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Le Courrier de l’algologie (2), no1, janvier/février/mars 2003
Mise au point
Mise au point
plus fréquents que l’administration
est prolongée, que les patients sont
âgés, que la dose administrée est im-
portante et qu’il existe une patholo-
gie sous-jacente (insuffisance rénale,
cardiaque, cirrhose hépatique, anté-
cédents d’ulcère gastroduodénal).
Les AINS sont contre-indiqués chez
les patients hypovolémiques, chez
ceux qui présentent des anomalies
de l’hémostase, chez les insuffisants
rénaux ou cardiaques, chez les cir-
rhotiques, chez les patients ayant des
antécédents d’hémorragie digestive
ou d’ulcère gastroduodénal et chez
les asthmatiques. Ils sont principa-
lement indiqués en cas de pathologie
avec réaction inflammatoire (co-
liques néphrétiques, douleurs articu-
laires aiguës, douleurs osseuses, pa-
thologie stomatologique et ORL,
etc.). De nombreuses molécules exis-
tent et, dans le contexte de l’urgence,
la molécule la plus adaptée reste le
kétoprofène à la dose de 100 mg
toutes les 8 heures en intraveineux
lent sur 10 minutes. Le délai d’ac-
tion est d’environ 15 à 20 minutes,
avec une durée d’action de 4 à
6heures. Il peut être associé à
d’autres antalgiques (effet additif
avec le paracétamol et synergique
avec les morphiniques). Un nouvel
AINS, plus spécifiquement anti-cy-
clo-oxygénase 2, est depuis peu dis-
ponible pour l’administration intra-
veineuse : le parécoxib, prodrogue
du valdécoxib, n’est pas encore éva-
lué dans le contexte de l’urgence, no-
tamment traumatique.
Le mélange équimoléculaire pro-
toxyde d’azote (N2O)-oxygène
(MEOPA) contient 50 volume-% de
chaque gaz. Son administration est
contre-indiquée lorsque la tempéra-
ture extérieure est inférieure à 5 °C.
En effet, en dessous de -7 °C, le N2O
se liquéfie, d’où le risque d’adminis-
trer un mélange appauvri en oxygène.
Le N2O est un analgésique d’action
centrale dont les effets dépresseurs
hémodynamiques sont très modérés.
Beaucoup plus diffusible que l’azote,
le N2O pénètre plus rapidement dans
les cavités aériennes closes que
l’azote n’en sort. Il augmente donc le
volume des gaz quand les parois des
cavités sont distensibles ou augmente
la pression intracavitaire quand les
parois sont rigides. Son action anal-
gésique est rapide et ses effets dispa-
raissent en 2 minutes environ, même
après une administration prolongée
(effet on-off). Du fait du passage ra-
pide sang-alvéole, le N2O diminue la
concentration des autres gaz présents
dans l’alvéole, pouvant entraîner une
hypoxie de diffusion. L’oxygénation
du patient doit donc être systématique
pendant au moins 15 minutes après
utilisation de Kalinox®. Kalinox®est
contre-indiqué dans les situations sui-
vantes : traumatisme crânien avec
troubles de la conscience, trauma-
tisme maxillo-facial, présence d’une
cavité aérienne close dans l’orga-
nisme (pneumothorax spontané ou lié
à un traumatisme thoracique, embo-
lie gazeuse, distension gastrique ou
intestinale), température ambiante in-
férieure à 5 °C et risque d’hypoxie de
diffusion (patient hypoxémique). Son
utilisation intensive et prolongée ex-
pose le personnel aux risques des ef-
fets indésirables du N2O liés à l’inac-
tivation de la vitamine B12. Il est très
utilisé pour l’analgésie préhospita-
lière dans les pays où la prescription
de morphinomimétiques n’est pas au-
torisée (21). Il est particulièrement
utile en traumatologie préhospitalière,
en association à d’autres antalgiques,
à la fois pour des gestes courts tels
que la réduction de fractures, mais
également pour l’analgésie continue
pendant le transport. Son utilisation
s’étend progressivement dans les ser-
vices d’urgences, chez l’enfant
comme chez l’adulte, notamment en
traumatologie pour la réalisation de
gestes douloureux brefs.
Le néfopam est un analgésique non
morphinique d’action centrale prédo-
minante qui agit par inhibition de la
recapture de la dopamine, de la nora-
drénaline et de la sérotonine et n’a au-
cune action anti-inflammatoire. Il est
contre-indiqué en cas d’antécédents
de convulsions, de risque de rétention
urinaire ou de glaucome à angle fermé
et chez l’enfant de moins de 15 ans. Il
est surtout utilisé par voie intravei-
neuse lente à la dose de 20 mg sur
45 minutes toutes les 4 à 6 heures.
L’administration trop rapide est mar-
quée par une incidence accrue d’effets
indésirables à type de sueurs, somno-
lence, nausées et vomissements, ma-
laises et réactions atropiniques. Un
travail récent sur la douleur aiguë
postopératoire montre une efficacité
supérieure de l’association néfopam-
morphine par comparaison à la mor-
phine seule et à l’association mor-
phine-propacétamol (20).
Le chlohydrate de tramadol est un
analgésique de mécanisme d’action
centrale complexe lié, d’une part, à
sa capacité d’augmenter la libération
ou de diminuer la recapture de la sé-
rotonine et de la noradrénaline et,
d’autre part, à une action opioïder-
gique faible. Il est métabolisé dans le
foie par le système enzymatique du
cytochrome P450 et les métabolites
ont une élimination rénale. Le pro-
duit est administré par voie intravei-
neuse lente à la dose initiale de
100 mg suivie par une titration en
bolus de 50 mg toutes les 15 à 20 mi-
nutes, sans dépasser la dose de
250 mg. La dose d’entretien est de 50
à 100 mg toutes les 4 à 6 heures. Le
pic analgésique est atteint en 60 mi-
nutes, la demi-vie d’élimination est
de l’ordre de 5 heures et la durée
d’action d’environ 6 heures. Cer-
taines contre-indications en limitent
l’utilisation : l’insuffisance respira-
toire, l’insuffisance rénale et/ou hé-
patique, l’épilepsie non contrôlée, le
sevrage toxicomaniaque, l’associa-
tion aux IMAO et l’hypersensibilité
au tramadol ou aux opiacés. Le tra-
madol peut induire des effets colla-
téraux tels que nausées, vomisse-
ments, vertiges, sédation, prurit. Ces
effets paraissent d’autant plus fré-
quents que le produit est administré
rapidement. La survenue d’une dé-
pression respiratoire est exception-
nelle. Son action analgésique est di-
minuée mais non abolie par la
naloxone. La place du tramadol en
médecine d’urgence préhospitalière,
notamment par comparaison à la
morphine titrée intraveineuse, reste à
démontrer.