A V C Accidents vasculaires cérébraux ● P. Amarenco* Points forts ■ L’IRM des plaques d’athérosclérose est en plein déve- loppement ; déjà, les sujets de la cohorte de Framingham sont étudiés systématiquement, à la recherche de plaques de l’aorte thoracique, et l’IRM confirme leur très grande fréquence au-delà de 60 ans. ■ Les lésions mobiles dans l’athérosclérose de la crosse de l’aorte ne sont pas forcément thrombotiques mais peuvent aussi correspondre à la chape fibreuse mobile d’une plaque rompue. Ainsi, le traitement anticoagulant ne s’impose pas toujours. dysfonction de l’auricule gauche, préalablement observée après un trouble du rythme auriculaire, est plus fréquente dans les infarctus cérébraux de cause indéterminée en rythme sinusal. séries non contrôlées est de 7,4 % dans les équipes les plus entraînées, de 6 % avant 80 ans et de 16 % après 80 ans. Elle est de 4,3 % lors du traitement par stent d’une resténose post-chirurgicale. ■ Des statines réduisent l’incidence de l’infarctus cérébral chez les patients qui ont eu un infarctus du myocarde, en diminuant le risque d’infarctus cérébral non fatal (– 25 %) sans diminuer celui de l’infarctus cérébral fatal. Cet effet s’observe uniquement chez les patients non hypertendus (– 36 %) et chez ceux qui prenaient de l’aspirine (– 28 %). ■ La ■ Après fermeture percutanée d’un foramen ovale perméable, 27 % des patients ont un shunt résiduel, le matériel doit parfois être retiré chirurgicalement (1 patient), une fracture du matériel peut survenir (5 patients), ou un thrombus peut se former localement (3 patients) ; un patient est mort pendant le retrait d’un matériel pour septicémie. Du fait de cette morbidité et du faible risque de récidive d’embolie cérébrale de ces patients, des essais randomisés sont absolument nécessaires. IRM HAUTE RÉSOLUTION DES PLAQUES D’ATHÉROSCLÉROSE Cette technique en pleine expansion et d’un intérêt considérable a pour objectif d’identifier les plaques dites “vulnérables”, à risque de rupture, en identifiant le cœur lipidique et l’épaisseur de la chape fibreuse. Cet objectif est cependant loin d’être atteint. Par rapport à l’an dernier, peu de progrès ont été faits sur la qualité des images, mais la méthodologie s’affine et des études prospectives se mettent en place, comme celle réalisée dans la cohorte de Framingham, qui paraît extrêmement prometteuse. * Service de neurologie, hôpital Lariboisière, Paris. L’IRM transœsophagienne de l’aorte thoracique K.A. Shunk (Baltimore, 121) a rapporté son expérience de l’IRM haute résolution réalisée grâce à un coil placé dans l’œsophage par voie nasale (8 à 12 french, flexibles) chez 22 sujets, dont 14 avec une athérosclérose aortique diagnostiquée au préalable par échographie transœsophagienne et 8 sujets contrôles. L’épaisseur maximale et minimale des plaques d’athérosclérose a été mesurée en coupe axiale. Une épaisseur de paroi de plus de 2 mm était retenue comme épaississement anormal. La comparaison entre ETO et IRM transœsophagienne a montré que l’épaisseur de la plaque était mesurée de la même façon par les deux techniques, mais que son étendue était sous-estimée par l’ETO, comparativement à ce qui était observé en IRM (p = 0,0025). La Lettre du Cardiologue - n° 323 - janvier 2000 41 ■ Les patients ayant une sténose carotide 70 % qui n’ont pas d’insuffisance cardiaque, de revascularisation coronaire récente, de BPCO, d’insuffisance rénale, sont à très bas risque chirurgical pour l’endartérectomie (2,9 % à 30 jours postopératoire). Ils devraient donc être exclus des essais comparant chirurgie et angioplastie avec stent. La morbidité à 30 jours du stenting carotide dans les A V C Par ailleurs, l’IRM permet une meilleure caractérisation de la plaque : l’hyposignal observé à l’intérieur de celle-ci est interprété comme étant représentatif du cœur lipidique et, par déduction, la chape fibreuse correspond à l’hypersignal interposé entre le cœur lipidique et la lumière de l’artère. Cette interprétation n’a toutefois pas été validée par un examen histologique. L’étude de Framingham a déjà inclus l’IRM haute résolution des plaques comme moyen de détection de l’athérosclérose aortique. Dans cette étude de population, F. Jaffer (Boston, 2745) a étudié 312 sujets asymptomatiques de la cohorte de Framingham. Cent cinquante-huit ont eu des données IRM analysables. Cinquante pour cent des sujets avaient des plaques de l’aorte thoracique. La distribution selon l’âge est la suivante : PLQ Burden (%) 1,5 1 0,5 0 n = 15 < 50 n = 61 n = 57 n = 25 50-60 60-70 ≥ 70 Âge (années) Commentaires : ainsi, l’IRM permet une mesure qualitative et quantitative des plaques de l’aorte thoracique et autorise l’évaluation du risque cardiovasculaire lié à la présence de ces plaques, dépistées chez les sujets asymptomatiques. La distribution selon l’âge confirme ce qui a déjà été observé dans les études autopsiques, à savoir leur plus grande fréquence chez les sujets au-delà de 60 ans. L’IRM haute résolution des plaques carotides C. Yuan (Seattle, 1304) a rapporté son expérience de l’IRM des plaques carotides chez 22 sujets. Il a pu identifier la chape fibreuse sous la forme d’une bande sombre et définir trois cas de figure : chape intacte et épaisse, intacte et fine, rompue. Ces résultats ont été comparés à ceux de l’examen histologique des pièces d’endartérectomie sur 36 niveaux de coupe, en double aveugle. La concordance IRM-examen histologique a été excellente, puisque le kappa était à 0,83 et la corrélation à 0,88 (p = 0,01). Commentaires : ainsi, l’IRM haute résolution réalisée avec une machine General Electric permet de distinguer les plaques fibreuses épaisses de celles dont la chape fibreuse est fine (à risque de rupture) ou déjà rompue. Cette technique doit désormais être validée dans les études prospectives et par des essais thérapeutiques utilisant des agents stabilisateurs de plaque d’athérosclérose. 42 L’équipe du Mount Sinaï Hospital (New York) a poursuivi l’étude dont elle avait rapporté les données préliminaires l’an dernier, en s’intéressant désormais à l’IRM haute résolution des lésions coronaires. S. Worthley (New York, 2744) a constaté chez le porc une corrélation excellente entre les images observées in vivo et les coupes histopathologiques (n = 24, p < 0,001) en ce qui concerne l’épaisseur de la paroi (r = 0,93), et l’hématome intraplaque. Chez l’homme, pour Z. Fayad (New York, 2742), la visualisation des plaques coronaires a été possible chez 5 patients atteints de maladie coronaire et chez 8 sujets contrôles. L’épaisseur de la paroi était en moyenne de 4,38 ± 0,71 mm chez les sujets atteints, contre 0,75 ± 0,6 mm chez les sujets contrôles (p < 0,0001). Par ailleurs, le diamètre adventice-adventice était supérieur chez les sujets par rapport aux contrôles, témoignant du remodelage associé à la présence de plaques d’athérosclérose. Commentaires : il s’agit des premières images de plaques d’athérosclérose coronaires et aortiques. Beaucoup de travail est encore nécessaire pour améliorer la résolution, la qualité et l’interprétation de ces images, mais le moment est proche où nous pourrons commencer à identifier, in vivo, des plaques à risque de rupture dans les coronaires, les artères carotides et l’aorte thoracique, et ainsi identifier les sujets à risque nécessitant une prévention primaire. LÉSION ATHÉROTHROMBOTIQUE MOBILE DE LA CROSSE DE L’AORTE Ces lésions sont associées à un risque significatif d’embolie cérébrale, notamment les plus larges d’entre elles. Les corrélations anatomiques qui ont été faites jusqu’alors, après endartérectomie de la lésion, ont fait conclure que l’élément mobile était d’origine thrombotique. Cependant, seules les plus larges de ces lésions ont été opérées, et il est possible que cela constitue un biais, car les plus petites n’ont jamais été examinées. W. Taylor (Atlanta, 516) a étudié post mortem 7 patients porteurs de 20 lésions mobiles identifiées par échographie transœsophagienne après avoir perfusé l’aorte avec une solution saline pour identifier les lésions mobiles. Ces patients étaient âgés de 66 à 82 ans. Dans tous les cas, la composante mobile vue en échographie transœsophagienne correspondait anatomiquement à la chape fibreuse rompue des lésions athéroscléreuses. Un thrombus n’a été identifié dans le cratère de la lésion ulcérée que dans 30 % des cas. Commentaires : l’examen post mortem sous-estime bien entendu la fréquence des lésions mobiles d’origine thrombotique du fait de la lyse du caillot post mortem. Cette étude démontre néanmoins que nombre de lésions mobiles observées en échographie transœsophagienne peuvent correspondre non pas à un thrombus mais à la chape fibreuse rompue de lésions athéroscléreuses. Cela vaut sans doute surtout pour les plus petites lésions mobiles. Les implications thérapeutiques sont très importantes, puisque l’usage fait que ces lésions mobiles sont traitées par anticoagulants, bien qu’aucun essai randomisé n’ait prouvé leur supéLa Lettre du Cardiologue - n° 323 - janvier 2000 A riorité par rapport aux antiplaquettaires. Ces observations viennent renforcer la nécessité d’une étude randomisée. H. Reynolds et P. Tunick (New York, 877) ont examiné en échocardiographie transœsophagienne 118 patients porteurs d’un anévrysme de l’aorte abdominale, et ont comparé les résultats à ceux de 118 sujets contrôles appariés selon l’âge et le sexe. Un athérome de l’aorte thoracique supérieur à 5 mm d’épaisseur avec ou sans élément mobile a été observé chez 49 % des patients et 24 % des sujets témoins (p < 0,001). Commentaires : il y a donc un lien très significatif entre athérome aortique et anévrysme de l’aorte abdominale. Les patients avec un anévrysme de l’aorte sont donc plus à risque d’embolie cérébrale ou périphérique. M. Longo (New Haven, 878) a rapporté les observations de trois patients, âgés de 42, 62 et 65 ans, qui présentaient de larges thrombus mobiles dans la crosse de l’aorte, révélés par des embolies périphériques. Les embolies ont été observées dans le rein, le cerveau, la rate et l’intestin grêle. La taille des thrombus mobiles était de 1,5 à 4,5 cm. Tous ont eu une thrombo-endartérectomie après aortotomie. Après un recul de un à quatre ans, il n’y a pas eu de récidive embolique sous traitement anticoagulant au long cours. Commentaires : le traitement chirurgical est donc possible, mais, comme le souligne l’auteur, le traitement optimal, médical ou chirurgical, reste à déterminer par le biais d’études randomisées, de même que l’utilité du traitement anticoagulant au long cours. Y. Agmon (Rochester, 1199) a étudié la relation entre la pression artérielle systolique et l’athérosclérose de l’aorte thoracique dans une étude de population. Une échocardiographie transœsophagienne était réalisée chez 581 sujets, pris au hasard dans le comté d’Olmsted parmi la population âgée de plus de 45 ans et participant à l’étude SPARC (Stroke Prevention Assessment of Risk in a Community). Quatre cent soixante-treize d’entre eux ont eu une mesure ambulatoire de la pression artérielle systolique sur 24 heures. L’échocardiographie transœsophagienne a recherché un athérome aortique quelle que soit sa taille, et un athérome complexe (plaque de plus de 4 mm d’épaisseur et/ou débris mobile). Après ajustement, il a été trouvé une association entre athérome aortique et pression artérielle systolique des 24 heures (OR = 1,17 pour toute augmentation de 10 mmHg, IC : 1,00-1,37, p = 0,05) et entre diabète et athérome aortique (OR = 1,95, IC : 0,94-0,04, p = 0,07). De plus, parmi les sujets qui avaient un athérome aortique (n = 298), l’âge et la pression artérielle systolique des 24 heures étaient associés à la présence d’un athérome dit complexe (p < 0,001), alors que le sexe, la présence d’un diabète, un antécédent d’intoxication tabagique ou l’hyperlipidémie ne l’étaient pas. Après ajustement, seuls l’âge et la pression artérielle systolique étaient significativement associés à un athérome complexe (OR = 1,37 pour toute élévation de 10 mmHg, IC : 1,08-1,74, p = 0,009). La Lettre du Cardiologue - n° 323 - janvier 2000 V C Commentaires : dans cette étude, l’hypertension artérielle est un facteur de risque fortement associé à l’athérome aortique, notamment les plaques de plus de 4 mm d’épaisseur, ce qui n’avait pas été montré dans les études précédentes. Dans celles-ci, l’intoxication tabagique (présente) ressortait comme le facteur de risque le plus significatif, ce qui correspondait bien à une association fréquente de l’athérome aortique avec l’artérite des membres inférieurs. Dans l’étude d’Agmon, où l’association avec le tabac était très proche de la significativité statistique, il semble que les anciens fumeurs et les fumeurs actuels aient été analysés ensemble. T. Fukui (Kochi, 3570) a étudié 103 patients consécutifs qui avaient subi une échocardiographie transœsophagienne en trois groupes : ceux qui avaient une athérothrombose mobile de l’aorte thoracique (n = 12), ceux qui avaient des plaques de l’aorte thoracique de plus de 4 mm d’épaisseur (n = 37) et ceux qui avaient des plaques inférieures à 4 mm d’épaisseur (n = 54). Il a ensuite étudié l’association avec les taux plasmatiques de LDL- et de HDL-cholestérol, ainsi que de fibrinopeptide A, de fibrinogène, de D-dimères et de bêta-thromboglobuline. Il a trouvé que les groupes I et II étaient plus âgés et avaient une fréquence plus importante d’hypertension artérielle. Le groupe I avec athérothrombose mobile avait un rapport LDL sur HDL plus élevé que les deux autres groupes, avec un taux significativement plus élevé de fibrinopeptide A, de fibrinogène, de D-dimères et de bêta-thromboglobuline. Commentaires : les thrombus mobiles de l’aorte thoracique sont donc associés à un rapport LDL- sur HDL-cholestérol plus élevé et à des anomalies de l’hémostase. Ainsi, le traitement par hypolipémiant associé au traitement antithrombotique pourrait être utile chez ces patients. Cette hypothèse sera bientôt testée dans une étude randomisée en double aveugle contre placebo avec une statine. C. Schannwell (Düsseldorf, 3571) a étudié 62 patients âgés de plus de 60 ans ayant un infarctus cérébral et 62 sujets contrôles ajustés sur l’âge et le sexe, au moyen d’une échocardiographie transœsophagienne. Il a trouvé des plaques de l’aorte thoracique chez 69 % des patients et 29 % des contrôles (p < 0,001), et des plaques complexes (définies par une épaisseur supérieure à 4 mm et la présence d’une ulcération ou d’un élément mobile) ont été observées chez 32,4 % des patients et 2,6 % des contrôles (p < 0,001). Après analyse en régression logistique multiple, une morphologie complexe des plaques de plus de 4 mm a été identifiée comme le facteur de risque le plus important d’infarctus cérébral (OR = 16,8). Commentaires : cette étude vient confirmer celle de Cohen publiée en 1998 dans Circulation, démontrant que, en plus de l’épaisseur des plaques (supérieure à 4 mm), la présence d’une plaque hypoéchogène non calcifiée augmentait considérablement le risque. Dans cette étude, l’irrégularité de la plaque et/ou un élément mobile étaient également un facteur d’augmentation du risque. DYSFONCTION DE L’AURICULE GAUCHE ET RISQUE D’INFARCTUS CÉRÉBRAL CHEZ LES PATIENTS EN RYTHME SINUSAL N. Ozer (Ankara, 3565) a étudié 61 patients ayant un infarctus cérébral, dont 44 en rythme sinusal et 17 en fibrillation auricu43 A V C laire, comparativement à 37 sujets contrôles, tous examinés en échocardiographie transœsophagienne. Les vitesses enregistrées dans l’auricule gauche étaient significativement diminuées dans le groupe en rythme sinusal et dans le groupe en fibrillation auriculaire, comparativement aux sujets contrôles (p < 0,001). H. Omran (Bonn, 3569) a effectué une échocardiographie transœsophagienne dans les 24 heures suivant un accident ischémique cérébral transitoire ou un infarctus cérébral chez 869 patients. Cinq cent quatre-vingt-trois d’entre eux étaient en rythme sinusal et 286 avaient une fibrillation auriculaire. Un thrombus auriculaire a été trouvé plus souvent chez les patients en fibrillation auriculaire (n = 39,14 %) que chez ceux en rythme sinusal (n = 6,1 %, p < 0,001). Il n’y avait pas de différence significative entre les patients en rythme sinusal qui avaient un thrombus auriculaire et ceux en fibrillation auriculaire concernant le diamètre de l’auricule, la surface de l’auricule et les vitesses enregistrées dans l’auricule. L’auteur conclut que des patients en rythme sinusal peuvent avoir des thrombus auriculaires, ceux-ci pouvant être favorisés par une sténose mitrale ou par une anomalie de la fonction auriculaire. Commentaires : on constate un intérêt grandissant pour les anomalies de la fonction auriculaire, notamment les anomalies transitoires constatées après un infarctus cérébral chez les patients vus en rythme sinusal après l’événement embolique. On sait qu’elles sont détectées de façon ponctuelle après une fibrillation auriculaire passagère. Elles pourraient donc constituer le marqueur, a posteriori, d’une fibrillation auriculaire paroxystique à l’origine d’un événement thromboembolique. FERMETURE DU FORAMEN OVALE PERMÉABLE La prévalence élevée du foramen ovale perméable chez les patients de moins de 55 ans ayant eu un infarctus cérébral de cause indéterminée suggère un lien entre ces deux pathologies. Néanmoins, le risque de récidive d’infarctus cérébral dans ces cas est peu connu, et dans les quelques études rétrospectives que nous possédons, il est inférieur à 2 % par an. Les options thérapeutiques proposées sont un traitement antiplaquettaire, un traitement anticoagulant au long cours ou la fermeture du foramen ovale perméable par chirurgie ou par voie percutanée endovasculaire. Les deux dernières possibilités thérapeutiques (anticoagulant et fermeture du foramen ovale perméable) sont très controversées en raison du risque de récidive embolique, qui, quoique faible, serait possiblement supérieur au risque naturel encouru par le patient. Les tenants d’un mécanisme d’embolie transcardiaque privilégient ces deux traitements à risque. Les autres utilisent un traitement antiplaquettaire, étant donné que le mécanisme d’embolie transcardiaque est très rarement prouvé et que d’autres mécanismes actuellement inconnus pourraient tout aussi bien être impliqués (par exemple une fibrillation auriculaire paroxystique, comme l’a récemment suggéré l’étude électrophysiologique de la vulnérabilité auriculaire chez ces patients – Berthet, Stroke 2000). 44 Dans ce contexte, S. Windecker (Bern, 3566) a étudié 80 patients ayant subi une fermeture du foramen ovale perméable par voie percutanée entre 1994 et 1999. La procédure a pu être réalisée avec succès chez 78 patients, mais 21 d’entre eux (27 %) avaient un shunt résiduel en échocardiographie avec épreuve de contraste. Après un suivi de durée variable, l’auteur a analysé le risque relatif de récidive d’accident ischémique cérébral transitoire, d’infarctus cérébral ou d’embolie périphérique, en fonction de l’âge, du sexe, du type de matériel de fermeture du foramen, de la présence d’un anévrysme du septum interauriculaire et d’un shunt résiduel. Seule la présence d’un shunt résiduel était significativement prédictive d’un nouvel événement embolique, avec un risque relatif de 4,2 (IC : 1,1-17,8, p = 0,003). H. Sievert (Francfort, 3568) rapporte une fermeture de foramen ovale perméable chez 109 patients âgés de 17 à 77 ans qui avaient eu 5 événements emboliques (infarctus cérébral dans 46 cas, accident ischémique transitoire dans 52 cas et embolie périphérique chez 5 patients). La procédure a été un succès dans 97 % des cas, mais, au cours du suivi, un matériel mis en place (Sideris) a dû être retiré chirurgicalement car la fermeture était incomplète et le patient avait eu deux événements emboliques successifs. Une fracture du matériel est survenue chez 5 patients, et la formation d’un thrombus a pu être diagnostiquée après l’implantation du matériel chez 3 patients. Un patient est mort pendant qu’on lui retirait chirurgicalement une ombrelle du fait d’une septicémie. Enfin, au cours de 152 années-patients de suivi, 3 patients ont eu une récidive embolique. L’auteur conclut qu’il est facile de mettre en place une fermeture percutanée du foramen ovale perméable, mais que, comme toute procédure interventionnelle, celle-ci peut avoir des complications sévères justifiant la mise en place d’études randomisées (traitement médical versus fermeture mécanique du foramen ovale perméable). ANGIOPLASTIE AVEC STENT DES ARTÈRES CAROTIDES ET VERTÉBRALES Notons l’intérêt considérable pour cette procédure suscité par les études de faisabilité, l’absence de cicatrice et des complications qui y sont liées et favorisé, bien entendu, par ceux qui commercialisent les stents. Néanmoins, la morbidité n’a pas encore été correctement évaluée, même si la connaissance sur le sujet progresse. Seule une étude randomisée incluant suffisamment de patients et au suivi suffisamment long permettra de dire si cette technique est capable de remplacer, dans certains cas, l’endartérectomie chirurgicale. En effet, ce n’est pas parce qu’une procédure est disponible qu’elle doit être utilisée avant d’avoir été évaluée, et aucune angioplastie, à de très rares exceptions près, ne devrait être réalisée en dehors d’essais randomisés approuvés par des comités d’éthique. Ces grandes études tentent de se mettre en place actuellement en Amérique du Nord et en Europe (à la suite de l’étude CAVATAS). En France, l’étude EVA-3S devrait débuter prochainement. Souhaitons qu’elle ait la puissance suffisante pour une étude d’équivalence et que la performance des angioplasticiens soit optimale, afin de ne pas défavoriser la technique (rappelons-nous les premiers essais sur la chirurgie carotide, qui avaient dû être arrêtés La Lettre du Cardiologue - n° 323 - janvier 2000 A pour cause de forte morbidité, à une époque où les chirurgiens n’étaient pas encore suffisamment entraînés et n’avaient pas assez fait progresser la technique). K. Ouriel (Cleveland, 3548) a étudié, sur une durée de 10 ans, 3 061 patients qui avaient eu une endartérectomie carotide afin de définir une population à très bas risque chirurgical et une autre à plus haut risque, chez lesquelles il serait licite de comparer l’efficacité de l’angioplastie avec stent et celle de l’endartérectomie chirurgicale. Le risque était défini par la présence, chez les patients, d’un ou plusieurs des facteurs suivants : insuffisance cardiaque, pontage coronaire dans les 6 mois précédents, bronchopneumopathie chronique obstructive, insuffisance rénale (créatinine supérieure à 3 mg/dl). Globalement, sur les 3 061 endartérectomies carotides, la chirurgie a été réalisée dans 45 % des cas sur une carotide asymptomatique, dans 42 % des cas en présence d’un accident ischémique cérébral transitoire et dans seulement 11 % des cas devant un infarctus cérébral. Le risque de la procédure à 30 jours était globalement de 3,8 % (AVC 2,1 %, infarctus du myocarde 1,2 %, décès 1,1 %). Il était de 3,32 % pour la chirurgie des artères carotides asymptomatiques, de 2,7 % pour les sténoses révélées par des accidents ischémiques transitoires et de 6,2 % pour les sténoses révélées par un infarctus cérébral. Dix-neuf pour cent des 3 061 patients avaient un ou plusieurs des facteurs de risque définis ci-dessus et constituaient donc le groupe dit “à haut risque”. Les résultats sont résumés dans le tableau ciaprès. AVC + IDM + décès (%) AVC (%) IDM (%) Décès (%) Haut risque n = 594 (19 %) 7,4 3,5 1,7 4,4 Bas risque n = 2 467 (81 %) 2,9 1,7 1,1 0,3 Commentaires : comme le soulignent les auteurs (incluant Yadav, pionnier de l’angioplastie carotide), il serait logique de cibler le groupe à haut risque pour évaluer l’angioplastie avec stent et la comparer à la chirurgie carotide. On peut cependant remarquer que les risques chirurgicaux dans cette série sont supérieurs à ceux rapportés dans l’étude ACAS (pour la chirurgie des sténoses asymptomatiques, où il était de 2,7 %, dont 1,5 % lié à la morbidité de l’angiographie) et dans l’étude NASCET (chirurgie des sténoses carotides symptomatiques, où il était de 5,7 %). De plus, ces risques de la chirurgie carotide ne tiennent pas compte des avancées en matière d’anesthésie. On sait que la chirurgie sous anesthésie locale, et chez un patient préalablement traité par aspirine, diminue considérablement le risque chirurgical. G. New, G. Roubin et coll. (New York, Pittsburgh, Phoenix, Buffalo, Washington, Newport Beach, Tacoma Park, Cleveland, 3549) rapportent les résultats d’un registre de 368 patients ayant subi un stenting carotide pour une resténose après endartérectomie chirurgicale d’une sténose carotide. Parmi les 368 patients, La Lettre du Cardiologue - n° 323 - janvier 2000 V C 358 carotides étaient concernées. Le délai moyen entre la chirurgie carotide et le stenting a été de 5,5 ± 7,3 ans. La resténose était asymptomatique dans 61 % des cas ; elle a donné lieu à un accident ischémique cérébral transitoire dans 23 % des cas, à une cécité monoculaire transitoire dans 5 % des cas et à un infarctus cérébral dans 11 % des cas seulement. La procédure a été un succès dans 91 % des cas. Le stent a été posé de façon bilatérale dans 6 % des cas. La morbidité à 30 jours était au total de 4,3 % (AVC, infarctus du myocarde, décès – tableau ci-dessous). Le risque après un suivi moyen de 14 mois a été de 1,4 %. AIT 2,2 % Infarctus cérébral mineur 1,7 % Infarctus cérébral majeur 0,8 % Décès 0,3 % Infarctus du myocarde 0,6 % Décès non neurologique 0,7 % Total 4,3 % Le taux de resténose au cours du suivi a été de 6 %, et la procédure a dû être répétée chez 2,6 % des patients. Commentaires : cette étude montre que la resténose après chirurgie carotide est une indication de choix pour un traitement par stent du fait d’une faible morbidité à court terme. L’équipe de G. Roubin (New York, 3551) a rapporté son expérience de la morbidité à 30 jours et du risque à trois ans du stenting carotide chez 528 patients (604 carotides), l’intervention ayant eu lieu entre septembre 1994 et septembre 1999. La moyenne du suivi a été de 17 ± 12 mois (de 1 à 55 mois). Un infarctus cérébral majeur a été défini par une augmentation du score du NIH supérieur ou égal à 4 persistant plus de 30 jours. La moyenne d’âge était de 69 ± 11 ans, 12,5 % des patients étaient âgés de plus de 80 ans, et 33 % étaient des femmes. La procédure a été effectuée avec succès chez 98 % des patients, le stenting étant bilatéral dans 15 % des cas. Globalement, la morbidité à 30 jours a été de 7,4 % (AVC totaux et décès). Chez les sujets de moins de 80 ans, elle a été de 6 % et chez ceux de plus de 80 ans de 16 %. Il y a eu une courbe d’apprentissage très nette, comme le montre le tableau ci-après. AVC 7,1 % 5,8 % 5,3 % 3,2 % 3,1 % AVC et décès 9,3 % 7,5 % 12,5 % 3,2 % 4,3 % 09/94-09/95 09/96 09/97 09/98 09/99 À long terme, après une moyenne de 17 mois de suivi, le risque était de 3,3 % (dont 0,9 % de décès neurologiques et 0,4 % d’infarctus cérébraux bilatéraux majeurs). 45 A V C Une nouvelle intervention (angioplastie ou stenting) a dû être entreprise dans 3 % des cas, et une endartérectomie carotide a été réalisée dans 0,3 % des cas. Globalement, le taux de survie (prenant en compte à la fois la morbidité à 30 jours et les événements à plus long terme au cours du suivi) a été de 95 ± 1 %. Commentaires (perfides !) : si le lecteur compare le tableau de la courbe d’apprentissage à celui publié lors de l’AHA 1998 (La Lettre du Cardiologue, n° 305, janvier 1999, p. 43), il s’apercevra que les chiffres annoncés jusqu’en septembre 1998 sont totalement différents, ce qui jette un doute sur ce genre de rapport de série “personnelle” et renforce la nécessité d’une bonne étude randomisée avec un suivi neurologique, un comité de validation des événements, un comité de surveillance indépendant et une analyse statistique elle aussi indépendante. Néanmoins, ces séries, encore une fois, montrent que la procédure de stenting carotide est réalisable, mais uniquement par des opérateurs très expérimentés (ce qui est rare). Selon cette étude, la prudence s’impose au-delà de 80 ans. S. Zhang (La Nouvelle-Orléans, 3552) a rapporté une série de sténoses de l’origine de l’artère vertébrale traitées par stent chez 21 patients, dont 7 asymptomatiques, 13 qui avaient eu simple- 1a Figure 1a. Origine de l’artère vertébrale : avant angioplastie. 46 ment des sensations vertigineuses, 1 une “drop attack”, 1 des “troubles de la marche”, et 4 des accidents ischémiques transitoires vertébrobasilaires (de type non précisé). La procédure a été un succès dans 100 % des cas (figures 1a et 1b). La morbidité de la procédure à 30 jours était représentée par un accident ischémique transitoire (4,7 %), et aucun autre événement vasculaire n’a été enregistré (infarctus cérébral, infarctus du myocarde ou décès). Le suivi a été de 11,3 mois en moyenne (entre 1 et 37 mois), au cours duquel une resténose a été constatée (5 %), et 20 patients sur 21 sont restés asymptomatiques (95 %). Commentaires : ces résultats, sur une toute petite série, semblent indiquer que le stenting de l’origine de l’artère vertébrale est réalisable, avec une très faible morbidité liée à la procédure. Mais lorsque l’on considère les symptômes sur lesquels les patients ont été traités, on peut penser que la plupart avaient en fait très vraisemblablement une sténose de l’origine de l’artère vertébrale asymptomatique. En matière de sténose de l’origine de l’artère vertébrale, nous manquons cruellement d’études d’histoire naturelle de sténoses réellement symptomatiques comportant un nombre important de patients. 1b Figure 1b. Origine de l’artère vertébrale : après angioplastie. La Lettre du Cardiologue - n° 323 - janvier 2000 A STATINES ET INFARCTUS CÉRÉBRAL R. Byington (Winston Salem, 1239) a rapporté les effets de la pravastatine dans l’étude PRAVA-III (qui correspond à une compilation des trois grandes études WOSCOPS, CARE et LIPID). Cette méta-analyse des données individuelles de 19 788 patients (correspondant à plus de 100 000 années-patients) donne les résultats résumés dans le tableau ci-dessous. RRR Intervalle de confiance AVC fatal ou non CARE LIPID CARE + LIPID WOSCOPS CARE + LIPID + WOSCOPS 0,68 0,82 0,78 0,89 0,80 0,48-0,96 0,67-1,00 0,65-0,93 0,60-1,33 0,68-0,93 AVC non fatal CARE + LIPID WOSCOPS 0,75 0,83 0,62-0,90 0,55-12,23 AVC fatal CARE + LIPID 0,96 0,58-1,57 La Lettre du Cardiologue - n° 323 - janvier 2000 HTA + HTA – 0,91 0,64 0,72-1,15 0,49-0,84 ASPIRINE + ASPIRINE – 0,72 1,01 0,59-0,88 – AVC ischémique AVC hémorragique AVC de cause inconnue 0,77 1,25 0,65 0,63-0,94 0,63-2,46 0,41-1,02 V C Commentaires : il est intéressant de noter que la pravastatine prévient davantage les infarctus cérébraux non fatals que les décès par infarctus cérébral et qu’elle paraît n’être efficace que chez les sujets non hypertendus (soit moins de 40 % des patients ayant un AVC) et chez ceux qui prenaient de l’aspirine (80 % des patients). Bien que le résultat ne soit pas statistiquement significatif, l’augmentation du risque d’hémorragie cérébrale nécessite d’être étudiée très précisément dans l’étude actuellement en cours, en prévention secondaire après un infarctus cérébral par une statine versus placebo (étude SPARCL : Stroke Prevention with Aggressive Reduction of Cholesterol Level). ■ 47