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La Lettre du Gynécologue - n° 312 - mai 2006
DOSSIER
•
•Ni l’échographie pelvienne ni le dosage de marqueurs sériques
(CA125) ne peuvent prétendre à améliorer ce dépistage.
Ces examens (clinique et échographie) peuvent toutefois être
réalisés en l’absence d’autre alternative.
Il n’y a actuellement pas de place pour le dosage systématique
du CA 125 comme outil de dépistage du cancer des ovaires.
La prévention du risque de cancer de l’ovaire
repose sur la chirurgie prophylactique
L’intervention consiste en une annexectomie bilatérale (14)
(du fait du risque élevé d’atteinte des trompes) avec prélève-
ment de liquide dans le cul-de-sac de Douglas pour analyse
cytologique. En l’absence de liquide, un lavage péritonéal est
indispensable au moins au niveau du Douglas et des gouttières
pariétocoliques.
En l’absence de pathologie utérine spécifique, il n’y a pas
d’indication à une hystérectomie préventive associée, malgré
la présence d’une petit segment de trompe dans la partie
interstitielle du myomètre.
Cette intervention doit être réalisée si possible par cœlioscopie.
L’indication de cette intervention doit avoir été validée par une
concertation pluridisciplinaire, chez une femme dont l’espé-
rance de vie doit être suffisante (au moins 15 ans), en prenant
en compte le projet parental et ce qui serait susceptible de le
modifier (critère d’âge). Un suivi médical, gynécologique et
psychologique est souhaitable.
Cette intervention est recommandée chez une femme porteuse
d’une mutation des gènes BRCA, à partir de l’âge de 40 ans, en
fonction de son propre risque de développer un cancer des
ovaires, en prenant donc en compte les différences de risques
liées à l’implication de BRCA1 ou de BRCA2. Un traitement
hormonal peut être discuté jusqu’à l’âge de 50 ans.
Chez les femmes pour lesquelles il n’a pas été identifié de
mutation sur les gènes BRCA, la décision de chirurgie prophy-
lactique peut se discuter au cas par cas, sur la base du risque de
développer un cancer des ovaires en respectant bien évidem-
ment les mêmes procédures.
Prise en charge des femmes à risque génétique
et atteintes de cancer du sein
La chirurgie conservatrice reste possible malgré un risque élevé
de second cancer homolatéral, dans la mesure où il ne semble
pas à ce jour que la présence d’une mutation sur les gènes
BRCA modifie l’efficacité ou la toxicité des traitements radio-
chimiothérapiques.
Des études sont en cours pour voir si ces femmes ont une
réponse différente à certaines molécules de chimiothérapie.
Toutefois, l’existence de ce risque de deuxième cancer homolaté-
ral doit faire discuter une chirurgie radicale, en faisant référence
aux recommandations évoquées plus tôt pour la chirurgie préven-
tive et en tenant compte du pronostic du premier cancer.
CONCLUSION
Les progrès réalisés ces dernières années sur la reconnaissance
des prédispositions héréditaires aux cancers du sein et de
l’ovaire ont permis une réflexion médicale structurée sur la
prise en charge de ces femmes à risque, avec une attention par-
ticulière sur le retentissement psychosocial de cette démarche.
Le bénéfice du dépistage, tel qu’il est actuellement recom-
mandé, n’est pas encore démontré, mais il paraît probable qu’il
apporte un bénéfice à ces femmes et les mesures de sur-
veillance proposées sont dans l’ensemble bien acceptées.
En revanche, même si la réflexion sur les possibilités de chi-
mioprévention du cancer du sein peut aboutir dans quelques
années à la mise en place de protocoles de recherche, la chirur-
gie prophylactique reste à ce jour la seule solution efficace,
que ce soit par rapport au risque de cancer des ovaires ou au
risque de cancer du sein.
La chirurgie annexielle est mieux acceptée que la chirurgie
mammaire, mais toute décision de chirurgie préventive reste
difficile avec des conséquences marquées tant sur le plan phy-
sique que moral, ce qui nécessite, avant toute intervention, une
réflexion appropriée avec les différents acteurs concernés.
■
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