UNIVERSITÉ D’ÉTAT D’HAÏTI CAMPUS HENRI CHRISTOPHE DE LIMONADE Faculté Lettres Sciences Humaines et Sociales Psychologie L2S3 Cours : Introduction à la psychiatrie Sujet : La Dépression Devoir proposé par M. PIERRE Michel dans le cadre du cours d’introduction à la psychiatrie Réalisé par Kenson DEROSAN & Madhva D. PAUL Cap-Haïtien, Mars 2016 Plan I- Introduction IIII.1- La dépression & Etat des connaissances actuelles II.1.1- Epidémiologie de la dépression II.1.2- Types de dépression II.1.3- Facteurs de la dépression II.1.4- Evolutions et Conséquences à travers le monde II.3- La dépression en Haïti II.4- Proposition pour une meilleure approche psychothérapeutique II.5- Etude de cas III- Conclusion IV- BIBLIOGRAPHIE Introduction La dépression est un état évolutif pathologique accompagné des troubles dysthimiques correspondant ainsi à un trouble affectif irritant dominé par une tristesse intense et une symptomatologie anxieuse. Il faut noter aussi la perte d’espoir, la manque d’envie, l’affaiblissement considérable d’estime de soi trop intense et durable que cela entraine. Elle évolue par séquences dont la rigidité, la répétition ou le passage à la chronicité entraînent une dégradation du comportement avec perte de motivation ou d’élan vital, des pensées négatives, des idées noires, des intentions suicidaires ou d’autres modifications de l’humeur faisant preuve d’une exaltation avec hyperactivité maniaque voire hallucinatoire manifesté dans 15% à 20% des cas. En effet, le terme dépression provient du latin « dépression1 » qui signifie enfoncement. C’est autour du XIXème siècle que le terme est apparu dans son usage psychologique. Première cause d’incapacité psychique et physique, la dépression est une pathologie multifactorielle et ses causes sont multiples. La dépression peut être considérée comme le cancer du siècle. Elle envahisse un monde déjà traumatisé par des peurs intenses et des inquiétudes sérieuses. Elle a des répercussions non seulement sur la santé en général et la survie mais aussi sur la vie familiale, les relations sociales et le travail. La qualité de vie des personnes dépressives et de leur entourage est affectée. Selon l’OMS2, 1/5 de toutes les causes de handicap sont dues à des maladies psychiatriques et en premier lieu à la dépression et à l’anxiété. Par conséquent, dans un pays comme le nôtre où la misère est la seule richesse qui nous reste, où la peur et l’inquiétude sont nos seuls motivateurs, il est évident de nous voir incliner à ces genres de pathologies. A titre de problématique, montrons qu’effectivement la dépression est le mal du siècle en soulignant avec un intérêt envoutant les diverses conséquences et déficiences engendrées d’une part, à travers le monde et d’autre part, en Haïti. Pour faire point sur la problématique de départ, nous mobilisons les arguments suivants : En premier lieu, le monde d’aujourd’hui est sujette à toutes sortes de drames et tragédies pouvant imprimer de fortes inquiétudes, peur et tristesse chez la population en vie tel ; les guerres mondiales, le réchauffement climatique, la baisse inquiétante de l’Esperance de vie etc... En second lieu, chez nous en Haïti, devenir 1 Grand dictionnaire de la psychologie, Larousse-Bordas, Canada, 1991 2 OMS/OPS. (2010). Culture et santé mentale en Haïti : une revue de littérature. Genève : OMS déprimés est une normalité acceptée vue que toutes les conditions sont mobilisées pour de tels façonnements. Ayant ces arguments comme base, nous déduisons « Puisque le monde y compris Haïti est le théâtre des bizarreries humaines, et que, notre destinée a voulu qu’on les vive chaque jour, en conséquences nous imprimons fortement un caractère déprimant ce qui augmente le risque parfait de voir un monde dominé par une telle pathologie ». Dans une première partie nous présenterons les données épidémiologiques, et les causes de la maladie. Nous étudierons la physiopathologie et la clinique de la dépression afin d’explorer les différents champs concernant la maladie, les signes cliniques ainsi que les évolutions possibles de la dépression. Dans une seconde partie, nous ferons un étalage plus ou moins concret de la dépression dans le monde. Ensuite, la contextualiser en Haïti dans une troisième partie c'est-à-dire, nous toucherons la compréhension psychomédicale et les facteurs déclenchants de la dépression. Dans une quatrième partie, nous prenons le soin d’étaler les diverses façons de préventions et de thérapies appropriées tout en essayant de proposer une meilleure façon d’appréhender les diverses méthodes de thérapies. Enfin dans une dernière partie, nous présenterons une étude de cas racontant ainsi l’histoire d’Honorine. II.1- La dépression & Etat des connaissances actuelles La dépression est une maladie mentale caractérisée par un trouble de l’humeur. Un certain nombre de critères définissent la dépression, comme par exemple : l’humeur triste, une perte d’intérêt, un sentiment de découragement, des troubles du sommeil et de concentration, des perturbations de poids, un ralentissement psychomoteur ou une agitation, une fatigue chronique, des pensées récurrentes à la mort… En outre, elle est l’un des troubles psychiatriques les plus fréquents. Cependant cette pathologie reste encore bien méconnue en partie parce qu’il s’agit d’une maladie difficile à définir en pratique. En effet, la signification de « dépression » n’est pas la même pour tout le monde. La représentation psychiatrique de la dépression est définie à partir de symptômes reconnus, mais qui ne concordent pas toujours avec la représentation populaire. Aussi, les classifications utilisées pour le diagnostic de la dépression varient selon les professionnels de santé. La plupart des professionnels de la santé utilisent le modèle médical pour définir la dépression. Dans ce modèle, le diagnostic est posé sur base de certains symptômes indépendamment des causes qui ont amené l’état dépressif. Les critères généralement utilisés et qui font actuellement autorité en matière de diagnostic psychiatrique, sont définis par l’American Psychiatrique Association dans le DSM-IV (Diagnostic Statistique Manual of Mental Health, 4ème édition, 1994). C’est aussi une pathologie qui se propage par stade et devient, à chaque stade d’évolution, de plus en plus chronique. Nous verrons plus bas à quel rythme se propage la dépression dans le monde. II.1.1. Epidémiologie de la dépression La dépression est considérée comme le « mal du 21ème siècle ». Les chercheurs spécialistes de l’OMS considèrent qu’elle pourrait devenir, en 2020, la première cause d’invalidité, devant les maladies cardiovasculaires. L’homme, au cours de son évolution naturelle est devenu un individu social pour assurer sa survie. Ainsi, sont apparus les liens affectifs, les notions de propriété, de niveau éducatif ou encore de position sociale. Tous ces aspects vont générer un état émotionnel qui permettra à l’individu de s’adapter et de faire face à un large spectre de situations. Cependant, dans nos sociétés modernes, l’impact du stress, de la compétition, l’affaiblissement des liens sociaux, les sollicitations diverses, l’individualisme, ont entraîné un dérèglement du système qui va donc passer du normal : l’adaptation, au pathologique : la dépression. Données épidémiologiques Selon l’OMS, la dépression est la maladie mentale la plus fréquente, touchant environ 120 millions de personnes dans le monde, avec une fréquence permanente de 1% de la population générale. En France, selon une enquête de l’Institut National de Prévention et d’Education pour la santé (INPES), 19 % des Français de 15 à 75 ans, soit près de 9 millions de personnes, ont vécu, vivent ou vivront une dépression au cours de leur vie. La prévalence d’un épisode dépressif majeur varie entre 6 et 12% sur un an (environ 3 millions de personnes en France seraient touchées par cette maladie). Ainsi, une personne sur cinq présentera une dépression caractérisée au cours de sa vie. Toute personne peut être concernée par ce trouble dont ont souffert certaines personnalités du monde des arts (Dalida), des sciences (Isaac Newton), du sport (Christophe Dominici) ou de la politique (Winston Churchill). L’âge est le premier facteur de risque. La période à risque le plus élevé correspond à la tranche d’âge de 18 à 44 ans. En moyenne, le premier épisode dépressif majeur apparaît aux alentours de 30 ans, mais on assiste à une diminution progressive de son âge de début. La prévalence d’un épisode dépressif majeur augmente avec l’âge jusqu’à 50-64 ans, puis diminue. La population féminine est la plus touchée, soit deux femmes pour un homme. Les personnes vivant seules (divorces, veuvage) sont plus à risques. Tous les milieux socio-économiques sont concernés. Visualisons la figure ci-dessous nous donnons une idée de l’évolution de la dépression en Europe. II.1.2-Types de dépression Il existe différents types de dépression dépendant de la durée de la maladie, de la sévérité et de la récurrence des épisodes. Dans la plupart des cas, on parle de l’épisode dépressif majeur. Il a été démontré que ces troubles de l’humeur sont directement liés à une altération du mécanisme des neurotransmetteurs tels que la noradrénaline, la sérotonine et la dopamine. Ainsi, nous avons mentionné les plus importants parmi les types proposés. On en distingue : Dépression- forme typique Elle est identique à celle de l’adulte et comprend une perte de l’élan vital, associée à une perte de l’intérêt pour les activités habituelles, une perte du goût à faire les choses, une perte des envies et de la capacité à éprouver du plaisir (anhédonie). Ce noyau dépressif se complète d’une tristesse pathologique, d’une douleur morale avec plus ou moins une envie permanente de pleurer (reflet de la souffrance affective), de perturbations psychomotrices (ralentissement ou agitation), d’une perte de l’estime de soi (dévalorisation, auto-dépréciation), d’un pessimisme, de troubles des fonctions instinctuelles (perte d’appétit et/ou du poids, altération du sommeil, fléchissement de la libido), de signes somatiques (asthénie, fatigue excessive, douleurs, perturbations digestives, frilosité), d’un fléchissement intellectuel (troubles de l’attention, de la concentration et plaintes de mémoire associées ou non à de réels troubles). Des idées noires et/ou des ruminations suicidaires peuvent aussi être présentes. Il n’est pas rare que ces symptômes centraux de la dépression soient attribués de façon erronée au vieillissement normal (Clément et al., 2010). Dépression - forme mélancolique La mélancolie est un état dépressif intense avec majoration de la douleur morale, de l'auto dévalorisation, de l'auto accusation, de l'anesthésie affective. Le ralentissement est marqué par un « masque de tristesse ». Le malade parle peu, à voix basse ou, au contraire, est très agité. Le risque suicidaire est alors majeur. La douleur morale culmine le matin. La perte de poids est souvent significative. La dépression anxieuse La présentation que l’aîné fait de lui va de l'angoisse à réaliser les actes de la vie quotidienne, source de désapprentissage et donc de dépendance, à l'ennui. Les troubles de l'humeur s'accompagnent beaucoup d'anxiété ; une angoisse surtout matinale qui contraste avec les peurs vespérales de la démence. La tristesse n'est pas toujours apparente derrière les traits figés, la douleur morale est rarement exprimée. Les habiletés cognitives sont volontiers altérées mais on note davantage de plaintes subjectives (sensation de baisse intellectuelle, impression de perte de mémoire), une atteinte objectivée par les tests psychométriques. Cette altération de l'estime de soi, avec des troubles de la mémoire supérieure à l'altération objective de la mémoire, semble un bon témoin de dépression chez le sujet âgé. (Alexopoulos & Chester, 1992). La dépression hostile Les dépressions hostiles sont marquées par une expression colérique prédominante. Très souvent, les personnes âgées sont hypersensibles aux stimuli, y répondent par de l'agressivité, de la confusion. A l'inverse de ce qui est observé chez les plus jeunes, la culpabilité et l'auto-dépréciation sont au second plan ou absent quand la déception de soi et des autres est fréquemment alléguée pour expliquer la situation vécue et appeler la mort. Cette déception est surtout source de colère qui est un moyen de défense essentiellement utilisé pour évacuer sur autrui la souffrance. Dans ce cas irritabilité, agitation et colères s'associent à une humeur dépressive dans 81 % des cas lors d'une démence de type Alzheimer (Blanchard, 2003). La dépression à forme cognitive La dépression avec troubles cognitifs, dite pseudo-démentielle, pose le problème de l'intrication des démences et des dépressions. La dépression est en effet fréquente dans la maladie d'Alzheimer. Classiquement, la normalisation des troubles cognitifs après traitement efficace sur la dépression fait porter le diagnostic de dépression pseudo-démentielle La dépression à forme conative Les troubles de la vie affective sont centrés à cet âge sur la démotivation qui rend compte de la perte du plaisir à faire, de l'inutilité d'être, de l'insignifiance du lendemain, de la perte de l'habitude puis du goût d'entreprendre, du renoncement à anticiper. Il en résulte un désengagement affectif et relationnel et des troubles de la conation, avec comme postulat cognitif central l'idée négative suivante « ce que je fais ne compte pas ». Le « à quoi bon ? », dans cette situation, justifie de renoncer à l'effort d'entreprendre. Démotivation et isolement psychologique sont bien mieux acceptés par les aidants que les comportements perturbants. Il faut comprendre la souffrance latente derrière le symptôme pour accepter la personne âgée dans sa peine sans la laisser pour autant se figer dans le refus relationnel. L'isolement aggrave les difficultés affectives et le repli sur soi facilite le désapprentissage (Thomas et al., 1999). Dépression post-partum. Ce type de dépression est diagnostiqué chez les femmes qui viennent d’accoucher lorsqu’elles manifestent un trouble dépressif majeur dans le mois qui suit l’accouchement. Dépression psychotique. Ce diagnostic correspond à une dépression clinique grave accompagnée d’une perception faussée de la réalité, d’hallucinations, de délire ou d’autres formes de psychose. Trouble affectif saisonnier Cette forme de dépression s’atténue généralement au cours du printemps et de l’été. Elle est associée aux faibles taux de lumière solaire naturelle auxquels sont exposés les Canadiens durant l’hiver. II.1.3- Facteurs engendrant la dépression La dépression est la pathologie mentale la plus fréquente chez la personne âgée. C’est une affection hétérogène, tant dans sa clinique que dans son étiopathogénie et il faut distinguer les sujets ayant déjà fait des récurrences dépressives durant la vie adulte de ceux qui présentent leur premier épisode dépressif à l’âge tardif. La dépression est aussi difficile à reconnaître chez le sujet âgé du fait des modifications physiques contemporaines du vieillissement, de l’intrication fréquente avec des affections organiques, et de l’idée fausse mais trop classiquement répandue, que cette période de la vie s’accompagne inéluctablement d’une certaine tristesse. La vieillesse est en effet une période de crise et de fragilisation en raison des pertes multiples subies : perte de l’activité professionnelle, perte d’un corps en bonne santé, perte de personnes chères... Parmi les facteurs, nous avons énuméré : Les facteurs prédisposant Certaines caractéristiques cliniques, sociales et démographiques présentes avant la pathologie dépressive, comme : L’âge : différentes études ont montré une relation importante entre l’âge avancé et la survenue d’une dépression (Meller et al., 1996). A l’inverse, l’étude EURODEP a démontré que la présence de comorbidités était le facteur principal dans la survenue de la dépression, indépendamment de l’âge (Blazer, 2003). Le sexe féminin : comme pour l’âge, il existe une relation entre l’accumulation des comorbidités ajoutée en plus à une espérance de vie plus longue (Sonneberg et al., 2000 ; Bergdahl et al., 2002). Un faible niveau d’étude et l’isolement social : pour Besson et al. (2000), ils sont aussi considérés comme des facteurs de risque. De même pour Fonda et al.3, les sujets avec un moindre engagement social, comme par exemple ceux qui ne peuvent plus conduire, présentent un risque plus important de survenue de dépression. - les pathologies vasculaires : les accidents vasculaires cérébraux de la substance blanche jouent un rôle important dans l’apparition d’une dépression tardive, et plusieurs auteurs ont défini le concept de dépression vasculaire (Devanand et al., 2004). - les maladies physiques : surtout si elles entraînent une perte d’autonomie. L’association entre dépression et affection organique se fait dans les deux sens (Lin et al., 2003), puisque la dépression aggrave la perte d’autonomie et le pronostic (Baldwin, 2008). La dépression reste étroitement associée avec l’existence de problèmes organiques, de troubles cognitifs ou de troubles sensoriels. Il en est de même d’une perte de poids (Morley et al., 1994) et de la perte de vision (Horowitz et al., 2005). Cependant le bas niveau socio- économique, le bas niveau d’études, les faibles qualifications professionnelles, un modeste niveau socioculturel, un faible niveau éducatif sont autant de risques de dépression. Les troubles dépressifs résultent de nombreux facteurs : - biologiques : génétique en particulier. - somatiques : pathologies organiques chroniques, invalidantes, douloureuses : affections endocrino-métaboliques, maladies neurologiques centrales, effets iatrogènes de certaines molécules (par exemple l’interféron). - psychopathologiques : personnalités pathologiques, les autres maladies psychiatriques comme les troubles névrotiques et anxieux. - addictologiques : alcool et autres substances psychoactives. Parmi les facteurs psychologiques et environnementaux, on peut également citer les deuils, les séparations précoces (petite enfance), les abus sexuels subis dans l’enfance ou l’adolescence, surtout dans le milieu familial. Ainsi, tous les évènements stressants de la vie sont des facteurs favorisant la survenue de troubles dépressifs ou favorisant les rechutes. Parmi eux, il est nécessaire de souligner l’impact des pertes ou des « sorties du champ social », comme des séparations conjugales, divorces, licenciements. Enfin, chez la femme, les dépressions du post-partum, qui touchent 10 à 20% d’entre elles, entraînent non seulement des 3 Fonda et All., Dépression dans les démences, 2001. souffrances pour la mère mais aussi des perturbations de la relation « mère-enfant » pouvant engendrer des troubles du développement du bébé. II.1.4- Evolutions et Conséquences à travers le monde L'évolution de la dépression est variable d'un malade à l'autre. La guérison sans rechute se voit dans 1/3 des cas, 1/3 des patients passent à la chronicité, le denier tiers rechute ou s'installe dans des états dépressifs résiduels : désengagement, démotivation chronique, ennui et régression. La dépression favorise l’aggravation des maladies somatiques préexistantes, une mauvaise compliance aux autres traitements, des décompensations organiques. Un risque d’évolution vers une démence reste toujours débattu. Sur une période de 3 ans, on estime que 35 % des sujets âgés vont obtenir une rémission complète, 22 % une récidive, 29 % aucune rémission et que 14 % seront décédés (Murphy, 1983). La méta-analyse de Cole et al. (1999) a retrouvé des chiffres similaires. Les facteurs de risque de mauvais pronostic sont l’existence de symptômes initiaux sévères, d’un déficit cognitif associé et d’une maladie physique concomitante mal équilibrée. Mais le plus important reste un traitement mal conduit, en particulier poursuivi insuffisamment longtemps. Les conséquences néfastes sur la morbidité, sur l’autonomie, sur la qualité de vie et sur le recours aux services de santé sont importantes (Charney et al., 2003). Après un traitement bien conduit, l’évolution est favorable dans 60 % des cas. Si la dépression du sujet âgé est aussi méconnue en médecine générale, c’est en partie lié au fait qu’elle prend, à côté d’une présentation qui correspond souvent à celle de l’adulte, des formes spécifiques que l’on peut qualifier de « masques » de la dépression et de formes avec une expression symptomatique atténuée (Gallo & Coyne, 2000), nombreuses à cet âge, mais pouvant constituer les prémices de troubles dépressifs plus sévères. On entend par « dépression masquée », une forme clinique où des symptômes somatiques (ou autres) prennent le devant du tableau. Il peut y avoir également des conséquences qui affectent l’organisme dans son entier dont : Sur le plan des neurotransmetteurs : Une baisse de sérotonine qui entraîne souvent une perte de sommeil et une diminution de l'appétit ; une baisse de noradrénaline qui influence la perte d'énergie, le manque d'intérêt et de plaisir et entraîne les pensées négatives qui s’aboutira jusqu’au suicide. Sur le plan hormonal : Le flux de plusieurs hormones est en baisse ; la fonction immunitaire est également amoindrie. II.3- La dépression en Haïti Haïti comme nation est déjà une source de dépression. Placée 154e sur 177 pays dans le monde, il est le plus pauvre du bassin occidental. Ancienne perle des Antilles devenue aujourd’hui l’aléa de la caraïbe. La nation nous donne déjà l’occasion de naitre avec un héritage commun, la dépression. Pays sans infrastructure où la technologie de base est la magie, conséquence directe du Vodou pris comme aide face à la peur et à la tristesse. Le peuple vit aux dépens du stress. Le document4 dans lequel nous avons tiré cet extrait, nous le montre assez claire. Après 12 janvier 2012, Haïti devint le Pompéi de la caraïbe. Phénomène nouveau pour les ¾ illettrés du pays, le stress devient la monnaie courante et la réponse immédiate devant cette catacombe de plus de 300000 morts et plus de paralysies encore. Que peut devenir le mental d’un peule devant ce scène macabre propulseur d’un doute vital et de tristesse si intense ? Les Haïtiens font la différence entre le mot français « dépression » pour signifier le découragement, et la « dépression mentale » qui se réfère à la dépression telle qu’elle est comprise par la psychiatrie occidentale, généralement exprimée en termes de maux de tête, mal de dos ou autres douleurs corporelles non spécifiques (Hillel et al., 1994). Le concept haïtien de dépression est généralement exprimé en termes de symptômes somatiques : sensation de vide ou de tête lourde, insomnie, distraction (c’est-à-dire « ma tête estailleurs »), fatigue, manque d’énergie et d’appétit. Toutefois, la dépression n’est pas considérée comme une maladie mentale, mais comme un état d’affaiblissement général attribuable à des états pathologiques tels que l’anémie et la malnutrition. Elle peut être considérée comme le résultat d’une malédiction vaudoue, d’une inquiétude excessive, d’une préoccupation obsessionnelle au sujet des problèmes de la vie, ou dû à un traumatisme. En général, la famille élargie offre conseil et soutien aux individus en situation de dépression qui sont rarement traitée par les professionnels de santé (Desrosiers et Fleurose, 2002). 4 http://www.centrejeunessedemontreal.qc.ca/pub_revue.htm II.4- Proposition pour une meilleure approche psychothérapeutique Les troubles dépressifs font partie des maladies les plus graves et les plus importantes dans le monde entier et surtout en Haïti. Ils touchent, sous leurs différentes formes, jusqu’à 20 % de la population et ont une incidence négative sur la pensée, les émotions, le corps et les relations sociales, autrement dit sur toute la vie. Malgré sa signification, la dépression n’est souvent pas décelée ni traitée de façon appropriée, entraînant ainsi une grande souffrance et une nette baisse de la qualité de vie des personnes touchées et de leurs proches. Ces dernières années, il est ressorti clairement que la dépression était une maladie chronique due au stress, d’où le nom de „dépression de stress“. La dépression est en outre un facteur de risque pour d’autres maladies graves telles que la crise cardiaque, l’accident vasculaire cérébral, l’ostéoporose et le diabète. Non traitée, elle peut écourter l’espérance de vie. La dépression est une maladie grave mais guérissable. Il ne s’agit pas d’une tristesse normale, ni d’un échec ou encore d’un manque de volonté ! Les avancées de ces dernières années permettent de donner un nouvel aperçu plus complet des possibilités de traitement. Le traitement psychothérapeutique et médicamenteux continu et spécialisé est essentiel, il mène à une guérison complète. Les patients sans rémission complète connaissent une rechute dans 80 % des cas. Voilà pourquoi les patients sont suivis dans le cadre d’un traitement d’entretien prévenant les rechutes pendant au moins six mois. Le nombre d’épisodes dépressifs survenus dans le passé et leur intensité déterminent la nécessité d’un traitement sur le long cours, c’est-à-dire un accompagnement thérapeutique du patient au-delà du traitement d’entretien Scientifique et a pour objectif une meilleure compréhension de la maladie. Pour une meilleure approche psychothérapeutique en Haïti surtout, nous suggérions : Un traitement adéquat de la dépression qui se fasse toujours sous l’auspice d’un psychothérapeute performant non chez un mambo5 qui donne à la maladie un aspect spirituel6. Celle-ci conduit idéalement à une nouvelle gestion du stress, une correction de la dévalorisation personnelle et une assimilation des événements stressants personnels. Parmi les offres psychothérapeutiques, la thérapie comportementale et la thérapie interpersonnelle sont les mieux documentées à l’heure actuelle quant à leur efficacité. Elles réduisent en outre le risque de rechute à long terme et sont utilisées avec succès tant dans le domaine ambulatoire que dans les Hôpitaux. Ces thérapies modernes se concentrent sur la recherche de solutions et la mobilisation 5 Prêtresse de vodou en Haïti 6 Augustin J., Le Vodou libérateur. Et si le Vodou était une valeur ! Montréal : Tanboula ; 1999. des ressources, et pas uniquement sur la recherche d’anciens conflits et des causes en se concentrant sur les déficits. La pensée, les émotions et les actions s’influencent sans cesse mutuellement en nous et agissent sur nos fonctions physiques. Ces quelques traitements se réalisent par des moyens psychologiques, qui se fait par des entretiens réguliers, individuels ou en groupe, avec un psychothérapeute. La durée du traitement varie de quelques mois à plusieurs années. Elle peut être pratiquée seule ou associée à d’autres thérapeutiques. Il existe différentes formes de psychothérapies dont peuvent bénéficier les personnes dépressives. La psychothérapie s’appuie dans la plupart des cas sur un échange verbal, mais pas n’importe lequel. Il ne s’agit pas d’une « discussion » du type de celles que l’on a dans la vie de tous les jours. Il s’agit d’une relation particulière où un professionnel formé à l’écoute et à la compréhension des problèmes psychologiques propose, dans un cadre conçu pour cela, d’aborder ces problèmes d’une manière spécifique, différente de la nôtre et de celle que nos proches peuvent nous proposer. Une des règles essentielles de cette relation est de permettre l’expression de ce que nous vivons, ressentons et pensons en toute liberté, sans craindre d’être jugé ou critiqué. On pourra par exemple aborder des situations ou des émotions qui nous effraient, se pencher sur nos « zones d’ombre » et parler de choses très difficile à aborder, même avec nos proches. Le praticien est là pour entendre la souffrance, les difficultés, les doutes ; il favorise l’expression de ce qui est réellement ressenti et nous aide à mettre des mots sur notre vécu en utilisant différentes techniques : questions ouvertes, reformulation des problèmes, exercices de mise en situation, espaces de silence. Le praticien nous propose donc un face-à-face avec nous-mêmes en toute confiance, dans un cadre sécurisant. Tout est fait pour aller au-delà d’où nous avons l’habitude d’aller ; nous pouvons alors nous regarder d’une autre façon, prendre conscience de nouvelles choses, aborder nos problèmes d’une façon différente, trouver de nouvelles réponses et des solutions efficaces. Pour favoriser ce changement, le praticien peut aussi intervenir de façon plus active ; il peut nous inviter à parler d’un sujet particulier, nous transmettre sa compréhension du problème ou nous donner certaines explications, nous faire des recommandations, nous inviter à faire certains exercices (dans son cabinet, chez nous ou à l’extérieur) … Selon le praticien et la situation de la personne, différents modes d’intervention pourront être mis en œuvre. Ces modes d’intervention sont en effet adaptés à la personne qui consulte (à sa personnalité, à ses problèmes, à son type de dépression) et à la singularité de chaque situation de soin ; ils peuvent également évoluer en fonction des moments de la psychothérapie. La psychothérapie est un traitement toujours pertinent en cas de dépression, quel que soit le type de dépression, son niveau de sévérité ou son ancienneté, son origine diabolique ou spirituel. Elle peut être utilisée seule ou conjointement aux médicaments antidépresseurs ou à d’autres traitements. En cas de dépression sévère en phase active, un soutien psychologique sera proposé, mais le travail de psychothérapie ne pourra débuter qu’une fois l’intensité de la souffrance diminuée par le traitement médicamenteux. II.5- Etude de cas Etude de cas sur la dépression7 Honorine âgée de 40 ans, divorcée depuis 13 ans, sans enfants, attachée de direction, est hospitalisée ce jour pour un état dépressif typique, qui s’est installé progressivement depuis 4 mois. Elle n’arrivait plus à travailler correctement, se réveillait fréquemment dans la nuit, avait le sentiment de gâcher son existence, n’éprouvait plus d’intérêt pour ses loisirs habituels : l’opéra et la danse, pensait à la mort évoquait des idées suicidaires. Elle avait rencontré 7 mois auparavant un homme de son âge, de même condition sociale, en qui elle avait mis beaucoup d’espoir. Ne vivant qu’au travers de cette relation, elle ne peut accepter que celui-ci s’investisse dans son travail et la délaisse pour ses répétitions au théâtre. Quand tout va bien Honorine s’investie socialement et ce façon très importante, soucieuse de plaire, d’attirer l’attention, d’être remarquée par les autres : ses relations avec les autres femmes sont marquées par de la jalousie, de la rivalité et de l’envie. Lors de l’entretien d’accueil, elle signale avoir déjà présenté des épisodes dépressifs, et avoir tenté de se suicider par phlébotomie8, et par prise médicamenteuse. Le psychiatre en conclut que la dépendance à autrui et la surenchère d’Honorine au niveau social et relationnel traduisent une insatisfaction permanente, une anxiété intérieure, une fragilité constante évoquant une personnalité histrionique. Il prescrit : - stablon 12.5 : 1-0-0 - atarax 100 : 1-1-1 - théralène 4 % 30 gouttes le soir. Au 3ème jour d’hospitalisation d’Honorine vous reprenez votre service, vous observez que la présentation de la patiente est négligée, vous constatez également au moment des repas qu’elle s’alimente peu et son contact est fuyant. Lors de l’entretien que vous effectuez avec le psychiatre, Honorine exprime un sentiment d’échec et des idées suicidaires, remettant en cause toute son histoire « je n’ai pas su donner de sens à ma vie, je n’ai rien construit, je ne compte pour personne… » Lors de la réunion d’équipe, le projet thérapeutique suivant est élaboré Cette étude de cas a été prise dans un ouvrage traitant des sujets similaires. C’est donc une revue collective appelée « psycom » 7 8 Incision faite au Niveau des veines. Conclusion Les changements démographiques observés dans les pays occidentaux, faibles taux de natalité et augmentation de l’espérance de vie, vont entrainer, dans les décennies à venir, une nette augmentation de la proportion de personnes âgées. En 2000, l’Europe, avec une proportion de personnes âgés de plus de 65 ans de 15 % et une proportion de 75 ans ou plus de 7 %, pouvait être considérée comme le continent ayant la population la plus âgées au monde. En 2030, ces chiffres devraient augmenter à 24 % et 12 % respectivement (EC, 2005). Cette augmentation de population âgée aura alors un effet direct sur les systèmes de soins par une élévation disproportionnée de la prise en charge des personnes atteintes de démence ou de dépression. En Haïti, le problème dépasse la complication. La dépression est suscitée soit par les évènements traumatiques (Dépression réactionnelle) soit par les inquiétudes générées par les croyances religieuses ou les insécurités spirituels. Et exige pour cela de l’aide approprié. Les cliniciens doivent intégrer les croyances et les comportements à l’égard de la maladie et de la culture haïtienne afin de comprendre comment ces facteurs peuvent influencer leurs relations avec les patients. Ils doivent s’imprégner de la diversité médicale qui existe en Haïti. Les patients utilisent plusieurs modèles explicatifs et différentes sources d’aide. Les cliniciens doivent éviter d’adopter une attitude « de l’une ou l’autre » qui forcerait les patients à devoir choisir entre la médecine et la guérison traditionnelle. Ils doivent évaluer la compréhension que l’usager et la famille ont de la maladie. Une attention particulière devrait être accordée à la compréhension spirituelle de la maladie et les cliniciens sensibles doivent travailler en collaboration avec la famille et la communauté. Le corps médical devrait être en mesure d’assister la population en état de grands besoin en apportant leur soutien social, des comportements d'adaptation, une bonne nutrition, l’exercice et condition physique, le contrôle optimal des problèmes de comorbidité, l’attachement et la compréhension religieuse. BIBLIOGRAPHIE Alexopoulos & Chester, Outcomes of geriatric depression, clin geriatric Med ,1992 Augustin J., Le Vodou libérateur. Et si le Vodou était une valeur ! Montréal: Tanboula; 1999. Bergdahl et al., differences in depression among the every old, 2002 Blanchard J., Dépression du sujet âgé, Paris Falmmarion,2003 Devanand et al., Affect disorder, 2004 Fonda et All., Dépression dans les démences, 2001. Grand dictionnaire de la psychologie, Larousse-Bordas, Canada, 1991 Lin et al., effect of improving care on pain and functionnal outcomes among alder adults with arthritis, 2003 Sonneberg et al., Sex differences in late life depression, 2000 Sittographie http://www.centrejeunessedemontreal.qc.ca/pub_revue.htm