Page GRIO - P. Orcel 3/03/03 14:35 Page 33 http://www.grio.org Rubrique coordonnée par T. Thomas, Saint-Étienne Ostéoporose des transplantés Post-transplantation osteoporosis des greffes d’organe Lpriseeouendéveloppement de moelle osseuse a révolutionné la charge des patients atteints d’insuffisance viscérale terminale ou d’hémopathie. L’utilisation de puissants immunosuppresseurs a très largement amélioré le pronostic vital et la qualité de vie de ces patients, mais au prix de pathologies secondaires telles que l’ostéoporose. DES PERTES OSSEUSES QUI VARIENT SELON LES INDIVIDUS La prévalence de l’ostéoporose chez les receveurs de greffe allogénique est diversement rapportée dans la littérature (28 à 74 % indépendamment du sexe), avec des fractures vertébrales ou périphériques (cadre obturateur, côtes et col fémoral par ordre décroissant), dans 8 à 65 % des cas. La perte osseuse postgreffe varie selon le patient, la maladie initiale, l’organe transplanté et l’agressivité des immunosuppresseurs, et atteint, par ordre décroissant, les transplantés cardiaques, hépatiques, pulmonaires et rénaux ; l’incidence des fractures paraît également être la plus faible chez les transplantés rénaux, alors qu’elle est la plus élevée chez les greffés hépatiques pour cirrhose biliaire primitive. Avant transplantation, la densité minérale osseuse est souvent déjà diminuée, du fait de facteurs de risque multiples : facteurs de risque habituels de l’ostéoporose (âge, sexe, statut hormonal), retentissement osseux de la pathologie en cause (organe défaillant et durée de l’insuffisance viscérale) et traitements antérieurs (corticoïdes, chimiothérapie). Après la greffe, la perte osseuse prédomine sur le secteur trabéculaire vertébral pour les greffes d’organes solides et sur le secteur cortical pour les transplantations de moelle osseuse. Cette perte osseuse rapide et les complications fracturaires surviennent particulièrement durant la première année. Le découplage du remodelage osseux, reflété par l’augmentation des marqueurs de résorption osseuse et, le plus souvent, par la diminution des marqueurs d’ostéoformation, est responsable en partie de la rapidité de cette perte osseuse. Malgré la variabilité des résultats des études, les facteurs de risque les mieux corrélés à l’intensité de cette perte osseuse, tous organes confondus, semblent être un âge élevé, le sexe masculin, la survenue d’un hypogonadisme iatrogène prématuré (dans les deux sexes) et la dose cumulée de corticoïdes. Le rôle synergique des autres immunosuppresseurs est moins clairement démontré, même s’il existe des arguments expérimentaux et cliniques suggérant l’induction par la ciclosporine ou le tacrolimus (FK506) d’une ostéopénie à haut niveau de remodelage. densitométrique ne reflétant clairement le risque fracturaire à l’échelon individuel, la majorité des patients doit bénéficier d’une prévention de la perte osseuse et des fractures, avec des mesures simples : diminution des immunosuppresseurs aux doses minimales efficaces, maintien d’une activité physique régulière (adaptée à l’état physiologique), apports en vitamine D (400800 UI/j) et en calcium (1 g/j) suffisants. En l’absence de contre-indication, une hormonothérapie substitutive doit être proposée à toutes les femmes ménopausées. Il existe peu d’études contrôlées évaluant l’efficacité des traitements préventifs ou curatifs de l’ostéoporose chez les transplantés, avec des résultats contradictoires selon les essais et l’organe transplanté. Les quelques études disponibles semblent confirmer l’efficacité des bisphosphonates. CONCLUSION LA PRÉVENTION La prévention de l’ostéoporose induite par les transplantations doit être envisagée avant la greffe. L’évaluation du capital osseux est indispensable, reposant sur l’ostéodensitométrie, des radiographies du rachis dorso-lombaire et des paramètres biologiques pertinents (fonction thyroïdienne, dosages sériques du calcium, de la vitamine D, de la PTH et de la testostérone chez l’homme). Elle permet d’identifier des causes réversibles de perte osseuse, telles que l’existence de carences nutritionnelles ou hormonales, et de traiter une éventuelle ostéoporose. La prévention de la perte osseuse doit se poursuivre en période de postgreffe immédiate, notamment lors des 6 premiers mois. Aucun marqueur clinique, biochimique ou La perte osseuse associée aux transplantations est une complication tardive fréquente, constituant un véritable problème de santé publique. Elle pose également un problème thérapeutique majeur chez des patients déjà polymédicamentés. Il est donc nécessaire de dépister, de prévenir et de traiter précocement l’ostéoporose de ces patients afin de leur offrir une meilleure qualité de vie après la transplantation. P. Orcel, M. Rousière, Fédération de rhumatologie, hôpital Lariboisière, 2, rue Ambroise-Paré, 75010 Paris. © La Lettre du Rhumatologue - n° 289 - février 2003 La Lettre du Gynécologue - n° 279 - février 2003 33