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Revue de presse
CRITÈRE DE CHOIX POTENTIEL DE TRAITEMENT ADJUVANT
CHEZ DES FEMMES NON MÉNOPAUSÉES ATTEINTES
D’UN CANCER DU SEIN
en tenant compte fidèlement de leurs attentes. De même, la
population RE+ < 35 ans au moins bon pronostic devrait faire
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l’objet d’une attention particulière.
E. Brain, Centre René-Huguenin, Saint-Cloud
Same gain, less pain: potential patient preferences for adjuvant treatment in premenopausal women with early breast
cancer. Fallowfield L, McGurk R, Dixon M. Eur J Cancer
2004;40:2403-10.
Les préférences des patientes vis-à-vis des traitements proposés sont d’actualité et supposées centrer la discussion bénéfice/
risque que nous leur devons. Cette étude a porté sur le choix
théorique du traitement systémique adjuvant d’un cancer du
sein potentiellement hormonosensible (RE+) chez des patientes
non ménopausées. Menée sur un échantillon de 200 femmes bien
portantes représentatif de la population anglaise, elle a exploré
les facteurs influençant le choix entre chimiothérapie type
CMF ou hormonothérapie par analogue de la LHRH, les deux
étant considérés d’une efficacité équivalente. Après présentation des deux traitements et de leurs inconvénients principaux,
la préférence était en faveur de l’hormonothérapie chez la
majorité des sujets (78 %), fondée sur les moindres effets
secondaires (71 %) (alopécie en première ligne : 27 %), la possibilité de maintenir ses activités professionnelles et privées
(36 %) et la réversibilité potentielle du blocage ovarien (17 %)
(influencé par l’âge < 40 ans et la pauciparité). Pour les 11 %
de sujets favorisant la chimiothérapie, la durée courte du traitement était le principal facteur invoqué (95 %).
Commentaires. Avec la réserve méthodologique liée à la projection hypothétique d’un diagnostic de cancer du sein chez
des sujets sains, les facteurs favorisant la préférence pour une
hormonothérapie illustrent bien la perception différente des
effets secondaires chez les patients potentiels par rapport aux
soignants : crainte prédominante des effets secondaires (aménorrhée durable incluse) et du caractère “déstabilisant” de la
chimiothérapie dans la vie quotidienne. On peut critiquer
l’actualité des deux scénarios choisis (le CMF est un peu
désuet et la castration seule moins utilisée que combinée au
tamoxifène). Mais en attendant la même étude chez d’authentiques patients, les taux élevés d’aménorrhée observés avec
l’utilisation des chimiothérapies plus “modernes” (taxanes ou
anthracyclines à doses “optimales”), l’existence de données
d’équivalence entre castration + tamoxifène versus chimiothérapie à base d’anthracyclines et la reconnaissance du blocage
ovarien avec tamoxifène comme alternative à la chimiothérapie dans plusieurs consensus internationaux devraient nous
inciter à discuter objectivement ces options chez nos patientes
La Lettre du Sénologue - n° 27 - janvier/février/mars 2005
PRÉVENTION HORMONALE DES CANCERS DU SEIN
BRCA1/2 : UNE ALTERNATIVE À LA MASTECTOMIE
BILATÉRALE ?
Deux travaux récents montrent que la mastectomie bilatérale
réduit le risque de cancer du sein chez des femmes porteuses
d’une mutation BRCA1/2 de 93 à 100 % (1, 2). Cependant, la
mastectomie totale demeure une attitude de prévention agressive, coûteuse sur le plan psychologique et de la qualité de vie.
Parallèlement, plusieurs études montrent que l’ovariectomie
prophylactique pratiquée avant la ménopause chez les femmes
BRCA1/2 réduit le risque de cancer du sein de moitié (3-7).
Après la ménopause où le risque reste considérable (plus de
50 % du risque cumulé), l’intérêt potentiel d’une prévention
antihormonale s’en trouve relancé.
Le concept de chimioprévention trouve sa meilleure application dans des situations à risque très élevé d’une maladie mettant en jeu le pronostic vital. Les formes héréditaires de cancer
du sein liées aux gènes BRCA1 et 2 constituent un exemple de
situations à très haut risque. Chez ces femmes, il faut avoir
conscience que les chances de ne pas développer un cancer du
sein (16-35 % pour BRCA1) sont bien plus faibles que les
risques d’être atteinte (65-84 %) (8, 9). Soulignons que si la
précocité de l’âge de survenue est une caractéristique spécifique des cancers liés à BRCA1/2, plus d’un cancer sur deux
survient chez ces femmes après la ménopause (8, 9).
Ce risque très élevé a conduit à introduire les propositions de
mastectomies prophylactiques chez les femmes BRCA1/2 dans
les recommandations nationales françaises récentes (10). Ce
geste mutilant constitue une attitude très efficace pour réduire
le risque (1, 2). Ainsi, dans l’étude prospective de Klijn et al.
actualisée au symposium de San Antonio 2004, le suivi d'une
population de 286 femmes porteuses d’une mutation BRCA1/2
montrent une réduction du risque de cancer du sein dans le
groupe ayant eu une mastectomie bilatérale de 100 % (n = 113)
par rapport au groupe contrôle (n = 173,2). Deux cancers
occultes ont été diagnostiqués lors de la mastectomie. Dans le
groupe des femmes qui ont fait l’objet d’une surveillance
seule, le taux d'incidence du cancer du sein est de 17 % pour un
suivi actuariel de 5 ans. Deux femmes sont décédées de cancer
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du sein dans ce groupe. Le dépistage qui est actuellement la
seule alternative à la mastectomie proposée pour la prise en
charge du risque ne permet donc pas de garantir une réduction
satisfaisante de la mortalité et n’agit pas sur le risque de cancer du
sein invasif lui-même.
Ces dernières années, des études ont montré que les femmes
ovariectomisées en préménopause pour prévenir le risque de
cancer ovarien lié aux mutations BRCA1/2 ont un risque relatif de cancer du sein d’environ 0,5 par rapport aux femmes non
ovariectomisées (pour revue, 11). Il s’agit d’observations cliniques remarquablement concordantes puisque les cinq études
publiées analysant la réduction du risque de premier (3-5) ou
de second cancer (6, 7) sont significatives. Malgré la faible
expression des RE dans les tumeurs BRCA1 avérées, il semble
donc bien que la cancérogenèse BRCA1/2 soit sensible aux
estrogènes. Ce paradoxe peut s’expliquer si l’on considère que
les cellules épithéliales normales chez les femmes BRCA1
expriment les RE (12). D’autres hypothèses telles que les
effets génotoxiques des métabolites des estrogènes, la voie des
facteurs de croissance ou les effets non génomiques des estrogènes peuvent être avancées pour expliquer le rôle des estrogènes dans la cancérogenèse liée à BRCA1/2 (11).
Quoi qu’il en soit, les antiestrogènes ont montré leur efficacité
en prévention du cancer du sein dans des situations à risque
familial (étude IBIS1 et NSABP1) (13). Parallèlement, les
inhibiteurs d’aromatase réduisent le risque de cancer du sein
controlatéral en traitement adjuvant (14). Des essais d’hormonoprévention chez des femmes à haut risque, y compris familial, sont en cours concernant le raloxifène et les inhibiteurs
d’aromatase (13). Cependant, une seule étude a été spécifiquement conçue pour étudier la réduction potentielle du risque
chez des femmes BRCA1/2 (15).
Le concept d’hormonoprévention du cancer du sein a été proposé en France tout en prenant en compte la préoccupation de
la balance bénéfice/risque chez des femmes en bonne santé
(16). Notons que le nombre d’événements observés chez les
femmes à haut risque incluses dans les deux grands essais de
prévention du NSABP1 et du Royal Marsden Hospital (13)
était 5 fois moins élevé que celui attendu chez les femmes
BRCA1. Les prédispositions familiales constituent en effet un
groupe hétérogène au sein duquel les formes BRCA1/2 confèrent un risque extrême.
La question de l’hormonoprévention des cancers du sein liés
aux gènes BRCA1/2 mérite d’être débattue. Elle constituerait
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une alternative entre la proposition attentiste et aléatoire de la
surveillance et l'attitude efficace mais agressive de la mastectomie
préventive.
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B I B L I O G R A P H I Q U E S
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P. Pujol, service de génétique médicale,
INSERM 540, CHU de Montpellier
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