41
pas incriminer un produit plutôt qu’un autre.
La dangerosité des consommations que nous
relatons est avant tout celle des associations.
On peut constater que dans le débat sur la
dangerosité de l’ecstasy qui se déroule, tant
dans la presse généraliste qu’au sein des pro-
fessionnels, on tient très peu compte des pra-
tiques réelles des populations concernées.
Si l’on s’en tenait strictement à une posi-
tion de soutien d’une politique de réduction
des risques liés à l’usage de drogue, il est
clair que le premier message de prévention
auprès de jeunes consommateurs d’ecstasy,
ou dite telle, serait : “Ne mélangez pas les
produits.” Informer ces populations sur la
dangerosité de l’ecstasy revient à dire à un
conducteur de respecter les limitations de
vitesse alors qu’il roule avec un bandeau
sur les yeux ! Y a-t-il des mono-utilisateurs
d’ecstasy “propre” ? Les éléments, recueillis
auprès de jeunes ne fréquentant pas l’espace
spécifique des free-parties, montrent que
pour une simple fête en boîte du samedi soir,
la soirée peut commencer par de l’alcool et
du cannabis, “pour se détendre”, puis conti-
nuer par des amphétamines médicamen-
teuses type coupe-faim ou de la cocaïne pour
se réveiller, de l’ecstasy pour danser, et finir
par des hypnotiques benzodiazépiniques
pour pouvoir dormir.
Sur le plan neuropsychiatrique, on ne peut
que souligner l’aspect très impressionnant
des intoxications aiguës. Ce sont notam-
ment les éléments neuropsychiques, de
type stéréotypies, catatonies, altérations
des mouvements oculaires, aphasie qui
semblent inquiétants. Dans l’impossibilité
d’en faire une genèse physiologique fon-
dée, ces éléments ne peuvent qu’être rap-
portés par proximité à d’autres troubles. Il
est clair qu’en ce sens ils évoquent les
manifestations comportementales qu’on
retrouve dans l’autisme (stéréotypies,
aphasies) ou la schizophrénie (catatonie,
troubles du regard).
On connaît les hallucinoses fréquentes lors
de la plupart des confusions toxiques, dont
le delirium tremens est probablement le
meilleur exemple. On en connaît également
le caractère totalement régressif et non
récurrent à la sortie de l’épisode.
Ce ne sont donc pas les terreurs ou les pro-
bables hallucinations que présentent ces
jeunes qui donnent le plus de soucis au psy-
chiatre. Les questions qui se posent sont les
suivantes : ces jeunes vivent-ils un
“simple” accident confuso-délirant, ou
font-ils l’expérience d’une véritable psy-
chose délirante, comme pourraient le laisser
penser les éléments neuropsychiques qui
accompagnent leur altération de la
conscience ? Les mécanismes neurobiolo-
giques en jeu sont-ils un simple brouillage
des fonctions cognitives comme dans la
confusion, ou en sont-ils une véritable
désorganisation ?
Un suivi à moyen terme des jeunes ayant
présenté ces accidents est absolument
indispensable pour pouvoir répondre à ces
questions.
Le vaccin anti-cocaïne de Cantab passe
le cap des essais de phase I
L’essai de Phase I (aidé financièrement par le National Institute on
Drug Abuse américain) de “TAD-CD”, vaccin anti-cocaïne de Cantab
Pharmaceutical, a montré sa sécurité et son immunogénicité. Les
résultats en ont été présentés par le Dr Thomas Kosten (VA Medical
Center) aux 61erencontres scientifiques annuelles du College on
Problems of Drug Dependance, à Acapulco, en juin 1999 :
– les essais, en double aveugle contre placebo, ont inclus 34 sujets
ayant tous présenté au cours de leur vie une addiction à la cocaïne.
Ils ont reçu trois injections à quatre semaines d’intervalle ;
– aucun effet secondaire sérieux n’a été observé au cours de l’essai ;
– tous les sujets ayant reçu le vaccin ont développé une immunité.
La réponse immunitaire, fonction de la dose administrée, s’est pro-
longée au moins 84 jours et il a été démontré que les anticorps pro-
duits pouvaient reconnaître la cocaïne libre dans le sang.
Le Dr Kosten a souligné que le “TA-CD offre la possibilité d’une
approche nouvelle, et particulièrement viable, d’un problème très
grave pour lequel il n’existe pas d’alternatives disponibles en termes
de pharmacothérapie”.
Allemagne : la codéine réservée aux cas d’exception
Entérinés en février 1998, les nouvelles règles des thérapeutiques de
substitution ont été appliquées en janvier 2000. Elles prévoient la
restriction à des cas d’exception de la substitution par la codéine et
de son dérivé hydrogéné.
Les nouvelles modalités autorisent les méde-
cins traitants à prescrire, dans le cadre d’une
thérapie de substitution,“la méthadone, la lévo-
méthadone ou une autre substance homologuée dans cette indica-
tion, voire la codéine ou la di-hydrocodéine dans des cas excep-
tionnels”.
Depuis le 1er janvier 2000, un traitement de substitution ne peut plus
être entamé avec la (dihydro) codéine et, dans le cas de traitements
en cours, le produit doit dorénavant être remplacé par la méthadone,
la lévo-méthadone, ou une autre substance homologuée.
Cependant, les situations d’exception à justifier par le médecin-trai-
tant peuvent subsister.
Communiqué du ministère Fédéral de la Santé, janvier 2000.
Simone Berthelier
Lofexidine et sevrage de la dépendance physique
aux opiacés
Agoniste spécifique et sélectif du récepteur alpha 2a, la lofexidine
présente une meilleure sécurité d’emploi que la clonidine ou la
guanfacine (agonistes alpha 2 non spécifiques du sous-type a) dans
le traitement symptomatique du sevrage de la dépendance physique
aux opiacés. Plus précisément, elle ne présente pas de risque d'hy-
potension. Dans ce contexte, alors que la lofexidine est commer-
cialisée en Grande-Bretagne, on ne peut que regretter son absence
dans l’arsenal thérapeutique français.
Patrick Beauverie