L Le couple diabétologue- cardiologue : pourquoi faut-il approfondir

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Correspondances en Risque CardioVasculaire - Vol. II - n° 4 - octobre-novembre-décembre 2004
Le couple diabétologue-
cardiologue :
pourquoi faut-il approfondir
nos relations ?
B. Charbonnel*, M. Komajda**
La coopération entre diabétologues et cardiologues peut être analysée dans un environ-
nement scientifique en profonde évolution :
Toutes les projections, tant nationales qu’internationales, sont unanimes pour prédire une
explosion de la prévalence du diabète, du syndrome métabolique et de l’obésité ; et l’on a
parlé d’une pandémie pour le XXIesiècle. Ce redoutable fléau de santé publique, qui
n’épargne aucun continent, est lié en grande partie aux mauvaises habitudes alimentaires
de la population, et les groupes socio-économiques défavorisés semblent particulièrement
exposés à cette épidémie.
Un autre facteur très important est la prise en compte progressive du fait que le diabète
n’est pas un facteur de risque comme les autres, mais que sa gravité en termes de risque car-
diovasculaire l’amène à être considéré dans les recommandations internationales comme
l’équivalent d’une prévention secondaire.
Cette demande accrue – tant quantitative que qualitative – de soins pour une part impor-
tante de la population s’est-elle accompagnée des mutations nécessaires au sein de nos deux
disciplines ?
L’analyse montre que beaucoup reste à faire. La prise de conscience du fait que le diabétique
nécessite une prise en charge agressive en termes d’investigations cardiovasculaires, pour
détecter notamment l’ischémie myocardique, est récente. La communauté cardiologique est
longtemps restée sur l’impression, qui prévalait il y a une vingtaine d’années, que le diabé-
tique avait a priori des lésions coronariennes multiples sévères et peu accessibles à une
revascularisation, ce qui a longtemps conduit à une prise en charge moins optimale que pour
le patient non diabétique. Cette situation est d’autant plus fâcheuse que près d’un patient
sur quatre hospitalisé en unité de soins intensifs cardiologiques est diabétique, et que l’étude
DIGAMI a clairement montré qu’une prise en charge optimale du diabète lors d’un syndrome
coronaire aigu améliore la survie des patients.
De même, dans la prise en charge des facteurs de risque cardiovasculaire, le cardiologue
manie moins aisément les antidiabétiques oraux ou leurs associations, notamment dans le
contexte des nouvelles classes récemment apparues telles que les statines ou les antihyper-
tenseurs. À l’inverse, le diabétologue doit penser à contrôler aussi strictement une hyper-
cholestérolémie ou la pression artérielle que la glycémie de son patient diabétique, et les
grandes études récentes telles que UKPDS, HPS et CARDS ont montré combien cette prise en
charge globale du diabétique est importante.
Il est donc très important que diabétologues et cardiologues s’entraident, ce qui passe par un pro-
cessus d’éducation visant à améliorer la connaissance par les cardiologues de la prise en charge
du diabète, et celle du dépistage des complications cardiovasculaires par les diabétologues.
éditorial
* Service de diabétologie, CHU de Nantes.
** Département de cardiologie,
CHU de la Pitié-Salpêtrière, Paris.
C’est précisément ce à quoi l’Alfediam et la Société française de cardiologie se sont attelées,
avec la création d’un groupe de travail paritaire. L’objectif initial était de rédiger des recom-
mandations communes concernant d’une part les informations élémentaires que tout car-
diologue devrait connaître pour prendre en charge un diabétique et savoir en particulier à
quel moment il doit passer la main à son collègue diabétologue, et d’autre part une straté-
gie de détection de l’ischémie myocardique silencieuse, si fréquente chez le diabétique.
Ces recommandations ont été finalisées et publiées au sein de nos revues respectives dans le
courant de l’année 2004. Parallèlement a été décidée l’organisation de réunions communes
dans nos grandes manifestations nationales, afin d’approfondir des points particuliers
concernant la prise en charge des complications cardiovasculaires du diabète. Ainsi ont déjà
été abordés le problème de l’insuffisance cardiaque du diabétique, des glitazones et du risque
cardiovasculaire, et la détection de l’ischémie myocardique. Nous pensons que l’organisation
de telles réunions communes est particulièrement fructueuse, amenant à un échange sur les
points de vue respectifs et permettant de définir concrètement des référentiels.
Nous sommes pleinement conscients qu’en définitive le diabétologue et le cardiologue trai-
tent les mêmes patients, et nous espérons que cette initiative de nos deux sociétés savantes
permettra à terme une meilleure connaissance du diabète et de ses complications cardio-
vasculaires ainsi qu’une amélioration de la prise en charge de ce fléau du XXIesiècle.
éditorial
Note. Le Pr B. Charbonnel
est l’ancien président de l’ALFEDIAM
et le Pr M. Komajda, l’ancien
président de la Société française
de cardiologie.
C’est sous leur mandat
que la décision de créer
des recommandations communes
a été prise.
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