324 | La Lettre du Cancérologue • Vol. XVII - n° 7 - septembre 2008
Résumé
les déplacements à l’hôpital et évitant la lourdeur
des perfusions.
L’objectif de cette mise au point est de présenter les
données disponibles concernant la capécitabine en
monothérapie dans le traitement de première ligne
des cancers du sein métastatiques.
Deux études de phase II
Dès 1996 a été initiée une étude prospective interna-
tionale de phase II randomisée visant à évaluer le taux
de réponse à la capécitabine en première ligne métas-
tatique chez des patientes âgées d’au moins 55 ans.
Parmi les 61 patientes évaluables, 62 % avaient au
moins 3 sites métastatiques, 34 % avaient des métas-
tases hépatiques, et 34 %, également, des métas-
tases pulmonaires. L’âge médian était de 69 ans (54
à 83). Avec un schéma standard de 1 255 mg/m² x 2/j
14 jours sur 21, une RO a été observée chez 30 % des
patientes, et 51 % ont eu une stabilisation tumorale.
Le délai médian avant progression a été de 4,1 mois, et
la durée de vie médiane de 19,6 mois. Pour référence,
33 patientes avaient été simultanément randomisées
pour un traitement par cyclophosphamide-métho-
trexate-5-fluoro-uracile (5-FU) [CMF] i.v. toutes les
3 semaines. Les taux de réponse et de stabilisation
dans le bras CMF ont été de 16 % et 44 %, le délai
médian de traitement avant progression de 3,0 mois
et la survie médiane de 17,2 mois (11).
La deuxième étude prospective, commencée en
1999 par l’Institut national du cancer de Milan,
s’intéressa plus spécifiquement aux patientes âgées
d’au moins 65 ans, avec pour objectif principal la
tolérance, et pour objectif secondaire l’efficacité
(12). Les patientes pouvaient avoir reçu en phase
métastatique, outre plusieurs hormonothérapies,
une ligne de chimiothérapie. En définitive, 93 %
des patientes reçurent la capécitabine en première
ligne de chimiothérapie. L’étude commença avec
le schéma standard de 1 250 mg/m² x 2/j 14 jours
sur 21. Parmi les 30 premières patientes traitées,
2 décès toxiques secondaires à une diarrhée de
grade 4 survinrent, et une réduction de posologie
fut nécessaire chez 30 % des patientes : le protocole
fut amendé, et les 43 patientes suivantes furent
traitées à la dose de 1 000 mg/m² x 2/j. Seuls 5 %
des patientes eurent besoin d’une nouvelle réduction
de posologie, la principale toxicité étant la fatigue.
Un taux de réponse de 35 % fut observé, identique
dans les deux cohortes de patientes. Le taux de
bénéfice clinique (RO + stabilisation ≥ 24 semaines)
fut de 60 % et 70 %, le délai avant progression
de 3,9 et 4,1 mois, la survie globale (SG) de 10 et
16 mois. Cette étude confirma donc, sur un groupe de
patientes fragiles, les résultats d’efficacité de l’étude
de J.A. O’Shaugh nessy (11), suggérant par ailleurs
l’intérêt d’une réduction de dose chez les patientes
âgées de plus de 70 ans, la très grande majorité des
toxicités de grade 3-4 survenant après cet âge.
Résultats des études
de phase III
Plus récemment, deux études randomisées de
phase III ont démontré qu’une monochimiothérapie
par capécitabine pouvait avoir sa place en première
ligne métastatique dans le cancer du sein.
Présentée à l’ASCO en 2007 par M.R. Stockler (14),
l’étude randomisée réalisée par l’Australian New
Zealand Breast Cancer Trials Group (ANZ-BCTG)
avait pour objectif principal de comparer la survie
sans progression (SSP) et le retentissement sur la
qualité de vie d’un traitement par capécitabine admi-
nistrée soit en continu (1 300 mg/m2 J1-J21 toutes
les 3 semaines), soit en intermittent (2 000 mg/m
2
J1-J14 toutes les 3 semaines) à ceux d’une chimio-
thérapie de type CMF classique (cyclophosphamide
J1-J14, méthotrexate i.v. et 5-FU J1, J8 ; cycles de
4 semaines). La réponse au traitement était évaluée
d’après les critères RECIST, et la qualité de vie à l’aide
d’échelles spécifiques.
L’analyse des données prévoyait, dans un premier
temps, la comparaison des 2 bras capécitabine entre
eux. Dans un second temps, si les 2 bras capécitabine
n’apparaissaient pas significativement différents,
l’ensemble des patientes traitées par capécitabine
étaient comparées au bras CMF. Une analyse séparée
des 3 bras était programmée dans l’autre cas. Une
stratification était réalisée selon le centre, l’indice de
performance, l’existence de localisations secondaires
hépatiques ou cérébrales et l’utilisation ou non de
biphosphonates.
Highlights
Clinical course of metastatic
breast cancer is heterogeneous,
and the large choice of avail-
able chemotherapy for first-line
treatment of these patients
allows envisaging personalized
systemic treatments. Results
of phase II and, more recently,
phase III studies in patients
with metastatic breast cancer
have shown that first-line
monotherapy capecitabine, an
oral fluoropyrimidine treatment,
is highly active in selected
patient populations (objective
response, time to progression
and overall survival) with a
good safety profile, minimal
toxicity and no alopecia.
Based on these results, oral
monotherapy capecitabine
could be a reasonable attrac-
tive therapeutic choice for
first-line treatment of patients
with a slowly progressing non-
life-threatening breast cancer
and for older patients who are
not eligible for a polychemo-
therapy.
Keywords
Capecitabine
First-line treatment
Metastatic breast cancer
Quality of life
Compte tenu de l’hétérogénéité des cancers du sein métastatiques et des nombreuses molécules de chimiothérapie
disponibles en traitement de première ligne, des traitements personnalisés peuvent être maintenant proposés aux
patientes. Les résultats des études de phase II et, plus récemment, des études de phase III montrent que la capécitabine,
fluoropyrimidine par voie orale, administrée en monothérapie en traitement de première ligne à des patientes sélec-
tionnées, est efficace (réponse objective, temps jusqu’à progression et survie globale) et présente un profil de tolérance
favorable, avec une toxicité minime et une absence d’alopécie. Ces données permettent de considérer la capécitabine
en monothérapie comme une possibilité thérapeutique intéressante pour le traitement de première ligne de patientes
atteintes d’un cancer du sein métastatique, en particulier celles dont la maladie est peu agressive et ne menace pas le
pronostic vital et les patientes âgées trop fragiles pour recevoir une polychimiothérapie.
Mots-clés
Capécitabine
Traitement de première
ligne
Cancer du sein
métastatique
Qualité de vie