rs a e c i s h e L de la La consommation d’ecstasy estelle un facteur de comorbidité ? L. Reneman, J. Booij, G.J. den Heeten, W. van den Brink* Le Royaume-Uni et les Pays-Bas sont les deux pays de l’Union européenne dans lesquels la consommation d’ectasy est la plus élevée (EMCDDA, 2001**). Depuis plusieurs années, le MDMA (3,4 méthylènedioxyméthamphétamine) est le principal composant de la plupart des pilules d’ecstasy aux Pays-Bas et probablement dans la plupart des autres pays (DIMS, 2002). Les études conduites chez l’animal ont montré que le MDMA pouvait être à l’origine de graves lésions sérotoninergiques et peut-être aussi dopaminergiques au niveau cérébral chez les rongeurs et les primates non humains (Ricaurte et al. 2000, 2002). Chez l’homme, l’utilisation d’ecstasy a entraîné des problèmes de mémoire et une augmentation de l’incidence de la dépression, d’anxiété, voire d’impulsivité. L’objectif, ici, est d’étudier l’hypothèse d’un lien éventuel entre l’utilisation d’ecstasy et la présence d’anomalies sérotoninergiques (irréversibles) dans le cerveau humain et d’une relation entre ces anomalies et les problèmes de mémoire et d’humeur dépressive Soixante-neuf sujets ont été inclus dans l’étude : 15 n’ayant jamais consommé d’ecstasy, 15 utilisateurs modérés d’ecstasy (consommation au cours de la vie supérieure à 55 pilules ; moyenne 29 pilules), 23 gros utilisateurs (consommation au cours de la vie supérieure à 55 pilules ; moyenne 530 pilules) et 16 ex-utilisateurs (consommation au cours de la vie supérieure à 55 pilules, dernière utilisation remontant à plus de 12 mois * Academic Medical Center University of Amsterdam (Centre médical universitaire - Université d’Amsterdam). ** Observatoire européen des drogues et des toxicomanies. Reneman et al., 2001a, 2001b ; De Win et al., soumis pour publication. Le Courrier des addictions (5), n° 3, juillet/août/septembre 2003 avant l’entrée dans l’étude ; moyenne 268 pilules). Les effets de l’ecstasy sur les neurones sérotoninergiques cérébraux ont été étudiés chez tous les sujets par tomographie d’émission monophotonique ([123I]ß-CIT SPECT) et chez un sous-groupe de 7 sujets n’ayant jamais utilisé d’ecstasy et 8 gros utilisateurs, par spectroscopie à résonance magnétique protonique (1HMRS). La mémoire verbale a été évaluée par le test d’apprentissage verbal et auditif de Rey (RAVLT). La présence d’une humeur dépressive et la dépression majeure selon le DSM-IV a été évaluée par l’inventaire de la dépression de Beck (BDI) et l’interrogatoire diagnostique composite international (CIDI). 114 Troubles de la mémoire et dépression Chez les femmes grosses utilisatrices d’ecstasy (mais non chez les hommes), des diminutions significatives des rapports de captation globale du ß-CIT marqué à l’iode 123 (beta-carboxymethoxy-iodophenyl-tropane) ont été observées. Chez les exutilisatrices (mais pas chez les hommes ex-utilisateurs) une diminution significative de fixation sur le transporteur de la sérotonine a également été observée au niveau du cortex pariéto-occipital et occipital. Les gros utilisateurs et ex-utilisateurs mémorisaient significativement moins de mots que les témoins n’ayant jamais utilisé d’ecstasy, lors des tests de mémorisation immédiate et différée (RAVLT). Le degré d’altération de la mémoire était lié au nombre de pilules, et non à la durée de l’abstinence ni à la captation du ß-CIT, marqué à l’iode 131 sur les transporteurs de la sérotonine au niveau des neurones corticaux. Lors de l’utilisation du 1H MRS chez un sousgroupe de gros utilisateurs d’esctasy, les scores de mémorisation différée (RAVLT) sont apparus liés de manière significative à la diminution des taux de NAA/Cr (N-acétylaspartate/ créatine) dans le cortex préfrontal. Les scores de dépression au BDI étaient significativement plus élevés chez les gros utilisateurs et ex-utilisateurs d’ecstasy que chez les sujets n’ayant jamais utilisé d’ecstasy, le nombre de pilules d’ecstasy étant significativement corrélé au score BDI. Cependant, aucune association significative n’a été observée entre le BDI et les rapports de captation du ß-CIT marqué à l’iode 123. Aucune différence significative n’a été observée quant à l’incidence de la dépression au cours de la vie ou de dépression majeure présente entre les différents groupes. Conclusion Chez les femmes, une grosse utilisation d’ecstasy semble liée à des anomalies neurotoxiques durables au niveau du système sérotoninergique, ces anomalies pouvant être corrélées à des problèmes fonctionnels en termes d’altérations de la mémoire et de Évaluation des consommations et des comorbidités chez les adolescents L’adolescence, période variant de 10 à 24 ans selon les études, débute par des phénomènes pubertaires qui vont entraîner une transformation radicale de l’organisme. Les répercussions psychologiques de ces modifications sont importantes pour comprendre le rapport des adolescents face aux substances psychoactives. Les modalités d’usage à risque chez les adolescents qui doivent attirer l’attention du praticien sont la précocité de la consommation, la recherche d’excès, la consommation à visée autothérapeutique, le cumul des consommations, et la répétition des modalités de consommation. L’investigation clinique du mésusage, ne répondant pas strictement aux critères diagnostiques d’abus (ou usage nocif) et de dépendance (DSMIV ; CIM-10), doit être impérativement accompagnée de l’identification de facteurs de vulnérabilité individuels et environnementaux. problèmes affectifs. Des études prospectives de neuro-imagerie sont nécessaires pour évaluer le lien de causalité des présentes observations. Dans cette attente, des mises en garde réalistes doivent être émises à destination des utilisateurs de drogue et il conviendra de prendre des mesures permettant une diminution des risques afin de prévenir lésions et comorbidités à venir chez les jeunes utilisateurs de drogue. Les instruments d’évaluation comprennent soit des questionnaires ciblés ou de véritables guides d’entretien et doivent évaluer le fonctionnement psychosocial. Nous allons dans ce sens dans notre groupe de recherche en proposant un travail de repérage et d’évaluation précoces des consommations abusives de produits psychoactifs (étude RECAPP) dans un échantillon non clinique de 1 700 adolescents à l’aide des questionnaires ADOSPA (version française du CRAFFT) et POSIT évaluant le fonctionnement psychosocial. Enfin, l’approche thérapeutique doit comprendre, outre le repérage et l’évaluation des usages à risque et les psychothérapies, un travail en collaboration étroite avec les acteurs sanitaires et sociaux. Cannabis et troubles cognitifs rs a e c i s h e L de la l’homme et cette plante. Chez les 12-25 ans, la substance illicite la plus consommée en France reste de loin le cannabis. Les données de la littérature internationale soulignent les symptômes psychiatriques, les effets cognitifs et comportementaux, tant aigus que chroniques, liés à l’usage répété du cannabis. Cependant, la recherche d’effets cognitifs persistants à l’arrêt de la consommation chez les usagers chroniques n’a pas donné jusqu’à présent de résultat convaincant, et nombreuses sont les critiques méthodologiques. Néanmoins, cette question semble capitale, en particulier chez les adolescents puisqu’il pourrait en résulter de possibles altérations sur les plans social et éducatif. Des études sur de larges échantillons semblent nécessaires pour approfondir ce sujet. L. Karila*, M. Reynaud** Le cannabis, dérivant du latin cannabus ou directement du grec kannabis, signifie plantation de chanvre, ou chanvre. Le terme grec et ses équivalents arabes kannab ou hébreu kanneb dérivent de l’assyrien quanabu, ce qui atteste des liens millénaires entretenus entre 115 *Interne, département de psychiatrie et d’addictologie (Pr M. Reynaud). ** Chef du département de psychiatrie et d’addictologie, hôpital universitaire Paul-Brousse, Villejuif Cedex.