Métabolismes Hormones Diabètes et Nutrition (IX), n° 3, mai/juin 2005
81
THS
Intérêts et controverses
Tout comme les estrogènes, le tamoxi-
fène paraît diminuer la résorption
osseuse et son impact sur le risque
coronarien semble bénéfique. C’est
ce que montre la méta-analyse de
RS Braithwaite (33) qui a porté sur
près de 53000 patientes incluses dans
32 essais thérapeutiques. Cependant,
le tamoxifène n’a pas d’effet sur les
bouffées de chaleur et il est respon-
sable d’effets indésirables: risques
thrombophlébitique (RR 3) ou
de cancer de l’endomètre (RR 3).
Ils ne permettent pas de considérer
le tamoxifène comme un traitement
idéal des formes de mastopathies à
haut risque de cancer du sein malgré
les résultats encourageants des
grandes études de prévention telles
que le NSABP-1 (RR 0,51 ; 0,39-
0,66) (34) ou l’essai IBIS-1 (RR
0,67 ; 0,49-0,90) (35). Ces risques
ont motivé la recherche d’autres
formes de thérapie des cancers du
sein. La méta-analyse de RS Braith-
waite (33) retrouve aussi une aug-
mentation discrète du risque de can-
cers gastrointestinaux (RR 1,31 ;
IC95,1,01 à 1,69), des attaques céré-
brales (RR 1,31; IC95,1,01 à 1,69), et
de l’incidence des embolies pulmo-
naires (RR 1,88 ; IC95,1,77 à 3,01).
Le raloxifène
Il appartient à la classe des benzo-
thiophènes et se lie préférentielle-
ment au RE. Il paraît avoir des pro-
priétés plus anti-estrogéniques que
le tamoxifène sur l’endomètre. Dans
la seule étude de longue durée ayant
pour objectif principal l’évaluation
de son efficacité de réduction du
risque fracturaire, le raloxifène dimi-
nuait l’incidence des cancers du
sein RE+ de 80 % et celle des can-
cers du sein ayant ou non des récep-
teurs des estrogènes de 70 % sur
une période de 5 ans (36). Le risque
de cancer de l’endomètre n’était pas
augmenté (RR 0,80) par contre per-
sistait un risque thrombophlébitique
identique à celui du tamoxifène.
Outre l’effet bénéfique sur l’os (37,
38) quelque études préliminaires
semblent montrer un impact cardio-
vasculaire favorable (39). L’étude
MORE, construite pour mettre en
évidence l’effet bénéfique du raloxi-
fène sur les fractures osseuse des
femmes ménopausiques, avait comme
second objectif l’analyse de l’inci-
dence des cancers du sein. Elle s’est
trouvée réduite de près de 70 %
(RR 0,3) dans le cas des cancers
invasifs du sein avec des récepteurs
aux estrogènes. L’étude CORE qui
prolongeait de 3 ans l’étude MORE,
montre une persistance de la chute
de l’incidence des cancers du sein
(40). Cela fait du raloxifène un can-
didat potentiel pour le traitement
préventif des cancers du sein en post-
ménopause. Son dérivé, l’arzoxi-
fène (LY 353,381) est 100 fois plus
affin que le raloxifène pour le RE et
paraît avoir des effets anti-estrogé-
niques plus puissants. Il est en cours
d’étude dans les cancers du sein avan-
cés où il paraît efficace avec une
bonne tolérance dans les cancers du
sein résistants au tamoxifène (41).
Cependant, la persistance ou l’induc-
tion de bouffées de chaleur suggère
une absence d’effet estrogénique
sur le système nerveux central, tout
comme pour le tamoxifène, ce qui
peut être un facteur limitant à son
utilisation prolongée. Aussi, d’autres
composés tel que le lazofoxifène (42),
le bazedoxifène (43),l’EM 652 (44,
45) sont en cours d’études, certains
en association avec un estrogène
(Bazedoxifène ; 43) car il ne passe
pas la barrière hémoméningée et il
est plus affin que l’estradiol pour les
REs. Ce dernier ne déplace donc
pas le SERM du RE.
La tibolone
Dérivée de la noréthyndrone, la tibo-
lone a des particularités qui l’ont
fait sortir de la classe des progesta-
tifs. Il est peu efficace par lui-même
et agit plutôt comme une pro-drogue
qui se métabolise en un composé
progestatif (dérivé 4-tibolone) et
des dérivés hydroxylés en 3 à faible
activité estrogénique (3et 3-tibo-
lone) (46). Ses dérivés faiblement
estrogéniques paraissent suffisants
pour faire régresser les bouffées de
chaleur et les autres signes du cli-
matère. Sa structure androgénique
peut expliquer, pour partie au moins,
son fort impact sur la libido et la
sphère uro-génitale (47). D’autre
part, la tibolone a une activité anti-
sulfatase qui lui permet de bloquer
la transformation périphérique de
l’estrone sulfate en estrone qui, dans
les cellules cibles, se transforme en
estradiol (48). Par ce biais, elle dimi-
nuerait la concentration intratissu-
laire d’estradiol et pourrait diminuer
l’effet promoteur potentiel de can-
cer du sein des estrogènes locaux.
Cet effet s’accorde bien avec la plus
faible fréquence d’augmentation de
la densité mammographique sous
tibolone par comparaison aux traite-
ments hormonaux de la ménopause
(49). Elle pourrait être considérée
comme SERM, puisqu’elle a des
dérivés qui lient les RE. Cependant,
pour mettre en exergue ses particu-
larités biologiques, certains auteurs
ont créé une nouvelle catégorie de
produits appelée STEAR (Selective
Tissue Estrogenic Activity Regulators).
La tibolone est à ce jour le seul
membre de cette classe de produit.
La récente publication de la Million
Women Study qui a montré une aug-
mentation de l’incidence des cancers
de l’endomètre (50),a surpris tous les
spécialistes car elle va à l’encontre
des résultats connus émanant de la
surveillance endométriale des femmes
traitées par tibolone (51). Avant de
tirer des conclusions sur ce produit
prescrit depuis plus de 20 ans en
Angleterre, il paraît indispensable
de réaliser des études prospectives
randomisées afin de vérifier l’exac-
titude de ce résultat et, dans cette
hypothèse, de renforcer notre vigi-
lance concernant l’endomètre des
femmes suivant un traitement par
tibolone.
Les phytoestrogènes
Ils constituent une part d’impor-
tance variable de notre alimentation
habituelle. Ce sont des substances
contenues dans toutes les familles
de plantes et qui peuvent être iso-
lées de la plupart des tissus végé-
taux (feuilles, tiges, racines, fleurs et