L
a prise en charge de l’asthme
est nettement insuffisante en
France, puisque, depuis plu-
sieurs années, la mortalité stagne et
que 50 % des patients arrivant aux
urgences doivent être hospitalisés.
Prévenir la crise
Chez l’enfant, 75 % des crises
d’asthme sont dues, ou du moins
font suite, à une infection virale. Le
pourcentage est un peu plus faible,
bien que non négligeable, chez
l’adulte (50 à 60 %).
En revanche, les bactéries ne sont
que peu impliquées dans le déclen-
chement des symptômes, d’où l’ab-
sence d’intérêt de la prescription
d’antibiotiques de façon préventive
ou curative pour une crise d’asthme.
Par contre, le tabagisme, qu’il soit
passif chez l’enfant ou actif chez
l’adulte, porte une lourde responsa-
bilité, bien plus importante que celle
des polluants atmosphériques, sou-
vent cités. Les polluants gazeux,
comme l’oxyde d’azote, ou solides,
comme les particules de combus-
tion des dérivés pétroliers, ou encore
les poussières, sont cependant éga-
lement responsables du déclenche-
ment des crises.
Polluants externes mais aussi et sur-
tout polluants internes sont les aller-
gènes le plus fréquemment retrou-
vés à l’intérieur des maisons : les
phanères d’animaux domestiques,
les blattes et surtout les acariens,
composants essentiels des pous-
sières de maison, se logeant dans les
literies, les tissus, les moquettes et
tapis en tout genre. D’où la nécessité
préventive de bien ventiler les pièces
destinées au repos, de ne pas trop
les chauffer, de supprimer les tissus
anciens et les moquettes usagées.
Les pollutions domestiques regrou-
pent aussi les produits ménagers de
toutes sortes (aérosols aidant à élimi-
ner la poussière, à favoriser le repas-
sage...).
Les infections virales étant des fac-
teurs de risque du déclenchement de
crises d’asthme, il peut être utile, pour
les petits, de les retirer des collectivi-
tés (crèches) pour préférer un mode
de garde plus individuel, et donc à
moindre risque de réinfestation. Si
l’activité physique doit être encoura-
gée (adaptée en cas d’asthme à l’ef-
fort), elle doit être déconseillée en
cas de forte pollution atmosphérique
avec concentration importante en
ozone. Cela est assez souvent le cas
dans les métropoles l’été.
L’activité physique permet également
de lutter contre une obésité infantile
qui devient en effet un autre facteur
de risque de déclenchement de crise,
car le surpoids entraîne des difficultés
respiratoires supplémentaires.
Chez l’adulte
Chez l’adulte, la situation est légè-
rement différente : un tiers des
asthmes ne sont pas d’origine aller-
gique. En ce cas, fréquemment,
l’exposition professionnelle aux
matières organiques est en cause.
Les premières manifestations de
l’atteinte sont généralement ORL,
sous forme de rhinite. À ce stade,
une thérapie est possible, liée à
l’éviction de l’allergène. Une fois
déclenché, l’asthme, lui, ne pourra
être guéri, même après élimination
de l’allergène.
Sachant que plus le traitement est
précoce, moins le risque est grand
de voir apparaître des complica-
tions pulmonaires non alors tou-
jours réversibles.
Chez la femme enceinte
Bien contrôlée, bien équilibrée, en
un mot correctement suivie, la
maladie asthmatique ne présente
de risque particulier de complica-
tions ni pour l’enfant, ni pour la
mère. Selon le Dr Pascal Demoly
(Montpellier) : «Pour une femme
asthmatique, une grossesse n’est
pas une contre-indication, les com-
plications tant maternelles que
fœtales étant rares dans les
cohortes récentes, à condition d’un
suivi et d’un bon contrôle de la
maladie ». Le suivi médical est en
effet nécessaire, puisque les ris-
ques de pathologie hypertensive
chez la mère asthmatique sont le
double de ceux d’une population
normale. Le risque est double éga-
lement de présenter un placenta
praevia, une césarienne ou un petit
poids de naissance. Il existe même
un surrisque, quoique faible, de
malformations congénitales. Le
suivi médical doit s’assurer que le
traitement est correctement pris et
suffisamment efficace. L’évaluation
clinique porte sur la pratique d’EFR
et d’auto-évaluations par débitmé-
trie de pointe. Les exacerbations
asthmatiques sont rares au cours
du premier trimestre, dans les der-
Professions Santé Infirmier Infirmière N° 61 • janvier-février 2005
Actualité Santé 13
Infos ...
Classification de
l’asthme
Classification
internationale du
GINA (Global
Initiative for Asthma)
Stade 1 :
intermittent = moins
d’une crise par
semaine.
Stade 2 :
persistant léger =
une fois/semaine
< une fois/jour.
Stade 3
persistant modéré =
tous les jours.
Stade 4 :
persistant sévère =
signes respiratoires
même en dehors
des crises.
Maladie de terrain, l’asthme est déclenché par une série
de facteurs environnementaux. Le contrôle de certains
d’entre eux pourrait permettre d’éviter la crise, ce qui est
un élément essentiel de la prise en charge des patients
asthmatiques.
Asthme
Où commence la prise en charge ?
Le débitmètre
expiratoire de pointe
ou peakflow
Chez un patient asthmatique, la
mesure du souffle expiratoire au
débitmètre doit faire partie de
toute consultation médicale, au
même titre que celle du pouls
ou de la tension artérielle. Elle
doit être enregistrée sur un car-
net de suivi et sur le dossier
médical.
Si le résultat témoigne d’une
chute de débit, il faut revoir
immédiatement le traitement et
mettre en place des investiga-
tions complémentaires.
>>
nières semaines et au moment de
l’accouchement. En traitement de
fond, les ß2-mimétiques de courte
durée d’action ont fait la preuve de
leur innocuité pendant la grossesse,
comme les corticoïdes inhalés. Ce
n’est pas le cas de leur forme
orale : ils semblent augmenter les
complications fœtomaternelles,
qu’il s’agisse des éclampsies, des
hémorragies, de la prématurité, des
retards de croissance ou des petits
poids de naissance. Si l’indication
existe pour ce type de traitement, le
suivi médical doit être plus impor-
tant, la grossesse étant alors consi-
dérée comme étant à risque. Il est
cependant difficile de calculer le
rapport bénéfices/risques entre les
complications liées aux traitements
de l’asthme et celles inhérentes en
propre à la maladie.
«C’est pour-
quoi, conclut le Dr Demoly, même si
cela n’est pas formellement prouvé,
il semble que meilleur est le
contrôle de l’asthme, meilleure est
la grossesse »
.
Traitement en cours
de grossesse
La surveillance de la maladie doit
être mensuelle pour les EFR et
biquotidienne pour l’autocontrôle
au débitmètre de pointe. La prise
de médicaments au cours de la
grossesse est déconseillée en
général, sauf les ß2-mimétiques
d’action courte, les corticoïdes inha-
lés, les cromones ne posant pas de
problème iatrogène.
En revanche, sont déconseillés les
ß2-mimétiques d’action longue, les
antileucotriènes, par un manque de
recul, les théophylliniques pour leurs
effets secondaires (nausées, reflux).
Éduquer le patient
Le nombre de décès pour asthme
est, en France, de 3,5 pour 100 000,
contre 2,7 pour 100 000 en Grande-
Bretagne, chiffre désespérément
stable alors que la consommation de
médicaments est en forte croissance.
De plus, les hospitalisations stagnent
dans l’ensemble du pays et croissent
en Ile-de-France. Ce qui signifie que
la prise en charge du patient asthma-
tique n’est pas suffisamment cor-
recte. Pour remédier à ce problème,
l’Anaes a publié en 2001 des recom-
mandations sur l’éducation thérapeu-
tique du patient asthmatique (voir
encadré).
En ce qui concerne l’environnement,
le métier de conseiller en environne-
ment a vu le jour en France. Ainsi,
des médecins conseillers peuvent se
former à Strasbourg sur les divers
polluants aériens domestiques. Se
rendant à domicile, ils évaluent l’ex-
position aux acariens, conseillant les
parents en fonction de leurs moyens.
Mais on en trouve aussi au sein des
laboratoires d’hygiène des villes,
des DASS, des CHU, ou à l’Obser-
vatoire de la qualité de l’air inté-
rieur, pour mesurer, conseiller, infor-
mer, mettre en garde.
Ces formations concernent des pro-
fessionnels de santé : médecins,
infirmiers, techniciens de labora-
toire, soucieux de se former com-
plémentairement.
Une voie d’avenir pour un conseil
de plus en plus important indivi-
duellement et collectivement.
JB
Professions Santé Infirmier Infirmière N° 61 • janvier-février 2005
Pour en savoir plus : www.anaes.fr
(D’après une communication du Dr Pascal
Demoly, hôpital Arnaud-de-Villeneuve
à Montpellier - XIIIes Journées parisiennes
d’allergie).
Infos ...
Les symptômes
de l’asthme
Ce sont la toux,
des sibillances,
un essoufflement
anormal. Les
symptômes peuvent
être d’importance
variable d’un
individu à l’autre :
certains seront peu
dérangés, d’autres
seront très
incommodés, et
pourront même
développer une
insuffisance
respiratoire, et
quelquefois en
décéder. Quand
les symptômes
apparaissent,
surtout s’ils sont
assez sévères, il est
important d’en
identifier la cause,
car des mesures
préventives ou
thérapeutiques
peuvent être
appliquées.
Actualité Santé
14
Le retentissement de l’asthme
D’après l’étude ICAS menée en 2004 dans 7 pays, plus de 83 %
des patients asthmatiques estiment que leur asthme est mal
contrôlé. Plus de 4 sur 5 rapportent des répercussions sur leur vie
quotidienne, liées à la présence de réveils nocturnes. Selon une
autre étude, GOAL, qui a inclus 3 416 patients dans 44 pays, l’as-
sociation salmétérol/fluticasone permet de réguler 75 % des
malades. Une association qui permet, avec des doses de corti-
coïdes inhalés moindres, d’assurer un meilleur contrôle de la
maladie.
Recommandations
2001 de l’Anaes
L’éducation thérapeutique du
patient doit lui permettre d’ac-
quérir les compétences sui-
vantes :
–connaître les principaux
mécanismes de l’asthme et les
modes d’action des médica-
ments ;
– utiliser correctement un aéro-
sol doseur standard, avec éven-
tuellement une chambre d’inha-
lation ;
– savoir se servir d’un DEP et
interpréter les résultats des
mesures ;
– savoir appliquer le plan de trai-
tement établi en accord avec
son médecin traitant ;
– adapter son traitement au
contexte environnemental, per-
sonnel, professionnel, social ;
– expliquer à son entourage la
maladie et la conduite à tenir en
cas de crise ;
– savoir lire de manière critique
les informations paraissant
dans les médias.
Ces recommandations permet-
tent d’optimiser la prise en
charge trop souvent floue aux
urgences. De 50 %, le pourcen-
tage doit tomber à 30 à 40 % nor-
malement.
Cela sera possible à condition
de protocoliser les soins à effec-
tuer, en ayant pris soin, en
amont, de repérer les malades à
risque, tout en assurant, en
aval, un meilleur suivi posthos-
pitalisation.
>>
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