
cas sans aucune complication embolique. Ainsi, la cardioversion
guidée par ETO est une méthode alternative à l’anticoagulation
classique efficace et sûre (Grimm, Cleveland).
Le même registre (Thamilarasan) permet d’étudier 330 patients
avant cardioversion pour FA. Dans 22 cas, la procédure a dû être
annulée en raison de la présence de thrombus intra-auriculaires,
gauches dans 21 cas (3 dans l’OG, 16 dans l’auricule et 2 dans
l’oreillette et l’auricule gauches) et droit dans un cas. Les carac-
téristiques de ces patients, tous anticoagulés au moment de l’ETO,
sont rapportées : âge moyen 63 ans, fibrillation auriculaire datant
de 5 à 1 500 jours (5 % < une semaine), fraction d’éjection
moyenne 34 %, OG moyenne 48 mm, contraste spontané en ETO
dans tous les cas. Il faut souligner le taux faible de thrombus
(7 %) présents surtout en cas de dilatation de l’OG avec contraste
spontané et dysfonction ventriculaire.
L’ETO peut mieux préciser le pronostic en cas de FA, dont on
sait qu’elle augmente le risque de décès cardiovasculaire. Dawn
a étudié par ETO 177 patients avec FA non valvulaire (92 %) sui-
vis pendant 20 mois (infarctus du myocarde, AVC, mort subite).
Un contraste spontané de l’OG est noté dans 48 % des cas et un
thrombus de l’OG dans 14 % des cas ; 13 décès cardiovasculaires
sont notés lors du suivi. Parmi les variables cliniques, seule l’in-
suffisance cardiaque (27 % des cas) est un facteur prédictif posi-
tif indépendant du décès (RR = 3,3, p = 0,04). En ETO, les autres
facteurs prédictifs sont les suivants : thrombus OG (RR = 5,4,
p = 0,02), contraste spontané (RR = 7,8, p = 0,01). Mais le trai-
tement par AVK protège de ces accidents (RR = 0,18, p = 0,02).
En analyse multivariée (clinique + ETO), l’insuffisance car-
diaque, la fraction d’éjection ou les plaques aortiques ne sont pas
prédictives de ces événements. En cas de FA, les événements car-
diovasculaires sont donc mieux prédits par les résultats de l’ETO
que par les variables cliniques ou la fraction d’éjection.
ÉCHOGRAPHIE DOBUTAMINE
Simplifiez en toute fiabilité
Elhendy (Rotterdam) montre sur 290 patients que l’apparition ou
l’aggravation de troubles de la cinétique dans ≥2 segments myo-
cardiques sous dobutamine n’améliore pas la fiabilité du test chez
les patients sans infarctus et diminue sa sensibilité en cas d’in-
farctus préalable ; il est donc plus simple et aussi fiable de ne
prendre en compte qu’un seul segment myocardique.
Pour raccourcir la durée du test, une perfusion d’emblée de dobu-
tamine à 40 gamma/kg/min pendant 10 min pour atteindre 85 %
de la FMT est proposée par Little (Washington) chez 47 patients.
Le test dure en moyenne 11 ± 3 min, 86 % des patients atteignent
la FMT (44 % en cas de traitement bêtabloquant), sans effet
secondaire sérieux. Ce test accéléré est donc faisable, peu dan-
gereux, et permet d’atteindre plus vite la fréquence cardiaque
maximale.
Owen (Philadelphie) propose des critères prédictifs de non-
atteinte du seuil de 85 % de la FMT : âge < 50 ans, fréquence
cardiaque de repos < 60 cpm, fréquence cardiaque < 60 % FMT
sous 20 gamma/kg/min. Dans ces cas, il est préférable d’admi-
nistrer l’atropine précocement (0,25 mg au début du palier III,
0,25 mg au palier IV, puis à 13 et 14 min si besoin). Lorsque l’on
compare 29 patients traités de cette manière et 25 patients ayant
un test classique (1 mg en une fois à 40 gamma/kg/min), on
constate que le test est raccourci de 20 % par rapport à un test
classique et que le retour à la fréquence cardiaque de base est plus
rapide.
Le confort du chirurgien vasculaire... pas seulement
Marwick (Cleveland) rapporte 237 patients ayant eu une écho-
graphie dobutamine avant chirurgie vasculaire et suivis 28 mois.
Une ischémie est identifiée chez 16 % de ces patients, 16 % pré-
sentent un infarctus ancien. Tous les patients ayant un test posi-
tif préopératoire sont pris en charge de manière appropriée pour
éviter le risque opératoire ; ainsi, 4 % (10 cas) ont eu une com-
plication opératoire mais aucun n’avait un test positif. Par contre,
des événements tardifs postopératoires sont survenus chez
30 patients ayant eu un test positif. La présence d’une ischémie
sous dobutamine est donc aussi prédictive des événements tar-
difs que des événements periopératoires, notamment chez les
patients à faible risque opératoire.
Stress et dysfonction VG
L’intérêt de l’échographie de stress en cas de dysfonction ven-
triculaire gauche reste discuté. Chez 259 patients à FE < 40 %
suivis en moyenne 2,8 ans, le nombre de segments de cinétique
anormale à l’acmé de l’effort, qui reflète à la fois l’étendue des
zones infarcies et ischémiques, est un indice pronostique péjora-
tif indépendant (p < 0,001). Lorsque plus de 5/16 segments sont
anormaux, le risque d’événements cardiovasculaires double
(Juracan, Mayo Clinic).
L’existence d’une réponse biphasique lors de l’échographie
dobutamine + atropine est très péjorative (Smart, Milwaukee) :
sur 228 patients avec FE < 40 % et suivis 18 mois, l’améliora-
tion suivie d’une aggravation de cinétique segmentaire (56 cas)
s’accompagne d’une incidence d’événements cardiovasculaires
de 56 % contre 5 % en cas d’amélioration soutenue dans tous les
segments (57 cas), 11 % en cas de cicatrice d’infarctus (66 cas),
et 29 % en cas d’ischémie (p < 0,01). En analyse multivariée,
cette réponse est la seule prédictive de décès. Cependant, l’écho-
graphie dobutamine a une sensibilité limitée pour la détection
d’une coronaropathie chez ces patients (76 %), surtout en cas de
lésion monotronculaire, d’atteinte de la circonflexe ou de la coro-
naire droite (Von Sohsten, Philadelphie).
L’échographie dobutamine à faibles doses peut prédire l’amé-
lioration de la capacité fonctionnelle après réentraînement phy-
sique dans l’insuffisance cardiaque chronique.
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