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D.A.R. - Hopital BOUCICAUT.
L’ANALGESIE CONTROLEE PAR LE PATIENT
( oxymag 1992 - Claire LEPPERT, interne d'anesthésie : hopital HENRI MONDOR - 94010 CRETEIL CEDEX)
INSUFFISANCE DES METHODES D'ANALGESIE TRADITIONNELLES
Les méthodes classiques de prescription des antalgiques sont insuffisantes pour obtenir une bonne
analgésie tenait d'une part à un défaut d'information du personnel soignant ( infirmières et médecins)
sur la pharmacologie des traitements antalgiques et d'autre part à une insuffisance de prescription.
Ainsi les morphiniques suscitent une crainte de leurs effets secondaires ( accoutumance, dépendance,
dépression respiratoire) qui est largement surestimée; elle conduit les médecins à réduire leur
utilisation. Les méthodes de prescriptions systématiques à doses fixes ne répondent pas aux variations
pharmacologiques considérables d'un individu à l'autre. Ainsi la réponse analgésique pour un même
taux plasmatique varie de 2 à 5.
Une dose prédéterminée peut donc être insuffisante ( persistance de la douleur) ou au contraire trop
importante. Enfin, l'absorption de morphiniques est imprévisible par voir I.M.. Elle provoque des
variations du délai d'apparition du pic sérique et du taux sérique maximum.
Le délai entre l'apparition de la douleur et sa sédation, plus qu'un défaut d'efficacité des agents utilisés
est en fait la principale cause d'échec des traitements analgésiques, ce délai se reproduit d'autre part à
plusieurs reprises avant chaque administration.
L'ANALGESIE CONTROLEE PAR LE PATIENT ( A.C.P.)
Historique
Le concept d'A.C.P. date de 1968. SECHZER a étudié la réponse analgésique à des petites doses
intraveineuses de morphiniques, administrées par une infirmière, à la demande du patient. Il a été
constaté que les besoins variaient énormément d'un patient à l'autre, mais qu'ils restaient stables pour
un même individu. Une meilleure analgésie était d'obtenir avec des doses totales beaucoup plus faibles
qu'avec une prescription systématique.
Les premiers prototypes permettant au patient de s'administrer eux-mêmes des bolus de morphiniques
apparaissent dans les années 70.
C'est la WELSH NATIONAL SCHOOL OF MEDECINE qui met au point en 1976 le premier
appareil commercialisé : le CARDIFF PALLIATOR.
Depuis les progrès technologiques ont conduit à des pompes programmables beaucoup plus
sophistiquées et plus sûres.
Dès la fin de l’anesthésie en salle de réveil et ultérieurement en post-opératoire, médecins et infirmières sont
confrontés au problème de la douleur ressentie par les patients dans les suites de la chirurgie qu’elle soit minime
ou majeure. Souvent la douleur post-opératoire est mal prise en compte par des prescriptions systématiques
"standardisées", ne tenant pas compte des variations individuelles, aussi bien dans l'intensité du symptôme
ressenti que dans la réponse au traitement.
Depuis quelques années, l'idée a fait son chemin que les patients, s'ils étaient convenablement surveillés,
pouvaient s'administrer eux-mêmes le traitement antalgique, adaptant ainsi sa posologie à leurs besoins. Ce
principe est rendu possible par l'utilisation de pompes programmables délivrant sur demande les antalgiques.
Quelles en sont les principes, les champs d'application et les limites ?
C'est ce que nous allons envisager dans cet article ....
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Fonctionnement d'un système A.C.P.
La pompe comprend :
Une seringue contenant la solution analgésique reliée au patient par une tubulure munie d'un
système anti-reflux connectée le plus souvent par voie intraveineuse.
Un système de programmation permettant de déterminer le volume des injections délivrées au
patient et l'intervalle séparant ces injections ainsi que la vitesse d'une perfusion continue
éventuellement associée aux injections intermittentes.
Une connection du patient à la pompe permettant d'enregistrer les demandes effectuées par le
patient en appuyant sur un bouton de commande qu'il tient main. La prescription de l'analgésie
consiste à déterminer les paramètres de programmation de la pompe c'est à dire :
Le volume des bolus ( donc la dose d'analgésie délivrée)
La période réfractaire séparant deux bolus
La dose à ne pas dépasser sur une ou plusieurs heures qui est la dose maximale autorisée au
patient. Certaines pompes associent une perfusion continue dont l'objectif et 'd'assurer une plus
grande stabilité des taux plasmatiques d'analgésiques et donc d'empêcher une réapparition trop
fréquente des sensations douloureuses.
Plusieurs sécurités ont pour objectif d'éviter un surdosage accidentel des patients.
Il s'agit :
de la période réfractaire et de la dose limite horaire que nous avons déjà vues.
de la tubulure en Y anti-reflux ( elle est fréquemment associée à une alarme de
surpression).
du verrouillage de l'accès à la pompe qui empêche toute manipulation intempestive par
le patient ou son entourage.
L'A.C.P. est souvent débutée en salle de réveil : le patient en cas de douleur appuie sur le bouton
pressoir et provoque l'injection d'un bolus antalgique. Il est encouragé à utiliser l'appareil en
prophylaxie avant les soins post-opératoires, la kinésithérapie, la toilette, etc.
Après l'initiation de la pompe l'A.C.P. ne doit pas synonyme de facilité mais nécessite une surveillance
attentive.
Le rôle du personnel infirmier est ici primordial, il doit rechercher régulièrement les effets indésirables
des morphiniques, en particulier, des signes prémonitoires de dépression respiratoire, tels qu'une
sédation excesssive ( tableau 1), un ralentissement de la fréquence respiratoire ( < 10 mn) qui doit être
mesurée régulièrement. Une surveillance à l'aide d'oxymètres de pouls mesurant la saturation artérielle
en oxygène est également souhaitable. Les paramètres surveillés doivent être mesurés régulièrement (
fréquence respiratoire toutes les heures, SaO2 en continu) et reportés sur une feuille de surveillance.
Des consignes claires et précises doivent être prescrites pour faire face aux situations de surdosage.
La NALOXONE qui antagonise spécifiquement l'effet des morphiniques doit être disponible au lit des
patients. En cas de problème, un médecin anesthésique doit pouvoir être joint et se trouver disponible
rapidement.
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La qualité de l'analgésie doit être également appréciée régulièrement afin d'évaluer l'efficacité du
traitement antalgique. Ceci est possible à l'aide d'un interrogatoire précis ou plus objectivement en
utilisant des échelles visuelles analogiques. Il s'agit d'une ligne que laquelle le patient déplace un
curseur entre deux extrémités figurant l'absence de douleur et à l'opposé la douleur la plus intense
possible. Après que le patient ait évalué l'intensité de la douleur ressentie à l'aide du curseur, la règle
est retournée et sur l'autre face apparaît une échelle graduée ( 0 -10) précisant le chiffre indiqué par le
curseur. Cette manoeuvre peut être répétée régulièrement et permet de suivre l'évolution de la douleur.
On comprend que cette surveillance nécessite un personnel infirmier informé, suffisamment nombreux
et incite donc à placer les patients dans différentes unités de soins intensifs ce que justifie par ailleurs
leur pathologie.
Agents analgésiques
L'analgésique idéal pour l'A.C.P. doit présenter les propriétés suivantes :
installation rapide de l'effet analgésique.
puissance effective
durée d'action intermédiaire ( adaptation possible)
absence d'effets secondaires
absence d'interaction médicamenteuse indésirable
Cet analgésique idéal n'existe pas. Aucun produit ne semble s'imposer par rapport à un autre. Dans la
pratique, la morphine reste le plus utilisée. Son délai d'action peut être raccourci en utilisant une
titration IV préalable par un morphinique d'action rapide.
Les avantages
L'A.C.P. est adaptée aux besoins en antalgiques propres à chaque patient. Ce dernier a la satisfaction
de prendre en charge sa douleur et d'être indépendant du personnel soignant. Son anxiété face aux
retards de l'administration des antalgiques est supprimée.
Un indice élevé de satisfaction est retrouvé chez les patients et le personnel soignant. Une douleur
résiduelle acceptable plutôt qu'une suppression totale est souvent souhaitée par la plupart des patients,
afin d'éviter certains effets secondaires ( sédation).
D'autres avantages ont été mis en évidence tels qu'une augmentation de l'activité physique spontanée et
une diminution des désordres du sommeil post-opératoire.
Enfin une réduction du séjour moyen hospitalier a pu être mise en évidence.
Les inconvénients
L'inconvénient majeur est représenté par le coût de l'A.C.P. ( achat des pompes et du matériel adapté,
formation et présence du personnel infirmier qui doit assurer la surveillance). La réussite de cette
technique nécessite un personnel qualifié et une surveillance rigoureuse.
Aucune dépression respiratoire n'a été décrite jusqu'en 1987 où deux accidents ont été rapportés : l'un
dû à une erreur de programmation l'autre à une manipulation accidentelle.
Les causes des accidents sont les suivantes :
a) erreur imputable à l'opérateur ( défaut de programmation,
de mise en route, surdosage de la solution analgésique).
b) abus intentionnel du malade ou de son entourage.
c) problèmes mécaniques
Ces inconvénients soulignent encore une fois la nécessité d'une surveillance attentive des patients.
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Indications
L'analgésie auto-délivrée n'est pas nécessaire pour tous les patients, elle est réservée aux types de
chirurgie les plus algiques ( chirurgie thoracique, abdominale majeure).
Environ 15 à 20% des patients sélectionnés ne peuvent utiliser le système en raison d'un défaut de
compréhension ou d'une anxiété trop grande.
Ce problème souligne la nécessité d'explications préalables de la pompe et de son fonctionnement au
patient, explication qui sont au mieux fournies en pré-opératoire.
Enfin la nécessité de disposer d'unités de surveillance appropriées et le nombre de places de
disponibles dans ces unités est un mode de sélection indirecte des patients.
Conclusion
L'intérêt grandissant des soignants pour la prise en charge de la douleur post-opératoire bénéficie de la
technologie des systèmes d'analgésie autodélivrée.
L'utilisation de ces systèmes nécessite un apprentissage du personnel soignant et une surveillance
appropriée ainsi que des structures adaptées à défaut de quoi elle ne saurait être mise en place.
Echelle d'évaluation de la sedation
0
patient éveillé
1
somnolent, répond aux stimulations verbales
2
somnolent, répond aux stimulations tactiles
3
non stimulable
Tableau 1
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