MISE AU POINT
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La Lettre du Pneumologue - Volume VIII - no3 - mai-juin 2005
I
l est difficile de proposer une conduite à tenir bien définie
pour la recherche étiologique d’un nodule solitaire pulmo-
naire ; en effet, les explorations, notamment chirurgicales,
peuvent être limitées par de nombreux facteurs, en particulier la
localisation du nodule, l’état physiologique du malade et ses
comorbidités, ou les valeurs fonctionnelles respiratoires. Le méde-
cin responsable doit donc faire un choix raisonné entre des inves-
tigations invasives, voire dangereuses (ponction sous scanner,
vidéochirurgie, thoracotomie, etc.) et une surveillance attentive, au
risque de sous-estimer la probabilité d’un cancer rapidement évo-
lutif. Une assurance supplémentaire dans la démarche diagnostique
peut heureusement nous être apportée par des examens isotopiques
de dernière génération (TEP-scanner, SPECT), mais ces examens
sont parfois peu accessibles, et peuvent induire en erreur le clini-
cien dans un nombre limité de cas. Cet article a pour but de pro-
poser une attitude cohérente dans le bilan étiologique d’un nodule
solitaire pulmonaire, à partir d’une bibliographie abondante, mais
de qualité variable.
ÉTIOLOGIES DES NODULES PULMONAIRES SOLITAIRES
Il n’est pas possible de déterminer avec précision la prévalence des
étiologies des nodules pulmonaires solitaires, car les populations
étudiées correspondent pour la plupart à des séries chirurgicales
très dissemblables. En particulier, les séries diffèrent en termes
d’antécédent de cancer et d’exposition aux carcinogènes, mais aussi
en granulomatoses, parasitoses, etc. Le tableau I, à titre d’exemple,
compare deux études aux résultats très différents (cette différence
étant surtout liée à la proportion des patients aux antécédents de
cancer). Ces publications ont le mérite de mettre en exergue trois
facteurs de risque : l’existence d’un antécédent de cancer connu,
la taille du nodule (seuil à risque : 1 cm) et l’âge avancé.
LES FACTEURS DE RISQUE DE NODULES SOLITAIRES MALINS
La recherche de facteurs de risque de néoplasie est un point de départ
essentiel dans la stratégie diagnostique d’un nodule solitaire ; en
effet, une recherche invasive ne pouvant être proposée à tous les
malades, il faut sélectionner préalablement ceux dont le risque
Le nodule solitaire pulmonaire : mise au point
Update on the solitary pulmonary nodules
O. Molinier*, F. Goupil*, F.X. Lebas*
* Département des maladies respiratoires, centre hospitalier général, Le Mans.
Résumé : La prise en charge du nodule pulmonaire solitaire est complexe et dépend de caractéristiques cliniques ou radiologiques,
comme l’âge, la taille du nodule ou d’une calcification. Il est primordial de déterminer l’éventualité d’un cancer par une analyse
bayésienne, avant de mettre en route des investigations potentiellement dangereuses, dont le risque morbide doit être compensé
par une probabilité significative d’améliorer le pronostic. Nous avons accès à des examens d’imagerie comme le scanner, qui est
capable de déterminer l’allure maligne du nodule par l’analyse du rehaussement iodé, ou la tomographie par émission de positons
(TEP), qui a une valeur prédictive négative élevée, et permet d’éviter une chirurgie inadaptée. Les études de dépistage par scanner
à faible dose ont aidé à améliorer la connaissance et la prise en charge des nodules pulmonaires solitaires, même si leur influence
sur la survie n’est pas prouvée.
Mots-clés : Score de probabilité - TEP - Chirurgie - Surveillance.
Summary: The management of the solitary pulmonary nodule is complex and depends on clinical or radiological characteristics,
as age, size of the nodule or calcification. It’s essential to determine, with a bayesian analysis, the probability of cancer, before
initiating a series of potentially dangerous procedures (as transthoracic needle biopsy or surgery), whose morbid risk must be
offset by a significant probability of improvement of prognosis.
We have access to many imaging as CT scan, that is able to determine the malignant appearance of a nodule by the enhancement
analysis or PET scan, that has a very high negative predictive value and can avoid a futile surgery.
Screenings by low-dose computed tomography have permitted to improve the knowledge and the management of the solitary
pulmonary nodules, but their influence on overall survival is not proven.
Keywords: Probability score - PET-FDG - Surgery - Follow-up.
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La Lettre du Pneumologue - Volume VIII - no3 - mai-juin 2005
morbide encouru lors du geste est compensé par une chance
d’améliorer le pronostic. Ces facteurs de risque sont cliniques et
radiologiques.
Swensen et al. (3)ont analysé, dans cette étude rétrospective menée
chez 629 patients, les facteurs de risque de malignité d’un nodule
pulmonaire solitaire. Les critères cliniques recherchés étaient l’âge,
le sexe, un antécédent de cancer, l’existence d’une exposition à
l’amiante ou au tabac, une maladie interstitielle ou obstructive.
Les critères radiologiques étaient le diamètre du nodule, sa loca-
lisation, ses bords, l’existence d’une cavitation, etc. Trois critères
cliniques ressortent : l’âge avancé, le statut tabagique, les antécé-
dents de cancer. Trois critères radiologiques semblent constituer
un risque important de malignité : le diamètre élevé, l’existence
d’une spiculation et la localisation dans les lobes supérieurs.
ÉVALUATION MORPHOLOGIQUE
D’UN NODULE PULMONAIRE
On retient généralement trois aspects radiologiques : la taille, les
contours et les caractéristiques internes.
La taille du nodule, si elle permet d’évoquer un cancer, n’a pas une
valeur diagnostique excellente : en effet, 80 % des nodules bénins
ont moins de 2 cm et 58 % des nodules malins plus de 2 cm (4).
Les bords du nodule, lorsqu’ils sont réguliers, apportent une pro-
babilité de bénignité de 79 % ; lorsqu’ils sont lobulés, cette proba-
bilité n’est plus que de 25 % (4). Quant à l’aspect en “corona radiata”
(ou spiculation), sa spécificité pour une lésion maligne varie de
88 à 94 % selon les études.
Les caractéristiques internes du nodule sont peu spécifiques comme,
par exemple, les cavitations ou les bronchogrammes aériens. Tou-
tefois, deux aspects sont à retenir :
l’existence d’une densité graisseuse est très nettement en faveur
d’un hamartochondrome (5) ;
une calcification est classiquement associée à une origine
bénigne, sauf dans deux circonstances : lorsque cette calcification
est “amorphe” et diffuse, elle est compatible avec une tumeur carci-
noïde ; lorsqu’elle est excentrée au sein d’une opacité morpholo-
giquement suspecte, il peut s’agir d’un adénocarcinome s’étendant
à partir d’une lésion granulomateuse ancienne.
CALCUL D’UN SCORE DE PROBABILITÉ CLINIQUE
Cummings et al. ont créé, par une approche bayésienne, une
méthode simple estimant la probabilité de malignité d’un nodule
pulmonaire (6) : l’auteur a fixé une table déterminant les rapports
de probabilité de cancer (LR [likelihood ratios]), de critères cli-
niques (âge, tabac) et radiologiques (taille) où LR correspond
au rapport suivant : LR = nombre de nodules malins ayant cette
caractéristique/nombre de nodules bénins ayant cette caracté-
ristique.
À titre d’exemple : LR taille est de 0,1 si le nodule est inférieur
à 1,5 cm ; LR taille est de 29,4 si le nodule est supérieur à 5,3 cm.
De même pour l’âge : LR âge est de 0,1 si l’âge est inférieur à
35 ans ; il est de 5,7 si l’âge est supérieur à 70 ans.
À partir de ces valeurs, on peut calculer la probabilité de cancer
par le rapport : PCa = odds Ca/(1 + odds Ca) où odds Ca est défini
Tableau I. Étiologies des nodules pulmonaires.
Cardillo (1) Ginsberg (2)
Nombre de patients 429 426
Antécédent de cancer 23 (5,4%) 315 (73,4 %)
Technique chirurgicale Thoracoscopie vidéo-assistée Thoracoscopie vidéo-assistée
en première intention en première intention
Lésions bénignes Étiologies (% nodules) Hamartochondrome : 72 % Hamartochondrome : 7,9 %
Tuberculome : 6,3 % Ganglion intrapulmonaire : 5,9 %
Fibrose : 4,9 % Autres (ganglion, tumorlet, fibrose, etc.) : 31,1 %
Autres (granulomes, etc.) : 2,9 % Total : 44,9 %
Total : 86,2 %
Influence de la taille Taille moyenne : 1,8 cm En l’absence de cancer connu :
du nodule et antécédents Antécédent de cancer : 3 % 69 % des nodules < 1 cm sont bénins
de cancer En présence de cancer connu :
48,6 % des nodules < 1 cm sont bénins
Âge Moyenne : 49 ans NR
Lésions malignes Étiologies (% nodules) Cancer bronchique : 52 (12,1 %) Cancer bronchique : 26 %
Métastases : 7 (1,6 %) Cancer du sein : 6,7 %
Total : 13,7 % Cancer colique : 5,5 %
Autres : 16,9 %
Total : 55,1 %
Influence de la taille Taille moyenne : 2,31 cm En l’absence de cancer connu :
du nodule Antécédent de cancer : 20,3 % 59 % des nodules > 1 cm sont malins
et antécédents En présence de cancer connu :
de cancer 84 % des nodules > 1 cm sont malins
Âge Moyenne : 59 ans NR
NR : non rapporté.
MISE AU POINT
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La Lettre du Pneumologue - Volume VIII - no3 - mai-juin 2005
par : odds Ca = LR prévalence x LR âge x LR tabac x LR taille.
Prenons deux exemples extrêmes :
premier cas : patient de moins de 35 ans, taille du nodule
<1,5 cm, n’ayant jamais fumé : LR taille = 0,1, LR âge = 0,1,
LR tabac = 0,15. Odds Ca = 0,7 x 0,1 x 0,1 x 0,15 = 0,00105.
PCa = 0,00105(0,00105+1) = 0,104 % ;
deuxième cas : patient de 75 ans, taille du nodule : 3 cm, taba-
gisme évalué à deux paquets par jour, et jamais sevré : PCa = 93,1 %.
LES EXAMENS D’IMAGERIE
Radiographie standard et tomodensitométrie
La hiérarchie des examens doit se conformer à deux critères essen-
tiels : d’une part, la valeur diagnostique de ces examens et, d’autre
part, leur caractère invasif. En effet, il est raisonnable de commen-
cer par des examens engendrant peu de morbidité, sauf dans le
cas précis où la probabilité clinique de cancer est forte. Dans cette
situation, afin d’éviter un retard parfois délétère au patient, la chirur-
gie apporte le diagnostic et le traitement.
Si la radiographie standard permet de détecter des signes pouvant
évoquer la malignité (corona radiata), ou la bénignité (calcifica-
tion), sa sensibilité ne sera jamais comparable à celle de la tomo-
densitométrie. Henschke et al. retrouvaient une sensibilité assez
faible de la radiographie, à la fois pour le diagnostic de nodules
non calcifiés (30,4 %) et pour le diagnostic de nodules malins
(10 % !). Même pour les images de calcification, le scanner est
plus sensible (7).
Le scanner thoracique à haute résolution permet de détecter les
nodules pulmonaires avec une grande sensibilité et de guider les
explorations (ponction sous scanner, vidéothoracoscopie, etc.).
En effet, les coupes millimétriques permettent d’analyser le
nodule avec une densitométrie exacte, en évitant l’effet de volume
partiel. Grâce à l’avènement du scanner spiralé, on peut effec-
tuer des mesures de nodules en trois dimensions, et ainsi calcu-
ler les variations de volume du nodule avec plus d’exactitude
qu’avec les images bidimensionnelles (8).
Associé à l’injection de produit de contraste, le scanner permet
d’augmenter la sensibilité de détection d’un nodule malin, par ana-
lyse du flux sanguin : avec un seuil de rehaussement fixé à 15 HU,
la sensibilité est de 98 % et la spécificité de 58 % (9). Ce résultat
semble donc attester qu’un rehaussement ne dépassant pas 15 HU
prédit fortement la bénignité du nodule (le rehaussement moyen
des granulomes et des nodules bénins est de 10 HU). Le scanner
dynamique pourrait affiner la démarche diagnostique par l’analyse
de la hauteur de pic ou par le rapport nodule-aorte (10). Enfin, la
technique appelée “maximum-intensity-projection” (MIP) corres-
pond, à travers une superposition d’images axiales, à la projec-
tion des organes de plus haute densité dans une image en deux
dimensions. Elle sélectionne surtout les vaisseaux et les nodules
pulmonaires, et efface les portions de faible densité comme les
structures aérées. En pratique, elle permet de différencier les
nodules pulmonaires centraux des vaisseaux qui prennent un aspect
tubulé (figure). Selon Gruden et al. (11), la technique en MIP peut
diagnostiquer des nodules périphériques et centraux des maladies
métastatiques passés inaperçus au scanner conventionnel.
La tomographie par émission de positons
Cet examen nouveau utilisant la fixation du 2-[F-18] fluoro-2-
désoxy-D-glucose pour mesurer le métabolisme du glucose dans
différents tissus permet de détecter la plupart des cancers. En onco-
logie thoracique, il est doublement intéressant :
Sa très grande sensibilité permet d’apporter des arguments dia-
gnostiques ; il est supérieur, en sensibilité, au calcul de probabilité
bayésien (12), et à la biopsie transthoracique (tableau II) (13).
Toutefois, cet examen pèche en sensibilité dans trois circonstances :
le carcinome bronchiolo-alvéolaire (la TEP serait négative dans
plus de la moitié des cas), la tumeur carcinoïde et le nodule de taille
inférieure à 1 cm. Une étude très récente (14)a recherché, à partir
de 3 912 patients porteurs d’un cancer bronchique prouvé histo-
logiquement, le taux de faux négatifs : seuls 0,5 % des patients
ne fixaient pas à la TEP ; parmi ces 20 cas, l’adénocarcinome était
prédominant (dont 30 % de bronchiolo-alvéolaires), et le risque
de faux négatifs était étroitement corrélé à la précocité du stade de
Mountain (70 % de stade IA, 25 % de stade IB, 5 % de stade IV).
Cet examen est moins remarquable en spécificité (79 à 100 %),
car certaines pathologies (15), au premier rang desquelles les gra-
nulomatoses, sont fréquemment positives (en Europe, il s’agit des
mycobactérioses, d’aspergillose et de sarcoïdose, en Amérique,
de l’histoplasmose et de la coccidioïdomycose).
Figure. Principe des images en MIP.
Images anatomiques
de deux vaisseaux
et d’un nodule,
sectionnées par trois
coupes axiales.
Scanner simple :
impossibilité
d’apprécier
les rapports
entre les nodules
vasculaires
et le nodule solitaire.
Maximum-intensity-
projection :
distingue
les vaisseaux
dans leur continuité,
sans rapport
avec le nodule.
Tableau II. Comparaison TEP et ponction sous scanner (13).
Sensibilité Spécificité Valeur prédictive Valeur prédictive Exactitude
(%) (%) positive (%) négative (%) diagnostique (%)
TEP TDM 100 78 93 100 94
Ponction transthoracique 81 100 100 64 86
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La Lettre du Pneumologue - Volume VIII - no3 - mai-juin 2005
Cet examen permet d’améliorer le bilan d’extension initial, en
éliminant les chirurgies inadaptées, ou, inversement, en incluant
des patients dans un programme chirurgical dont ils avaient été exclus
dans un premier temps : ainsi, il détecte des métastases occultes
dans 14 % des cas. Associé au scanner, il évalue de manière fiable
l’extension médiastinale, en différenciant notamment les ganglions
hilaires (N1) et subaortiques (N2), une tumeur paramédiastinale
d’un ganglion inter-trachéo-bronchique (16). En conclusion, la
TEP élimine 21,7 % de thoracotomies chez des patients initiale-
ment considérés comme opérables (17).En revanche, pour les stades
précoces (I et II), elle modifie l’attitude thérapeutique dans 13 % des
cas, mais n’influe pas sur le nombre de thoracotomies [car les
quelques stades IIIA sont des mini-N2 qui restent opérables, les
métastases viscérales diagnostiquées uniquement à la TEP étant
rares dans cette population] (18).
SPECT
Il s’agit d’une tomographie utilisant un analogue de la somato-
statine (le dépréotide) lié au technétium 99 pour dévoiler les organes
atteints. Blum et al. ont évalué la valeur diagnostique du “SPECT”
(19). Sur les 114 sujets porteurs de nodules inférieurs à 6 cm, la
sensibilité était élevée et la spécificité intermédiaire (tableau III).
Ces résultats, presque superposables à ceux de la TEP, rendent cet
examen intéressant, surtout pour les centres ne disposant pas de
la TEP pour des raisons économiques ou géographiques.
LA BIOPSIE
Elle est indiquée quand la probabilité de lésion bénigne est suffi-
samment forte pour éviter la chirurgie d’emblée.
La ponction transthoracique a une sensibilité variant de 80 à 95 % si
la situation du nodule est périphérique. Les mauvais candidats sont
porteurs d’une lésion centrale, de diamètre inférieur à 1,5 cm ou
d’une cavitation (23). Les complications les plus notables sont le
pneumothorax (pouvant compliquer jusqu’à 30 % des ponctions,
mais nécessitant un drainage dans seulement 15 % des cas), et
l’hémorragie [rarement grave] (24). Enfin, l’ultrasonographie
pourrait permettre d’améliorer la valeur prédictive négative de la
biopsie transthoracique et prévenir une chirurgie futile dans un
nombre important de cas [64 %] (25).
Les nodules sont rarement visibles en fibroscopie bronchique, mais,
sous amplificateur de brillance, cette technique, associée à un bros-
sage distal, permet d’apporter le diagnostic dans 60 % des cas (26).
De même, une fibroscopie bronchique avec biopsies ou brossages
distaux, guidée par le scanner, permet de diagnostiquer des nodules
malins dans 69 % des cas (27). L’ultrasonographie endobronchique
sous amplificateur de brillance, pratiquée par des opérateurs entraî-
nés, a une sensibilité, une spécificité et une exactitude diagnos-
tique supérieures à celles de la fibroscopie faite sous amplificateur
de brillance seule (28). Enfin, la navigation électromagnétique
est une technique de repérage des petites lésions périphériques qui
pourrait augmenter la sensibilité des biopsies transbronchiques,
surtout si un scanner thoracique tridimensionnel est effectué au
préalable (29).
LA CHIRURGIE
Lorsque la présomption de cancer est grande, ou si des examens
n’ont pas permis d’apporter des arguments formels éliminant un
cancer (comme les résultat d’une TEP), on proposera une chirur-
gie, plutôt par thoracoscopie vidéo-assistée. En effet, cette dernière
engendre une morbidité très faible (30), à l’inverse de la thoraco-
tomie, dont les complications postopératoires immédiates seraient
estimées entre 20 et 44 %, et dont la mortalité à 30 jours serait
de 3 à 6 % (31) ; ces derniers résultats sont toutefois à pondérer
sérieusement, car la population étudiée était à risque cardiores-
piratoire et âgée. La durée de séjour pour une thoracotomie est
estimée à 7,8 jours, contre 4,6 jours pour la thoracoscopie chi-
rurgicale (30). Celle-ci a une sensibilité et une spécificité maxi-
males si la distance du nodule à la plèvre est inférieure à 5 mm et
le diamètre supérieur à 1 cm (32). Le risque de conversion en
thoracotomie est toutefois grand, estimé à 25 %.
APPORTS DES ÉTUDES DE DÉPISTAGE
ET DE SURVEILLANCE
La majorité d’entre elles utilisent le scanner spiralé à faible dose.
Leur principal défaut concerne les populations d’études, qui,
regroupant, pour la plupart, des patients exposés aux carcinogènes
et asymptomatiques, ne sont pas parfaitement identiques à celles
rencontrées en pratique courante.
Leur objectif est multiple (tableau IV) :
déterminer le taux de nodules non calcifiés. La prévalence des
nodules varie de 5,1 % à 51,4 %. Ces différences dépendent du
degré de résolution du scanner, mais aussi de l’origine géogra-
phique de certaines populations (les populations américaines étu-
diées étaient porteuses d’un nombre d’histoplasmoses non négli-
geable). Ce taux ne varie pas avec l’âge, contrairement au cancer
bronchopulmonaire. La valeur prédictive positive du scanner à faible
dose (c’est-à-dire la proportion de nodules correspondant à un
cancer) est faible, surtout chez les patients âgés de moins de 50 ans.
Elle dépend beaucoup du profil des populations étudiées (âge,
Tableau III. Valeur diagnostique de la TEP et du SPECT.
Sensibilité Spécificité Valeur prédictive Valeur prédictive
(%) (%) positive (%) négative (%)
SPECT Blum (19) 96,6 73,1 92,4 86,3
Bury (20) 100,0 88,0 94,0 100,0
TEP-scan Dewan (21) 95,0 80,0 90,0 89,0
Gupta (22) 93,0 88,0 92,0 95,0
MISE AU POINT
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La Lettre du Pneumologue - Volume VIII - no3 - mai-juin 2005
exposition aux carcinogènes ou plutôt à certaines maladies infec-
tieuses pouvant simuler une néoplasie…). Les valeurs de la sensi-
bilité et de la spécificité ne peuvent être qu’approximatives, car il
n’est pas possible d’avancer le nombre exact de faux négatifs dans
ces études ;
déterminer la prévalence du cancer bronchique dans une popu-
lation définie. Selon les études, elle est de 0,4 à 2,7 %. Ces variations
s’expliquent par la différence d’âge et de consommation tabagique
entre les populations d’étude ;
évaluer l’incidence annuelle du cancer pulmonaire : elle est
faible, variant de 0,07 à 0,4 % ;
diagnostiquer le cancer à un stade précoce : le scanner est effi-
cace puisqu’il diagnostique des stades IA dans 80 % des cas, alors
que ce stade ne représente que 7 % des cancers bronchiques hors
dépistage. Les adénocarcinomes sont de loin les plus fréquents
(54,5 à 94,6 % selon les études), et il n’y a pas d’arguments
convaincants pouvant expliquer la différence entre ce taux très
élevé d’adénocarcinomes et celui, très inférieur, retrouvé en pra-
tique courante ;
diminuer la mortalité par cancer bronchique et la mortalité glo-
bale. Cet objectif ultime sera difficile à atteindre compte tenu de
l’absence de randomisation initiale dans l’ensemble de ces études.
Pour espérer diminuer la mortalité du cancer bronchique, il faut
non seulement augmenter le nombre de patients opérables, mais
aussi diminuer celui de patients inopérables. En l’absence de cette
dernière condition, on ne fait qu’augmenter le nombre de cancers
bronchiques diagnostiqués sans diminuer le nombre total de décès
liés à cette pathologie ;
définir une attitude diagnostique et thérapeutique en fonction
de la taille du nodule et des facteurs de risque.
Une étude a évalué l’association du scanner à faible dose et de la
TEP-TDM chez des patients à risque (38) : les critères de sélection
pour une biopsie diagnostique comprenaient la taille>2cm, et,
pour les lésions suspectes de plus de 7 mm, l’analyse du rehausse-
ment iodé (> 30 UH) et la positivité de la TEP. Les autres nodules
étaient suivis annuellement. Cette attitude a permis d’opérer tous
les nodules cancéreux, au prix de 6 interventions pour lésion
bénigne sur 27 au total. À noter que l’analyse du rehaussement
iodé ne s’est pas révélée inférieure à la TEP en termes d’exacti-
tude diagnostique.
ATTITUDE PRÉCONISÉE
DEVANT UN NODULE PULMONAIRE SOLITAIRE
Ost et al. (39) ont défini un algorithme thérapeutique inspiré de
ces études de dépistage. Dans un premier temps, il ont exclu ceux
dont les valeurs fonctionnelles respiratoires ne sont pas compa-
tibles avec un geste curateur (VEMS < 0,8, VO2max<15ml/kg/mn)
et les nodules stables depuis deux ans ou calcifiés.
Il ont proposé :
la thoracoscopie vidéo-assistée pour tout nodule suspect s’accom-
pagnant d’une probabilité de cancer élevée, c’est-à-dire PCa > 60 % ;
une batterie d’examens comprenant selon les cas la TEP, le
scanner avec étude du rehaussement iodé, la ponction transthora-
cique, voire la bronchoscopie pour tous les cas de probabilité inter-
médiaire (10-60 %) ;
la surveillance par scanner à haute résolution à 3, 6, 9, 12, 18 et
24 mois pour tout patient ayant un score de probabilité inférieur
à 10 %, ou pour lequel l’ensemble des examens précités sont revenus
négatifs.
Toutefois, dans deux circonstances, l’attitude proposée par Ost
et al. n’est pas valable :
Henschke a étudié le devenir des patients porteurs de nodules
de taille inférieure à 5 mm : il ne retrouve aucun cas de cancer
prouvé et préconise la surveillance par un scanner annuel (40) ;
les patients aux antécédents de cancer doivent bénéficier d’un
maximum d’explorations aboutissant à un diagnostic rapide, car
la moitié des nodules retrouvés chez ces patients sont des méta-
stases (41).
PLACE DE LA TEP DANS L’ALGORITHME
Ost et al. ont proposé la TEP aux cas de probabilité intermédiaire.
Or :
un consensus international a décidé que, compte tenu de l’excel-
lente valeur prédictive négative de la TEP, un nodule de plus de
Tableau IV. Résultats des études de dépistage et de surveillance des nodules pulmonaires.
Nombre Âge Tabagiques Prévalence Valeur Incidence Stade IA Adéno- Décès
de patients (%) nodules non prédictive annuelle (%) carcinomes par cancer
calcifiés (%) positive (%) du cancer (%) (%)
Henschke (7) 1 000 60 100 23 2,7 NR 81,5 78,6 NR
Médiane : 67 ans
Sone (33) 5 483 40 46,1 5,1 0,4 0,4 91,3 82,6 1
moyenne : 64 ans
Diedrich (34) 817 40 100 43 1,3 NR 45,5 54,5 3
médiane : 54 ans
Nawa (35) 7 956 50 62,1 26,4 0,45 0,07 57 94,6 NR
Sobue (36) 1 611 40-79 86 11,5 0,87 0,30 69,2 76,9 NR
Swensen (37) 1 520 50 96,7 51,4 1,38 0,25 59,1 68,2 1
moyenne : 59 ans
NR : non rapporté
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