Le risque de dénutrition existe lorsque la préalbumine est infé-
rieure à 200 mg/l.
Ses conséquences sont fatales (tableau I).
Quarante à 80 % des patients atteints de cancer présentent un état
de dénutrition durant l’évolution de leur maladie. La gravité et
la rapidité d’apparition varient selon la pathologie néoplasique,
sa localisation (les cancers digestifs et des voies aérodigestives
étant les premiers pourvoyeurs de dénutrition majeure), mais
aussi selon l’âge et les traitements anticancéreux. La réduction
des apports s’observe chez 30 à 75 % des patients atteints de
cancer devenus anorexiques, et ce par plusieurs mécanismes
directs ou indirects parfois intimement intriqués et liés au cancer
et aux traitements anticancéreux, tels que : l’existence d’obstacles
mécaniques anatomiques, d’un syndrome dépressif ou d’une
anxiété, de douleurs chroniques, ou encore la sécrétion intracé-
rébrale de cytokines (interleukine 1, interleukine 8, TNF
α
, etc.),
la présence de médiateurs de la réponse inflammatoire, mais aussi
la modification du goût entraînée par la chimiothérapie, tout cela
le plus souvent dans un contexte d’hospitalisation(s). L ’ a u g-
mentation des dépenses énergétiques coexiste par le biais,
d’une part, de perturbations spécifiques du métabolisme : pro-
duction anormale par l’organisme et la tumeur de médiateurs
spécifiques (cytokines, hormones, etc.), d’autre part d’un hyper-
métabolisme protéique, glucidique et lipidique, ou encore par la
réponse inflammatoire (d’origine tumorale ou infectieuse ou par
synthèse accrue des protéines de l’inflammation), et enfin, par les
traitements appliqués : chirurgie, radiothérapie, chimiothérapie,
corticothérapie. L ’ â g e , enfin, est, avec le cancer et les traite-
ments, le troisième facteur de déséquilibre nutritionnel. En effet,
la réduction des apports, particulièrement observée chez le
sujet âgé quelle que soit la maladie, par ignorance des besoins
L
e traitement du cancer fait aujourd’hui appel à des
thérapeutiques de plus en plus performantes et adaptées
au patient et, pour certaines, augmentant les taux de
survie sans altérer la qualité de vie. Pourtant, le médecin se heurte
à un moment donné de l’évolution de la maladie, survenant plus
ou moins tôt dans l’histoire du patient, à un état de dénutrition,
voire de cachexie, de ce dernier, l’empêchant de poursuivre la
thérapeutique, et ce indépendamment du résultat déjà obtenu.
L’importance de diagnostiquer le plus précocement possible
cet état de dénutrition, et particulièrement chez le sujet âgé,
a été rappelée à l’occasion de la VI
e
Biennale monégasque de
cancérologie.
La dénutrition est la conséquence d’un déséquilibre entre les
apports et les besoins protéino-énergétiques de l’organisme, avec,
dans un premier temps, une adaptation métabolique au jeûne et
une masse protéique préservée, puis, dans un second temps, une
protéolyse musculaire.
LE DIAGNOSTIC DE DÉNUTRITION
Selon les recommandations de l’ANAES (septembre 2003),
l’évaluation diagnostique de la dénutrition protéino-énergétique
des adultes hospitalisés s’appuie sur des mesures anthropomé-
triques et biologiques.
Anthropométrie
La définition de l’indice de Quetelet : indice de masse corporelle
(IMC) ou Body Mass Index(BMI), est la suivante : P (kg)/ T
2
( m
2
).
Le risque de dénutrition existe quand l’IMC est de 20 ou moins.
La taille est estimée à partir de la mesure talon-genou :
– homme : taille (cm) = (2,03 x h cm) - (0,04 x âge) + 64,19 ;
– femme : taille (cm) = (1,83 x h cm) - (0,24 x âge) + 84,88.
Facteurs biologiques
– Albumine : le risque de dénutrition est grand lorsque l’albu-
mine est inférieure à 35 g/l.
– Préalbumine = transthyrétine (- synthèse hépatique (+ pancréas,
plexus choroïdiens) - demi-vie 2 jours).
D é n u t rition : son impact en cancéro l o g i e
Denutrition: impact in oncology
P. Amsalhem*
D’après la présentation de H. Robiani, médecin coordonnateur de l’EHPAD-Le Chesnay.
187
La Lettre du Cancérologue - Volume XIII - n° 4 - juillet-août 2004
A
C T U A L I T É S - R É U N I O N S
* Service de médecine interne, hôpital intercommunal de Meulan-les-Mureaux, et
service d’oncologie médicale, hôpital Avicenne.
T a b l e a u . Critères diagnostiques chez le sujet de 70 ans et plus (ANAES).
Diagnostic de dénutrition
Mesures anthropométriques Perte de poids 10 % en 6 mois
Perte de poids 5 % en 1 mois
IMC 20 kg/m
2
Mesures biochimiques Albuminémie* < 30 g/l
Préalbuminémie* < 110 mg/l
Calcul d’index MNA-SF 11
*En l’absence de syndrome inflammatoire.