ESPACES DE TRAVAIL ET MANAGEMENT Etienne Maclouf 2011/3 N° 81 | pages 5 à 18 ISSN 1163-913X ISBN 9782747218290 Document téléchargé depuis www.cairn.info - Université de Versailles Saint-Quentin - - 193.51.33.29 - 15/12/2016 18h21. © ESKA Powered by TCPDF (www.tcpdf.org) Article disponible en ligne à l'adresse : -------------------------------------------------------------------------------------------------------------------http://www.cairn.info/revue-de-gestion-des-ressources-humaines-2011-3-page-5.htm -------------------------------------------------------------------------------------------------------------------Pour citer cet article : -------------------------------------------------------------------------------------------------------------------Etienne Maclouf, « Espaces de travail et management », Revue de gestion des ressources humaines 2011/3 (N° 81), p. 5-18. DOI 10.3917/grhu.081.0005 -------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- Distribution électronique Cairn.info pour ESKA. © ESKA. Tous droits réservés pour tous pays. La reproduction ou représentation de cet article, notamment par photocopie, n'est autorisée que dans les limites des conditions générales d'utilisation du site ou, le cas échéant, des conditions générales de la licence souscrite par votre établissement. Toute autre reproduction ou représentation, en tout ou partie, sous quelque forme et de quelque manière que ce soit, est interdite sauf accord préalable et écrit de l'éditeur, en dehors des cas prévus par la législation en vigueur en France. Il est précisé que son stockage dans une base de données est également interdit. Document téléchargé depuis www.cairn.info - Université de Versailles Saint-Quentin - - 193.51.33.29 - 15/12/2016 18h21. © ESKA ESKA | « Revue de gestion des ressources humaines » 5-18_Chap_1_Maclouf_Mise en page 1 17/06/11 09:41 Page5 © Éditions ESKA, 2011 ESPACES DE TRAVAIL ET MANAGEMENT D Document téléchargé depuis www.cairn.info - Université de Versailles Saint-Quentin - - 193.51.33.29 - 15/12/2016 18h21. © ESKA e nombreux travaux en sciences sociales ont montré que l’espace de travail conditionne en partie le rapport aux autres et à l’environnement (Moles et Rohmer 1972-1992), à son propre travail (la personnalisation du bureau : Montjaret 1996), à l’activité collective, en permettant la compréhension et les feedbacks (Oldham et Brass 1979). Il reflète la place et le rôle de chacun dans l’organisation, c’est-àdire le statut des individus (Pélegrin-Genel 1994, Baldry 1997). Il contribue au confort ou à l’inconfort d’une situation de travail1, en garantissant une sécurité, un abri, la possibilité de se retrancher de la vue des autres (privacité : Fischer 1989). Vis-à-vis de l’extérieur, tels les « châteaux de l’industrie » les bâtiments indiquent la puissance d’une organisation et rappellent son souvenir (monumentum : Lautier 1999). S’appuyant sur ce formidable potentiel, praticiens et chercheurs conçoivent l’espace comme une ressource stratégique pour concrétiser un projet, répondre aux besoins de l’organisation, améliorer son image, optimiser l’immobilier, accroître le bien-être. Cependant, à nos yeux, les phénomènes qui accompagnent les transformations du cadre physique de travail et les conséquences des configurations spatiales contemporaines demeurent méconnues ou mal comprises. Cet article tente de palier ce manque. A notre connaissance, aucune synthèse n’a encore été réalisée en sciences de gestion. Notre premier travail consiste à proposer une revue des différentes conceptions de la ressource spatiale, puis à exposer les objectifs de recherche. Ensuite, nous présentons la méthode, puis nous analysons et discutons les résultats obtenus. 1. LES RELATIONS ENTRE ESPACE ET ORGANISATION EN GESTION Les principales définitions proviennent de la sociologie (Lefebvre, 1974; Giddens, 1984; Boutinet, 1990; Evette, 1998; Lautier, 1999). L’espace matériel fournit un cadre, il est une ressource pour l’action. Il est également une contrainte qui impose des limites physiques aux interactions (Giddens 1984, citant le géographe Hägerstrand 1975 ; Girin 1989). Par conséquent, les occupants s’approprient les lieux prévus pour un usage, les adaptent, les font évoluer avec leurs pratiques. Si l’utilisation d’un lieu change, sa dénomination change également2. L’espace est le résultat d’un processus, à la fois contenant et contenu, ressource et contrainte, cadre et produit de l’action collective. Il peut aussi être vu avec Lautier (1999) comme un système de relations sociales et de travail médiatisées par un dispositif matériel. A l’instar de la technologie, 1 La presse se fait régulièrement le relai d’enquêtes ou de publications grand public sur les effets négatifs des openspaces (dernier article documenté en date, les Echos du 7 janvier 2010, Espace de travail : les limites du tout-ouvert, de Muriel Jasor et Caroline Montaigne). 2 La plupart des occupants ne décrivent pas l’espace par ses caractéristiques mais par l’utilisation qui en est faite (Evette, 1998; Lautier, 1999). La dénomination du lieu correspond à sa finalité (Boutinet, 1990), à son utilisation (Lautier, 1999) : le siège administratif, la salle de réunion, le bureau du Président, l’atelier de montage, l’espace de convivialité, la cafeteria, le plateau d’achat, la plateforme d’appels. 5 N° 81 - JUILLET - AOÛT - SEPTEMBRE 2011 Document téléchargé depuis www.cairn.info - Université de Versailles Saint-Quentin - - 193.51.33.29 - 15/12/2016 18h21. © ESKA Etienne MACLOUF Université Paris 2 Panthéon Assas (LARGEPA) 5-18_Chap_1_Maclouf_Mise en page 1 17/06/11 09:41 Page6 l’espace est une dimension de l’action collective en interaction avec les autres dimensions. En sciences de gestion, la recherche n’est pas unifiée. L’espace est encore une dimension méconnue (Schronen 1998, Fenker 2003, Maclouf 2005), implicite (Chanlat, 2006). Nous identifions trois courants. Le premier étudie la manière dont la localisation géographique facilite les coopérations interorganisationnelles et développe le territoire de la firme (approche territoriale T). Les deux autres sont nés des métiers de la gestion des espaces de travail3. L’approche corporate (C), présente principalement dans les travaux de langue anglaise sur le facility management, s’intéresse à la stratégie immobilière4 pour rationaliser l’organisation et développer son agilité. L’approche managériale moderne (M) conçoit l’espace comme une ressource pour guider et orienter l’action dans le sens voulu. Document téléchargé depuis www.cairn.info - Université de Versailles Saint-Quentin - - 193.51.33.29 - 15/12/2016 18h21. © ESKA 1.1. L’approche territoriale (T) : localisation et territoire de la firme L’approche territoriale (T) cherche à développer les coopérations grâce à la proximité géographique, notamment dans les clusters et les pôles de compétitivité. Le territoire de la firme (Joffre & Koenig, 1992), opérationnalisé dans l’agroalimentaire par Saives et Lambert (2000), est une ressource stratégique fondée sur les apprentissages interorganisationnels. Il procure trois avantages concurrentiels : il est le substrat des actifs spécifiques territorialisés, il réduit les coûts de transaction et favorise le développement de compétences spécialisées et spécifiques par les interactions. Cette définition relie une représentation économique de l’organisation « sans épaisseur organisationnelle » et une représentation locale de « l’action collective [...] comme construction conjointe des savoirs et des relations » (Bréchet & Desreumaux, 2004). L’unité localisée est au carrefour de trois insertions : le groupe, l’industrie et le territoire (Perrat et Zimmermann, 2002). La ressource spatiale territoriale correspond à l’insertion dans un environnement. Par conséquent, sa mobilisation est incertaine. Le noma- disme engendre des coûts sociaux, l’actualisation du territoire dépend d’apprentissages collectifs donc de la signification des territoires (Perrat & Zimmermann, 2002). Un rapprochement stratégique entre firmes peut même provoquer des conflits au lieu des coopérations attendues (Adam-Ledunois & Renault, 2007). A notre étonnement, les travaux sur les frontières organisationnelles (Minghi, 1963; Santos & Eisenhardt, 2005) n’analysent pas la dimension spatiale ni la dimension territoriale. Pourtant, les trois notions sont liées : une frontière est une convention qui s’appuie sur des accidents topographiques, des aspérités de l’espace matériel, elle « institue une distinction par l’appartenance matérielle et symbolique à une entité territoriale dont elle est l’expression » (ArbaretSchulz et al., 2004). L’approche territoriale (T) soulève précisément la question du rapprochement géographique pour ouvrir les frontières entre organisations. 1.2. L’approche corporate (C) : optimiser la localisation et l’agencement On doit cette approche principalement à Frank Becker (1981; 1995). Il s’inscrit dans le paradigme de l’écologie des organisations et de la resource-based view ; il conçoit le dispositif matériel comme une ressource stratégique. Les zero-time solutions permettent d’adapter les locaux aux variations d’effectifs, à moindre coût et dans des délais réduits, elles accroissent l’agilité organisationnelle (Becker, 2000, 2002). Le corporate real estate est également un coût qu’il faut optimiser : acquisition, mise en production et maintenance des infrastructures, densité d’occupation, répartition des activités afin de réaliser des gains de salaires entre bassin d’emploi d’origine et bassin de destination (Becker, 2003). Le Work Tool analyse la contribution de l’espace à la performance, le Cornell Balanced Real estate Assesment model (COBRA) et le Toolkit aident à la décision. L’avantage de ces outils est de proposer une évaluation objective de la ressource spatiale, à la fois comme contenant (optimisation du dispositif matériel) et comme contenu (déploiement flexible des activités). Les gains 3 Les bâtiments et l’architecture, l’aménagement d’entreprise et le mobiliser (cloisons mobiles, mobilier, décoration, courants forts et faibles), les services généraux, le management de projet et le conseil en organisation. Ces spécialités sont fédérées au sein d’un secteur qui arrive à maturité. Voir par exemple http://www.arseg.asso.fr/, à l’image du Facility Management dans le monde anglo-saxon. 4 Le corporate real estate management. 6 REVUE DE GESTION DES RESSOURCES HUMAINES Document téléchargé depuis www.cairn.info - Université de Versailles Saint-Quentin - - 193.51.33.29 - 15/12/2016 18h21. © ESKA Espaces de travail et Management 5-18_Chap_1_Maclouf_Mise en page 1 17/06/11 09:41 Page7 Espaces de travail et Management 1.3. L’approche managériale moderne (M) : l’agencement comme instrument de management stratégique Document téléchargé depuis www.cairn.info - Université de Versailles Saint-Quentin - - 193.51.33.29 - 15/12/2016 18h21. © ESKA Cette approche complète l’approche territoriale (T) à l’intérieur de l’organisation. Elle mobilise l’espace pour provoquer des apprentissages, par exemple en décloisonnant afin de développer la communication (Hatch, 1987; Oldham & Brass, 1979; Oldham & Fried, 1987). Elle s’appuie également sur les processus cognitifs par lesquels les objectifs et les modes d’organisation sont transcrits dans l’espace. La configuration spatiale contient des significations sur le projet collectif (Boutinet, 1990) et sur l’organisation (Pélegrin-Genel, 1994). Elle traduit une logique productive (Schronen, 1998), constitue un cadre cognitif, un support de connaissance (Fenker, 2003) et un vecteur d’identité territoriale (Raulet-Croset, 2008). Selon cette approche, l’intervention sur l’espace permet de figurer un projet et d’engager une négociation collective sur les objectifs et sur les moyens de les atteindre (Fenker, 2003)5. Par le biais des territoires, elle crée l’engagement, la proximité et la cohésion des acteurs (Raulet-Croset, 2008). Une configuration adaptée aux besoins de l’entreprise (Schronen, 1998) développe la performance organisationnelle (Fenker, 2003). Cette approche est moderne au sens de Hatch et Cunlife (2009). Elle intègre les apports des approches cognitives en gestion. Elle cherche à engager des apprentissages grâce à des repères visibles dans l’environnement6. Une telle conception instrumentale présente cependant deux limites principales. Premièrement, la mo- bilisation de la ressource spatiale n’échappe pas aux jeux de pouvoir qui visent à prendre le contrôle de l’espace (Davis, 1984), éloignant ainsi le projet de l’objectif technique exprimé. Par exemple, au cours de sa recherche-intervention, Fenker (2003) attribue l’échec partiel du projet qu’il observe aux revirements de la direction et au non respect des principes adoptés. Deuxièmement, comme elle s’appuie sur la cognition organisationnelle, la mobilisation de l’espace dépend de sa réception par les occupants. Or les rationalités sur l’espace sont multiples (Evette, 1998), influencées par la subjectivité et la sensibilité individuelles (Fischer, 1989), les émotions (Kaufmann, 1975). Lorsqu’on utilise l’espace pour véhiculer un message, les risques d’incongruence communicationnelle sont importants (Baldry, 1997). 1.4. Objectifs de la recherche Théoriciens et praticiens de la ressource spatiale tirent leurs arguments des trois ensembles théoriques que nous avons identifiés : développer le territoire de la firme en ouvrant ses frontières (approche territoriale T) ; rationaliser et flexibiliser (approche corporate C), provoquer des apprentissages et guider l’action collective dans le sens voulu (approche moderne M). Cependant, les coûts sociaux et les apprentissages qui accompagnent une transformation spatiale demeurent méconnus : l’approche C les néglige, les approches T et M insistent sur la nécessité de les étudier davantage. Cette connaissance semble d’autant plus importante que précisément, d’après Boutinet (1990), l’appropriation d’un projet spatial, c’est-à-dire le déploiement des activités dans l’espace, échappe fondamentalement aux auteurs du projet. Avec Boutinet, nous formulons la proposition centrale que la diversité des modalités d’influence d’une transformation sur les relations sociales et de travail peut entrer en contradiction avec une instrumentation efficace7. Pour traiter cette problématique, nous ten- 5 A partir des processus cognitifs connus : perception de la forme, négociation de connaissances, figuration. 6 On retrouve ici les coordonnées spatio-temporelles de la stratégie (Wacheux 1998). À titre d’exemple, une grande compagnie d’assurance européenne utilise, en 2009, des techniques dignes du neuromarketing pour engager un projet de management centré sur le client : une vaste campagne d’affichage rouge a marqué tous les esprits, suivie d’une réorganisation spatiale et de nouveaux codes de décoration dans les locaux. 7 Une nouvelle configuration peut sembler adaptée d’un point de vue – par exemple un plateau ouvert regroupant des acheteurs pour rationaliser l’occupation de l’espace et provoquer des synergies. En même temps, elle peut entrer en contradiction avec d’autres éléments de la situation – statut des acheteurs rabaissé par la perte d’un bureau individuel, nuisances et interférences entre des marchés sans rapport les uns avec les autres. Le résultat de l’opération sur les collectifs de travail présente donc une incertitude. 7 N° 81 - JUILLET - AOÛT - SEPTEMBRE 2011 Document téléchargé depuis www.cairn.info - Université de Versailles Saint-Quentin - - 193.51.33.29 - 15/12/2016 18h21. © ESKA sont censés apparaître a posteriori, dans un indicateur de productivité globale. Nous nous interrogerons sur l’opportunité d’une évaluation plus complète des projets spatiaux, qui tiendrait compte des conséquences organisationnelles du nomadisme et de la flexibilité. 5-18_Chap_1_Maclouf_Mise en page 1 17/06/11 09:41 Page8 tons d’abord de repérer les différentes conceptions de la ressource spatiale mobilisée lors des projets spatiaux, à travers les justifications, objectifs et interprétations exprimés. Nous nous attendons à retrouver les conceptions identifiées dans la littérature : l’espace comme dispositif matériel à optimiser et flexibiliser ; l’espace pour provoquer des apprentissages, d’une part en exerçant une contrainte sur les interactions sociales et de travail, c’est-à-dire la communication, la coordination, la coopération et le contrôle, d’autre part en symbolisant le projet collectif, les processus, la place et le rôle de chacun. Ensuite, nous identifions les principales catégories de configurations spatiales et nous analysons leurs effets. 2. RÉSULTATS Document téléchargé depuis www.cairn.info - Université de Versailles Saint-Quentin - - 193.51.33.29 - 15/12/2016 18h21. © ESKA Nous avons étudié la gestion des espaces de travail tertiaire au sein de 12 organisations privées et publiques8. Afin de comparer des situations avec changement et les pratiques quotidiennes, nous avons étudié 9 déménagements ou réaménagements et 3 situations sans changement. Nous avons réalisé 131 entretiens semi-directifs, dont 84 enregistrés et dactylographiés, auprès de directeurs et des membres d’équipes projets, d’une part, et d’occupants, d’autre part. Afin de mieux comprendre les dynamiques à l’œuvre, nous avons pu réaliser deux observations participantes (Plane 2005). Les données ont été analysées avec Alceste (Reinert, 1994) et ont fait l’objet d’une classification thématique (Miles & Huberman, 2003). Chaque résultat est illustré par des verbatims représentatifs. 2.1. Des ‘standards’ de gestion des espaces en cours d’institutionnalisation Pour l’observateur, il est aisé de repérer un mouvement d’institutionnalisation de nouveaux modes de gestion du dispositif matériel. Leur légitimité repose sur des arguments représentatifs des trois conceptions de la ressource spatiale (T, C et M) (tableau 1). Ainsi, les organisations tendent à déployer leurs sites au gré de leur évolution stratégique et le nomadisme géographique 8 fait désormais partie intégrante de la vie de l’entreprise. Les installations sont rendues flexibles, avec la capacité technique et organisationnelle de modifier la disposition ou de déplacer les occupants. Les surfaces et le mobilier sont standardisés en fonction du statut, les espaces sont décloisonnés afin de développer «la transparence et la communication», dans les bureaux partagés, openspaces, ou plate eaux partagés, openspaces, ou plateaux. Avec la réduction des surfaces individuelles comme corollaire, les coûts immobiliers sont en voie d’optimisation. En même temps, les environnements deviennent moins fonctionnels : “le président n’aime pas le papier, ils ont fixé une demie armoire par personne alors comme ils n’ont pas prévu d’archives, où suis-je supposée mettre les dossiers ?”. D’une manière générale, les nouvelles configurations spatiales traduisent des logiques productives afin de concrétiser des changements : “on fait tomber les cloisons pour développer la communication, la polyvalence, la flexibilité” ; “le rassemblement des services clarifie l’organisation”. L’émergence de formes dominantes d’aménagement est vécue à la fois comme la preuve de leur efficacité et comme la manifestation d’une norme : “ce serait aller complètement à contre courant que de recloisonner les bureaux, tout le monde le sent bien”. Dans les parties suivantes, nous analysons les conséquences d’un déménagement d’entreprise (2.2), d’un réaménagement ou d’une redistribution des activités dans un même espace (2.3), d’une configuration ouverte (2.4). 2.2. Nomadisme géographique : les conséquences d’un déménagement d’entreprise Nous avons observé cinq déménagements : la délocalisation du CNASEA, qui a duré dix ans ; le déménagement d’une entreprise d’un groupe industriel médical d’un bâtiment dans un autre, sur un même site géographique ; le rassemblement progressif d’établissements de deux enseignes de grande distribution, de plusieurs régions de province vers une ville de banlieue parisienne, puis dans trois bâtiments successifs de cette même ville, et enfin dans un même bâtiment ; le rassemblement d’une dizaine d’éta- Les organisations ont été sélectionnées au hasard, dans des secteurs variés: avocats d’affaires, grande distribution, industrie médicale et informatique, ingénierie informatique, organisation d’événements, chambre de commerce et d’industrie, services administratifs d’une grande agglomération, hôpital et enseignement publics. 8 REVUE DE GESTION DES RESSOURCES HUMAINES Document téléchargé depuis www.cairn.info - Université de Versailles Saint-Quentin - - 193.51.33.29 - 15/12/2016 18h21. © ESKA Espaces de travail et Management 5-18_Chap_1_Maclouf_Mise en page 1 17/06/11 09:41 Page9 Espaces de travail et Management Tableau 1 : Standardisation de la gestion des espaces de travail Transformations spatiales (9) Groupe de contrôle (3) présent durant l’observation présent 2 7 3 Bureaux partagés et openspaces bureaux partagés (2 à 6 personnes) openspaces (>10 personnes) 5 Ouverture visuelle Ouverture visuelle totale (vitres, armoires basses, obstruction interdite) 4 1 entre bureaux et circulations 8 1 entre responsables et subordonnés 4 stores aux vitres des responsables 3 1 9* 3 5 1 par des couloirs 7 3 par des cloisons vitrées 1 1 9 9* 2 déménagement (récent ou prévu +/- 1an) (2) 5 (1) capacité à remodeler (cloisons techniques, services généraux) 2 3 1 capacité à déplacer rapidement les acteurs (baies informatiques, services généraux) 3 9* 2 surface au sol (dont insuffisante) 6 (6) 2 (2) surface de la table (dont insuffisante) 6 (3) capacité de rangement (dont insuffisante) 6 (6) zoning (découpage de l’espace en zones, attribution par services, directions, départements, niveaux hiérarchiques…) 9 séparations hiérarchiques par des étages Document téléchargé depuis www.cairn.info - Université de Versailles Saint-Quentin - - 193.51.33.29 - 15/12/2016 18h21. © ESKA degré d’exposition visuelle et sonore en fonction du niveau hiérarchique Standardisation : mobilier neuf intégral, normalisation des aménagements, surfaces, mobilier et disposition en fonction du statut. Flexibilisation Réduction des surfaces individuelles écrans plats 1 Cadre de vie qualité des locaux améliorée 4 nouvel ordinateur 1 consignes d’utilisation des locaux 9 3 cafetières et réfrigérateurs interdits 7 1 affichage difficile/interdit 9 2 café interdit sur le poste de travail 1 gêne acoustique (dont visuelle) 6 (5) 2 (2) *déjà présent, renforcé et adapté aux nouvelles structures le cas échéant 9 N° 81 - JUILLET - AOÛT - SEPTEMBRE 2011 Document téléchargé depuis www.cairn.info - Université de Versailles Saint-Quentin - - 193.51.33.29 - 15/12/2016 18h21. © ESKA Séparations renforcées et standardisées 5-18_Chap_1_Maclouf_Mise en page 1 17/06/11 09:41 Page10 Espaces de travail et Management 9 emploi du conjoint, divorce, incapacité à supporter le dépaysement (la vie en province peut “attirer puis décevoir” ; la région parisienne peut sembler “invivable” ; “les gens du pays [être] fermés” etc.). Comme lors des fusions post-acquisitions, des frontières entre populations se forment : “les nantais”; “les parisiens”; “les limousins”; “ça ne se voit pas comme ça mais les gens ne se mélangent pas”. Certains font recruter leur conjoint sous un nom différent. Le recrutement au plus pressé de jeunes diplômés intéressés par la localisation géographique accentue les déséquilibres. La gestion des carrières rencontre rapidement des difficultés (témoignages de deux RRH). 2.3. Les conséquences de la flexibilité spatiale Comme pour un déménagement, la décision de réaménager pour donner immédiatement une dimension concrète à un changement apparaît toujours en partie comme une démonstration de pouvoir : “c’est le bébé du président” ; “une dépense somptuaire” ; “les dirigeants se sont fait plaisir”. Pour faciliter les transformations, surfaces et mobilier sont standardisés en fonction du statut. Les effets peuvent être positifs : “j’ai un bureau complètement en rapport avec mon positionnement, de mon bureau se crée mon positionnement aussi”; “quand on entre, on voit tout de suite à qui on a affaire”. Ils peuvent aussi être négatifs : «ça fait mal parce que quand on voit le bureau de certains ça ne correspond pas à la réalité». Les réactions dépendent du climat interne mais on assiste le plus souvent à une élévation du niveau de conflictualité : “on sent la tension tous les jours, on ne se parle presque plus”. La négociation, le plus souvent subie10, entraine une baisse de légitimité des dirigeants, de la défiance, des stratégies de contournement : “je laisse ma veste sur mon siège, il n’y a aucun moyen de savoir si je suis parti déjeuner ou en réunion dans un autre étage ou ailleurs, je ne suis pas le seul, surtout le vendredi” ; “les managers n’ont plus aucune crédibilité, des fois j’arrive à 11h je repars à 15h et il ne se passe rien”. Dans la plupart des organisations, le dispositif matériel est plus flexible, les transformations Pour une analyse du choix d’une localisation géographique, voir notamment Sergot (2005). 10 Dans la terminologie de Rojot (1977). 10 REVUE DE GESTION DES RESSOURCES HUMAINES Document téléchargé depuis www.cairn.info - Université de Versailles Saint-Quentin - - 193.51.33.29 - 15/12/2016 18h21. © ESKA Document téléchargé depuis www.cairn.info - Université de Versailles Saint-Quentin - - 193.51.33.29 - 15/12/2016 18h21. © ESKA blissements des services administratifs d’une agglomération dans un bâtiment de proche banlieue. Trois résultats principaux se dégagent. Tout d’abord, la rumeur puis l’annonce d’un déménagement sont vécues symboliquement et politiquement9 : “on est éloignés des centres historiques mais les élus, eux, restent dans les beaux quartiers, c’est pas une place de parking qui changera ça” ; “Edith Cresson a décidé la ville au hasard” ; “le président a sa famille en Normandie alors le siège est là-bas”. Le déménagement est perçu comme une décision autoritaire, arbitraire, inutile voire contre-productive, injuste : “ils ont décidé comme ça, on ne voit pas ce que ça va apporter à part dépenser et donner l’impression de faire quelque chose” ; “on nous a demandé si on voulait suivre à Paris, il n’y a que moi qui suis venu parce que tous mes collègues avaient des enfants et des conjoints qui travaillaient”. Les résistances vont de la négociation de départs à la séquestration de dirigeants, en passant par la tentative d’empêcher le projet par les ergonomes et les CHSCT : “dans les réunions, je sens une vraie agressivité de la part des consultants” (témoignage d’un ergonome). Ensuite, ces opérations sont plus longues que prévu, de 18 mois à 10 ans. Il se produit un effet de gel : “le service informatique prépare le transfert depuis deux ans pour garantir continuité” ; “depuis qu’on sait qu’on va déménager, on a tout arrêté, on attend” ; “les projets stratégiques sont suspendus, il n’y a plus d’évolution professionnelle” ; “les gens n’osent pas faire de projets personnels”. La rotation de personnel est importante. Par exemple, sur les 400 occupants du siège du CNASEA à l’arrivée, au bout d’un an, seuls 25% proviennent de l’établissement d’origine. Les acteurs concentrent leurs efforts à reconstituer la mémoire organisationnelle : « qui fait quoi, où, pourquoi et comment ? ». Enfin, la structure supporte des coûts sociaux directs, liés à la mobilité et à la rotation, et indirects, liés à l’ambiance de travail, au stress, à l’absentéisme. On constate l’inefficacité totale des dispositifs d’anticipation et de couverture des mouvements des individus (le “tuilage des postes”) : certains se portent immédiatement volontaires mais ne déménagent pas, d’autres refusent puis déménagent, d’autres enfin déménagent puis retournent à leur lieu d’origine. Les causes sont multiples : célibat géographique, 5-18_Chap_1_Maclouf_Mise en page 1 17/06/11 09:41 Page11 Document téléchargé depuis www.cairn.info - Université de Versailles Saint-Quentin - - 193.51.33.29 - 15/12/2016 18h21. © ESKA fréquentes, afin “d’adapter sans cesse la configuration au besoin”. Voici deux exemples. Dans un grand cabinet d’avocats d’affaires parisien, un homme de main déménage les bureaux le dimanche à l’insu des occupants. Au siège européen d’un groupe de matériel informatique, le directeur des services généraux a développé un savoir-faire pour que les acteurs découvrent leur future configuration spatiale en même temps qu’on leur annonce un changement. Il s’écoule six jours entre la conception et le réglage de la climatisation selon les préférences individuelles. Sous des allures de services hôteliers de luxe, ces deux exemples de zero-time solutions (approche corporate C) concrétisent immédiatement les changements voulus par les directions. Les transformations provoquent donc la réaction des occupants, qui considèrent que les dirigeants affirment leur territoire. En retour, ils développent également des comportements territoriaux. Dans le cabinet d’avocats, certains déménagent à nouveau leurs bureaux : “elle, on a essayé de lui faire un fois, de la virer d’ici et pour je ne sais pas où, et donc elle a fait un énorme esclandre, et elle a récupéré son bureau, ils font ça aussi pour les secrétaires, après si tu veux il faut protester mais ensuite on sait qu’il y a des gens qu’on sait qu’ils vont accepter ou d’autres pas, et puis quand tu commences à avoir quelques années dans la maison, ils le font plus difficilement”. Dans l’entreprise industrielle, les occupants déploient de véritables stratégies pour conforter une position spatiale, gagner en surface, choisir leur mobilier, sélectionner leurs voisins (une DRH a obtenu du P-D G un engagement écrit ; témoignage d’un directeur des services généraux). Les transformations successives traduisent et provoquent des comportements territoriaux. 2.4. Configurations ouvertes : les conséquences du partage des sphères visuelles et sonores Toutes les organisations observées installent des bureaux ouverts. Les auteurs des projets espèrent améliorer la performance organisationnelle : “on a mis des vitres pour développer la communication, générer des coopérations, des polyvalences, des synergies”. D’un côté, les oc- 11 cupants approuvent et acceptent les nouvelles configurations : «c’est plus moderne» ; «ça dynamise» ; «ça va dans le bon sens» ; «c’est inévitable». D’un autre côté, ils ne constatent pas d’amélioration «ça ne change rien» ; «on ne voit pas l’intérêt» ; «on a l’impression d’une vitrine». Ils voient leur statut se dégrader : “on a au départ l’impression d’être dans un aquarium ou éventuellement au zoo et puis il n’y a plus qu’à nous balancer des cacahuètes” ; “dans les fusions acquisitions il y a les viviers de talents qu’on va passer à la casserole, ici on nous a mis dans un vivarium”. Les nuisances confortent cette perception : “on est sans cesse dérangées, le nez en l’air”, ainsi que la possibilité de contrôle physique qu’il offre : “c’est dans l’air du temps, le président aime bien voir d’un coup d’œil qui est là et qui travaille” ; «on a des consignes pour ne pas occulter les ouvertures».. En réaction, pour éviter de subir les interactions imposées, les occupants adoptent des stratégies de contournement. Malgré les consignes, ils installent des protections visuelles : “les agents se débrouillent pas mal, (…) pour mettre une armoire, regardez comment ils sont agencés”. Ils désapprouvent les coopérations que l’on veut leur imposer : «on n’a pas attendu le déménagement pour développer les synergies à l’intérieur de la filière fruits et légumes ; aujourd’hui, on est collés aux acheteurs des autres filières alors qu’il n’y aura jamais rien à faire avec la marée ou la viande, on se gêne plus qu’autre chose» ; «ils ont fait un bel organigramme, le directeur de la BU ne connaît pas notre métier ni les clients, il s’imagine que je vais d’un coup travailler avec les consultants qui sont sur des secteurs qui n’ont rien à voir». Les occupants s’arrangent pour conserver leurs anciennes coopérations sans développer les nouvelles imposées. Ils décalent leurs horaires de travail tôt le matin ou tard le soir pour éviter de réaliser certaines tâches en présence de certains collègues. Ils utilisent des messageries instantanées pour communiquer les informations qu’ils ne souhaitent pas partager11 ; ils ne reçoivent pas à leur bureau, fixent des rendez-vous informels dans les couloirs ou les lieux de convivialité déserts. De plus, les configurations ouvertes modifient les relations. Tout d’abord, contrairement aux idées reçues, ces formes de rapprochement spatial sont source de distanciation hiérarchique. Par exemple, pour résoudre un problème technique chez un client, deux consultants et un technicien utilisent simultanément trois outils de communication: téléphone, messagerie électronique et messagerie instantanée. 11 N° 81 - JUILLET - AOÛT - SEPTEMBRE 2011 Document téléchargé depuis www.cairn.info - Université de Versailles Saint-Quentin - - 193.51.33.29 - 15/12/2016 18h21. © ESKA Espaces de travail et Management 5-18_Chap_1_Maclouf_Mise en page 1 17/06/11 09:41 Page12 Document téléchargé depuis www.cairn.info - Université de Versailles Saint-Quentin - - 193.51.33.29 - 15/12/2016 18h21. © ESKA Les managers de proximité sont placés dans le même espace visuel et sonore que leurs équipes ou bien ils ont une vue sur les bureaux et les circulations. Ces dispositions ont rarement une visée disciplinaire. Parmi les douze cas, seul un directeur affiche : “l’objectif est clair, casser les baronnies, voir qui travaille, stimuler et mettre les gens au travail”. Un autre reconnaît : « l’ouverture crée une émulation, c’est un peu le but aussi, d’ailleurs on l’appelle « la ruche »». Cependant, même sans cet objectif explicite, la possibilité de contrôle est intériorisée par les occupants : “la jeune femme qui vient de passer, sortir, il n’est pas dans mon habitude de contrôler que les agents partent ou pas, il y a une badgeuse, il y a du temps de travail réparti (…), tout ça est (…) géré ailleurs et il ne reste pas moins que concrètement là aujourd’hui lundi soir voilà, ce n’est pas dans ma manière de faire, mais j’ai l’information, donc oui l’espace favorise si on le souhaite le contrôle et en induit même si on ne le souhaite pas”. Le contrôle hiérarchique est induit de fait par l’ouverture spatiale. Ce contrôle est souvent vécu comme inadapté par les managers de proximité, qui refusent de l’utiliser, et par les subordonnés. Ensuite, le partage des sphères visuelles et sonores modifie les relations entre collègues. Les occupants sont mutuellement informés en temps réel des mouvements des autres. Ces dispositions créent les conditions d’une conflictualité accrue et d’un autocontrôle. Dans la situation la plus extrême que nous avons observée, un commercial, dont le salaire et le poste dépendent de ses résultats, ne peut supporter de voir un autre commercial tenter de prendre le budget d’un de ses prospects avec une offre concurrente. Les conflits sont exacerbés par la configuration spatiale : “en juin il y a eu fritage déjà entre trois personnes de mon openspace, je n’ai jamais vu ça ; (…) c’est comme deux chats (…), tu avais trois (jeunes femmes) à hurler, à moitié en pleurs (…) impossible de gérer (…) ça a duré deux heures, deux heures où tu es là à te tourner les pouces ; (…) là c’est arrivé à un degré trop fort, mais c’est arrivé aussi dans les autres openspaces”. Dans des situations plus tempérées, les conflits interindividuels s’étendent aux groupes12, des frontières se forment au milieu des openspaces, prenant appui sur les accidents naturels de l’environnement : une pho- 12 tocopieuse, un fax, une bonbonne à eau ou une colonne forment des lignes de démarcation. Même dans les situations mois conflictuelles, les humeurs se transmettent : “on est de véritables éponges, c’est-à-dire que l’on absorbe tout, (…) inconsciemment on écoute toutes les conversations des uns et des autres, un contrat signé c’est youpi, un contrat raté (…) ça se transmet”. La régulation collective des interactions fatigue les occupants : “je ressens les humeurs des uns et des autres, donc je sais quand une personne ne va pas bien, quand elle va bien, quand il y a des animosités ou autres, (…) je fais le tampon, (…) je vais voir Valérie, je lui dis fais attention parce qu’untel n’a pas l’air bien”. Les occupants « appréhende(nt) de passer un coup de téléphone important», craignent les « jugements extérieurs ». Dans le meilleur des cas, les acteurs « compatibles, par exemple des juristes », intériorisent la nécessité de ne pas déranger. 3. DISCUSSION ET PERSPECTIVES DE RECHERCHE Grâce aux techniques disponibles sur le marché, les pratiques se standardisent, le dispositif matériel est rendu de plus en plus flexible (3.1 et 3.2) et transparent (3.3). Dans la discussion, nous revenons sur les approches théoriques identifiées dans la revue de littérature (T, C et M). Nous interprétons les raisons pour lesquelles ces configurations créent de nouvelles contraintes sans répondre aux objectifs exprimés ni aux besoins des occupants de manière satisfaisante, nous proposons une grille pour les évaluer (3.4). 3.1 : les conséquences du nomadisme géographique Nos résultats invitent à deux commentaires. Tout d’abord, l’approche territoriale (T) s’interroge sur les coûts sociaux (Zimmermann, 1998), l’approche corporate (C) les néglige. Or en effet la réception politique de la décision s’accompagne d’une hausse de la conflictualité. Il se produit un effet de gel, c’est-à-dire l’abandon ou la suspension des décisions et projets durant l’opération. Le départ d’un grand nombre entraîne des Par des mécanismes similaires à ceux montrés par Labianca, G., Brass, D. J., & Gray, B. 1998. Social Networks and Perceptions of Intergroup Conflict: The Role of Negative Relationships and Third Parties. The Academy of Management Journal, 41(1): 55-67. 12 REVUE DE GESTION DES RESSOURCES HUMAINES Document téléchargé depuis www.cairn.info - Université de Versailles Saint-Quentin - - 193.51.33.29 - 15/12/2016 18h21. © ESKA Espaces de travail et Management 5-18_Chap_1_Maclouf_Mise en page 1 17/06/11 09:41 Page13 Document téléchargé depuis www.cairn.info - Université de Versailles Saint-Quentin - - 193.51.33.29 - 15/12/2016 18h21. © ESKA coûts d’apprentissage pour recouvrer la mémoire organisationnelle (qui fait quoi, où, pourquoi et comment ?). Le déménagement laisse les traces d’un traumatisme au sens de Vinsonneau (1997), des frontières apparaissent selon l’ancienneté et l’origine géographique des individus, qui rendent les synergies difficiles. Un déménagement d’entreprise provoque donc un enchevêtrement de phénomènes que nous proposons de prendre en compte dans le calcul des gains et des pertes (3.4). Ensuite, la formation de frontières à l’intérieur de l’organisation rappelle l’importance des facteurs d’intégration des individus dans le contexte de destination (Roger & Ventolini, 2004; Roques & Roger, 2004). Elle met en évidence des phénomènes que l’on néglige habituellement. Dans la gestion quotidienne, les dysfonctionnements de la mobilité sont corrigés par les capacités d’adaptation des individus et des groupes de travail qui les accueillent. La plupart du temps, lorsqu’une recrue n’arrive pas comme prévu ou lorsqu’un départ n’a pas été anticipé, les vides sont comblés et les outils de gestion de la mobilité ne sont jamais véritablement remis en cause. Un déménagement d’entreprise offre une expérimentation à grande échelle. Même lorsqu’une mobilité géographique est choisie, les approches planificatrices s’avèrent inefficaces pour anticiper les mouvements et réussir le transfert des connaissances (Maclouf & Delaunay 2008). Cela nous invite à réinterroger la pertinence du modèle de l’action planifiée d’Ajzen (1991 :(Mignonac 2004). Les décisions de mobilité sont prises dans un environnement trop incertain (Maclouf & Wierzbicki 2008). 3.2 Flexibilité spatiale, territoires, innovation. Nos observations permettent de tirer un enseignement général sur la relation entre espace et organisation : la flexibilité spatiale n’est pas la flexibilité du travail. En effet, chaque transformation vise à traduire une logique productive dans l’espace. Elle contraint physiquement les relations sociales et de travail, elle oblige les occupants à des efforts d’adaptation. En réaction, ils défendent leurs territoires et protègent leurs marges de manœuvres face à l’affirmation d’autres territoires. Une interprétation positive pourrait s’énoncer ainsi : toute transformation spatiale traduit, exacerbe et provoque des comportements territoriaux ; elle focalise les acteurs sur la compétition13 entre les territoires. Pour l’approche moderne (M), héritée des conceptions classiques14, les territoires, en tant que manifestation de la dimension sociale de l’organisation, détourne les acteurs des objectifs et porte préjudice à l’efficacité des projets spatiaux15. En réalité, ce résultat rappelle que l’interaction entre le social et le technique est inhérente à l’évolution de l’espace au sein des organisations (Goodrich, 1982). Lorsqu’on cherche à standardiser, dépersonnaliser ou flexibiliser, on symbolise les hiérarchies et les processus prescrits. Les réactions ne visent pas uniquement à conserver des degrés d’autonomie16. Elles montrent également que les nouvelles configurations spatiales modifient le cadre de l’interaction et déstabilisent les systèmes d’action sans tenir suffisamment compte des besoins du travail réel. En défendant des territoires, les occupants défendent aussi des réseaux de coopération instaurés collectivement, qui leur semblent fonctionner et qui sont frappés d’obsolescence. Les réactions territoriales ne sont donc pas seulement ‘primaires’, elles correspondent également à des dynamiques de sauvegarde de l’action. Lors de projets spatiaux, pour que les espoirs d’innovation organisationnelle se réalisent, il faudrait reconnaître les efforts d’apprentissage et les intégrer avec succès dans un projet collectif au lieu de les considérer seulement comme des détournements ou des résistances. Cet enseignement renouvelle l’idée que le respect et la construction des territoires professionnels sont déterminants, par exemple lorsqu’on introduit une nouvelle technologie (Black et al. 2004). Avec une méthode adaptée, l’étude des transformations spatiales permet 13 Nous tenons à remercier ici le Professeur Jean-Michel Plane pour sa comparaison de l’espace à un « système de compétition » lors de la présentation de nos travaux. Cette question a contribué à formaliser cette idée. 14 L’organisation scientifique du travail considère l’espace comme implicite, productif, contrôlé, divisé, hiérarchisé, organisé scientifiquement, administrativement et socialement ; dans une bureaucratie, il est implicite, divisé, contrôlé et hiérarchisé, productif, neutre, impersonnel, égalitaire (Chanlat 2006) 15 La contribution de la ressource spatiale à la performance (Fenker, 2003) 16 Voir les travaux actuels sur la sous-optimisation dans les dysorganisations. 13 N° 81 - JUILLET - AOÛT - SEPTEMBRE 2011 Document téléchargé depuis www.cairn.info - Université de Versailles Saint-Quentin - - 193.51.33.29 - 15/12/2016 18h21. © ESKA Espaces de travail et Management 5-18_Chap_1_Maclouf_Mise en page 1 17/06/11 09:41 Page14 Espaces de travail et Management 3.3 Les openspaces, décloisonnement et enfermement. Document téléchargé depuis www.cairn.info - Université de Versailles Saint-Quentin - - 193.51.33.29 - 15/12/2016 18h21. © ESKA Les openspaces incarnent l’approche corporate (C), la lutte contre l’immobilisme du cloisonnement rendant l’organisation plus agile. Ils incarnent l’approche moderne (M) en favorisant la circulation des connaissances. Or au contraire, le partage des sphères visuelles et sonores crée de nouvelles cristallisations. Les occupants se savent potentiellement observés, ils expérimentent qu’ils peuvent déranger leurs voisins. Cette sensation, d’abord physique, est interprétée aussi sur un registre politique. Pour la plupart des occupants, l’ouverture spatiale poursuit une visée disciplinaire implicite. Il s’ensuit des conflits, des stratégies de contournements et, surtout, le blocage des transformations recherchées. Avec des modalités et des degrés différents, les openspaces provoquent toujours ce type de contradictions. Oldham et al. (1979, 1987) observaient déjà une réduction de la satisfaction ; Hatch (1987) une diminution des interactions. Une dimension intervient, bien connue en ergonomie ou en psychosociologie et peu étudiée en sciences de gestion, le corps. Le système sensoriel organisationnel correspond au fait que les acteurs voient des événements et entendent des processus (Pihlajamäki, 1990). En vertu de ce principe, on pense que les interactions développent le partage de connaissances et les coopérations, conformément aux prescriptions de l’approche cognitive moderne (M). Nos observations montrent le contraire17 : le partage des sphères visuelles et sonores, selon le contexte organisationnel, provoque de la gêne mutuelle, la fatigue de la régulation des conflits, il renforce la distance hiérarchique et les frontières à l’intérieur de l’organisation. L’interaction permanente produit un effet panoptique18 spécifique à l’organisation, lorsqu’on se sait potentiellement observé, visuellement ou acoustiquement. C’est la conséquence de la suppression de la privacité (Fischer, 1989). En réaction à l’openspace, dans une dynamique d’adaptation et d’apprentissage, les jeux de territoires permettent aux occupants de conserver des marges de manœuvre et de sauvegarder des collectifs de travail. La dimension corporelle exacerbe ces mécanismes et contribue à expliquer pourquoi il ne suffit pas de placer les acteurs dans un champ d’interactions visuelles et sonores pour développer la communication. Dans le contexte actuel, où praticiens et chercheurs se trouvent parfois désemparés face au délitement des collectifs de travail et à la perte de sens, l’étude des espaces de travail permet de nouvelles analyses. 3.4 L’évaluation des ‘standards’ de gestion des espaces de travail. La structuration du secteur professionnel de l’immobilier d’entreprise est en cours, avec l’institutionnalisation de pratiques : nomadisme géographique, flexibilisation des installations par la capacité à modifier la disposition ou déplacer les occupants, standardisation des surfaces, du mobilier et de la disposition en fonction du statut, ouverture visuelle et sonore. Ces normes traduisent des logiques productives et visent à concrétiser des changements, elles sont portées par une forte légitimité (approches T, C et M). L’uniformisation des espaces de travail tertiaire peut être vue comme la preuve de leur efficacité. Les effets que nous avons observés montrent cependant que ces nouvelles configurations ne peuvent satisfaire les besoins propres à chaque contexte. En cela, nous rejoignons un constat répandu en sciences de gestion. Certaines décisions sont dictées davantage par la volonté de se conformer à une norme que par la recherche rationnelle de la solution optimale (DiMaggio & Powell, 1991; Selznick, 1996). Les théories néo-institutionnelles permettent ainsi d’expliquer pourquoi des pratiques continuent de s’étendre malgré des effets non intentionnels déjà connus (par exemple, Banbury & Berry, 2005, Hatch, 1987 et Oldham et al., 1979 pour le décloisonnement spatial ;)(Becker, Simms, & Bethany, 1991 pour les bureaux non 17 Nos observations complètent des résultats connus : le décloisonnement spatial et le rapprochement des acteurs ne développent pas mécaniquement les échanges, ils empêchent les conversations privées nécessaires à de bonnes relations de travail, ils entraînent une réduction de la communication et de la satisfaction (Oldham et al., 1979 ; Oldham et al., 1987 ; Hatch, 1987). 18 Formalisé par Bentham (1831) et analysé par Foucault (1975). 14 REVUE DE GESTION DES RESSOURCES HUMAINES Document téléchargé depuis www.cairn.info - Université de Versailles Saint-Quentin - - 193.51.33.29 - 15/12/2016 18h21. © ESKA d’observer ces comportements territoriaux parfois si difficiles à repérer et à comprendre. 5-18_Chap_1_Maclouf_Mise en page 1 17/06/11 09:41 Page15 Espaces de travail et Management Document téléchargé depuis www.cairn.info - Université de Versailles Saint-Quentin - - 193.51.33.29 - 15/12/2016 18h21. © ESKA Pratiques institutionnalisées Effets reconnus comme légitimes T= approche territoriale ; C= approche corporate ; M= approche moderne Autres effets prévisibles Nomadisme géographique Rassembler les sites, délocaliser, relocaliser Développer des territoires pertinents, engager des apprentissages (T) Rationaliser l’implantation (C) Traduire des mouvements stratégiques, en particulier les fusions (M) Réception politique, hausse de la conflictualité Rotation de personnel entrainant des coûts d’apprentissage Echec de la gestion planifiée de la mobilité Effet de gel, abandon ou suspension des projets et décisions durant l’opération Nouvelles frontières à l’intérieur de l’organisation selon l’origine, synergies difficiles Mobiliser l’espace comme ressource pour le management stratégique Optimiser les coûts immobiliers, rendre le dispositif matériel flexible pour l’adapter aux besoins de l’organisation (C) Symboliser un projet d’organisation et engager des apprentissages dans le sens voulu (M) Dysfonctionnements, coûts cachés, adaptation aux nouvelles contraintes physiques exercées sur les interactions Inertie ; focalisation, défense des territoires antérieurs, des réseaux de coopérations et méthodes qui fonctionnent et qui sont frappés d’obsolescence Destruction créatrice, innovation organisationnelle, lorsque les efforts d’adaptation sont reconnus et intégrés avec succès dans un projet collectif Remplacer les bureaux fermés par des openspaces Optimiser les coûts immobiliers, rendre le dispositif matériel flexible (C) Lutter contre l’immobilisme du cloisonnement ; supprimer les frontières organisationnelles, développer le partage de connaissances (M) Principe panoptique organisationnel induit par le partage des sphères visuelles et sonores Distanciation, nouvelles frontières organisationnelles, dans l’openspace et entre l’openspace et l’extérieur Inconfort, gêne mutuelle, régulation des humeurs, fatigue Conflits, auto-contrôle, stratégies de contournement, absentéisme, souffrance au travail attribués). La gestion des espaces de travail aboutirait ainsi à de l’hypocrisie organisationnelle au sens de (Brunsson, (2002). Tout en exprimant leurs déconvenues face aux nouvelles configurations, occupants et équipes projets continuent de colporter les justifications habituellement admises. Ils remarquent que des normes s’imposent sans véritablement tenir compte des objectifs ni des besoins particuliers. 19 En dernier recours, ils avancent encore une explication rationnelle de type corporate (C), la recherche d’économies, bien qu’il n’y ait pratiquement jamais de bilan financier. Lorsqu’on parvient à les établir, ces bilans font apparaître le coût de l’opération19 et les surcoûts de fonctionnement, de sécurité et de maintenance des nouveaux locaux, devenus plus techniques. Dans le discours, la réduction des Le conseil, les travaux, l’hébergement temporaire, le transfert, y compris dans un même bâtiment, le mobilier, les coûts sociaux visibles. 15 N° 81 - JUILLET - AOÛT - SEPTEMBRE 2011 Document téléchargé depuis www.cairn.info - Université de Versailles Saint-Quentin - - 193.51.33.29 - 15/12/2016 18h21. © ESKA Tableau 2 : Grille d’évaluation des standards de gestion des espaces de travail 5-18_Chap_1_Maclouf_Mise en page 1 17/06/11 09:42 Page16 surfaces – réalisée au détriment de la fonctionnalité20 – et les gains de performance compensent ces coûts objectifs. Cependant, aucune projection ne prévoit de mesurer ces gains. Aucune ne prend en compte les coûts cachés ni les apprentissages mis en évidence par notre étude. Mieux comprendre les dynamiques à l’œuvre dans le secteur de l’immobilier d’entreprise et tenter de soumettre les pratiques à une évaluation plus systématique nous semble nécessaire pour permettre aux gestionnaires de s’en réapproprier les enjeux. Nous proposons une grille d’évaluation (tableau 2). Elle reprend les grandes catégories de configurations, les objectifs exprimés et les principes qui les légitiment, ainsi que les phénomènes que l’on peut s’attendre, en toute rationalité, à observer en retour. Il appartiendra à des recherches futures de corriger et de faire évoluer cette grille. CONCLUSION Document téléchargé depuis www.cairn.info - Université de Versailles Saint-Quentin - - 193.51.33.29 - 15/12/2016 18h21. © ESKA Notre étude exploratoire s’appuie sur un échantillon d’organisations restreint, il faut donc envisager les résultats avec toute la prudence qui s’impose. Nous nous limiterons à formuler trois propositions. Premièrement, une conception unifiée de la ressource spatiale en sciences de gestion, avec une synthèse des principaux fondements de la gestion des espaces de travail contemporaine. Le gestionnaire mobilise l’espace comme une ressource stratégique pour optimiser le dispositif matériel et rendre l’organisation plus agile (approche corporate C), pour développer le territoire de la firme en provoquant des apprentissages interorganisationnels (approche territoriale T), pour concrétiser une transformation en symbolisant les objectifs et l’organisation recherchés (approche moderne M). Ces raisonnements se retrouvent dans des pratiques devenues dominantes, portées par un secteur immobilier21 en cours de professionnalisation. Deuxièmement, une grille d’évaluation des configurations spatiales qui permet de prévoir les principales réactions auxquelles on peut s’at- tendre. Notre étude recense et interprète les phénomènes observés dans un échantillon de douze situations. Troisièmement, une définition de la notion de territoire comme le résultat de l’appropriation des espaces par les acteurs pour développer des réseaux de coopération. A l’issue d’un processus nécessaire d’adaptation réciproque, l’écart entre l’usage prévu et le déploiement effectif des activités dans le nouvel espace forme des territoires, qui se superposent et s’enchevêtrent. La prise en compte de l’ancrage spatial des activités devrait nourrir l’analyse des frontières organisationnelles, qui l’ignore (Black, Carlile, & Repenning, 2004; Santos et al., 2005) ou l’évoque seulement de manière détournée22. En effet, l’un des objectifs des transformations spatiales est d’ouvrir les frontières à l’extérieur de l’organisation (approche territoriale T) et à l’intérieur de l’organisation (approche moderne M). Or la suppression des cloisons spatiales n’est pas une condition nécessaire ni suffisante pour intégrer les ensembles que l’on souhaite : le décloisonnement remet en cause des territoires, il se heurte à l’inertie des frontières (Arbaret-Schulz et al., 2004 ; Dumez & Jeunemaître 2010) et celles-ci peuvent s’en trouver renforcées. Par ailleurs, l’adaptation entre l’organisation et le dispositif matériel est à la fois un réglage technique et un jeu politique. Les territoires sont soupçonnés de favoriser la sous-optimisation mais les occupants défendent aussi leurs coopérations face aux nouvelles prescriptions spatiales et, trop souvent, les systèmes d’action en sortent affaiblis. Le respect des zones d’autonomie pour le bon fonctionnement des organisations prolonge des résultats comparables dans d’autres domaines23. Il renvoie à une préoccupation particulièrement d’actualité en GRH et en management stratégique, le maintien et le développement de collectifs de travail efficaces et toujours plus adaptables. BIBLIOGRAPHIE ADAM-LEDUNOIS, S., & RENAULT, S. 2007. La coordination des Parcs Industriels Fournisseurs : 20 Salles de réunions aveugles, bureaux partagés, capacités de stockage réduites, box impersonnels pour recevoir. 21 Cette expression est empruntée à Norbert Alter qui l’emploie pour le secteur informationnel. Le mouvement nous semble comparable. 22 Fennell & Alexander (1987) étudient l’influence de la localisation géographique de l’organisation sur sa disposition à ouvrir ses frontières. 23 Par exemple lors de l’introduction d’une nouvelle technologie au sein de collectifs professionnels (Black et al. 2004). 16 REVUE DE GESTION DES RESSOURCES HUMAINES Document téléchargé depuis www.cairn.info - Université de Versailles Saint-Quentin - - 193.51.33.29 - 15/12/2016 18h21. © ESKA Espaces de travail et Management 5-18_Chap_1_Maclouf_Mise en page 1 17/06/11 09:42 Page17 Document téléchargé depuis www.cairn.info - Université de Versailles Saint-Quentin - - 193.51.33.29 - 15/12/2016 18h21. © ESKA l’art de l’équilibre. Article présenté à la conférence « la dimension spatiale dans le management des organisations », Orléans. AJZEN, I. 1991. The Theory of Planned Behavior. Organizational Behavior & Human Decision Processes, 50(2): 179-212. 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