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La Lettre du Sénologue - n° 21 - juillet/août/septembre 2003
reliquats galactophoriques du parenchyme et quelques lobules
ayant échappé à l’involution. La métaplasie adipeuse observée
a ainsi une distribution en taches résultant de petites zones de
tissu fibreux préexistant alternant avec des zones adipeuses nou-
vellement formées. Occasionnellement, la métaplasie adipeuse
peut isoler une large région de stroma fibreux.
Cette involution adipeuse est importante à souligner car le tissu adi-
peux est le lieu privilégié de l’aromatisation de l’androstènedione
en estrone. Le taux de conversion augmente brutalement après
la ménopause de 1,4 à 2,7 %. Ainsi l’involution graisseuse du
sein qui se produit au cours de la ménopause favorise la trans-
formation locale des androgènes en estrogènes. Cette aromati-
sation est, en outre, cinq fois plus active dans le tissu adipeux
mammaire que dans le tissu adipeux périphérique et deux fois
plus dans le quadrant supéro-externe que dans le reste du sein.
Parallèlement, la concentration tissulaire des stéroïdes est plus
faible dans le parenchyme que dans le tissu adipeux, probable-
ment en raison de la plus faible aromatisation des androgènes.
L’involution stromale comme l’involution lobulaire évoluent
par place à différentes vitesses dans différentes zones mêmes
adjacentes du sein. Cet asynchronisme peut parfois entraîner des
difficultés d’interprétation des mammographies ou des lames
histologiques en raison de fausses images d’infiltration.
Variations cliniques
Le manque d’uniformité de l’involution stromale dans le temps
et dans l’espace, c’est-à-dire dans les différentes parties du sein,
entraînent des différences de consistance selon, en particulier, la
quantité de tissu adipeux. La distribution en plages de la méta-
plasie apocrine avec de petites zones de tissu fibreux préexistant,
qui alternent avec les zones de tissu adipeux nouvellement formé
est à l’origine de la palpation d’une consistance granuleuse,
voire nodulaire, pouvant faire suspecter à tort une pathologie.
Variations mammographiques
Cette involution stromale qui peut évoluer de façon irrégulière
et asynchrone est à l’origine d’images radiologiques très
diverses et peut conduire à des difficultés d’interprétation. Si
l’étude des modifications physiologiques du sein à la ménopause
n’a pas fait l’objet de nombreuses publications, il n’en est pas
de même de leurs retentissements au niveau des densités radio-
logiques et de leurs répercussions au niveau de la sensibilité de
la mammographie en relation avec un grand nombre de facteurs
dont les plus importants sont les traitements hormonaux substi-
tutifs de la ménopause.
Une preuve des variations tissulaires globales des seins chez
la femme au cours du viellissement (11) a été présentée par
l’analyse des densités qui traduisent un tissu fibro-glandulaire per-
sistant. Cette évolution se manifeste dans l’étude des mammo-
graphies de dépistage du Bas-Rhin (ADEMAS) par une dimi-
nution progressive des seins très denses DY (de 4,9 % à 50 ans
à 1,4 % à 66 ans) ou denses P2 (de 34,3 % à 50 ans à 13,5 % à
65 ans) au profit des seins N adipeux (de 14,2 % à 50 ans à
28,4 % à 66 ans) ou P1 à prédominance adipeuse (de 46,6 % à
50 ans à 55,5 % à 66 ans). Ces données sont en accord avec
celles de la littérature (10-15).
●Le rôle de la ménopause sur le phénomène d’involution du
sein a pu être étudié dans cette même population. Parmi 27 906
clichés classés, 25 174 femmes ont fourni leur statut hormonal :
19 782 correspondent à des femmes déjà ménopausées alors que
5 392 ne le sont pas encore. Il ressort clairement de cette étude
que la ménopause entraîne une diminution significative des
seins denses (de 5,0 à 2,4 % pour les DY et de 35,8 à 22,0 %
pour les P2) au profit des seins clairs (de 12,9 à 20,0 % pour les
N et de 46,3 à 52,6 % pour les P1).
●Le rôle respectif de l’âge et de la ménopause sur cette invo-
lution est fourni par l’allure des courbes de variations de la den-
sité radiologique, en fonction de l’âge, des seins des femmes non
ménopausées, ménopausées non traitées et ménopausées rece-
vant un traitement substitutif. On constate encore, bien qu’à un
moindre degré, une diminution des seins denses au profit des
seins adipeux (16). Ces observations sont en faveur du rôle com-
biné du vieillissement et de la privation hormonale liée à la
ménopause. Cependant, cette dernière n’est pas essentielle dans
l’involution ainsi qu’en atteste la précocité du phénomène même
en présence d’activité ovarienne ou la variabilité dans la persis-
tance de l’architecture lobulaire à un âge tardif.
Récemment, plusieurs études ont montré le rôle d’un certain
nombre de facteurs liés à la densité mammographique tels que
la parité (17-20), la race (21), des facteurs génétiques (22)… Par
ailleurs, il a été observé que la réduction de la densité mammaire
des femmes qui se présentaient au dépistage dans les années
1990 n’était pas aussi rapide en fonction de l’âge que dans la
décade précédente, même chez les femmes non traitées à la
ménopause (23).
CONCLUSION
L’involution mammaire résulte de deux phénomènes qui s’intri-
quent et se superposent : l’un étant lié au vieillissement et l’autre
à la privation hormonale de la ménopause. Les variations histo-
logiques tissulaires se reflètent dans les variations de densité
radiologique qui traduisent les effets de l’âge, de la ménopause
et des traitements hormonaux substitutifs (24). Jusqu’à présent,
le rôle de l’involution dans la cancérogenèse mammaire est
inconnu et l’influence des traitements hormonaux au niveau tis-
sulaire fait encore l’objet de discussions. ■
RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES
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