progrès en
Progrès en diabétologie
Variations de la
fréquence cardiaque
La dysfonction autonome
cardiaque s’exprime de
façon précoce, à un stade
infraclinique, par des
altérations des variations
de la fréquence cardiaque
(VFC). Ces altérations
peuvent être mises en évi-
dence au cours d’épreuves
standardisées (respiration
profonde, orthostatisme
actif, Valsalva) proposées
par Ewing, ou dans des
conditions spontanées sur
des enregistrements ECG
de longue durée en recou-
rant à des analyses dans
le domaine temporel (dé-
viation standard de l’in-
tervalle RR ou différents
indices de variabilité à court terme) et
dans le domaine fréquenciel (analyse
spectrale). Chez les diabétiques, le rôle de
l’hyperglycémie chronique avec sa cascade
métabolique subséquente est fortement
soupçonné à partir des études transver-
sales et surtout des essais d’optimisation
de l’équilibre glycémique. Cependant, en
dehors du diabète, des arguments de pré-
somption en faveur du rôle de l’insulino-
résistance peuvent être avancés : relation
des anomalies des VFC avec l’indice de
masse corporelle, le surpoids androïde,
les triglycérides, et comme nous l’avons
observé, avec l’insulinémie. Deux études
récentes renforcent cette présomption.
Dans l’étude hollandaise HOORN portant
sur une population de 50 à 75 ans, d’im-
portantes altérations des VFC sont notées
dès la découverte du diabète et même au
stade de l’intolérance au glucose. L’étude
épidémiologique Fredericia, du nom
d’une ville danoise, qui a débuté en 1961,
s’est intéressée aux descendants non dia-
bétiques de sujets diabétiques ou non dia-
bétiques qui faisaient partie de la cohorte
initiale. Chez les sujets ayant un parent
diabétique de type 2, les VFC au cours
d’épreuves standardisées étaient signifi-
cativement plus faibles, même après ajus-
tement sur la glycémie et le taux
d’HbA1c, que chez les sujets n’ayant pas
d’hérédité diabétique, et la dysfonction
autonome cardiaque était associée à des
niveaux plus élevés d’insulinémie à jeun.
Ces données suggèrent l’existence d’un
syndrome génétique incluant la neuropa-
thie autonome cardiaque,
l’insulinorésistance, le
diabète de type 2 et les
complications cardiovas-
culaires. L’insuline endo-
gène pourrait rendre
compte des modifications
de l’activité autonome
cardiaque, en déprimant
le contrôle parasympa-
thique de la fréquence
cardiaque et en activant le
système nerveux sympa-
thique, une telle modifi-
cation de la balance vago-
sympathique exposant au
risque de troubles du
rythme cardiaque. Une
suractivité sympathique
pourrait aussi contribuer
à la rigidité artérielle.
L’ hyperglycémie, des fac-
teurs nutritionnels ou la
réduction d’activité phy-
sique pourraient ensuite renforcer l’ex-
pression des gènes.
L’endothélium en question
La dysfonction endothéliale est un phéno-
mène ubiquitaire qui joue sans doute un
rôle physiopathologique important dans
les complications macro- et microvascu-
laires du diabète. Elle affecte les troncs
artériels (aorte, artères brachiales, fémo-
rales et coronaires) et la microcirculation
(peau, reins, rétine, corps caverneux). Ses
conséquences en sont notamment une
altération de la vasomotricité, une aug-
mentation de la perméabilité vasculaire,
une réduction de l’activité fibrinolytique.
Des taux circulants augmentés de cer-
taines glycoprotéines d’adhésion solubles
(VCAM-1, selectine E), du facteur von
141
Plusieurs études prospectives réalisées chez des
sujets non diabétiques suggèrent qu’un hyperinsu-
linisme, témoin de l’insulinorésistance, constitue un
facteur de risque de cardiopathie ischémique. Le syn-
drome d’insulinorésistance conjugue une élévation
concomitante de la glycémie et de l’insulinémie, une
augmentation des triglycérides, une baisse du HDL-
cholestérol, une hypertension artérielle et un état
d’hypofibrinolyse. Les mécanismes par lesquels l’insu-
linorésistance contribue à l’aggravation du risque
cardiovasculaire sont encore incomplètement connus.
Deux types d’anomalies bien décrites chez les diabé-
tiques se trouvent en fait associées à l’insulinorésistan-
ce et pourraient rendre compte du mauvais pronostic
de ce syndrome. Il s’agit de la dysfonction autonome
cardiaque et de la dysfonction endothéliale.
Insulinorésistance et risque cardiovasculaire :
des chainons manquants
Paul Valensi*
* Hôpital Jean-Verdier, université Paris-Nord,
Bondy.
progrès en
Progrès en diabétologie
Willebrand et du PAI-1 constituent
d’autres témoins de la dysfonction endo-
théliale. Le rôle de l’hyperglycémie est
fortement suggéré par la normalisation de
ces taux à la faveur de quelques jours de
normoglycémie.
Une série de données récentes suggère
que la dysfonction endothéliale peut éga-
lement résulter de l’insulinorésistance.
Ainsi le groupe de J. Tooke a rappor
chez des sujets ayant une hyperglycémie à
jeun (à risque de devenir diabétique), une
réponse hyperhémique au réchauffement
local de la peau du dos du pied réduite,
négativement corrélée à l’insulinémie et
positivement corrélée à la sensibilité à
l’insuline. De même nous avons montré
chez les obèses, une réduction de la vaso-
dilatation cutanée endothélium-dépendante
(évaluée par laser doppler) induite par
l’application iontophorétique d’acétylcho-
line, et que la vasodilatation est corrélée
négativement à la glycémie 120 minutes
après charge orale en glucose. D’autres
auteurs ont noté que la vasodilatation au
niveau des membres inférieurs, en réponse
à l’injection intra-artérielle d’acétylcholine,
est réduite et corrélée négativement à l’ex-
cédent pondéral à disposition androïde.
L’insulinorésistance pourrait être impliquée
dans la dysfonction endothéliale en contri-
buant au stress oxydant par une production
exagérée de radicaux libres, mais aussi en
réduisant la capacité de production endo-
théliale d’oxyde nitrique. Cela amène à
considérer l’existence d’une insulino-
résistance vasculaire, dans la mesure où
l’insuline exerce physiologiquement son
effet vasodilatateur propre en activant la
NO-synthase. Les désordres secondaires à
l’insulinorésistance, dyslipidémie ou hyper-
tension artérielle, contribuent à leur tour à
la dysfonction endothéliale.
Selon l’hypothèse de Barker, un faible
poids de naissance s’associe à un risque
accru d’insulinorésistance pendant la vie
adulte. De façon intéressante, chez des
enfants de 11 ans nés avec un faible
poids de naissance mais indemnes de
désordres métaboliques, des anomalies
de la vasomotricité ont été observées au
niveau brachial. Ces données ont conduit
à émettre l’hypothèse que les gènes
impliqués dans la sensibilité à l’insuline
affecteraient également la fonction
endothéliale.
Ainsi l’insulinorésistance voit sa sémiolo-
gie clinique s’enrichir de désordres qui peu-
vent contribuer à son mauvais pronostic
cardiovasculaire et qui relèveraient de fac-
teurs génétiques communs. Ces désordres
précèdent le diabète, les désordres lipi-
diques et l’HTA. Leur régression sous l’in-
fluence de nouveaux traitements améliorant
la sensibilité à l’insuline commence à être
évaluée et mérite certainement d’être testée
de façon plus approfondie.
Références bibliographiques
– Gerritsen J, Dekker JM, Ten Voorde BJ et al.
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cardiovascular autonomic function : the
HOORN study. Diabetologia 2000 ; 43 : 561-70.
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Autonomic neuropathy in nondiabetic offspring
of type 2 diabetic subjects is associated with uri-
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ry blood pressure. Diabetes 2001 ; 50 : 630-6.
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thelial function and the insulin resistance syn-
drome. J Intern Med 2000 ; 247 : 425-31.
142
Act. Méd. Int. - Hypertension (13), n° 6, juin 2001
Internet : http//www.edimark.fr
62-64, rue Jean-Jaurès, 92800 Puteaux
Tél. : 01 41 45 80 00 - Fax : 01 41 45 80 01
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