34
2.
Ces mêmes auteurs ont montré que le taux de BNP avait une
bonne valeur prédictive des données de fonction VG tirées de
l’écho-doppler : une valeur de 75 pg/ml a une VPN de 89 % et
une VPP de 98 % de dysfonction VG, systolique ou diastolique.
Des taux > 80 pg/ml étaient observés chez 1 % seulement des
200 patients examinés (18). L’analyse de l’aire sous la courbe
ROC donne une valeur de 0,96 comparée à l’échographie.
3.
Chez 72 patients hospitalisés pour décompensation de leur
insuffisance cardiaque, un dosage répété de BNP permet de noter
que le taux moyen augmente durant l’hospitalisation chez les
patients décédés ou réhospitalisés par la suite, alors qu’il baisse
chez les autres. Le BNP à la sortie de l’hôpital se révèle un puis-
sant critère pronostique (19).
4.
Enfin, ils montrent qu’une baisse de 33 ± 5 pg/ml du BNP sur
les 24 heures est corrélée avec une baisse de 0,74 ± 0,12 mmHg
par heure (sur 24 heures) de la pression capillaire pulmonaire
(PCP) chez des patients traités pour IC gauche et suivis sur le
plan hémodynamique avec une sonde de Swan-Ganz (20). Néan-
moins, il s’agit de données statistiques sur l’ensemble de la popu-
lation, et l’on manque de données à l’échelon individuel. Il serait
utile de connaître, si cela était possible, les valeurs de baisse de
BNP, en valeur absolue ou relative, qu’il faut obtenir pour reflé-
ter une baisse de PCP de 20 % en valeur relative ou de 5 mmHg
sur une heure, par exemple, afin d’envisager une extension du
dosage rapide du BNP dans cette indication.
D’autres travaux avec ce kit sont nécessaires afin de préciser
ces données. Un travail récent présenté par les auteurs néo-zélan-
dais montre que le dosage du BNP se révèle tout aussi fiable et
reproductible, mais bien plus rapide par la méthode froide, que
celui du NT-proBNP (r = 0,90) (21).
D’autres études réalisées avec la technique radio-immunolo-
gique sur des populations différentes ou plus larges, non sélec-
tionnées, montrent néanmoins des résultats moins favorables, avec
des zones de chevauchement plus larges et une moins bonne
valeur prédictive à l’échelon individuel (22). L’insuffisance res-
piratoire ou rénale et la cirrhose du foie augmentent le BNP (8).
Les valeurs normales du BNP plasmatique augmentent également
légèrement avec l’âge, peut-être du fait de l’altération des pro-
priétés diastoliques du cœur et de la réduction néphronique avec
le vieillissement. Il faut donc prendre en compte l’âge et la fonc-
tion rénale dans les valeurs de normalité.
De ce fait, les valeurs seuil avec chacune des deux techniques
ne sont pas définitivement arrêtées. Ce n’est que lorsque celles-
ci auront été clairement définies, comme cela a été fait avec la tro-
ponine, que le dosage du BNP pourra être utilisé en toute confiance.
Notons néanmoins que les recommandations de la Société euro-
péenne de cardiologie en 2001 considèrent qu’un taux normal d’ANP
ou de BNP rend très improbable un diagnostic d’IC, mais n’abor-
dent pas encore la question de la VPP du dosage de ces peptides.
COMPARAISON BNP/ÉCHOCARDIOGRAPHIE
DOPPLER
L’échocardiographie, surtout couplée au doppler, apporte des ren-
seignements sur le diagnostic étiologique que n’apporte pas le BNP.
Le doppler permet d’apprécier la PCP et la PAP comme le vou-
drait le dosage du BNP. Néanmoins, les limites de l’écho-doppler
sont également nombreuses : échogénicité, expérience de l’écho-
graphiste, fibrillation auriculaire, disponibilité imparfaite bien que
meilleure qu’au Royaume-Uni, où le dosage du BNP tend à se
développer plus vite du fait de la difficulté d’accès à l’échographie
(23, 24), avec une valeur diagnostique variable selon les auteurs
(22, 25) ; difficulté à répéter fréquemment l’examen... (tableau).
Ainsi, le dosage du BNP ne peut, à notre sens, remplacer
actuellement l’échocardiographie doppler dans le diagnostic
de l’IC pour les raisons suivantes :
✔Il reste relativement cher, certes moins qu’une échocardio-
graphie doppler, mais bien plus qu’une créatininémie ou une
glycémie.
✔Avec la technique radio-immunologique, les résultats ne sont
disponibles que dans un long délai, incompatible avec la néces-
sité d’un diagnostic rapide (ce n’est pas le cas avec le kit Triage®).
✔Il ne sépare pas IC droite ou gauche, par dysfonction systo-
lique ou diastolique.
✔Les valeurs seuil sont encore imparfaitement définies.
✔Surtout, il n’offre pas toute la richesse de renseignements don-
nés par l’échocardiographie doppler (étiologie, FEVG, fuite
mitrale, géométrie ventriculaire, niveau de PAP...).
Toutefois, si les résultats préliminaires se confirment avec les kits
à réponse rapide, la situation pourrait changer pour les rai-
sons suivantes :
✔Le prix diminuerait avec la généralisation de la technique.
✔Le dosage pourrait être généralisé au dépistage de l’IC chez
tous les sujets âgés, ou plutôt – ce qui apparaît plus réaliste en
termes économiques – à risque (HTA, coronarien, diabétique...) :
il pourrait ainsi avantageusement remplacer les dosages de cal-
cémie, uricémie, PSA... dans le bilan sanguin “standard”, censés
dépister des pathologies bien moins fréquentes et moins graves
que l’IC.
MISE AU POINT
Tableau. Comparaison des avantages et des limites respectifs de
l’échocardiographie doppler et du BNP dans l’insuffisance cardiaque.
Échocardiographie BNP
doppler
Coût approximatif 600 F 170 F
Accès ++ + (potentiel +++)
Opérateur-dépendance ++ -
Rapidité des résultats 30 mn 15 mn à 24 h
Reproductibilité ++ +++
Répétabilité dans le temps + +++
Valeur pronostique +++ ++
Apport dans le suivi +++ ++ ?
thérapeutique
La Lettre du Cardiologue - n° 350 - décembre 2001