* Hôpital européen Georges-Pompidou, Paris.
Conclusion
B. Landi, M. Bensoussan*
L
e pronostic des tumeurs endocrines du tube digestif est
très variable. Le spectre clinique de ces tumeurs va de
petites tumeurs bénignes à de volumineuses tumeurs
métastatiques. Deux types de tumeurs endocrines du tube digestif
peuvent être distingués. D’une part, les tumeurs endocrines diffé-
renciées (anciennement “tumeurs carcinoïdes”), d’évolution le plus
souvent lente ; d’autre part, les tumeurs peu différenciées, plus évo-
lutives et associées à un pronostic plus sombre. Outre la différen-
ciation tumorale, les principaux facteurs pronostiques sont la taille,
la localisation, certains critères histologiques (index de proliféra-
tion, existence d’images d’invasion vasculaire) et, évidemment, la
présence de métastases. L’évolution des tumeurs métastatiques est
le plus souvent lente, sur plusieurs années, mais elle peut aussi être
rapide, notamment en cas de tumeur peu différenciée. Il faut savoir
que des métastases osseuses s’observent chez environ 30 % des
malades avec des métastases hépatiques. Pour les tumeurs méta-
statiques, l’efficacité et la chronologie des différents traitements non
chirurgicaux restent discutées en l’absence de résultats d’essais
randomisés.
La chirurgie a une place majeure dans les tumeurs endocrines bien
différenciées du tube digestif. Lexérèse est d’étendue variable selon
la localisation, la taille et l’extension de la tumeur. Une exérèse
par voie endoscopique est réalisable dans certains cas.
En cas de tumeur bien différenciée métastatique, la possibilité d’une
résection des métastases hépatiques associée à celle de la tumeur
primitive doit être évaluée. Une chirurgie peut être discutée si la
tumeur primitive paraît résécable et une résection R0 envisa-
geable. Elle peut être indiquée aussi pour faciliter le contrôle des
symptômes si l’imagerie suggère que plus de 80 à 90 % de la masse
tumorale peut être réséquée. Les métastases hépatiques sont sou-
vent nombreuses et bilatérales. Le bilan préopératoire, même très
précis, sous-estime souvent le nombre de lésions. Certaines tech-
niques peuvent augmenter les chances de résection complète
(embolisation portale préopératoire, ligature peropératoire d’une
branche de la veine porte). Dans le cas des tumeurs peu différen-
ciées, il n’y a pas d’indication à la chirurgie, et la chimiothérapie
doit être commencée d’emblée.
Le traitement symptomatique est une priorité thérapeutique en
cas notamment de syndrome carcinoïde. Il repose en première
intention sur les analogues de la somatostatine. L’interféron alpha
est une alternative, mais sa tolérance est moins bonne.
Du fait de l’évolution généralement lente des tumeurs bien différen-
ciées, de la toxicité potentielle des traitements et de leur efficacité
limitée, le traitement médical antitumoral dans les formes méta-
statiques n’est à commencer qu’en cas de symptômes non contrô-
lés par le traitement symptomatique ou d’évolutivité tumorale. Les
analogues de la somatostatine et l’interféron alpha peuvent, outre
l’effet symptomatique, permettre une stabilisation tumorale.
La chimiothérapie systémique est plus active dans les métastases
de tumeurs endocrines du pancréas différenciées et les tumeurs
indifférenciées que dans les tumeurs endocrines différenciées du
tube digestif. La chimiothérapie de référence des tumeurs endo-
crines différenciées du tube digestif est l’association 5-FU + strepto-
zotocine, mais le taux de réponse est faible (environ 20 %) et la
durée de la réponse souvent brève. Son indication devra être discu-
tée au cas par cas par rapport aux alternatives thérapeutiques telles
que la chimioembolisation et le traitement par analogues de la
somatostatine ou par interféron. La chimiothérapie de référence
des tumeurs peu différenciées est l’association étoposide-cisplatine.
Le taux de réponse est d’environ 60 %, mais le pronostic demeure
mauvais, avec une survie médiane de l’ordre de 15 mois.
La chimioembolisation des métastases hépatiques a un effet anti-
tumoral chez environ la moitié des malades et permet un contrôle
du syndrome carcinoïde chez environ les trois-quarts d’entre eux.
Elle est associée à une morbidité non négligeable. Ses contre-
indications sont la thrombose porte, l’insuffisance hépatocellulaire
et la présence d’un ictère. Le taux de complications augmente en
cas de prothèse biliaire ou d’anastomose biliodigestive. Elle relève
de centres spécialisés.
D’autres traitements peuvent être discutés dans des cas particu-
liers : radiofréquence hépatique, transplantation hépatique, radio-
thérapie métabolique (dont les modalités optimales et les indica-
tions sont en cours d’évaluation), radiothérapie (en cas de métastases
osseuses symptomatiques ou cérébrales). L’intérêt d’agents anti-
angiogéniques est en cours d’évaluation.
DOSSIER THÉMATIQUE
La lettre de l’hépato-gastroentérologue - n° 3 - vol. VIII - mai-juin 2005
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DOSSIER THÉMATIQUE
La lettre de l’hépato-gastroentérologue - n° 3 - vol. VIII - mai-juin 2005 119
La complexité de la prise en charge au cours de l’évolution de la
maladie souligne la nécessité d’une concertation pluridisciplinaire.
La meilleure stratégie thérapeutique antitumorale n’est pas encore
déterminée, justifiant d’inclure les malades dans les protocoles multi-
centriques. Des recommandations nationales de prise en charge
ont été publiées et seront réactualisées en 2005 (1, 2).
RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES
1. Cadiot G, Baudin E, Partensky C, Ruszniewski P, pour la SNFGE. Thésaurus
de bonnes pratiques en cancérologie digestive : tumeurs endocrines digestives
et pancréatiques. 2002. www.snfge.asso.fr
2. Recommandations de la FFCD. Que faire devant un cancer digestif en 2003 ?
Gastroenterol Clin Biol 2003;27:43-58.
1. Parmi les affirmations suivantes sur la classification histo-
logique actuelle des tumeurs endocrines du tube digestif,
laquelle ou lesquelles sont exactes ?
A. Elle distingue les tumeurs carcinoïdes et les tumeurs endocrines
peu différenciées.
B. Elle distingue les tumeurs endocrines en fonction de leur origine
embryologique.
C. Elle distingue notamment les tumeurs endocrines bien différen-
ciées, les carcinomes endocrines bien différenciés, les carcinomes
endocrines peu différenciés.
D. Elle distingue les tumeurs endocrines en fonction de leur sécrétion
hormonale.
2. Dans le cas de métastases hépatiques non résécables
d’une tumeur endocrine bien différenciée de l’iléon réséquée
3 ans plus tôt, associées à un syndrome carcinoïde (une ou
plusieurs réponses justes) :
A. Les analogues de la somatostatine sont une priorité thérapeu-
tique.
B. L’association interféron-analogues de la somatostatine est plus
efficace que les analogues de la somatostatine seuls.
C. Une chimiothérapie par 5-FU streptozotocine permet d’obtenir
une réponse objective chez environ 60 % des patients.
D. Une chimiothérapie par adriamycine-streptozotocine est plus effi-
cace,contrairement à ce qui est observé dans les tumeurs endocrines
du pancréas.
E. Une chimioembolisation est une option thérapeutique si elle est
réalisable.
3. Dans le cas de métastases hépatiques d’une tumeur endo-
crine peu différenciée de primitif inconnu (une ou plusieurs
réponses justes) :
A. Une chimiothérapie par adriamycine-streptozotocine est le standard.
B. Une chimiothérapie par VP16-cisplatine est la plus efficace.
C. La résection hépatique doit être réalisée après 3 mois de chimio-
thérapie si les métastases sont résécables.
D. Les analogues de la somatostatine permettent d’obtenir une stabi-
lisation chez environ 50 % des patients.
Réponses :
1:C - 2:A,E - 3 : B.
AUTO-ÉVALUATION
Prochain dossier thématique à paraître en septembre 2005
Urgences vitales
en hépato-gastroentérologie
Coordination : Y. Panis (Paris)
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