Par exemple: les marchandises d'un petit artisan sans dette; la part du prix de toutes les marchandises
qui correspond à la valeur produite hors du capitalisme par les retraités, les chômeurs, les malades, les
médecins, les instituteurs ou les fonctionnaires. Cette part du prix est intégrée via l'impôt pour les salaires
des fonctionnaires ou les cotisations sociales pour les salariés hors emploi.
- des marchandises à prix disponibles sur le marché qui soient capitalistes.
C'est le cas de tout ce qui est produit par des sociétés à actions privée dans un but lucratif. Les sodas, les
meubles ou le ciment en font généralement partie. Les économistes vulgaires croient et tentent de nous
faire croire que ce type de marchandise est le seul qui crée de la valeur économique légitime, « réelle ».
- des biens et des services sans prix qui soient capitalistes.
C'est le cas des dépenses de l'État, les dépenses d'énergie, d'infrastructure ou de restauration immobilière,
par exemple. Elles ne coûtent rien directement, elles sont intégrées dans les prix des autres marchandises
par l'impôt mais elles sont produites par des sociétés privées selon la logique capitaliste.
- des biens et des services sans prix qui ne soient pas capitalistes.
C'est le cas aussi bien de l'économie domestique vampirisée par l'économie lucrative que des services
publics gratuits - les écoles, les hôpitaux, les commissariats, les casernes de pompier, les routes (sauf si
elles sont sous-traitées au privé), etc.
La mise en cause de l'emploi et des institutions capitalistes comme rapport d'asservissement exclut la
logique capitaliste mais pas nécessairement le marché, l'échange de marchandises à prix. Les prix
intègrent la notion de consommation intermédiaire et de valeur ajoutée. Cette valeur ajoutée est créée par
les salaires – mais la gratuité rend la nécessité des salaires moins prégnante.
Proposition 36
La marchandise agit comme fétiche : elle se cache pour ce qu'elle est et se montre
pour ce qu’elle n’est pas. Elle détermine les actes des agents économiques.
La gratuité doit être intégrée dans les prix des marchandises à prix et, à l'extrême, pour reprendre
l'exemple d'école que Bernard Friot m'évoquait, si une seule marchandise à prix se trouve sur le
marché, elle doit intégrer dans son prix toute la valeur ajoutée utile aux salaires et aux
investissements de toute la production économique gratuite - ce qui la rendrait assurément
impayable, sauf à travailler pour rien mais c'est là une démarche qui risque de mettre à l'encan les
acquis des luttes féministes ou des luttes antiesclavagistes. L'argent permet de gérer la violence
sociale en se dégageant des structures de violence sociale antérieure, des structures personnelles,
lige, féodales. L'argent est le prix, en quelque sorte, de cette émancipation des structures
traditionnelles. Ce prix peut lui-même générer, soutenir, construire une violence sociale intimement
liée à celle qu'il peut dépasser.
La nature de la cristallisation de la violence sociale doit être réfléchie quand on opte pour la
gratuité. On peut imaginer une société qui s'émancipe des prix et des salaires à condition qu'elle ait
pensé la violence sociale incarnée par la féodalité puis par le capitalisme de telle sorte qu'elle
constitue un devenir désirable pour ses membres. Pour le dire en terme simple, si la gratuité
implique la fuite dans une communauté sous le joug d'un gourou, elle ne constitue pas un devenir
souhaitable pour nous qui avons connu la libération de ce type de liens de soumission grâce à
l'argent – nous éprouverons des difficultés à revenir en arrière, à revenir à l'époque des prêtres tout-
puissants ou des seigneurs plus ou moins bienveillants parce que nous avons bénéficié de la
neutralisation sociale et de la distanciation de la violence sociale par l'argent. Pour autant, la piste de