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Le mystérieux auto-antigène responsable du déclenchement
de la polyarthrite rhumatoïde serait-il démasqué ?
La polyarthrite rhumatoïde (PR) est une maladie autoimmune mais l’auto-antigène à l’origine de cette réaction
est toujours inconnu. La souche de souris K/BxN transgénique
pour le récepteur T développe spontanément une maladie qui s’apparente à la PR. Les auteurs savaient déjà que la maladie était
transférable à des souris saines par l’administration des immunoglobulines G (IgG) provenant de souris K/BxN.
Il restait donc à identifier l’auto-antigène contre lequel ces IgG
arthritogènes étaient dirigées. Un screening de différents extraits
tissulaires montre que ces anticorps reconnaissent une protéine
de 60 kDa qui, après purification, extraction, digestion enzymatique, séquençage et comparaison aux banques de données protéiques disponibles, s’avère être la glucose-6-phosphate isomérase (GPI). Cette enzyme est une protéine ubiquitaire, intervenant
dans la glycolyse, de localisation cytoplasmique mais aussi détectée à l’état de traces dans le sérum. Pourquoi une réaction contre
une protéine ubiquitaire n’engendrerait-elle qu’une symptomatologie articulaire ? Après avoir rendu peu probable l’hypothèse
d’une réaction croisée des anti-GPI avec une protéine d’expression purement synoviale, les auteurs suggèrent que la GPI aurait
une expression différente dans la synoviale par rapport aux autres
tissus de l’organisme. Cette expression différente serait à l’origine de la symptomatologie purement articulaire par un mécanisme pour l’instant inconnu.
Ces résultats pour le moins inattendus sont importants à plus d’un
titre : remise au goût du jour de la voie des lymphocytes B dans
la pathogénie de la PR et de la coopération T/B, alors que le paradigme dominant est celui de la voie des lymphocytes T ; renforcement de la théorie de la responsabilité d’un auto-antigène dans
le déclenchement de l’arthrite, ce qui ne manquera pas de stimuler les recherches du ou des auto-antigène(s) responsable(s) ;
potentialités thérapeutiques. Cependant, et les auteurs prennent
bien soin de le souligner, l’extrapolation aux PR humaines doit
être prudente, car la “sémiologie” dans le modèle animal n’est
pas tout à fait superposable à celle de l’être humain.
C. Bologna, Mende
Arthritis provoked by linked T and B cell recognition of
a glycolytic enzyme.
Matsumoto I., Staub A., Benoist C., Mathis D. ● Science
1999 ; 286 : 1732-5.
Le rachis des spondylarthropathies est peu sensible
à la sulfasalazine
Dans trois études multicentriques, randomisées, double
aveugle contre placebo, un effet bénéfique de la sulfasalazine (SZL) a été montré dans le rhumatisme psoriasique (RP), les
arthrites réactives (AR) et, à un moindre degré, dans la spondylarthrite ankylosante (SPA). Mais, depuis, de nouvelles données
suggéraient une réponse différente à la SZL selon le caractère
axial ou périphérique de l’atteinte. Les auteurs ont donc décidé
de faire une analyse a posteriori de leurs trois études en comparant la réponse à la SZL selon le type des manifestations cliniques.
L’atteinte axiale était définie comme l’absence de synovite,
l’atteinte périphérique comme la présence de plus d’une synovite, alors que l’atteinte isolée de l’épaule ou de la hanche était
classée comme atteinte axiale. La SZL était donnée à la dose
de 2 g/j. Les trois études regroupaient 619 patients (264 SPA,
221 RP et 134 AR), qui se répartissaient en 187 patients ayant
une atteinte axiale, dont 97 traités par SZL et 90 par placebo, et
432 patients ayant une atteinte périphérique, dont 212 traités par
SZL et 220 par placebo. Le taux de réponse dans le groupe axial
n’était pas différent entre SZL et placebo ; en revanche, il était
significativement plus élevé avec la SZL dans le groupe périphérique (p = 0,0007) par rapport au placebo. De toutes les
variables analysées, seule la VS diminue significativement dans
le groupe SZL axial, alors que la VS, le nombre d’articulations
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douloureuses et gonflées, ainsi que la consommation d’AINS
diminuent significativement sous SZL dans le groupe périphérique. Les arrêts sont aussi fréquents avec la SZL qu’avec le placebo dans les deux groupes.
On peut arguer, pour rester prudent quant aux résultats de cette
analyse, de la difficulté de la classification des patients en axial
et périphérique, de la dose non maximale de SZL testée (2 g au
lieu de 3 g/j) et de la légère irrégularité statistique de l’analyse
de groupes constitués a posteriori et non préalablement à la réalisation des trois essais thérapeutiques. De cette étude, on retiendra cependant qu’elle confirme l’impression clinique d’une bonne
efficacité avec bonne tolérance de la SZL dans les formes périphériques de spondylarthropathies. Dans les formes axiales, l’effet de la SZL est au mieux modeste, le nombre de patients n’étant
peut-être pas encore assez grand pour le mettre en évidence.
C. Bologna, Mende
Comparison of sulfasalazine and placebo for the treatment of axial and peripheral articular manifestations
of the seronegative spondylarthropathies.
Clegg D.O., Reda D.J., Abdellatif M. ● Arthritis Rheum
1999 ; 42 : 2325-9.
La Lettre du Rhumatologue - n° 259 - février 2000
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Souffrance partagée
La fréquence de la douleur chronique, définie par une durée
supérieure à trois ans, a été évaluée dans un échantillon de
population recruté à partir des listes de patients d’un cabinet de
médecine générale dans la région de Grampian, en Écosse, quel
que soit le motif de la consultation. L’enquête a été réalisée par
questionnaires expédiés par voie postale ; 3 605 réponses sur
5 036 envois ont été obtenues.
50,4 % des personnes ayant répondu se plaignent de douleurs
chroniques ; pour un quart d’entre elles, la douleur a été estimée
sévère à très sévère. La fréquence de la douleur chronique augmente avec l’âge (31,7 % dans la tranche 25-34 ans, 62 % après
75 ans), avec une fréquence légèrement plus élevée dans le sexe
féminin (51,8 % versus 48,9 %).
Les douleurs d’origine rhumatologique représentent un tiers des
douleurs chroniques : 16 % des personnes se plaignent de lombalgies chroniques, avec un taux comparable dans les différentes
tranches d’âges, 15,8 % des personnes se plaignent de douleurs
articulaires chroniques, avec une augmentation de fréquence en
fonction de l’âge (1,1 % pour les 25-34 ans, 28,1 % chez les plus
de 75 ans).
En résumé, la moitié de la population se plaint de douleurs chroniques. Une personne sur 6 (16 %) se plaint de douleurs rhumatismales chroniques. Du pain sur la planche et un beau challenge
à relever pour les rhumatologues dont la vocation prééminente
dans la lutte contre la douleur est soulignée par les données de
cette enquête épidémiologique.
J.L. Kuntz, hôpital de Hautepierre, Strasbourg
The epidemiology of chronic pain in the community.
Elliott A.M., Smith H., Penny K.I., Smith W.C., Chambers
W.A. ● Lancet 1999 ; 354 : 1248-52.
Thalidomide et myélome : une surprenante efficacité
La thalidomide, de sinistre mémoire, reste utilisée par les
dermatologues dans certaines vascularites cutanées. Son
effet sur les cytokines (diminution du TNF, augmentation de l’interleukine 10), lui donne un profil intéressant pour le traitement
de la polyarthrite rhumatoïde. La thalidomide a aussi des effets
inhibiteurs de l’angiogenèse ; or la néoangiogenèse est un élément primordial de la progression des tumeurs cancéreuses. Au
cours des myélomes, il existe une importante vascularisation
médullaire attribuée à la surproduction de facteurs angiogéniques
(VEGF, FGF), d’où l’idée d’utiliser la thalidomide dans cette
affection, idée proposée et appliquée chez un patient unique dès
1965.
La thalidomide, en monothérapie, à une dose initiale de 200 mg/j,
augmentée régulièrement dans la mesure du possible jusqu’à
800 mg/j, chez 84 cas de myélomes graves, réfractaires aux traitements classiques, y compris une polychimiothérapie lourde, a
permis une réponse chez 32 % des patients, la réponse étant définie par une diminution du composant monoclonal supérieure ou
égale à 25 %. Six patients sur 84 sont en quasi-rémission (diminution du composant monoclonal supérieure de 90 %), deux en
rémission complète. La plasmocytose médullaire a diminué, parfois de façon spectaculaire.
Certes, une progression du composant monoclonal a été notée
chez deux tiers des patients malgré le traitement, et la moitié des
patients répondeurs ont rechuté dans l’année. Mais la proportion
de 32 % de répondeurs, parfois de façon quasi miraculeuse, est
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à considérer comme particulièrement remarquable, vu la gravité
de ces myélomes au-delà de toute ressource thérapeutique. 58,5 %
des patients restent vivants à un an.
La toxicité du traitement a été acceptable. Un tiers des patients
se plaignaient de faiblesse, asthénie, fatigue, somnolence, mais
seulement 11 % ont dû arrêter le traitement pour intolérance ;
seuls quelques rares cas de toxicité hématologique (anémie, leucopénie, thrombopénie) sont survenus.
Il n’est pas sûr que cet effet antitumoral de la thalidomide passe
effectivement par le mécanisme présumé d’inhibition de l’angiogenèse, puisque la densité de la microvascularisation médullaire n’a pas diminué. L’association de la thalidomide à la chimiothérapie permet d’espérer une meilleure réponse et fait
envisager l’utilisation de ce traitement dans ces conditions à des
stades moins avancés du myélome.
J.L. Kuntz, hôpital de Hautepierre, Strasbourg
Antitumor activity of thalidomide in refractory multiple myeloma.
Singhai S., Mehta J., Desikan R., Ayers D., Roberson P.,
Eddlemon P., Munsh N., Anaissie E., Wilson C.,
Dhodapkar M., Zeldis J., Barlogie B. ● N Engl J Med
1999 ; 341 : 1565-71.
La Lettre du Rhumatologue - n° 259 - février 2000
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Analyses de la littérature
Y a-t-il un risque accru de fracture au cours
de l’hyperparathyroïdie primitive ?
L’indication opératoire est facile à poser au cours de l’hyperparathyroïdie primitive (HPT) compliquée de troubles
psychiques, digestifs, rénaux ou osseux évidents. En revanche,
dans l’HPT modérée, la conduite thérapeutique reste très controversée.
Khosla et coll. ont évalué rétrospectivement (sur la période 19651992, région de Rochester, Minnesota) l’incidence des fractures
survenues dans un groupe de 407 sujets atteints d’HPT (le plus
souvent modérée). Le risque fracturaire a été calculé en comparant le nombre de fractures à chaque site à celui attendu pour la
population générale.
Quatre cent soixante et onze fractures sont survenues sur une
période de 5 766 personnes-année de suivi. Le risque fracturaire
était globalement accru dans le groupe HPT (ratio standardisé
d’incidence [RSI] : 1,3). Le risque était plus marqué pour les fractures vertébrales (RSI : 3,2), de l’avant-bras (RSI : 2,2), des côtes
(RSI : 2,7) et du bassin (RSI : 2,1) que pour les fractures de l’ex-
trémité supérieure du fémur (RSI : 1,4). En analyse multivariée,
seuls l’âge et le sexe féminin étaient des facteurs de risque indépendants de fracture, alors qu’en analyse univariée le taux de calcémie semblait également intervenir.
En conclusion, l’HPT, même modérée, expose à un risque accru
de fracture, notamment dans les populations féminines âgées. Un
traitement chirurgical devrait donc être plus souvent proposé à
ces patientes.
E. Thomas, hôpital Lapeyronie, Montpellier
Primary hyperparathyroidism and the risk of fracture :
a population-based study.
Khosla S., Melton III L.J., Wermers R.A., Crowson C.S.,
O’Fallon W.M., Riggs B.L. ● J Bone Miner Res 1999 ; 14 :
1700-7.
Traitement des lombalgies : les manipulations efficaces ?
Les lombalgies communes représentent, malgré leur bénignité apparente, une part importante des dépenses de santé.
En France, près de six millions de consultations sont liées chaque
année à ce problème, avec un coût d’un milliard de francs. La
place respective des différents traitements reste très discutée.
Andersson et coll. ont réalisé une intéressante étude contrôlée et
randomisée évaluant le traitement conventionnel (antalgiques,
anti-inflammatoires non stéroïdiens, physiothérapie, rééducation...) avec ou sans manipulations vertébrales.
Le critère d’inclusion était la présence d’une lombalgie commune
(mécanique) évoluant depuis plus de trois semaines et moins de
six mois. Toutes les lombalgies symptomatiques étaient exclues.
De même, les patients présentant une affection générale sévère,
en arrêt de travail ou présentant un problème psychiatrique ne
pouvaient pas participer à l’étude.
La durée du suivi a été fixée à 12 semaines. Les critères d’évaluation étaient : l’échelle visuelle de douleur, les échelles de qualité de vie (Roland-Morris, Oswestry) et la mobilité rachidienne.
Sur les 155 patients qui ont terminé l’étude, 72 avaient été
traités “classiquement” et les autres par manipulations. À
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12 semaines, 90 % des patients ont été améliorés, sans différence
significative entre les deux groupes. La consommation de médicaments antalgiques et le nombre de prescriptions de rééducation
étaient moins importants dans le groupe manipulation.
Les auteurs concluent que les manipulations représentent un traitement efficace des lombalgies communes subaiguës et chroniques de moins de six mois d’évolution. Il aurait été toutefois
intéressant de comparer l’évolution de ces six groupes à celle de
groupes placebo pour se faire une opinion plus précise sur l’intérêt réel des manipulations dans une affection où l’évolution
habituelle est la guérison...
E. Thomas, hôpital Lapeyronie, Montpellier
A comparison of osteopathic spinal manipulation with
standard care for patients with low back pain.
Andersson G.B.J., Lucente T., Davis A.M., Kappler R.E.,
Lipton J.A., Leurgans S. ● N Engl J Med 1999 ; 341 :
1426-31.
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