Mots-clés
Maladie de Gorham et Stout - Ostéolyse - IL-6 - VEGF-A - VEGFR-3 - Biphosphonates
Légendes
Figure 1. Radiographie de bassin en 2004,
avant l’arrivée en France : disparition de la
branche ischiopubienne droite.
Figure 2. Radiographie du thorax en 2004 :
épanchement pleural de la base droite.
Figure 3. Radiographie du thorax en 2007 :
mauvaise visibilité des arcs antérieurs des der-
nières côtes droites.
Figure 4.
Radiographie du bassin en 2007 :
disparition de l’hémibassin droit, de l’extrémité
supérieure du fémur droit.
Figure 5. IRM rachis en T1 : quasi-dispari-
tion de la vertèbre T12, avec déformation en
cyphose et fusion du plateau supérieur de L1
avec le reste de la vertèbre T12, qui apparais-
sent en hypersignal.
Figure 6. PET scan en août 2007 avant traite-
ment : hyperfixation de l’arc postérieur d’une
côte droite.
10 | La Lettre du Rhumatologue • Suppl. 3 au n° 357 - décembre 2009
CAS CLINIQUE
SOS fantôme
R. Belkhir*
U
n homme âgé de 26 ans, sans histoire médicale et vivant en Algérie, souffre de
douleurs de l’aine droite depuis une chute sur son lieu de travail (chute d’une hauteur
de plusieurs mètres).
Aucune fracture n’est constatée sur les radiographies successives du rachis lombaire
et du bassin. Deux ans plus tard, la douleur persistant, il doit interrompre son activité
professionnelle. Une nouvelle radiographie du bassin montre une ostéolyse de l’aile
iliaque droite (figures 1 et 2). À cette date, l’ostéolyse a progressé jusqu’à atteindre l’ex-
trémité supérieure du fémur droit, et le patient se déplace avec des béquilles. En 2004,
le patient développe une pleurésie de la base droite drainée en unité de soins intensifs
en Algérie. La composition du liquide pleural n’est pas connue. Devant les anomalies
radiographiques, des biopsies de l’aile iliaque droite et des tissus mous sont pratiquées,
montrant un tissu de granulation inflammatoire sans spécificité, des travées osseuses
de taille variable, une assez grande richesse en vaisseaux à paroi épaisse, sans signe de
prolifération maligne. Le diagnostic de maladie de Gorham et Stout est évoqué. Par la
suite, le patient tombe, à nouveau, de sa hauteur. Il reste alité pendant un an, en raison
de rachialgies et, depuis, il ne se déplace qu’en fauteuil roulant.
En juillet 2007, le patient est hospitalisé dans le service de rhumatologie de l’hôpital
Bicêtre. À l’admission, son membre inférieur droit raccourci lui permet de se déplacer
de son lit vers un fauteuil. Il n’a quasiment plus de douleurs. L’examen neurologique est
normal. Les paramètres biologiques sont normaux, ainsi que les marqueurs du remodelage
osseux : la seule anomalie est l’existence d’une hypergammaglobulinémie polyclonale.
Les radiographies standard et le scanner (rachis et bassin) confirment l’existence de
multiples lésions ostéolytiques sur le rachis avec destruction de D12, fusion du plateau
de L1 et du plateau inférieur de T12, une ostéolyse complète des 11
e
et 12
e
côtes droites,
et partielle des 7e, 8e, 9e et 10e côtes droites (figure 3), une ostéolyse complète de l’aile
iliaque droite (figure 4), de la tête du fémur et du col fémoral droit, ainsi que de l’hémi-
sacrum droit. L’IRM du bassin et du rachis montre un signal hyperintense en séquence
T1 sur les corps vertébraux de T11 à L1 et le sacrum (figure 5). Sur les séquences STIR,
les lésions osseuses apparaissent hyperintenses. Il existe un hypersignal STIR de la paroi
thoracique postérieure droite remontant jusqu’à l’apex et de ganglions axillaire droit,
paratrachéal droit et sous-carénaire. Aucune prise de contraste des lésions osseuses ou
des parties molles n’est constatée après injection de produit de contraste. Il n’y a pas
d’hypersignal médullaire. Le PET scan, réalisé en août 2007, montre un hypermétabolisme
intense de la paroi thoracique postérieure droite en relation avec les zones d’ostéolyse
des arcs postérieurs de la 6
e
à la 8
e
côte droite, des lésions vertébrales (T10 et L2) et des
ganglions suscités. Aucun foyer d’hyperfixation n’est noté sur le bassin.
Afin d’interrompre la progression de l’ostéolyse, un traitement par biphosphonate (acide
zolédronique 4 mg intraveineux mensuellement) est alors instauré. Une radiothérapie
externe est réalisée, ciblant les zones d’hyperfixation du PET scan, soit les vertèbres
de T11 à L1, les lésions costales et ganglionnaires (figure 6).
Étant donné la nature vasculaire de la maladie de Gorham, un traitement par anticorps
monoclonal anti-VEGF-A, le bévacizumab (400 mg à J1 et J15), est proposé, associé à
une radiothérapie sur les côtes droites et le rachis dorso-lombaire, en raison du risque de
compression médullaire. Un mois plus tard, un nouveau PET scan montre une diminution
en intensité de l’hypermétabolisme sur les côtes et les vertèbres. Deux mois plus tard,
il n’existe plus d’hypermétabolisme sur les vertèbres. Le patient est retourné en Algérie
après le dernier PET scan et a été perdu de vue.
* Service de rhumatologie, hôpital Bicêtre, Le Kremlin-Bicêtre.