La Lettre de l’Infectiologue - Tome XXII - n° 4 - juillet-août 2007
Réunion
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Candidémies en réanimation : mortalité élevée
mais absence d’émergence des espèces non albicans
Les soins intensifs sont souvent associés à la détection de
candidémies, aussi J. Garbino et al. (Genève, Suisse, abstract
18) ont-ils étudié, de janvier 1989 à décembre 2006 (18 ans), la
mortalité et la répartition des espèces de Candida à l’origine
des candidémies diagnostiquées en réanimation médicale et
chirurgicale. Pour les 157 malades analysés, la mortalité dans
les 30 jours était de 56 %. En ce qui concerne la nature des diffé-
rentes espèces identifiées, il n’a pas été observé de modification
de répartition des espèces tout au long de la période concernée.
C. albicans constituait 72 % de l’ensemble des isolats et, parmi
les 28 % d’espèces non albicans, C. glabrata prédominait (36 %),
suivi de C. parapsilosis (18 %) et de C. tropicalis (14 %). Il est
à noter que 94 % des souches de C. albicans étaient sensibles
au fluconazole.
Traitement d’une candidémie : la mortalité due
à C. glabrata est supérieure à celle observée
pour C. albicans
M. Klevay et al. (Iowa, États-Unis, abstract 30) ont comparé,
par une étude rétrospective, les candidémies dues à C. albicans
(n = 55) et C. glabrata (n = 55) survenues sur une période de
8 ans (1997-2004), leur objectif étant de comparer la morta-
lité due aux espèces C. albicans et C. glabrata. La mortalité
globale, calculée à J30 après la détection de la candidémie, était
de 29 % pour C. albicans et de 40 % pour C. glabrata. La raison
de cette différence n’est pas en rapport avec une inadaptation
du traitement antifongique puisque les traitements prescrits
pour C. albicans et C. glabrata étaient adaptés (posologie,
durée d’administration) à J7 respectivement pour 71 % et 73 %
des cas et à J14 pour 53 % et 51 % des cas (pas de différence
statistique).
Émergence des candidémies à C. parapsilosis :
un lien avec l’utilisation
des nouveaux antifongiques ?
La caspofungine et le voriconazole, de plus en plus employés
pour traiter les candidémies, pourraient modifier la réparti-
tion des espèces de Candida à l’origine des candidémies. C’est
pour tester cette hypothèse que G. Forrest et al. (Baltimore,
États-Unis, abstract 62) ont analysé sur une période de 5 ans
(2002 à 2006) la répartition des espèces identifiées à partir de
440 candidémies. En 2006, sur les 121 candidémies analysées,
la répartition entre les principales espèces identifiées était la
suivante : C albicans (50,4 %), C. glabrata (23,1 %), C. parap-
silosis (19,8 %), C. tropicalis (4,1 %) et C. krusei (2,6 %). Sur
la période considérée, il n’a pas été constaté de différence de
répartition pour C. albicans, mais une diminution nette de
C. tropicalis (moins 98 %) et une augmentation de C. parap-
silosis (plus 67 %). L’augmentation de C. parapsilosis apparaît
significativement liée à l’utilisation de la caspofungine et du
voriconazole (R = 0,9 ; p < 0,05), mais ce lien statistique devra
être confirmé par d’autres études et des hypothèses de causalité
formulées.
C. parapsilosis est plus souvent à l’origine
de candidémies ayant pour point de départ le
cathéter central que les autres espèces de Candida
L’intérêt de l’ablation du cathéter en cas de candidémie reste
débattu en raison de résultats contradictoires observés sur
la survie des patients. M. Abidi et al. (New York, États-Unis,
abstract 2) ont étudié 50 candidémies survenues entre 1998 et
2006 et comparé la différence du délai de détection des candi-
démies issues d’hémocultures prélevées sur sang périphérique
par rapport à celles prélevées simultanément sur cathéter. Par
cette analyse, ils ont pu démontrer que, pour 24 candidémies, la
source était le cathéter et, en analysant les espèces concernées,
ils ont constaté que l’espèce C. parapsilosis était nettement plus
souvent identifiée (7/9) que les autres espèces (4/15 ; p < 0,05).
En cas de candidémie, l’isolement de l’espèce C. parapsilosis
devrait donc inciter à une ablation du cathéter.
DIAGNOSTIC
Nouvelle cible génomique pour la détection
de Candida spp
En cas de candidose disséminée, la sensibilité diagnostique des
hémocultures, positives seulement dans 40 à 60 % des cas, reste
insuffisante. La mise au point de techniques de détection du
génome de Candida par PCR est donc en plein essor. S. Arancia
et al. (Rome, Italie, abstract 4) ont ainsi évalué la valeur de la
détection, par PCR en temps réel, d’un gène de Candida albi-
cans codant pour une mannoprotéine de 65 kDA. Cette cible
permet d’amplifier le génome des principales espèces de Candida
(C. albicans, C. parapsilosis, C. tropicalis, C. glabrata, C. krusei)
à la fois dans le sang, le sérum et les urines avec une sensibilité
variant d’une cellule (urine) à 10 cellules/ml (sang). Pour juger
des performances de cette nouvelle technique diagnostique, fort
prometteuse, il reste encore à les comparer celles des techniques
diagnostiques conventionnelles.
TRAITEMENT
Prophylaxie de l’aspergillose pulmonaire
par aérosol d’amphotéricine B liposomale :
données pharmacologiques
B. Capitano et al. (Pittsburgh, États-Unis, abstract 8), constatant
que l’aspergillose pulmonaire atteint plus de 17 % des transplantés
pulmonaires avec une mortalité de plus de 80 %, ont voulu analyser
les données pharmacocinétiques de la nébulisation d’un aérosol
d’amphotéricine B liposomale chez des patients transplantés pulmo-
naires (n = 18). Après inhalation de l’aérosol à la posologie de 1 mg/
kg/j pendant 4 jours, il n’a été noté aucun signe d’intolérance. De
plus, les concentrations d’amphotéricine B mesurées dans le LBA
jusqu’à 7 jours après administration étaient supérieures aux CMI
définies pour inhiber 90 % des Aspergillus spp. Les résultats de
cette étude permettent donc d’envisager ce type de prophylaxie
chez les patients à risque d’aspergillose pulmonaire.