Métabolismes Hormones Diabètes et Nutrition (IX), n° 4, juillet/août 2005
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Première partie : thyroïde – parathyroïde
communes, sachant qu’elles sont
dominées par l’hyperparathyroïdie
primaire et les hypercalcémies néo-
plasiques, deux étiologies qui ras-
semblent 90 % des cas.
Bien sûr, le diagnostic étiologique
est évident lorsque le malade est
déjà connu pour être porteur d’une
hyperparathyroïdie primaire ou
d’une néoplasie.
Dans les autres situations, afin
d’orienter le diagnostic étiologique,
on s’attachera à recueillir :
■Des informations cliniques:
– prise de médicaments (contenant
de la vitamine D ++),
– absorption massive de calcium
(buveurs de lait),
– antécédent de néoplasie,
– découverte d’une néoplasie lors
de l’examen général (sein) ;
■Des informations biologiques
sanguines :
– calcémie, phosphorémie, phos-
phatases alcalines,
– réserve alcaline, chlore,
– créatinine,
– VS, NFS plaquettes,
– transaminases, GT,
– électrophorèse des protides,
– TSH, PTH,
– 25 OH D3, 1-25 (OH)2D3,
– PTHrp (parathormone related
protein);
■Des informations radiologiques:
radiographie de thorax.
À partir de ces éléments simples, le
diagnostic étiologique peut être
porté dans la plupart des cas :
■Hyperparathyroïdie primaire:
classiquement, l’hypercalcémie est
associée à une hypophosphorémie,
une hypercalciurie, une acidose
hyperchlorémique. L’élément clé
est le dosage de la parathormone.
■Hypercalcémies néoplasiques :
l’hypercalcémie peut aussi s’ac-
compagner d’une hypophosphoré-
mie, lorsqu’il y a sécrétion par la
tumeur d’un facteur mimant l’action
de la PTH, (la PTH related protein
ou PTHrp), alors que le taux plas-
matique de PTH, obéissant aux lois
du rétrocontrôle physiologique, est
effondré. En complément, on sera
alerté par une accélération de la VS.
Un myélome sera fortement sus-
pecté devant la présence d’un pic à
l’électrophorèse des protides, ou à
l’inverse par une hypogammaglobu-
linémie.
■Granulomatoses : la sarcoïdose
s’accompagne rarement d’une hyper-
calcémie (plus souvent d’une hyper-
calciurie), liée à la production par le
granulome de 1-25 OH vitamine D.
■Iatrogènes : elles sont essentiel-
lement liées à l’absorption exces-
sive de calcium (buveurs de lait),
ou, de façon souvent beaucoup plus
sournoise, par l’ingestion de médi-
caments contenant de la vitamine D
et dont la dénomination commer-
ciale n’est pas évocatrice de son
contenu. Plus rarement, l’hypercal-
cémie peut être due à l’absorption
de diurétiques thiazidiques, de vita-
mine A, ou de lithium.
■Immobilisation : elle doit être
totale pour être responsable d’une
hypercalcémie qui affecte plus volon-
tiers le sujet jeune, dont le remode-
lage osseux est actif. La simple remise
en charge, lorsqu’elle est possible,
corrige cette hypercalcémie.
■Hyperthyroïdie : le dosage de la
TSH doit être facile dans le bilan
étiologique, car 15 à 20 % des hyper-
thyroïdies peuvent s’accompagner
d’une hypercalcémie, il est vrai le
plus souvent modérée.
Conduite à tenir
Dans la plupart des cas, l’hypercal-
cémie aiguë est sévère (lire Défini-
tion).
La prise en charge initiale néces-
site, quelle que soit l’étiologie sus-
pectée :
•Une réhydratation par voie intra-
veineuse, la déshydratation, avec ou
sans insuffisance rénale fonction-
nelle, étant constante. Selon l’âge et
l’état cardiovasculaire du malade,
on utilisera du glucosé à 5 % conte-
nant les électrolytes adaptés, ou du
soluté salé à 9 ‰. Cette réhydrata-
tion va permettre de diminuer la cal-
cémie dès les premières heures de
sa mise en place. La pratique d’une
“diurèse forcée” ne s’applique
qu’aux hypercalcémies très sévères
justifiant une prise en charge en
réanimation.
•Un traitement par calcitonine peut
être ajouté lorsque l’hypercalcémie
est mal supportée, ou lorsque la cal-
cémie est supérieure à 3,5 mmol/l.
Par son effet rapide sur l’élimination
rénale du calcium, la calcitonine repré-
sente un traitement utile pour sortir
rapidement de la “zone dangereuse”,
et est sans contre-indication en cas
d’insuffisance rénale. On utilise plutôt
la calcitonine de saumon, la plus puis-
sante, à la dose initiale de 4 UI/kg/j
et jusqu’à 10 UI/kg/j, en perfusion,
jusqu’à normalisation de la calcémie.
Cependant, un épuisement de l’effet
de la calcitonine s’observe souvent
après quelques jours de traitement.
Lorsque l’origine néoplasique est for-
tement suspectée, l’administration
d’un bisphosphonate intraveineux est
utile pour normaliser la calcémie avec
un effet prolongé qui va permettre
de mener à bien la recherche précise
de la néoplasie. En raison du risque
de précipitation tubulaire des bis-
phosphonates susceptible d’être à
l’origine d’une insuffisance rénale
aiguë, il est recommandé de précéder
l’administration par la réhydratation
pendant au moins 12 à 24 heures, et de
passer le produit lentement si persiste
une insuffisance rénale modérée; leur
utilisation n’est pas recommandée
en cas d’insuffisance rénale sévère.
On peut utiliser :
•le pamidronate (Arédia®), à la
dose de 60 à 90 mg selon la sévérité
de l’hypercalcémie, en perfusion sur
4heures ;
•l’ibandronate (Bondronat®), à la
dose de 2 à 4 mg selon la sévérité de
l’hypercalcémie, en perfusion sur
2heures ;
•le zolédronate (Zométa®), à la
dose de 4 mg en perfusion courte
sur 15 minutes, est aujourd’hui le
plus utilisé en raison de son effica-
cité (supérieure au pamidronate) et
de sa facilité d’administration.