◆ TECHNIQUE CHIRURGICALE Progrès en Urologie (1999), 9, 1136-1147 Technique de Duplay modifiée dans le traitement de l’hypospadias antérieur. Résultats immédiats et à long terme à propos de 321 cas et revue de la littérature Jean-Luc MEGE, Gloria PELIZZO, Rémi DUBOIS, Josette ARCACHE, Patrick CARLIOZ, Hubert DODAT Unité d’Urologie Pédiatrique, Service de Chirurgie Pédiatrique, Hôpital Edouard Herriot, Lyon, France RESUME Buts : Description d’une technique chirurgicale dans le traitement des hypospadias antérieurs, malformation fréquente dont le traitement n’est pas dénué de complications. Evaluation des résultats à court, mais aussi à long terme. Matériel et Méthodes : Il s’agit d’une étude rétrospective portant sur 321 patients traités selon cette méthode. Cinquante-huit patients ont pu être revus avec un recul moyen de 71 mois. Résultats : Les résultats immédiats sont marqués par la survenue de 16 fistules, soit 5%, dont 4 se sont fermées spontanément. Il a été observé 5 reculs du méat, soit 1,6%, 6 sténoses du méat, soit 1,9%. Le taux global de complications ayant nécessité un traitement spécifique est de 5,6%. Les résultats à long terme montrent un recul dans 20,7% des cas, une sténose urétrale dans 1,7%, une fistule dans 3,5%. Il s’agit de la série présentant le recul moyen le plus important. La comparaison avec les techniques proposées actuellement permet d’envisager ce procédé dans le traitement des hypospadias distaux. L’analyse des résultats à long terme encourage vivement un suivi régulier et prolongé d’enfants traités d’hypospadias dans les 2 premières années. Conclusion : La technique de Duplay modifiée est fiable, facilement réalisable, qui donne des résultats tout à fait corrects, même à long terme, dans le traitement des hypospadias distaux. Mots clés : Hypospadias antérieur, uréthroplastie, uréthroplastie de Duplay et redressement de verge. L’hypospadias, dans sa forme antérieure, est une des malformations fréquentes du garçon : le méat est situé dans le tiers distal de la verge. On distingue 3 formes différentes : • L’hypospadias balanique ou glandulaire, le méat étant situé à la face inférieure du gland. • L’hypospadias balano-préputial, le méat se trouvant dans le sillon balano-préputial. • L’hypospadias pénien antérieur, le méat étant positionné entre le sillon et le tiers moyen de la verge. préhension de la courbure de la verge, de la possibilité d’un test d’érection per-opératoire et de l’amélioration des techniques de sutures fines. Actuellement, la plupart des auteurs considère qu’un traitement chirurgical de l’affection doit permettre une cure en un temps opératoire, réalisée entre 1 et 2 ans, permettant d’obtenir un gland d’aspect normal, une verge droite en érection, une miction avec un jet franc, un méat situé au sommet du gland, un prépuce enlevé ou reconstruit et un taux très faible de complications. Il s’accompagne d’anomalies associées à ne pas négliger. Les méthodes thérapeutiques ont beaucoup évolué ces 20 dernières années du fait d’une meilleure com- Manuscrit reçu : novembre 1998, accepté : septembre 1999. 1136 Adresse pour correspondance : Pr. H. Dodat, Unité d’Urologie Pédiatrique, Pavillon Tbis, Hôpital Edouard Herriot, Place d’Arsonval, 69437 Lyon Cedex 03. J.L. Mège et coll., Progrès en Urologie (1999), 9, 1136-1147 Depuis 1986, est réalisée dans le service de chirurgie pédiatrique de l’Hôpital Edouard-Herriot, de façon très courante, dans les formes d’hypospadias antérieur, une uréthroplastie s’inspirant de la technique de Duplay mais modifiée de façon à traiter toutes les lésions associées rencontrées dans cette variété particulière. Le but de cet exposé est de présenter la technique, ses résultats à long terme et d’évaluer sa place parmi l’ensemble des procédés chirurgicaux décrits dans la littérature. MATERIEL ET METHODES Matériel Entre janvier 1986 et mars 1996, 321 patients ont été traités selon cette méthode. Les hypospadias se répartissaient en 32% juxta-méatiques, 5% balaniques, 53% balano-préputiaux et 10% péniens antérieurs. Du fait des bons résul tats initiaux, au cours de la dernière année, cette intervention a été proposée dans 8 cas d’échecs de cure d’hypospadias. lisée grâce à une anesthésie loco-régionale caudale, complétée par une légère sédation générale. On débute par une méatostomie d’aval avec éversion de la muqueuse urétrale par 5 points de P.D.S. 7/0. Les points sont pris suffisamment profondément pour bien amarrer l’urètre. Puis, un cathétérisme urétral par une sonde d’un calibre, en général de 8 CH pour un enfant de 18 mois, est réalisé et l’urètre est lavé de façon abondante à la Bétadine® diluée (Bétadine gynécologique® 10 cc diluée dans 100 cc de sérum physiologique). Secondairement, la sonde est fixée au gland par un fil résorbable de 5/0. Actuellement, l’urètre n’est lavé qu’avec du sérum physiologique en raison du risque de brûlure par la Bétadine®. La plaque urétrale est délimitée puis incisée au bistouri microchirurgical en commençant 2 à 3 mm en amont du méat hypospade et en remontant de part et d’autre dans le gland jusqu'à son sommet (Fi gure 1). Secondairement, l’incision est poursuivie sur les 2 rebords préputiaux, rabattus vers la face ventrale de la Les enfants se répartissaient de la manière suivante : 12% de moins d’1 an, 15% entre 1 an et 18 mois, 34% entre 18 mois et 2 ans et 39% d’enfants âgés de plus de 2 ans. Les extrêmes vont de 8 mois à 17 ans et 9 mois. Tous ces enfants ont été revus au deuxième mois postopératoire et, si possible, 1 ou 2 ans plus tard. Cinquante-huit ont pu être revus entre 5 et 9 ans après l’intervention. Nous avons souhaité vérifier par nous-mêmes si les bons résultats constatés dans la première année se vérifiaient à plus long terme. C’est la raison pour laquelle tous les cas opérés jusqu’en janvier 1992 ont été revus. Notre série initiale comportait 73 patients opérés entre le 7 janvier 1986 et le 21 janvier 1992. Nous sommes parvenus à revoir en consultation 58 patients, ce qui représente 15 perdus de vue (20,6%). La moyenne d’âge au moment de l’intervention était de 34 mois avec des extrêmes allant de 14 mois à 10 ans et 9 mois. La répartition s’effectuait de la manière suivante : 8,6% d’enfants âgés de 1 an à 18 mois, 27,6% d’enfants âgés de 18 mois à 2 ans et 63,8% d’enfants de plus de 2 ans. La répartition en fonction du type d’hypospadias montre 10% de forme juxta-méatique, 2% balaniques, 85% de balano-préputiaux et 3% de péniens antérieurs. Méthodes La technique de Duplay modifiée Elle s’inspire du principe de l’uréthroplastie de Duplay [18] mais a été modifiée en incluant tous les gestes de traitement des lésions associées. L’intervention est réa- Figure 1. A. Tracé de l’incision au pourtour de la plaque uré trale (14 mm de large minimum) remontant sur les bords libres du prépuce à l’endroit où ceux-ci peuvent venir facilement au contact l’un de l’autre. B. Intervention avec circoncision : reconstitution d’une colle rette muqueuse circulaire et allongement des plans cutanés ventraux. C. Même intervention avec conservation et tubulisation prépu tiale. 1137 J.L. Mège et coll., Progrès en Urologie (1999), 9, 1136-1147 verge afin de constituer 2 lambeaux muco-préputiaux qui seront ramenés plus tard à la face inférieure du pénis. Il faut, bien entendu, prendre soin au maximum à la vascularisation des lambeaux muqueux et, pour cela, réaliser la dissection en restant le plus proche possible du versant cutané. La dissection, en amont du méat, doit être très prudente car la peau recouvrant l’urètre est très fine et l’on doit au maximum éviter toute blessure urétrale, source de fistule. Ce temps est toujours réalisé sous garrot, ce qui facilite le geste. Cette ischémie temporaire n’excède pas les 45 minutes et n’a pas de conséquence fonctionnelle. La gouttière péri-urétrale délimitée pendant ce temps opératoire doit avoir une largeur de 14 à 15 mm afin de ne pas risquer une sténose du nouvel urètre glandulaire. Ensuite, 2 lambeaux de tissus spongieux latéraux sont confectionnés dans le gland et seront suturés sans tension par devant l’urètre glandulaire. Ce temps doit veiller à ne pas ouvrir en profondeur l’albuginée des corps caverneux, source d’un saignement complémentaire. Par ailleurs, le spongieux est très fin au niveau du sillon balano-préputial et il faut être prudent de façon à ne pas transfixier le gland à ce niveau. L’incision en profondeur sera arrêtée dès que les lambeaux seront suffisamment libérés pour être suturés sur la ligne médiane, sans tension. L’urètre glandulaire est très superficiel et il faut respecter cette position. Ensuite, on pratique une tubulisation de la plaque urétrale par des points séparés invaginant de P.D.S. 7/0 en commençant en amont du méat et en remontant jusqu’au sommet du gland. Le gland est reconstitué en réalisant un premier point amarrant le nouvel urètre à la muqueuse glandulaire par du P.D.S. 6/0. Les autres sutures consistent en des points de Blair-Donati affrontant parfaitement, pour des raisons esthétiques et d’hémostase, les 2 berges du gland. Le temps ultérieur consiste à recouvrir l’urètre distal par rapprochement sur la ligne médiane des plans précaverneux, résidus des tissus spongieux bifurqués, par un surjet hémostatique. Cette suture démarre dans le tissu spongieux du gland et permet ainsi une hémostase très satisfaisante. Le garrot est lâché et l’on confectionne une collerette On réalise ensuite un test d’érection artificielle et, si nécessaire, une intervention de type Nesbit complémentaire est pratiquée. L’excès de tissu préputial est réséqué. L’intervention est terminée par la reconstitution du fourreau cutané par du P.D.S. 6/0. Dans certains cas, il suffit de suturer le fourreau à la collerette muqueuse. Parfois, le fourreau doit être allongé par une suture verticale sur 2 ou 3 centimètres. Lorsque la tension est excessive, on propose soit la réalisation d’un lambeau de Byars, soit une transposition pédiculée préputiale, ce qui permet dans le même temps de désenliser la verge. La stratégie est décidée en fonction des conditions locales. Un pansement hémostatique, hydrocolloïde, est mis en place. La sonde urinaire est fixée à l’abdomen par un film transparent autocollant et sera enlevée au bout de 2 jours. La durée de ce geste est de 90 minutes en moyenne et il s’effectue à l’aide de lunettes grossissantes (x 4). (Figures 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10, 11). L’enfant part avec son pansement qui se décolle spontanément au bout de quelques jours. Les gestes associés On libère le fourreau cutané jusqu'à la racine de la verge sur la face ventrale pour supprimer les adhérences responsables de la courbure entre l’urètre distal pellucide dépourvu de tissus spongieux et le plan cutané. Ce temps s’effectue à l’aide d’une pince hémostatique bipolaire. L’incision cutanée recule alors le plus souvent de plusieurs centimètres, témoin de la correction de la courbure. Cette dissection, débutée sur la face ventrale, sera poursuivie en arrière, permettant de retrouver le bon plan en avant et de terminer la libération des corps caverneux dont l’albuginée bleutée est très facilement reconnaissable. muqueuse circulaire par 2 lambeaux préputiaux pour pallier le manque de peau ventrale et améliorer le résultat esthétique final. Des gestes associés à la technique ont été réalisés : • Des courbures de verge persistantes, après un test d’érection artificielle réalisé après la libération complète des adhérences urétro-cutanées ventrales, ont été rares ; elles n’ont intéressé que 3 patients. • Nous avons dû procéder à 3 désenlisements. • Une conservation préputiale, à la demande des familles, a été réalisée dans 25 cas, soit 7,8%. RESULTATS Résultats immédiats Nous avons observé 16 fistules sur 321 cas, soit 5%, dont 4 se sont fermées spontanément. Il faut noter que 2 fistules urétrales sont survenues chez 2 patients dont la cure d’hypospadias était itérative. En somme, si l’on exclut les fistules qui se sont taries spontanément, ce qui n’a occasionné qu’une gêne temporaire, seules 12 fistules ont ou vont nécessiter une reprise chirurgicale, ce qui donne un résultat de 3,7% sur l’ensemble des hypospadias traités. Il s’est produit 5 reculs du méat, soit 1,6%, 6 sténoses du méat, soit 1,9% traitées pour 2 patients par des dilatations simples et pour les autres, par des méatostomies sous anesthésie. Il n’a pas été rencontré de sténose urétrale. 1138 J.L. Mège et coll., Progrès en Urologie (1999), 9, 1136-1147 Figure 2. La sonde uréthrale est en place, fixée au gland. Le prépuce est présenté. Figure 4. Libération des adhérences uréthro-cutanées. Figure 3. Les lignes d’incision sont marquées au crayon der mographique. Elles circonscrivent le méat et se prolongent sur les bords du prépuce. Figure 5. L’incision glandulaire isole deux lambeaux glan dulaires latéraux. Figure 6. L’uréthroplastie vue de profil. Le gland est encore ouvert. 1139 J.L. Mège et coll., Progrès en Urologie (1999), 9, 1136-1147 Figure 9. Le gland est suturé sur la ligne médiane. Le garrot est lâché. Figure 7. Suture sur la ligne médiane des reliquats de corps spongieux qui assure l’hémostase et diminue la survenue de fistules. Figure 8. Repérage de la collerette muqueuse. Elle est tou jours de bonne taille pour garantir un résultat esthétique satisfaisant. Figure 10. Aspect final de face. Figure 11. Aspect final de trois-quart. La verge est bien droi te. 1140 J.L. Mège et coll., Progrès en Urologie (1999), 9, 1136-1147 Figure 12. Recul du méat. Figure 14. Méat bien apical. Adhérences préputiales. Figure 13. Recul du méat. Noter l’aspect fendu du gland. Figure 15. Bon résultat. Léger excès préputial. Figure 16. Même photo que la précédente, mais vue de plus près. 1141 J.L. Mège et coll., Progrès en Urologie (1999), 9, 1136-1147 Les compl ications préputiales ont comporté 6 scléroses du prépucesur 25 avec adhérences au plan profond gênant le décalottage, 5 désunions préputi ales et 1 cicatrice chéloïde. Globalement, il s’est donc produit 12 complications lorsque le prépuce a été conservé. Tableau 1. Recul du méat. Techniques (MAGPI) Glanduloplastie [9, 10, 13, 17, 20, 24, 34, 35, 39, 43, 44, 49] Si l’on exclut les problèmes liés à la conservation préputiale, rarement réalisée, le taux de complication après l’intervention de Duplay modifiée nécessitant une reprise chirurgicale est de 5,6% (18 sur 321). Les autres complications concernaient 5 infections urinaires basses, 2 hématomes du fourreau et 2 suppurations cutanées. Résultats à long terme Chez les 58 patients revus à long terme (5 à 9 ans après l’intervention), l’âge au moment de la consultation, est en moyenne de 8 ans et 10 mois, avec des extrêmes compris entre 5 ans et 11 mois et 14 ans et 3 mois. Les âges au moment de la consultation se répartissent de la manière suivante : 28 (48,3%) enfants de moins de 7 ans, 18 (31%) enfants âgés de 7 à 10 ans, 12 (20,7%) enfants de plus de 10 ans. Le recul moyen est de 71 mois, soit 5 ans et 9 mois, avec des extrêmes allant de 4 ans et demi à 9 ans et 9 mois. Lors de l a consultation réali sée à distance, en présence d’au moins un parent, ont été pratiqués un interrogatoire et un examen cli nique pour juger du siège, de l’aspect, du calibre par un calibrage systématique du méat urétral. La forme du gland a été notée et dans 84,5% des cas, nous avons observé l’enfant uriner. Pour les 58 cas les plus anciens, revus après plusieurs années, le siège du méat a été considéré par le même examinateur comme étant apical dans 79,3% des cas (46 sur 58). En dehors de 3 reculs minimes, il a été constaté 8 reculs balaniques et un gros recul balanopréputial. Il s’est donc produit un recul avec le temps dans 20,7% des cas (Figures 12 et 13). Le méat a un aspect de fente dans 74,1% des cas (43 sur 58). Le calibre du méat, vérifié par cathétérisme systématique est, dans 93,1% des cas, (54/58), d’au moins 8 CH. Un méat présentait une taille inférieure à 6 CH (1,7%); cet enfant avait déjà bénéficié de 2 méatostomies réalisées pour sténose du méat compliquant sa cure d’hypospadias. Il a été traité par une nouvelle méatostomie. 82,8% des patients (48 sur 58) ont un gland de forme arrondie mais globalement l’aspect esthétique satisfait tous les parents. L’appréciation d’une éventuelle courbure résiduelle est plutôt subjective et difficile en consultation. Nous avons noté 9 courbures de moins de 20° ne nécessitant pas de reprise chirurgicale (15,5% des cas). Les érec- Nombre de patients Nombre de Pourcentage reculs du méat recul du méat 2 236 107 4,8% (KOFF) Avancements urétraux [7, 30, 38, 41, 52] 162 9 5,6% (DUPLAY classique) Tubulisation de la plaque urétrale [ 1, 19,28, 38, 50, 51, 53, 56] 531 0 0% (MATHIEU) Lambeaux non tubulisés à base méatique [6, 22, 23, 26, 38, 46, 48, 49, 53, 55] 106 1 0,9% Duplay modifié 321 5 1,6% tions sont considérées dans tous les cas, par l’enfant ou les parents, comme normales, sans courbure franche. Nous avons observé 2 cas de fistules urétrales qui étaient évidentes à l’observation des jets urinaires car ces 2 patients présentaient un jet normal et un jet en goutte à goutte. Cela représente une fréquence de 3,5% (2 sur 58). Le premier enfant, âgé de 8 ans, avait été opéré en 1991 et présentait une forme balano-préputiale. Lors de la visite post-opératoire, aucune fistule ni sténose du méat n’avait été remarquée. Il présente actuellement, sur la face ventrale, au niveau du sillon balano-préputial, 3 petits orifices fistuleux, responsables de pertes urinaires pendant la miction. Ces orifices sont cathétérisables grâce à un mandrin d’une sonde urétérale de 4 CH et l’indication opératoire est portée. Le second cas concerne un enfant de 12 ans opéré en 1988 d’un hypospadias juxtabalanique. Là encore, aucune fistule ni sténose du méat n’avait été repére en post-opératoire. Le méat est d’un calibre 10 CH, allongé, la fistule se situe en juxta-balanique. L’enfant a été réopéré secondairement avec un bon résultat. Enfin, l’aspect de la verge a ét é considéré comme normal par l’exami nateur dans 82,8% des cas. Dans 9 cas (15,2%), il exi ste un léger excès préputial à l’origine d’une demande de reprise chirurgicale de l a part de la famille. Nous avons observé un cas de désunion ancienne du prépuce qui doit êt re repris chirurgicalement (1,7%), 2 adhérences préputiales libérées à la consultation et 2 scléroses du prépuce conservé sans indication opératoire (Figures 14, 15, 16). Le cas de recul bal ano-préputial est responsable d’un aspect fendu du gland, disgracieux (Figures 12 et 13). 1142 J.L. Mège et coll., Progrès en Urologie (1999), 9, 1136-1147 DISCUSSION Techniques Une multitude de techniques a été décrite au fil des ans pour corriger cette anomalie congénitale. Il n’y a pas une bonne méthode pour tous les types d’hypospadias. La technique doit être adaptée à chaque patient. Les glanduloplasties (interventions dérivant de l’intervention originale décrite par DUCKETT en 1981 sous l’appellation MAGPI) [9, 13, 15, 32, 43] sont actuellement, avec les lambeaux non tubulisés à base méatique de type Mathieu, [<<37, 6, 47, 45, 4, 48, 42, 11, 40] le standard du traitement des hypospadias antérieurs et toute nouvelle technique leur est comparée. Le MAGPI nécessite une sélection rigoureuse des patients pour obtenir de bons résultats. Il est recommandé dans les formes balaniques, avec un gland large, un calibre du méat normal, une peau para-méatique épaisse et souple [17] et une absence de courbure. En effet, ce procédé ne permet pas de traiter une inclinaison ventrale de la verge et nécessite, dans ce cas-là, une plicature dorsale des corps caverneux. Par ailleurs, OZEN [43] a noté, en cas de courbure, une augmentation de la survenue des complications.On peut ainsi avancer le méat hypospade de 10 à 15 mm. Cette technique doit être évitée pour des formes plus proximales car alors, le gland a tendance à basculer à la face inférieure de la verge en fin d’intervention et le méat peut reculer par lâchage progressif de la glanduloplastie. Le Mathieu est adapté à toutes les formes d’hypospadias antérieur même lorsqu’il existe des lésions associées à type de courbure, d’hypoplasie de l’urètre ou de malformation du méat. Il est également réalisable si l’enfant a été circoncis. Il est proposé, également dans les formes moyennes, à condition que l’orifice hypospade ne se situe pas en amont de la moitié de la verge, sinon, le lambeau prélevé n’est pas assez l ong. Cependant, ce procédé entraîne de façon fréquente des difficultés de recouvrement du néo-urètre nécessitant habituellement des lambeaux de Byars. D’autre part la vascularisation du lambeau est parfois précaire expliquant probablement une incidence de fistule urèthrales post-opératoires plus fréquente. Enfin, certains ont proposé de réaliser cette technique dans les échecs de cures d’hypospadias en respectant un délai d’au moins 6 mois entre les 2 interventions [25]. Les avancements urétraux, dont les promoteurs sont KOFF et WATERHOUSE [7, 30, 54, 41, 52], sont proposés dans les formes balaniques et juxta-balaniques. Ils sont limités par la longueur d’urètre mobilisable après une dissection extensive de ce conduit. Même si K OFF a pu réaliser un avancement sur 3,5 cm, il semble plus raisonnable de limiter la translation à 1 ou 1,5 cm. On peut combiner un avancement à un petit lambeau cuta- né laissé adjacent à l’urètre pour élargir les indications, mais cela fait perdre alors l’avantage principal que représentait cette technique et qui consistait à éviter une uréthroplasie pour diminuer l’incidence de fistule. RESULTATS Résultats esthétiques Le recul du méat Le recul du méat n’échappe pas à un examen clinique minutieux et signe, s’il est important, un échec de la méthode, ce qui est vécu de façon beaucoup plus douloureuse par le chirurgien que par le patient lui même (Tableau 1). La technique de Duplay modifiée donne globalement des résultats meilleurs que le MAGPI et les avancements urétraux. Nous pensons comme OZEN [43] ou HASTIE [24], que beaucoup ignorent cette complication, dans la technique du MAGPI, ce qui améliore les résultats. DUCKETT lui-même [17] n’a-t-il pas proposé une modification technique en 1992 pour éviter le recul du méat? Il s’agit probablement de la complication la plus sensible à l’action du temps (20,7% dans notre série avec un recul de plus de 5 ans). Elle justifie presque, à elle seule, un suivi régulier des patients jusqu'à la fin de la croissance de la verge. Si on analyse les séries ayant le recul le plus important, nous remarquons que le taux global de la complication a augmenté. Notre résultat devra donc être comparé avec celui de séries présentant un recul identique et un examen clinique minutieux, afin de refléter la réalité de cette complication (Tableau 2). La forme D’après SNODGRASS [50], le lambeau de Mathieu permettrait d’obtenir un méat arrondi et orienté horizontalement alors que la tubulisation de la plaque urétrale permet de retrouver à ce niveau une anatomie normale, c’est-à-dire verticale et allongée. Nous sommes satisfaits de l’aspect du méat après réalisation de la technique de Duplay modifiée. Courbure résiduelle Les phénomènes de courbures résiduelles sont actuellement rares du fait du test d’érection artificielle. Nous n’avons jamais observé, après technique de Duplay modifiée, d’asymétrie inesthétique dans l’allure générale de la verge. Complications préputiales Les auteurs signalent volontiers la tendance naturelle en début d’expérience que nous avons également pu constater, de conserver un surplus préputial de peur «d’en enlever trop». Il est cependant rare qu’une telle complication soit à l’origine de demandes pressantes de correction chirurgicale. 1143 J.L. Mège et coll., Progrès en Urologie (1999), 9, 1136-1147 Tableau 2. Recul du méat dans les séries ayant le recul le plus important. Hauteur Année Nombre de patients Nombre de reculs du méat Pourcentage Recul moyen De Sy [9] G 1985 43 3 7% 24 mois Hastie [24] G 1989 28 26 92,9% 2,9 ans Park [44] G 1995 57 0 0% 3 ans Spencer [52] A 1990 42 6 14,3% 17 mois Caïone [7] A 1991 74 3 4,1% 19 mois Snodgrass [50] T 1994 16 0 0% 22 mois 260 38 14,6% 58 12 20,7% Total Duplay modifié 1997 5 ans et 9 mois G = Glanduloplasties, A = Avancement urétral, T = Tubulisation de la plaque urétrale. Tableau 3. Fistules urétrales. Techniques Nombre de patients Nombre de fistules Pourcentage de fistules (MAGPI) Glanduloplastie [9, 10, 13, 14, 17, 20, 21, 24, 26, 33, 34, 35, 36, 39, 49, 55) 2227 28 1,3% (KOFF) Avancements urétraux [7, 30, 38, 41) 162 1 0,6% (DUPLAY classique) Tubulisation de la plaque urétrale [1, 19, 28, 38, 50, 51, 53, 56] 531 27 5,1% (MATHIEU) Lambeaux non tubulisés à base méatique [2, 3, 4, 5, 6, 11, 12, 13, 14, 21, 22, 23, 25, 26, 29, 31, 33, 38, 42, 45, 46, 47, 47, 49, 55] 106 12 11,3% Duplay modifié 321 16 5% Résultats urinaires Fistules L’analyse fidèle des résultats en ce qui concerne les fistules (Tableau 3) montre que nos résultats sont en deçà de ceux du MAGPI ou des avancements urétraux, mais bien supérieurs au Mathieu. Cette complication a été plus souvent rencontrée l orsque l a technique de Duplay modifiée a été réalisée pour un hypospadias pénien antérieur (6 sur 28) alors que la fréquence n’a été que de 2,1% pour les hypospadias balano-préputiaux et de 1,2% pour les hypospadias juxta-balaniques. Les lambeaux de Byars produisent souvent une tension sur les bords, notamment à la base du pénis lorsqu’ils ont été utilisés pour recouvrir un lambeau de Mathieu, ce qui peut diminuer la vascularisation et créer une fistule [27]. Cette complication est rare lors d’avancements urétraux ou de glanduloplastie car ces procédés évitent à proprement parler une uréthroplastie. C’est en partie une des raisons pour laquelle le MAGPI a un succès important, même si le résultat esthétique est un peu moins satisfaisant. Nos résultats tardifs relèvent une fois de plus l’intérêt de suivre de manière systématique les patients sur une longue période puisque, lors de notre visite réalisée à distance de l’intervention, 2 fistules passées inaperçues aux yeux des parents et qui n’existaient pas lors des visites post-opératoires, ont été diagnostiquées. 1144 J.L. Mège et coll., Progrès en Urologie (1999), 9, 1136-1147 Tableau 4. Sténoses du méat. Techniques Nombre de patients Nombre de sténoses du méat Pourcentage de sténoses du méat (MAGPI) Glanduloplastie [10, 17, 24, 34, 36, 39, 44] 1542 3 0,2% (KOFF) Avancements urétraux [7, 30, 38, 41, 52] 162 11 6,8% (DUPLAY classique) Tubulisation de la plaque urétrale [1, 19, 28, 50, 51, 56] 531 3 0,6% (MATHIEU) Lambeaux non tubulisés à base méatique [3, 4, 5, 6, 8,22, 23, 25, 26, 29, 31, 38, 47, 48, 55] 106 3 2,8% Duplay modifié 321 6 1,9% Sténoses du méat Le taux de sténoses du méat rencontrées dans la technique de Duplay modifiée se situe dans la moyenne des différentes séries publiées et reste inférieur à ce qui est noté dans la technique de Mathieu et dans les avancements urétraux. L’appréciation de ces résultats est difficile car le calibrage de l’urètre n’est probablement pas réalisé de façon systématique dans toutes les séries publiées (Tableau 4). Sténose de l’urètre Bien que nous n’ayons pas rencontré de sténose de l’urètre en post-opératoire précoce ou de manière tardive, le principe de l’incision longitudinale de la plaque urétrale recommandée par SNODGRASS [50] paraît un principe intéressant pour prévenir ce type de complications lors de tubulisations de la plaque urétrale. Il paraît donc indispensable, au vu de ces résultats et à la possibilité de survenues de complications secondaires, de suivre tout enfant opéré d’un hypospadias pendant toute sa croissance jusqu'à l’adolescence afin de vérifier notamment l’absence de recul du méat, la bonne cicatrisation préputiale et l’absence de survenue de fistule secondaire. Par ailleurs, cela permet à l’enfant et à sa famille de garder le contact avec l’interlocuteur privilégié que constitue le chirurgien face à cette malformation angoissante sur le devenir de ces futurs hommes et de répondre ainsi à toutes les interrogations. l’Hôpital Edouard-Herriot à Lyon, consiste en une tubulisation en un temps de la plaque urétrale avec traitement de la courbure de verge et de toutes les lésions associées. Nous la recommandons dans le traitement de la majorité des hypospadias, c’est-à-dire dans les formes distales, surtout balaniques et balano-préputiales. Bien qu’elle puisse techniquement être tout à fait réalisée dans les formes péniennes antérieures et même être étendue aux formes péniennes moyennes, elle doit être validée dans ces indications, sur un nombre de cas important, pour vérifier la qualité des résultats, surtout en ce qui concerne les fistules urétrales. Son taux de complication est tout à fait acceptable puisqu’il s’avère que la technique idéale n’existe pas. Ce travail soulève enfin l’intérêt capital du suivi de ces enfants car il paraît peu probable que les résultats soient immuables dans le temps. REFERENCES 1. ALLEN T.D., SPENCE H.M. The surgical treatment of coronal hypospadias and related problems. J. Urol., 1968, 100, 504-508. 2. BARCAT J. Symposium sur l’hypospadias, société française de chirurgie infantile. Ann. Chir. Infant., 1969, 10, 285-388. 3. BARTHOLD J.S., TEER T.L., REDMAN J.F. Modified Barcat balanic groove technique for hypospadias repair : experience with 295 cases. J. Urol., 1996, 155, 1735-1737. 4. BELLOLI G. The Mathieu Righini technique for mid-distal, hypospadias repair. Pediatr. Surg. Int., 1994, 9, 99-102. CONCLUSION 5. BUSON H., SMILEY D., REINBERG Y., GONZALEZ R. Distal hypospadias repair without stents : is it better? J. Urol, 1994, 151, 1059-1060. 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Five cases (1.6%) of meatal retraction and 6 meatal stenoses (1.9%) were observed. The overall complication rate requiring speci fic treatment was 5.6%. Remerciements Les auteurs remercient Mademoiselle Véronique Therme pour son efficacité et sa disponibilité. Commentaire de Jac ques Biserte, Service d’ Urologie, Hôpital Huriez, Lille. The long-term results showed meatal retraction in 20.7% of cases, meatal stenosis in 1.7% of cases and fistula in 3.5% of cases. This is the series with the longest mean follow-up. Voici une très intéressante série d’hypospadias distaux traités avec une technique homogène. La technique en question est parfaitement décrite et illustrée, les résultats manifestement analysés avec honnêteté. Comparison with the currently proposed techniques suggests that this technique is indicated in the treatment of anterior hypospadias. Long-term analysis of the results strongly encou rages regular and prolonged follow-up of children treated for hypospadias in the first 2 years. Les intérêts de cet article sont multiples : - outre l’aspect purement technique, Conclusion : The modified Duplay technique is reliable, can be easily performed, and gives perfectly satisfactory results, even in the long-term, for the treatment of anterior hypospadias. - le grand nombre d’enfants traités, - la comparaison des résultats (fistule, recul ou sténose du méat, aspect esthétique...) avec ceux des autres techniques de traitement des hypospadias distaux, Key-words : Anterior hypospadias, urethroplasty, Duplay ure throplasty and straightening of the penis. ____________________ 1147