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Soins Libéraux
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Dépression du “senior”
Une maladie curable
Parce qu’ils ne sont pas toujours caractéristiques, les
symptômes faisant soupçonner un début de maladie
d’Alzheimer doivent, certes, interpeller le médecin, mais
sans inquiéter inutilement l’entourage. En effet, beaucoup plus fréquente que l’Alzheimer est la dépression.
L
a dépression touche de une
personne sur trois à une sur
deux après 65 ans. Méconnus,
les premiers symptômes inquiètent
l’entourage, qui pense tout de suite à
la maladie d’Alzheimer, fortement médiatisée ces derniers temps.
La mémoire qui flanche
Il est vrai que les deux maladies commencent souvent de la même façon :
essentiellement une perte de mémoire. Ainsi, oublier un événement
récent tout en se souvenant parfaitement de choses beaucoup plus anciennes. Par ailleurs, qui, sans réfléchir,
sans prêter attention, ne fait pas certains gestes machinaux comme poser
des clés, ranger des papiers et les
oublier au point d’avoir ensuite des
difficultés à les retrouver ? Jusque-là,
rien de franchement anormal. La situation devient plus préoccupante si cela
s’aggrave jusqu’à en oublier le prénom
de ses petits enfants, par exemple. Là,
il faut se poser des questions, les
poser au médecin traitant en se gardant bien de réponses toutes faites.
Perdre la mémoire ne signifie pas systématiquement démence de type
Alzheimer. Même si, à ce trouble,
s’ajoute une perte d’intérêt, une absence d’envie. En ce cas, une dépression doit être envisagée, car la maladie
est fréquente (30 à 50 % des personnes de plus de 65 ans). Elle peut
survenir spontanément, sans raison
connue, comme après un choc affectif. Le trouble de la mémoire n’est pas
lié ici à un trouble cérébral, mais à une
perte de concentration, à un désintérêt portant sur les choses et les êtres.
Sont aussi fréquemment présents une
fatigue, qui débute le matin au lever et
dure toute la journée, ou encore une
perte de l’appétit, un trouble du sommeil, qui sont autant de signes de la
dépression qui menace ou plutôt qui
s’installe déjà. Le danger pour la personne est alors de se laisser glisser, de
s’isoler du monde. Pour le Dr Duguay,
gériatre : « La dépression guette particulièrement les adolescents, mais aussi les seniors, à ces deux moments
charnières de la vie, souvent difficiles
à aborder. Ainsi, sur le nombre de
malades diagnostiqués, on considère
qu’une personne de plus de 65 ans
sur 6 vivant chez elle fait un état
dépressif, une personne sur trois, si
elle est à l’hôpital et une sur deux, si
elle se trouve en maison de retraite ».
Le Dr Duguay poursuit : « À son arrivée
en institution, lorsque je constate que
la personne a des difficultés d’adaptation, j’envisage d’emblée le diagnostic
de dépression et la traite comme
telle ; les résultats sont souvent excellents et relativement rapides, favorisant l’adaptation à de nouvelles
conditions de vie ».
allopathiques. Si les premiers médicaments existants de cette classe
thérapeutique étaient plus ou moins
dangereux, au point d’en limiter l’utilisation, ce n’est plus le cas des nouveaux, qui sont efficaces et ont un
minimum d’effets secondaires. Ils
aident à rétablir un équilibre au niveau
de la transmission entre les neurones,
faussée par la maladie. Ne causant
que peu d’effets secondaires, ils peuvent être utilisés à tout âge. Il faut seulement bien suivre les indications
énoncées par le praticien : les médicaments doivent être pris régulièrement
en respectant les doses prescrites. Ils
ne doivent jamais être arrêtés sans
avis médical. Le traitement peut être
long, parfois de plusieurs années, rarement moins d’une sans risque de
rechute. Il est possible que, malgré
toutes les précautions prises, un effet
indésirable apparaisse, comme des
vertiges, des tremblements, des
sueurs, signes qui vont le plus souvent
disparaître après quelques jours, et qui
ne doivent jamais entraîner un arrêt
médicamenteux spontané. Un traitement pris correctement, à doses efficaces et suffisamment longtemps permet de guérir d’une dépression. Alors
que, conclut le Dr Duguay, « non traitée, la dépression peut conduire à des
états suicidaires ».
Jacques Bidart
Diagnostic
Le diagnostic doit être fait grâce à l’interrogatoire du patient. Tous les maux
(mêmes petits) sont importants. Le
repliement sur soi peut être lent et
faussement attribué à la vieillesse. Ne
rien faire par crainte d’un Alzheimer,
c’est risquer de passer à côté d’une
dépression, pour laquelle des traitements efficaces existent. Quels traitements ? D’abord et avant tout, la psychothérapie, qui sera fondée sur
l’écoute. Parler, c’est faire le premier
pas vers la guérison. Si les résultats ne
sont pas suffisants, on peut alors s’aider de traitements antidépresseurs
Êtes vous plutôt Alzheimer ?
Un test simple à faire
L’entourage demande à la personne de prendre
connaissance de 5 noms communs écrits en majuscule sur une feuille de papier, comme : rose, camion,
girafe, bonbon... La personne doit les lire, puis les
répéter sans lire la feuille. Pour l’aider, on peut lui
suggérer un indice : il s’agit d’une fleur ou d’un animal. Si ce test est mauvais, comportant plus de deux
erreurs, il faut en parler à son médecin.
Professions Santé Infirmier Infirmière N° 59 • novembre 2004
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