Éditorial
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La Lettre du Gynécologue - n° 331 - avril 2008
Directeur de la publication : Claudie Damour-Terrasson
Rédacteur en chef : Pr P. Madelenat (Paris)
Rédacteurs en chef adjoints : Pr F. Lécuru (Paris)
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La Lettre du Gynécologue
La désignation de la personne
de conance cinq ans après la loi :
le risque de faire semblant
Naming a person
of trust five years after the law:
the risk of misrepresentation
IP G. Moutel*
L
a personne de confiance, instaue par la loi du 4 mars 2002 relative
aux droits des patients et à la qualité du système de santé, a pour
objet, aps désignation par le patient, d’assister ce dernier dans
ses marches de soins, de l’accompagner physiquement et/ou psychologi-
quement et de faire le lien avec les équipes médicales. De ce fait, elle a une
responsabili de poids et partage de facto des éléments du secret dical.
Elle a par ailleurs pour mission, dans deux domaines spécifiques qui sont le
don d’organes et les cisions den de vie, en particulier en termes d’arrêt
des soins, d’éclairer les équipes médicales sur les intentions et les volons
antérieures du patient. Elle porte ainsi moignage de la parole de la personne
et de ses choix. Ainsi, la loi fraaise a fait le choix d’une conception large qui
ne cantonne pas l’intervention de la personne de conance aux situations
extrêmes (patient hors d’état d’exprimer sa volonté ou pathologie particu-
lièrement grave) mais l’étend aux situations quotidiennes en decine. La
personne de conance est habilie à seconder le patient dans son parcours
au sein du sysme de san, lors des consultations et hospitalisations, et à
être ainsi infore dans le même temps que le patient. Par ailleurs, la loi
prévoit que la personne de confiance soit “consultée” lorsque le patient se
trouve hors d’état d’exprimer son consentement.
Plusieurs écueils sévères guettent aujourd’hui la désignation d’une
personne de confiance au vu des premières analyses de pratiques. Tout
d’abord, on assiste dans certains centres de soins à des modes de désigna-
tion aveugles et non médicalis (c’est-à-dire sans explications données
aux patients sur l’importance des rôles majeurs de la personne choisie
dans la relation de soins). Dans certains cas, les patients sont invités à
désigner une personne de confiance non pas via l’équipe soignante, une
infirmière ou un médecin, mais lors des démarches administratives “au
comptoir d’entrée” d’un établissement de soins, sans qu’aucune explica-
tion soit effective. Il en ressort plusieurs points critiques.
Tout d’abord, il arrive que des personnes de confiance désignées
ne sachent pas qu’elles ont été choisies par un patient, n’étant pas
présentes et non associées à la démarche de désignation.
Par ailleurs pour certains patients, la marche présene semble quasi
obligatoire, alors qu’elle n’est qu’un outil de l’accompagnement à proposer,
que le patient doit pouvoir choisir (accepter ou refuser s’il n’en ressent ni le
* Laboratoire d’éthique médicale et de médecine légale, Faculté de médecine Paris-Descartes, Réseau de recherche en
éthique de l’Inserm, rédacteur en chef du Courrier de l’Éthique, revue de la Société française et francophone d’éthique-
médicale, www.ethique.inserm.fr
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besoin ni lesir), a fortiori s’il souhaite que le secret soit
gar totalement ou s’il veut proger tous ses proches et
taire sa maladie.
Enfin, dans certains cas, on constate qu’il y a une confu-
sion institutionnelle forte entre “personne de confiance”
et “personne à prévenir”. La seconde n’a pas du tout la
même finalité que la première, elle n’est conçue pour
être utilisée qu’en cas de problème majeur ou de décès
pour donner une information en ce sens. Elle n’a en
aucun cas les autres rôles de la personne de confiance ;
les confondre peut avoir de lourdes conséquences en
termes relationnels et de responsabilité médico-légale.
La personne de confiance a des missions claires définies
par la loi et qui confèrent aux soignants de nouvelles
responsabilités, ce qui n’est pas le cas pour la personne
à prévenir. Faire la distinction est donc essentiel.
Ainsi, les établissements et les services qui veulent faire
de la signation de la personne de confiance un indica-
teur de quali de laccueil et de l’information des patients
doivent se garder de toute évaluation uniquement quan-
titative (nombre de patients ayant fait une désignation),
mais sont tenues de promouvoir une approche qualitative.
Cette dernre devrait passer par plusieurs approches.
Tout dabord, les approches peuvent être un mode de dési-
gnation médicalisée par un decin, en lien si besoin avec
l’équipe infirmière, ce qui permet de donner sens à la place
d’une éventuelle personne de confiance dans la démarche
de soins et d’informer le patient sur l’intérêt de cette dési-
gnation et sur les les de la personne de confiance. La
question de la rupture du secret sera également discue
ici. Faire place à la présence de la personne de confiance
suite à cette désignation est également un ément essentiel
pour l’informer sur ses rôles et ses devoirs. Ainsi, cette dési-
gnation a de telles conséquences pour le patient qu’elle ne
saurait êtrenoyée” entre divers documents d’admission.
Par ailleurs, cette approche doit permettre de conseiller
le patient, dans un sens ou dans l’autre, au mieux du
vécu de la maladie, à un moment donné, dans un
environnement familial ou affectif parfois complexe.
La désignation, comme la non-désignation, peuvent
dès lors être des choix tout à fait légitimes. C’est en ce
sens que le Code de santé publique stipule qu’il y a une
obligation à proposer une personne de confiance, mais
non une obligation de désignation. Le fait de laisser
cette liberté au patient et de le guider au mieux de ses
intérêts constitue une responsabilité d’ordre éthique.
Un autre point qualitatif important à prendre en compte
est la durée de validi de la signation d’une personne de
confiance. En effet, les aléas relationnels de la vie et l’évo-
lution du vécu de la maladie par un patient font que les
choses peuvent changer au fil du temps. L’esprit de la loi et
la variabilité gitime des choix d’une personne amènent à
dire qu’il convient d’interroger le patient sur la rennité
de la signation ou de la non-désignation d’une personne
de confiance, à chaque nouvelle hospitalisation ou plus
souvent si le decin le juge nécessaire.
Enfin, la signation ou la non-désignation doivent être
sysmatiquement noes dans le dossier médical avec les
coordonnées précises et la nature des liens entre patient
et personne désignée. Cela n’est pas encore effectif, ce qui
fait que, dans certaines équipes, on s’interroge parfois, en
situation de crise, sur l’existence ou non dune personne
de confiance, le patient nétant alors plus en état de s’ex-
primer. La marche écrite dans ce domaine, figurant
dans le dossier, fait partie des crires de quali pour opti-
miser la transmission entre les équipes et les services en
charge dun patient.
Soulignons en dernier lieu, en termes d’approche qualita-
tive, qu’il serait souhaitable qu’un document d’informa-
tion reprenant tous ces points soit remis au patient, afin
de compléter l’information orale.
Ainsi, entre démarche clinique, éthique et droit, ce
nouvel outil de la relation soignants-soignés qu’est
la personne de confiance doit nous amener à nous
interroger en permanence sur l’abord de la personne
et sur la distinction entre approche administrative et
approche médicale d’une question qui touche avant
tout à l’humain et à l’intime.
n
© Lettre du Cancérologue n° 5, vol. XVI, mai 2007.
Articles du Code de la santé publique
“Toute personne majeure peut désigner une personne de
confiance qui peut être un parent, un proche ou le decin
traitant, et qui sera consultée au cas elle-même serait
hors d’état d’exprimer sa volonet de recevoir l’information
cessaire à cette fin. Cette désignation est faite par écrit.
Elle est vocable à tout moment. Si le malade le souhaite,
la personne de confiance l’accompagne dans ses démarches
et assiste aux entretiens médicaux afin de l’aider dans ses
cisions.
Lors de toute hospitalisation dans un établissement de santé, il
est proposé au malade de signer une personne de confiance
dans les conditions prévues à l’alia prédent. Cette si-
gnation est valable pour la durée de l’hospitalisation, à
moins que le malade n’en dispose autrement.” “…Lorsque la
personne est hors d’état d’exprimer sa volonté, aucune inter-
vention ou investigation ne peut être alie, sauf urgence ou
impossibili, sans que la personne de confiance, ou la famille,
ou àfaut, un de ses proches ait été consulté…
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