Gérer l’accès direct au dossier médical : le laboratoire de la confiance* V

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Gérer l’accès direct
au dossier médical :
le laboratoire de la confiance*
“Toute personne a accès à l’ensemble des informations concernant sa
santé détenues par les professionnels de santé”. L’accès direct au dossier médical est, à n’en pas douter, un des points phares de la loi nouvelle sur les droits des malades. Cette réforme était demandée avec
insistance par les patients, ou ceux qui s’expriment en leur nom. Elle l’était aussi
par certains acteurs de santé, médecins ou administrateurs, sur le thème : nous n’avons rien
à cacher, jouons la transparence.
S
ans doute le temps des mystères ou de l’ignorance
entretenue doit-il prendre fin. Mais, pour l’essentiel, la page était – heureusement – tournée. La loi
ancienne, à savoir l’accès au dossier médical par l’intermédiaire
d’un médecin librement choisi, avait fait la preuve de sa pertinence. Le patient pouvait disposer de toute l’information, mais
celle-ci n’était pas donnée à l’état brut. Elle était nécessairement
accompagnée du commentaire médical, de l’explication rendant
le fait compréhensible… et ainsi l’information utile. Le système
fonctionnait très bien pour peu qu’il fût mis en œuvre avec un
minimum de bonne volonté. Bref, était-il vraiment nécessaire de
changer la loi ? On peut en douter, et ce d’autant plus qu’en réalité ce qui semblait en cause était moins l’accès au dossier médical que l’existence, au jour le jour, d’une relation confiante et respectueuse, de nature à gérer l’anxiété, si ce n’est l’angoisse devant
la maladie. Il s’agissait moins de pouvoir lire des mots ou des
chiffres que d’entendre une parole.
Cela étant, la loi nouvelle est là, et la question est désormais
de l’appliquer avec intelligence. Le texte est explicite, mais laisse
une large place à l’interprétation. Ainsi, la loi sera d’abord
ce que l’on en fera. Quelques points de repère peuvent être
proposés.
✔ Si le patient peut accéder directement à son dossier, le système
ancien – soit l’accès par l’intermédiaire d’un médecin – est maintenu. Les médecins sont, auprès des patients, les premiers dispensateurs… de l’information juridique sur leurs droits et ils doivent veiller à en défendre une vue équilibrée. Conforter la place
centrale du médecin dans la relation de soin ne constitue pas exactement une atteinte aux droits de l’homme.
* © La Lettre d’Oto-rhino-laryngologie et de chirurgie cervico-faciale, n° 272, avril 2002.
La Lettre du Cardiologue - n° 357 - septembre 2002
✔ La loi retient pour exception les soins en santé mentale, lors-
qu’il s’avérerait qu’une consultation du dossier sans accompagnement ferait courir un risque au patient. Solution pleine de bon
sens, mais dont il sera difficile de définir le champ d’application.
Quid face à un état dépressif dû à la confrontation avec une maladie somatique grave ?
✔ La déontologie fait obligation au médecin de différer l’annonce
d’un diagnostic ou d’un pronostic grave si cette annonce est de
nature à nuire aux intérêts du patient. Cette règle, dont le bienfondé a récemment été rappelé par la Cour de cassation, peut-elle
être remise en cause par l’accès direct au dossier ? Rien n’est
acquis. Une lecture juridique stricte donne primauté à la loi sur
le Code de déontologie, mais un tribunal pourrait-il sanctionner
le souci de protéger l’intérêt du patient ? Et que faire face à un
diagnostic incertain ?
Ce que chacun redoute, c’est que, pour éviter ce type de difficultés, on en vienne à la pratique de dossiers réduits au strict minimum : plutôt ne pas écrire que prendre le risque d’être démenti
ou mis en contradiction ; plutôt ne rien écrire que faire état d’éléments incertains. Ce serait une dérive et une régression. Alors,
tentons quelques idées.
✔ La loi définit un cap, mais laisse une large marge dans la mise
en œuvre. Les professionnels de santé doivent – et très rapidement
– proposer par des travaux, des publications, des conférences de
consensus un contenu pour les pratiques nouvelles. Ce travail de
réflexion et d’élaboration est le meilleur moyen de se prémunir
de réglementations tatillonnes ou de jurisprudences imprévisibles.
C’est le moyen de défendre une déontologie praticienne.
✔ La démarche doit reposer sur un principe clair, à savoir que la
confiance doit l’emporter sur la transparence. Or, à trop mettre
l’accent sur la transparence, on risque d’induire l’idée d’une
méfiance.
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✔ La question devient alors de définir le contenu du dossier direc-
tement accessible. Passé un certain seuil, l’information est suffisamment établie sur le plan scientifique pour être affirmée : elle
doit figurer dans le dossier. Mais avant d’atteindre ce seuil, il ne
s’agit que d’une hypothèse, d’une piste de travail. Il est nécessaire que le médecin, dans le cadre de sa démarche et de celle de
l’équipe, puisse garder la trace de ces pistes, sans que ces éléments, non vérifiés, soient directement accessibles au patient, car
ils seraient déstabilisateurs. La loi est respectée : le patient a accès
aux informations concernant sa santé et non pas aux interrogations du médecin.
L’art médical est fait de technique et d’humanité. Il comporte sa
part d’interrogation, et le médecin doit défendre sa gestion du
doute. C’est bien parce qu’il est capable d’analyse qu’il est digne
de confiance. Le médecin a besoin d’un laboratoire, d’un lieu
hors d’accès où il puisse, dans la sérénité, nourrir sa réflexion et
préparer sa décision. Défendre l’intérêt du malade, mais aussi
respecter sa personnalité, c’est lui dire qu’il n’a pas accès à ce
laboratoire. La porte peut d’autant mieux rester fermée que les
informations scientifiquement établies lui seront données rapidement et en toute franchise, et moins en réclamant son dossier
par voie d’huissier que par la voix confiante de ce confident qu’est
le médecin, les yeux dans les yeux.
Quelle place, alors, pour la loi nouvelle ? Pour le patient, une
garantie : en définitive, il pourra tout savoir. Pour le médecin, une
occasion de rappeler l’humilité qu’impose la maladie ; que s’il
doit combattre les mystères, il peut avoir à défendre le secret.
Le débat s’ouvre. Il revient aux médecins de s’en saisir pour
baliser ce domaine qu’ils connaissent si bien.
Gilles Devers,
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