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ARTICULONS NOS PENSÉES
Les deux tiers des rhumatologues qui ont répondu au ques-
tionnaire Articulons nos pensées croient que de 10 % à 50 % de
leurs patients arthritiques ressentent les écarts de tempéra-
ture. À en croire les trois quarts des répondants, un temps « humide »
est le principal déterminant, suivi respectivement des « variations
de température » et du « froid ». Moins du tiers des répondants
croient que les changements de la pression barométrique affectent
la douleur articulaire (malgré les travaux classiques de Hollander
de 1961). Un nombre moindre estime pourtant qu’un ciel couvert
exerce une quelconque influence, malgré l’abondance de travaux
sur le trouble affectif saisonnier (TAS).
Arthrite et température : Y a-t-il un lien?
Les patients arthritiques ne se plaignent pas tous de problèmes
liés à la température. Dans ma pratique, environ seulement un
patient sur trois « réagit » à la température. Ceux qui sont affec-
tés se plaindront souvent avec vigueur de leurs symptômes tout
au long de notre long hiver canadien. Il faut souvent modifier les
traitements. Toutefois, la symptomatologie de la majorité des
patients ne semble pas subir l’influence des caprices de dame
nature. C’est peut-être pourquoi certaines études ne font état
d’aucune différence significative en fonction du temps qu’il fait
dans la population cumulative de patients arthritiques, comme
en témoignent les études suivantes : Osteoarthritis pain and
weather (Douleur arthrosique et température) par Wilder et coll.,
et Rheumatoid arthritis patients show weather sensitivity in daily life,
but the relationship is not clinically significant (Les patients atteints
de polyarthrite rhumatoïde se montrent sensibles aux change-
ments de température au quotidien, mais le lien n’est pas clini-
quement significatif) par Gorin et coll.1,2.
On déplore un manque flagrant de données scientifiques
rigoureuses sur l’étiologie de l’intensification de la douleur due
aux changements de température chez les sous-groupes de
patients atteints d’arthrite qui y réagissent. L’humidité et le froid
peuvent occasionner plus de tremblements musculaires pour
maintenir la chaleur corporelle, ce qui exerce une traction sur
les structures musculosquelettiques déjà mal en point, et en
retour, amplifie la douleur. En outre, certains ont indiqué que le
temps froid exacerbe la douleur chez les patients qui souffrent
d’arthrite juvénile3.
On ajoutera que les changements de température, qui accom-
pagnent habituellement des systèmes de basse pression ont sou-
vent été associés à une aggravation des symptômes chez les
patients migraineux, phénomène aussi démontré chez certains
patients arthritiques. On émet l’hypothèse qu’une diminution
de la pression atmosphérique peut accroître l’activité des
mécanorécepteurs à l’intérieur des capsules articulaires, et exa-
cerber la douleur4,5.
Quelle est la solution?
Pour ces patients, la solution consiste à consommer plus d’anal-
gésiques et d’anti-inflammatoires ou se rendre chez leur agent
de voyages. Les participants à ce sondage ont émis des avis
partagés quant à l’état de santé amélioré des individus qui
fuient l’hiver sous des cieux plus cléments. On sait bien sûr que
ceux qui partent en vacances au soleil auront l’occasion de faire
plus d’exercice que ceux qui restent bien emmitouflés chez eux
pour se protéger des rigueurs de l’hiver. On note également des
effets psychologiques considérables pour ceux qui ne se rendent
pas jusqu’à la « fièvre de l’igloo » vers la fin de l’hiver. Il faut par
contre mettre dans la balance ce phénomène et le désir pré-
dominant du « snowbird » typique de ne pas consulter lorsqu’il
sort de notre paradis de la gratuité des soins. Certains pro-
blèmes de santé ne seront donc tout simplement pas suivis pen-
dant plusieurs mois, ce qui vient tempérer peut-être la percep-
tion globale d’un quelconque avantage associé aux climats plus
chauds chez cette population de patients.
Les meilleures destinations pour les patients atteints
d’arthrite
Où donc les personnes arthritiques devraient-elles se rendre
idéalement l’hiver? La prescription d’une retraite idéale inclu-
rait donc du soleil pour éloigner le TAS, beaucoup de chaleur
pour favoriser le relâchement musculaire et un climat relative-
ment stable pour éviter les baisses de pression barométrique
(particulièrement sous forme d’orages) qui semblent exacerber
les symptômes articulaires.
Les participants à notre questionnaire du présent numéro
croient clairement qu’un climat sec est le nec plus ultra pour le
voyageur arthritique. Près des deux tiers se disent d’accord ou
fortement d’accord avec le fait que l’Arizona est la meilleure des-
tination hivernale (il ne faut par contre pas oublier votre photo
d’identification et votre passeport). Près de la moitié de nos
experts participants se disent d’accord ou fortement d’accord
avec le fait que le Mexique et les autres états ensoleillés des
États-Unis sont tout aussi bons pour notre population arthri-
tique. Et puis, incroyable, mais vrai, il paraît que le Manitoba,
avec son climat hivernal ensoleillé et ses fortes pressions
barométriques, n’est pas dans la course! Et moi qui croyais qu’un
peu de glace sur des articulations enflammées était un traite-
ment souverain.
Glen Thomson, M.D., FRCPC
Rédacteur en chef, JSCR
Winnipeg, Manitoba
(Hibernation prévue jusqu’au printemps)
Références :
1. Wilder FV, Hall BJ, Barrett JP. Osteoarthritis pain and weather. Rheumatology
(Oxford) 2003; 42(8):955-8. Publication électronique, le 14 mars 2003.
2. Gorin AA, Smyth JM,Weisberg JN, et coll. Rheumatoid arthritis patients show
weather sensitivity in daily life, but the relationship is not clinically significant. Pain
1999; 81(1-2):173-7.
3. Tsai WS, Yang YH,Wang LC, et coll. Abrupt temperature change triggers arthral-
gia in patients with juvenile rheumatoid arthritis. J Microbiol Immunol Infect 2006;
39(6):465-70.
4. McAlindonT, Formica M, Schmid CH, et coll. Changes in barometric pressure and
ambient temperature influence osteoarthritis pain. Am J Med mai 2007;
120(5):429-34.
5. Vergés J, Montell E, Tomàs E, et coll. Weather conditions can influence rheumatic
diseases. ProcWest Pharmacol Soc 2004; 47:134-6.
La météo est exécrable
Par Glen Thomson, M.D., FRCPC
Félicitations
à la gagnante du questionnaire
« Articulons nos pensées »
du présent numéro,
Dre Shirley Chow de Toronto (Ontario)