
Éditorial
Éditorial
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La Lettre du Sénologue - n° 36 - avril-mai-juin 2007
proposer, que le patient doit pouvoir choisir (accepter ou
refuser s’il n’en ressent ni le besoin ni le désir), a fortiori
s’il souhaite que le secret soit gardé totalement ou s’il
veut protéger tous ses proches et taire sa maladie.
Enfin, dans certains cas, on constate qu’il y a une confu-
sion institutionnelle forte entre “personne de confiance”
et “personne à prévenir”. La seconde n’a pas du tout la
même finalité que la première, elle n’est conçue pour
être utilisée qu’en cas de problème majeur ou de décès
pour donner une information en ce sens. Elle n’a en
aucun cas les autres rôles de la personne de confiance ;
les confondre peut avoir de lourdes conséquences en
termes relationnels et de responsabilité médico-légale.
La personne de confiance a des missions claires définies
par la loi et qui confèrent aux soignants de nouvelles
responsabilités, ce qui n’est pas le cas pour la personne
à prévenir. Faire la distinction est donc essentiel.
Ainsi, les établissements et les services qui veulent faire
de la désignation de la personne de confiance un indica-
teur de qualité de l’accueil et de l’information des patients
doivent se garder de toute évaluation uniquement quan-
titative (nombre de patients ayant fait une désignation),
mais sont tenues de promouvoir une approche qualitative.
Cette dernière devrait passer par plusieurs approches.
Tout d’abord, les approches peuvent être un mode de dési-
gnation médicalisée par un médecin, en lien si besoin avec
l’équipe infirmière, ce qui permet de donner sens à la place
d’une éventuelle personne de confiance dans la démarche
de soins et d’informer le patient sur l’intérêt de cette dési-
gnation et sur les rôles de la personne de confiance. La
question de la rupture du secret sera également discutée
ici. Faire place à la présence de la personne de confiance
suite à cette désignation est également un élément essentiel
pour l’informer sur ses rôles et ses devoirs. Ainsi, cette dési-
gnation a de telles conséquences pour le patient qu’elle ne
saurait être “noyée” entre divers documents d’admission.
Par ailleurs, cette approche doit permettre de conseiller
le patient, dans un sens ou dans l’autre, au mieux du
vécu de la maladie, à un moment donné, dans un envi-
ronnement familial ou affectif parfois complexe. La dési-
gnation, comme la non-désignation, peuvent dès lors
être des choix tout à fait légitimes. C’est en ce sens que le
Code de santé publique stipule qu’il y a une obligation à
proposer une personne de confiance, mais non une obli-
gation de désignation. Le fait de laisser cette liberté au
patient et de le guider au mieux de ses intérêts constitue
une responsabilité d’ordre éthique.
Un autre point qualitatif important à prendre en compte
est la durée de validité de la désignation d’une personne
de confiance. En effet, les aléas relationnels de la vie et
l’évolution du vécu de la maladie par un patient font que
les choses peuvent changer au fil du temps. L’esprit de
la loi et la variabilité légitime des choix d’une personne
amènent à dire qu’il convient d’interroger le patient sur
la pérennité de la désignation ou de la non-désignation
d’une personne de confiance, à chaque nouvelle hospita-
lisation ou plus souvent si le médecin le juge nécessaire.
Enfin, la désignation ou la non-désignation doivent être
systématiquement notées dans le dossier médical avec
les coordonnées précises et la nature des liens entre
patient et personne désignée. Cela n’est pas encore
effectif, ce qui fait que, dans certaines équipes, on s’in-
terroge parfois, en situation de crise, sur l’existence ou
non d’une personne de confiance, le patient n’étant
alors plus en état de s’exprimer. La démarche écrite
dans ce domaine, figurant dans le dossier, fait partie des
critères de qualité pour optimiser la transmission entre
les équipes et les services en charge d’un patient.
Soulignons en dernier lieu, en termes d’approche
qualitative, qu’il serait souhaitable qu’un document
d’information reprenant tous ces points soit remis au
patient, afin de compléter l’information orale.
Ainsi, entre démarche clinique, éthique et droit, ce
nouvel outil de la relation soignants-soignés qu’est
la personne de confiance doit nous amener à nous
interroger en permanence sur l’abord de la personne
et sur la distinction entre approche administrative et
approche médicale d’une question qui touche avant
tout à l’humain et à l’intime.
n
© Lettre du Cancérologue n° 5, vol. XVI, mai 2007.
Articles du Code de la santé publique
“Toute personne majeure peut désigner une personne de
confiance qui peut être un parent, un proche ou le médecin
traitant, et qui sera consultée au cas où elle-même serait hors
d’état d’exprimer sa volonté et de recevoir l’information néces-
saire à cette fin. Cette désignation est faite par écrit. Elle est
révocable à tout moment. Si le malade le souhaite, la personne
de confiance l’accompagne dans ses démarches et assiste aux
entretiens médicaux afin de l’aider dans ses décisions.
Lors de toute hospitalisation dans un établissement de santé, il
est proposé au malade de désigner une personne de confiance
dans les conditions prévues à l’alinéa précédent. Cette dési-
gnation est valable pour la durée de l’hospitalisation, à
moins que le malade n’en dispose autrement.” “…Lorsque la
personne est hors d’état d’exprimer sa volonté, aucune inter-
vention ou investigation ne peut être réalisée, sauf urgence ou
impossibilité, sans que la personne de confiance, ou la famille,
ou à défaut, un de ses proches ait été consulté…