J’ai fait un mauvais rêve
Arnaud VAN DEN WIELE, à Gap, le 3 mars 2016
1
Hier, j’étais un enfant.
Un enfant à qui les instituteurs ont appris que la France
était la fille aînée de la liberté et des droits de l’homme.
Hier, j’étais un adolescent.
Un adolescent à qui des professeurs ont appris à
réfléchir et à refuser les réponses toute faites.
Hier, j’étais athée.
Un athée à qui des hommes et des femmes ont appris à
croire d’une foi insoumise.
A croire une parole à la liberté imprenable.
Aujourd’hui, je suis un adulte.
Un adulte qui n’a pas renoncé à ses rêves d’enfants
ni à ce que ses maîtres lui ont appris.
2
Mais comment sera demain ?
Alors j’ai fermé les yeux et j’ai fait un mauvais rêve.
J’ai fais un mauvais rêve :
j’ai vu l’Europe réveiller ses vieux démons pour
exorciser ces peurs les plus profondes.
Peurs d’étranges étrangers venus piller ses richesses.
Peurs de hordes barbares déferlant sur nos pays.
Peurs d’envahisseurs féroces qui viennent
jusque dans nos bras… écorcher notre
narcissisme et notre égoïsme.
J’ai fais un mauvais rêve :
j’ai vu les Eglises tourner le dos aux appels de
détresse d’enfants, de père et de mère
qui ont commis le crime d’espérer un
ailleurs, d’espérer un meilleur.
3
J’ai fais un mauvais rêve :
j’ai vu les Eglises être au service d’elles-mêmes et
éviter de prendre la parole - comme on prend une arme –
pour préserver la tranquillité bourgeoise de chrétiens
endormis.
J’ai fais un mauvais rêve :
j’ai vu des chrétiens médire, maudire et se blottir
parce qu’à force d’avoir peur de tout et de tout-le-monde,
on finit par prendre son prochain pour un loup.
J’ai fais un mauvais rêve :
j’ai vu des colombes devenir des dragons.
Je les ai vu tuer du regard ; je les ai vu monter du doigt ;
je les ai vu cracher au visage.
J’en ai vu d’autres baisser les bras et s’en laver les mains.