La Lettre du Rhumatologue - Supplément au n° 293 - juin 2003
IV
L’analyse du liquide synovial
Elle est systématique dès lors qu’il existe un épanchement
articulaire. Le liquide est de type inflammatoire (il
contient plus de 2 000 leucocytes/µm3), composé en majo-
rité de polynucléaires, sans micro-cristaux ni bactéries.
La biopsie synoviale,plus invasive, est rarement prati-
quée, sauf si l’on veut éliminer d’autres diagnostics.
UNRHUMATISME TRÈS HÉTÉROGÈNE
L’évolution de la polyarthrite rhumatoïde est très
variable d’un patient à l’autre. On estime que :
– 10 à 20 % des polyarthrites sont des formes très sévères.
Ces formes au pronostic fonctionnel médiocre entraînent
un handicap fonctionnel important. En quelques années,
apparaissent des destructions ostéo-articulaires et des
déformations des articulations (figures 3 et 4),qui nécessi-
tent de recourir à la chirurgie orthopédique (prothèses,
arthroplasties).
– À l’opposé, dans 20 % à 30 % des cas, la polyarthrite est
peu active. L’inflammation est discrète, les douleurs peu
intenses, les lésions radiographiques minimes, le nombre
d’articulations touchées est souvent réduit. La qualité de
vie est peu altérée.
– Dans 50 à 60 % des cas restants, l’atteinte est plus lente-
ment progressive.
Après la phase de début de la polyarthrite rhumatoïde, qui
dure de quelques mois à une année, on entre dans la phase
d’état de la maladie. L’évolution est émaillée de poussées
douloureuses et inflammatoires entrecoupées de périodes
où la maladie est quiescente. Avec les années, des lésions
ostéo-articulaires se développent progressivement et des
déformations articulaires apparaissent. Des manifestations
extra-articulaires peuvent s’y associer.
La synovite chronique (sécrétion de synovie au sein de
l’articulation contenant des enzymes) et le développement
du pannus (prolifération des cellules synoviales de la mem-
brane qui entoure l’articulation) sont responsables de la des-
truction du cartilage et de l’os adjacent. Parfois, les destruc-
tions surviennent à bas bruit sans signes de synovite.
Presque toutes les articulations peuvent être touchées :
articulations des membres, rachis cervical, articulations
chondro-sternales et, bien sûr, les articulations des poi-
gnets, des mains et des pieds.
Sur les radiographies, on peut voir au voisinage des arti-
culations : un épaississement des tissus mous, une déminé-
ralisation des extrémités osseuses (épiphyses), des géodes
osseuses (trous dans l’os qui est détruit), des érosions
(encoches de l’os à la jonction entre cartilage et os), des
déviations des articulations (désaxations), voire une anky-
lose (soudure). La sévérité des lésions varie d’un sujet à
l’autre (30 % n’ont jamais de lésions) et d’une articulation
à l’autre.
LES MANIFESTATIONS EXTRA-ARTICULAIRES
Elles sont nombreuses mais inconstantes. Ces manifesta-
tions surviennent plus souvent dans les formes sévères.
Elles traduisent le caractère général (systémique) de la
maladie.
Elles peuvent affecter le sang (anémie, augmentation des
plaquettes), les muscles (amyotrophie, inflammation ou
myosite), les tendons, le cœur (troubles du rythme, atteinte
des valves), les vaisseaux, les poumons et la plèvre, le sys-
tème nerveux (névrite, compression des nerfs), les yeux
(syndrome sec), les tissus mous (nodules rhumatoïdes).
LARÉVOLUTION THÉRAPEUTIQUE
L’évolution de la polyarthrite est étroitement liée à la
précocité du diagnostic et de la mise en route du traite-
ment. Les progrès réalisés ces dernières années dans la
pathogénie de la polyarthrite ont conduit à la mise au
point de thérapeutiques plus spécifiques qui s’attaquent
aux processus immunologiques inflammatoires respon-
sables des lésions faisant la gravité de la maladie. On
assiste aujourd’hui à une véritable révolution du traite-
ment de la polyarthrite rhumatoïde. Dans des formes très
actives de polyarthrite, des médicaments comme les
anti-TNF-alpha ont bouleversé la vie des patients et le
cours de la polyarthrite. D’autres thérapeutiques sont en
cours de développement, certaines seront disponibles
prochainement. La polyarthrite rhumatoïde change donc
de destin… !
DOSSIER PATIENTS
Des facteurs pronostiques de sévérité
La présence de certains éléments prédictifs péjoratifs au
début de la maladie permet de juger de l’évolution ulté-
rieure et d’adapter le traitement à la sévérité potentielle de
la polyarthrite rhumatoïde.
Ce sont :
– le nombre d’articulations gonflées et douloureuses ;
– la présence d’érosions ostéo-articulaires à la radiographie ;
– un syndrome inflammatoire (VS et CRP élevées) ;
– des facteurs rhumatoïdes positifs, anticorps antipeptides
citrullinés (anti-CCP) positifs ;
– génétiques : présence d’un HLA DRB1*01-04.
Figure 3. Doigt “en boutonnière”. Figure 4. Déviation en coup de vent
cubital.