M I S E A U P O I N T Le BNP peut-il remplacer l’échocardiographie dans le diagnostic de l’insuffisance cardiaque ? ● A. Cohen-Solal, D. Logeart * Résumé ■ Le brain natriuretic peptide (BNP) plasmatique ou sanguin est un assez bon reflet des pressions de remplissage des ventricules. ■ Le BNP est plus stable que l’ANP, et donc plus facile à doser en routine. Il existe maintenant des kits à réponse rapide sur sang total donnant des résultats en 15 minutes. ■ La valeur diagnostique, notamment en ce qui concerne la valeur prédictive négative de l’insuffisance cardiaque gauche, semble bonne. ■ La spécificité d’un taux élevé de BNP reste à préciser un peu mieux qu’à l’heure actuelle. ■ Le dosage du BNP pourrait également aider à mieux trier les patients à risque, justifiant d’une évaluation de la fonction cardiaque par échocardiographie, et peutêtre à mieux adapter le traitement. le BNP n’apporte pas les informations d’ordre étiologique fournies par l’échographie. Différentes affections (BPCO, anémie, déconditionnement, œdèmes veineux) peuvent mimer les signes de l’insuffisance cardiaque. L’échocardiographie doppler aide énormément au diagnostic positif et surtout étiologique d’une IC ; cet examen reste néanmoins d’interprétation délicate, et doit inclure toutes les finesses d’analyse du remplissage (flux mitral, flux des veines pulmonaires...) ; l’existence d’une altération de la fonction systolique n’est pas suffisante, chez un patient dyspnéique ou œdémateux, pour affirmer une IC. Une fonction systolique conservée à l’échographie, à l’inverse, ne permet pas de récuser une IC : on connaît la prévalence croissante des IC à fonction systolique conservée, notamment chez le sujet âgé. Les néphrologues, les diabétologues, les hépatologues ont depuis longtemps un paramètre biologique simple qui leur permet d’affirmer sur un prélèvement sanguin que l’organe de leur spécialité est malade ou non. Les cardiologues disposent de tels paramètres biologiques pour affirmer l’infarctus, mais pas pour diagnostiquer l’IC. Les peptides natriurétiques se sont positionnés depuis plusieurs années déjà comme des paramètres biologiques diagnostiques de l’IC. Parmi ceux-ci, le brain natriuretic peptide (BNP) s’est imposé comme le plus sensible et le plus spécifique. Divers arguments suggèrent que ce peptide pourrait sortir du cadre de la recherche et entrer dans la routine du diagnostic. Remplacera-til, à court ou moyen terme, l’échocardiographie doppler ? ■ Néanmoins, RAPPEL SOMMAIRE Mots-clés : BNP - Insuffisance cardiaque - Diagnostic. e diagnostic de l’insuffisance cardiaque (IC) est fondé sur la conjonction de signes cliniques (congestion, bas débit) et de la présence d’une pathologie cardiaque à l’origine de ces signes. Le diagnostic, classiquement simple, est en fait plus difficile quand les signes sont frustes, notamment chez le sujet âgé, ou chez l’insuffisant respiratoire. L * Service de cardiologie, hôpital Beaujon, 100, bd du Général-Leclerc, 92110 Clichy. La Lettre du Cardiologue - n° 350 - décembre 2001 1. Les peptides natriurétiques forment une famille composée actuellement de trois peptides : ANP, BNP, CNP. Le BNP est essentiellement sécrété par les ventricules, ce qui le rend d’emblée plus intéressant que l’ANP, sécrété par les oreillettes et les ventricules, à partir du clivage d’un préproBNP en BNP32, seul actif, et N-terminal proBNP. À la différence de l’ANP, le BNP n’est pas stocké et la régulation à court terme de la synthèse et de l’excrétion du BNP se situe au niveau de l’expression des gènes. Le stimulus de la sécrétion est la contrainte pariétale, c’està-dire l’étirement radial des myocytes dans la paroi ventriculaire. En revanche, une hyperpression sans étirement, une dilatation par allongement mais sans étirement des sarcomères augmentent peu le BNP (1, 2). Le BNP agit à deux niveaux : au niveau rénal, en stimulant l’excrétion de sodium par le tubule, mais son action est 31 M I S E A U P O I N T émoussée, plus du fait d’une baisse de la perfusion rénale que d’une down-regulation du récepteur rénal ; au niveau vasculaire, par une action vasodilatatrice. Il est inactivé par une endopeptidase neutre (NEP) non spécifique. Néanmoins, les choses ne sont pas aussi simples qu’il y paraît ! 1. Le BNP est sécrété par les deux ventricules : il peut ainsi être augmenté dans les pathologies aiguës et chroniques qui augmentent les contraintes ventriculaires droites par le biais d’une hypertension artérielle pulmonaire : BPCO, emphysème, embolie pulmonaire (6-8). Toutefois, les taux plasmatiques retrouvés sont, en général, moins élevés que dans la dysfonction systolique ventriculaire gauche, surtout quand elle est décompensée (9). Mais ils peuvent être du même niveau que ceux observés dans une dysfonction ventriculaire gauche diastolique. Nous avons également trouvé des taux élevés de BNP dans la cirrhose du foie (du fait de la surcharge volumique qui dilate les ventricules) (8) (figure 1). L’insuffisance rénale augmente également modérément les taux de BNP. La spécificité n’est donc pas parfaite. 800 700 600 500 BNP (pg/ml) 2. De très nombreuses études ont ainsi montré que le BNP était augmenté dans l’insuffisance cardiaque et que ses taux étaient corrélés à la gravité de l’état hémodynamique et au pronostic. Ces corrélations ont été rappelées dans plusieurs articles de synthèse (3-5). BNP et NYHA 400 300 200 100 0 – 100 – 200 1 2 3 4 Figure 2. Relation entre le taux plasmatique de BNP, dosé par radioimmunologie, et la classe NYHA [d’après (8)]. BNP et remplissage mitral 1 000 900 Résultats 800 700 BNP (pg/ml) 2 250 2 000 1 750 BNP (pg/ml) 1 500 1 250 500 400 300 1 000 200 750 100 500 0 250 0 – 250 Cirr IVG Tr C IRC IC diast Témoins Figure 1. Taux de BNP (dosé par radio-immunologie) chez des patients avec insuffisance ventriculaire gauche systolique (IVG), cirrhose du foie (Cirr), insuffisance respiratoire chronique (IRC), insuffisance cardiaque à fonction systolique conservée (IC diast) et transplantés cardiaques (Tr C) [d’après (8)]. 2. Les taux plasmatiques de BNP sont mieux corrélés à des indices de fonction diastolique ou de remplissage (pression capillaire pulmonaire, pression artérielle pulmonaire, rapport E/A ou temps de décélération de l’onde E au doppler mitral) qu’à des indices de fonction systolique ou d’éjection (FE) (8, 10, 11), ce qui n’est pas surprenant, vu les mécanismes de sécrétion (figures 2 et 3). On peut donc observer des taux élevés sur des cœurs à FE peu altérée mais peu compliants et, à l’inverse, des taux modérément augmentés sur des ventricules dilatés à FE basse, mais bien remodelés, distensibles, à pressions de remplissage peu augmentées. 32 600 1 E/A < 1 2 E/A > 2 Groupe 3 E/A 1-2 Figure 3. Relation entre le taux plasmatique de BNP, dosé par radioimmunologie, et le rapport E/A en doppler cardiaque [d’après (8)]. Le BNP est également augmenté chez le transplanté cardiaque (8, 12). Le BNP plasmatique n’est donc pas un bon reflet de la FEVG. 3. Le mécanisme précis de la libération de BNP dans le plasma n’est pas entièrement élucidé. En effet, des variations des taux de BNP sous l’effet des médicaments peuvent êtres observées dans des délais de 15 minutes (sous l’action de diurétiques ou de nitrés par exemple), ce qui suggère soit un mécanisme de synthèse très rapide avec une production très rapide d’ARN messager, soit un pool de BNP stocké et immédiatement libérable (figure 4). 4. Le BNP semble suivre un cycle circadien, et le rôle éventuel joué par l’heure du prélèvement, le repos strict ou non, la position couchée ou debout reste à préciser. La Lettre du Cardiologue - n° 350 - décembre 2001 M BNP ultrarapide et doppler mitral : aspect évolutif dans l'OAP BNP pg/ml E/A m/sec 1 600 1 400 1 200 1 000 BNP E/A 800 600 400 200 0 J1 J2 J3 J8 Figure 4. Exemple d’évolution du BNP dosé par technique rapide et du rapport E/A au doppler mitral (reflet de la pression auriculaire gauche) dans le traitement d’une poussée d’IC. 5. L’action des médicaments sur les taux de BNP reste mal connue, sans que l’on sache non plus s’il s’agit d’action : – directe des médicaments sur la sécrétion du BNP ou sur la NEP ; – indirecte par le biais d’une interrelation hormonale (endothéline et angiotensine II semblent interférer avec la sécrétion ou le métabolisme du BNP) ; – plus indirecte encore, par le simple biais des modifications hémodynamiques, modifiant les contraintes ventriculaires et le profil neurohormonal. Les IEC, les diurétiques tendent à diminuer les taux de BNP. L’action des bêtabloquants est moins claire : le BNP ne semble pas baisser au cours des six premiers mois, peut-être du fait de l’action inotrope négative initiale des bêtabloquants et de la bradycardie qui tend à dilater le ventricule. Logiquement, les taux devraient diminuer ensuite avec la baisse des pressions de remplissage et l’effet favorable sur le remodelage ventriculaire, ce que semblent montrer les dernières études. La Lettre du Cardiologue - n° 350 - décembre 2001 A U P O I N T Récemment, un kit (Triage®) de la société Biosite a été commercialisé (en France, par la société BMD, Croissy Beaubourg, France) ; il a le double intérêt de donner des résultats en 15 minutes, et cela sur sang total. Il utilise une technique par immunofluorescence “froide” de dosage sur sang total (250 microlitres suffisent) . Son coût est actuellement de 170 F. On voit d’emblée l’intérêt potentiel de ce kit, non seulement pour le diagnostic positif dans des services d’urgence, des USIC ou des SMUR, mais aussi dans le suivi du traitement. Les valeurs normales selon les données du laboratoire sont de 0 à 50 pg/ml (médiane 12,3 ; 95e percentile 39,6, n = 1 236, hommes 610, femmes 676) [les résultats des témoins sont exprimés par tranche d’ âge]. Il existe une bonne corrélation entre les résultats obtenus avec le kit Triage® et ceux obtenus avec la technique de Shionogi dans deux articles récents : r = 0,963 ; Triage BNP = 1,579 ; Shionoria BNP – 2, 947 (16) ; r = 0,935 ; Triage BNP = 1,52 x Shionoria – 7 (17). La limite maximale de mesure est 1 300 ng/ml. VALEUR DIAGNOSTIQUE DU BNP Les travaux les plus intéressants sur le BNP dans l’insuffisance cardiaque avec le kit Biosite® sont ceux réalisés par l’équipe de A. Maisel à San Diego dans quatre études. 1. Ces auteurs ont dosé le BNP aux urgences chez 250 patients (94 % d’hommes) suspects d’IC (droite, gauche ou globale) pour de la dyspnée (9). Les dosages ont été faits dans les 24 heures. Ces auteurs montrent que le BNP avec une valeur seuil de 80 pg/ml a une valeur prédictive négative (VPN) de 98 % et une valeur prédictive positive (VPP) de 95 % pour le diagnostic d’IC. Le BNP se révélait supérieur au sens clinique de l’urgentiste : 29 des 30 erreurs de diagnostic auraient été corrigées par le dosage du BNP (figure 5). MÉTHODES DE DOSAGE 1 400 1 076 ± 138 1 200 BNP (pg/ml) Le BNP est classiquement dosé par méthode radio-immunologique (kit Shionogi-Shionoria®, actuellement commercialisé par CIS-BIO). Le BNP doit être prélevé sur tubes EDTA (13), qu’ils contiennent ou non de l’aprotinine. La stabilité des peptides natriurétiques après prélèvement a fait l’objet de controverses ; il est souvent d’usage de placer le plasma à – 20 °C immédiatement après le prélèvement, mais différentes études montrent que le BNP est plus stable que l’ANP (14), et une étude récente montre qu’il est stable 12 heures dans le sang total, quelle que soit la température des échantillons, et même en absence d’aprotinine (15). Malheureusement, comme pour tous les autres dosages neurohormonaux, le dosage reste cher, de l’ordre de 200-300 F l’unité, et les tubes ne sont “techniqués” que lorsqu’un nombre important d’examens (trousseaux de 50 tubes) est à réaliser. Il est donc peu probable que l’on puisse à l’avenir avoir, avec cette technique, des résultats dans la journée ou a fortiori immédiats. I S E 1 000 800 600 400 200 141 ± 31 38 ± 4 0 Pas d'IC n = 139 Dysfonction VG Insuffisance Sans insuffisance cardiaque cardiaque décompensée décompensée n = 97 n = 14 Diagnostic Figure 5. Valeur du BNP dans le diagnostic positif d’une IC aux urgences [d’après (9)]. 33 M I S E A U P O I N T 2. Ces mêmes auteurs ont montré que le taux de BNP avait une bonne valeur prédictive des données de fonction VG tirées de l’écho-doppler : une valeur de 75 pg/ml a une VPN de 89 % et une VPP de 98 % de dysfonction VG, systolique ou diastolique. Des taux > 80 pg/ml étaient observés chez 1 % seulement des 200 patients examinés (18). L’analyse de l’aire sous la courbe ROC donne une valeur de 0,96 comparée à l’échographie. 3. Chez 72 patients hospitalisés pour décompensation de leur insuffisance cardiaque, un dosage répété de BNP permet de noter que le taux moyen augmente durant l’hospitalisation chez les patients décédés ou réhospitalisés par la suite, alors qu’il baisse chez les autres. Le BNP à la sortie de l’hôpital se révèle un puissant critère pronostique (19). 4. Enfin, ils montrent qu’une baisse de 33 ± 5 pg/ml du BNP sur les 24 heures est corrélée avec une baisse de 0,74 ± 0,12 mmHg par heure (sur 24 heures) de la pression capillaire pulmonaire (PCP) chez des patients traités pour IC gauche et suivis sur le plan hémodynamique avec une sonde de Swan-Ganz (20). Néanmoins, il s’agit de données statistiques sur l’ensemble de la population, et l’on manque de données à l’échelon individuel. Il serait utile de connaître, si cela était possible, les valeurs de baisse de BNP, en valeur absolue ou relative, qu’il faut obtenir pour refléter une baisse de PCP de 20 % en valeur relative ou de 5 mmHg sur une heure, par exemple, afin d’envisager une extension du dosage rapide du BNP dans cette indication. D’autres travaux avec ce kit sont nécessaires afin de préciser ces données. Un travail récent présenté par les auteurs néo-zélandais montre que le dosage du BNP se révèle tout aussi fiable et reproductible, mais bien plus rapide par la méthode froide, que celui du NT-proBNP (r = 0,90) (21). D’autres études réalisées avec la technique radio-immunologique sur des populations différentes ou plus larges, non sélectionnées, montrent néanmoins des résultats moins favorables, avec des zones de chevauchement plus larges et une moins bonne valeur prédictive à l’échelon individuel (22). L’insuffisance respiratoire ou rénale et la cirrhose du foie augmentent le BNP (8). Les valeurs normales du BNP plasmatique augmentent également légèrement avec l’âge, peut-être du fait de l’altération des propriétés diastoliques du cœur et de la réduction néphronique avec le vieillissement. Il faut donc prendre en compte l’âge et la fonction rénale dans les valeurs de normalité. De ce fait, les valeurs seuil avec chacune des deux techniques ne sont pas définitivement arrêtées. Ce n’est que lorsque cellesci auront été clairement définies, comme cela a été fait avec la troponine, que le dosage du BNP pourra être utilisé en toute confiance. Notons néanmoins que les recommandations de la Société européenne de cardiologie en 2001 considèrent qu’un taux normal d’ANP ou de BNP rend très improbable un diagnostic d’IC, mais n’abordent pas encore la question de la VPP du dosage de ces peptides. COMPARAISON BNP/ÉCHOCARDIOGRAPHIE DOPPLER L’échocardiographie, surtout couplée au doppler, apporte des renseignements sur le diagnostic étiologique que n’apporte pas le BNP. 34 Le doppler permet d’apprécier la PCP et la PAP comme le voudrait le dosage du BNP. Néanmoins, les limites de l’écho-doppler sont également nombreuses : échogénicité, expérience de l’échographiste, fibrillation auriculaire, disponibilité imparfaite bien que meilleure qu’au Royaume-Uni, où le dosage du BNP tend à se développer plus vite du fait de la difficulté d’accès à l’échographie (23, 24), avec une valeur diagnostique variable selon les auteurs (22, 25) ; difficulté à répéter fréquemment l’examen... (tableau). Tableau. Comparaison des avantages et des limites respectifs de l’échocardiographie doppler et du BNP dans l’insuffisance cardiaque. Échocardiographie doppler BNP 600 F 170 F Accès ++ + (potentiel +++) Opérateur-dépendance ++ - Rapidité des résultats 30 mn 15 mn à 24 h Reproductibilité ++ +++ Répétabilité dans le temps + +++ Valeur pronostique +++ ++ Apport dans le suivi thérapeutique +++ ++ ? Coût approximatif Ainsi, le dosage du BNP ne peut, à notre sens, remplacer actuellement l’échocardiographie doppler dans le diagnostic de l’IC pour les raisons suivantes : ✔ Il reste relativement cher, certes moins qu’une échocardiographie doppler, mais bien plus qu’une créatininémie ou une glycémie. ✔ Avec la technique radio-immunologique, les résultats ne sont disponibles que dans un long délai, incompatible avec la nécessité d’un diagnostic rapide (ce n’est pas le cas avec le kit Triage®). ✔ Il ne sépare pas IC droite ou gauche, par dysfonction systolique ou diastolique. ✔ Les valeurs seuil sont encore imparfaitement définies. ✔ Surtout, il n’offre pas toute la richesse de renseignements donnés par l’échocardiographie doppler (étiologie, FEVG, fuite mitrale, géométrie ventriculaire, niveau de PAP...). Toutefois, si les résultats préliminaires se confirment avec les kits à réponse rapide, la situation pourrait changer pour les raisons suivantes : ✔ Le prix diminuerait avec la généralisation de la technique. ✔ Le dosage pourrait être généralisé au dépistage de l’IC chez tous les sujets âgés, ou plutôt – ce qui apparaît plus réaliste en termes économiques – à risque (HTA, coronarien, diabétique...) : il pourrait ainsi avantageusement remplacer les dosages de calcémie, uricémie, PSA... dans le bilan sanguin “standard”, censés dépister des pathologies bien moins fréquentes et moins graves que l’IC. La Lettre du Cardiologue - n° 350 - décembre 2001 M ✔ Le dosage serait disponible pour tous, cardiologues, généralistes, infirmières, en plus des biologistes, sans qu’une expertise échographique ou biochimique soit nécessaire. Il deviendrait vite indispensable dans les services d’urgence et les unités mobiles de réanimation, où il faciliterait l’orientation des patients. ✔ Le dosage pourrait très rapidement se révéler générateur d’économies s’il permettait d’éviter des échographies ou des investigations – a fortiori des hospitalisations – inutiles. ✔ Il pourrait permettre de guider le traitement : on peut imaginer ainsi de suivre l’efficacité du traitement d’un OAP ou d’une décompensation d’IC globale sur des dosages bi- ou triquotidiens du BNP (en plus de la réponse clinique). Le BNP pourrait encore limiter le recours à la sonde de Swan-Ganz. De même, comme le suggèrent des travaux préliminaires (figure 6), il pourrait permettre d’adapter le traitement au long cours de l’IC chronique, facilitant la titration des doses de diurétiques, actuellement faite sur la clinique et selon les recommandations des sociétés savantes. D’autres études sont nécessaires pour confirmer l’observation des auteurs écossais (26) ou néo-zélandais (27) d’après laquelle une titration du traitement selon les valeurs de BNP serait plus efficace sur les réhospitalisations, que selon la réponse clinique. I S E A U P O I N T CONCLUSION Les échographistes peuvent dormir tranquilles : l’échocardiographie doppler, notamment avec les progrès techniques continuels qui l’accompagnent, garde une place essentielle dans le diagnostic de l’IC et est toujours indispensable dans son bilan. Néanmoins, si les résultats actuels obtenus avec le BNP, notamment avec le dosage ultrarapide, se confirment, on peut prédire que le dosage du BNP aura probablement une place importante dans le bilan diagnostique, pronostique et thérapeutique d’une IC et qu’il deviendra un examen de routine répétable (28). D’ores et déjà, on peut considérer qu’un taux plasmatique normal de BNP exclut une IC cardiaque décompensée. Mais pour que le BNP devienne “la créatinine des cardiologues” ou rivalise en valeur diagnostique avec la troponine, il faudra des données plus consistantes que celles dont nous disposons actuellement. ■ Bibliographie 1. Lang C, Prasad N, Mc Alpine H. Increased plasma levels of brain natriuretic peptide in patients with isolated diastolic dysfunction. Am Heart J 1994 ; 127 : 1635-6. Pourcentage de patients sans événement 2. Ikeda T, Matsuda K, Itoh H et al. Plasma levels of brain and atrial natriuretic peptides elevate in proportion to left ventricular end-systolic wall stress in patients with aortic stenosis. Am Heart J 1997 ; 133 : 307-14. 100 3. Mair J, Friedl W, Thomas S, Puschendorf B. Natriuretic peptides in assessment of left-ventricular dysfunction. Scan J Clin Lab Invest 1999 ; 59 (suppl. 230) : 132-42. Événement cardiovasculaire 4. Jourdain P, Funck F, Fulla Y et al. Brain natriuretic peptide et insuffisance cardiaque. Arch Mal Cœur 2001 ; 94 : 124-9. 90 80 BNP 70 60 50 clinique p = 0,034 Nombre de patients à risque 33 36 Pourcentage de patients sans événement 100 31 33 29 29 28 25 26 21 24 17 22 15 Insuffisance cardiaque ou décès BNP 80 70 60 clinique p = 0,049 0 0 180 30 60 120 90 150 Temps après randomisation (semaines) Nombre de patients à risque BNP Clinique 33 36 31 34 29 31 28 27 26 23 25 21 24 17 Figure 6. Pronostic des patients dont le traitement est adapté selon les taux de BNP ou selon la réponse clinique [d’après (27)]. La Lettre du Cardiologue - n° 350 - décembre 2001 8. Logeart D, Gambert A, Beyne P et al. Brain natriuretic peptide (BNP) dans l’insuffisance cardiaque : relations avec le remplissage ventriculaire gauche et la tolérance à l’effort. Ann Cardiol Angeiol 1999 ; 48 : 523-58. 9. Dao Q, Krishnaswamy P, Kasanegra R et al. Utility of B-type natriuretic peptide in the diagnosis of congestive heart failure in an urgent-care setting. J Am Coll Cardiol 2001 ; 37 : 379-85. 90 50 6. 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Tous droits de reproduction, d'adaptation et de traduction par tous procédés réservés pour tous pays. © mai1983 - EDIMARK S.A. Imprimé en France - Differdange S.A. - 95110 Sannois Dépôt légal : à parution Un encart détachable “Uprima” est inséré entre les pages 10 et 11 de ce numéro. 36 La Lettre du Cardiologue - n° 350 - décembre 2001