bronchopneumopathie chronique obstructive (bpco)

publicité
Collège des Enseignants de Pneumologie
Référentiel pour la préparation de l’ECN
Pr Roche (Paris), Pr Cuvelier (Rouen)
Pr Diot (Tours), Dr Bourdin (Montpellier)
Pr Marquette (Nice), Pr Chabot (Nancy)
Dernière mise à jour : Juillet 2010
BRONCHOPNEUMOPATHIE
CHRONIQUE OBSTRUCTIVE (BPCO)
ITEM 227
Objectifs d’enseignements tels que définis dans le programme de l’ECN :
Bronchopneumopathie chronique obstructive
Diagnostiquer une bronchopneumopathie chronique obstructive
Identifier les situations d’urgence et planifier leur prise en charge
Argumenter l’attitude thérapeutique et planifier le suivi du patient
Décrire les principes de la prise en charge au long cours
Objectifs pédagogiques terminaux définis par le Collège des Enseignants de Pneumologie
1. Connaître la définition de la BPCO
2. Connaître l’épidémiologie de la BPCO et les facteurs de risque de la BPCO
3. Connaître les éléments du diagnostic positif et du diagnostic différentiel
4. Connaître la classification de la sévérité de la BPCO (GOLD)
5. Connaître les co-morbidités fréquemment associées à la BPCO
6. Savoir identifier une exacerbation/décompensation de BPCO, en évaluer les signes de
gravité et en identifier les causes
7. Connaître les modalités de prise en charge d’une exacerbation/décompensation de BPCO
8. Connaître les indications d’hospitalisation d’une exacerbation/décompensation de BPCO
9. Connaître l’évolution naturelle et les principaux facteurs pronostiques (indice BODE)
10. Connaître la place respective du sevrage tabagique, du traitement pharmacologique, de
l’éducation thérapeutique et de la réhabilitation respiratoire en fonction de la sévérité de la
BPCO
Points clés
1. La BPCO est une maladie fréquente et source de morbidité (handicap, exacerbations),
de mortalité et de dépenses de santé.
2. Elle est définie par une obstruction bronchique non complètement réversible :
VEMS/CVF<0,70 après bronchodilatateurs.
3. Le symptôme principal est la dyspnée.
4. Ses principaux diagnostics différentiels comportent l’asthme et les dilatations des
bronches.
5. Le bilan fait appel à l’exploration fonctionnelle respiratoire (spirométrie, volumes
pulmonaires, diffusion du CO), au gaz du sang, à l’exploration de la capacité d’exercice
(test de marche de 6 minutes).
6. La sévérité de la BPCO en 4 stades, est basé sur le VEMS (seuils 0-30-50-80% et plus).
7. Des comorbidités associées sont fréquentes et doivent être recherchées et prises en
charge : dénutrition, dysfonction musculaire, anémie, affections cardio-vasculaires,
anxiété/dépression, ostéoporose, cancer bronchique.
8. Le traitement repose sur
-
le sevrage tabagique et les vaccins (grippe, pneumocoque)
-
les bronchodilatateurs inhalés (bêta2 agonistes et anticholinergiques de courte ou
longue durée d’action)
-
les associations fixes de bêta2 agonistes de longue durée d’action et de
corticostéroïdes inhalés (dans les formes sévères à très sévères avec exacerbations
fréquentes)
-
la réhabilitation respiratoire fait partie intégrante du traitement
9. La prise en charge des exacerbations (majoration des symptômes) débute par la
recherche de critères d’hospitalisation (incluant les signes de gravité clinique) et de la
cause de l’exacerbation (la purulence de l’expectoration fait évoquer une origine
bactérienne).
10. Le traitement des exacerbations est celui de la cause (antibiotiques en cas d’infection
bactérienne) auquel s’associent des bronchodilatateurs, éventuellement les corticoïdes
oraux (signes de gravité, amélioration insuffisante à 48h) et enfin l’oxygénothérapie (pour
maintenir une SpO2 > 90%)) et l’assistance ventilatoire mécanique (si acidose
respiratoire non compensée)
2/32
La BPCO constitue un problème de santé publique majeur par le nombre de personnes
touchées, le handicap dont ces personnes sont affectées, leur mortalité et les dépenses de
santé nécessaires pour leur prise en charge.
I. DEFINITIONS, CLASSIFICATION
I.1. Définitions, nosologie
La BPCO est une maladie respiratoire chronique définie par une obstruction permanente et
progressive des voies aériennes (présence d’un trouble ventilatoire obstructif)1.
Le diagnostic de trouble ventilatoire obstructif requiert obligatoirement une spirométrie avec
mesure du volume expiratoire maximal à la première seconde (VEMS) et de la capacité
vitale forcée (CVF).
La cause la plus fréquente est le tabagisme. La BPCO peut donc être prévenue. Elle est
accessible à des traitements susceptibles d’en atténuer les conséquences.
L’évolution de la BPCO est marquée par :
Un déclin accéléré du VEMS au cours du temps,
Un risque d’exacerbations pouvant mettre en jeu le pronostic vital,
Un risque de handicap avec réduction des activités quotidiennes.
L’apparition d’une insuffisance respiratoire chronique
se traduisant par une hypoxémie avec ou sans hypercapnie
et pouvant se compliquer d’une insuffisance cardiaque droite et d’une rétention
hydrosodée
L’association fréquente à des co-morbidités2 qui aggravent les symptômes et le
pronostic.
I.1.1.Trouble ventilatoire obstructif obstructif (TVO)
Le trouble ventilatoire obstructif est défini par un rapport VEMS/CVF < 70 % après
administration d’un bronchodilatateur, quelle que soit la valeur observée du VEMS.
C’est la présence d’un TVO dans un contexte clinique compatible (tabagisme ancien,
exposition professionnelle) en l’absence d‘autre cause de TVO, en particulier un asthme ou
des dilatations des bronches (cf § 1.1.3) qui aboutit au diagnostic de BPCO.
I.1.2. Affections inclues dans le terme BPCO
Le terme BPCO inclut :
1
L’obstruction est causée par l’association, variable selon les patients 1°/ d’une diminution du calibre des
bronchioles du fait de modifications anatomiques (remodelage) et 2°/ d’une destruction des alvéoles pulmonaires
(emphysème) qui, par le biais de la diminution de la force de rétraction élastique du poumon, entraîne un
collapsus des lumières bronchiques. Il s’y associe une réponse inflammatoire pulmonaire anormale à des
toxiques inhalés (tabac, polluants...).
2
Co-morbidités : présence d’une ou plusieurs affections ou maladies chroniques coexistant avec la BPCO sans
préjuger d’un lien causal.
3/32
la bronchite chronique avec TVO,
l’emphysème pan-lobulaire et/ou centro-lobulaire avec TVO.
Bronchite chronique (BC)
Sa définition est purement clinique :
hypersécrétion bronchique se manifestant par une toux productive quotidienne ou
quasi-quotidienne durant au moins 3 mois par an au cours d’au moins 2 années
consécutives.
Elle concerne la moitié des fumeurs environ et peut être simple (sans obstruction
bronchique) ou obstructive (accompagnée d’un TVO).
La BC reflète l’exposition à des facteurs de risque environnementaux. Elle ne
conduit pas systématiquement à une obstruction bronchique.
Inversement, l’absence de BC n’exclut pas une BPCO.
Emphysème
Sa définition est anatomique :
élargissement anormal et permanent des espaces aériens distaux (c’est à dire
situés au delà des bronchioles terminales), avec destruction des parois
alvéolaires, sans fibrose associée
Il peut être centro ou pan-lobulaire3 (figure 1)
I.1.3. Affections exclues de la BPCO
L’asthme
En raison de leurs fréquences respectives et de la prévalence du tabagisme chez les
asthmatiques (30% environ, comme dans le reste de la population), BPCO et asthme
coexistent fréquemment.
L’asthme doit donc être évoqué dès qu’il existe une réversibilité significative de
l’obstruction bronchique (augmentation du VEMS de plus de 200 ml et 12% de la
valeur de base après bronchodilatateur) ou des éléments évocateurs d’asthme ou
d’allergie dans l’histoire clinique. Ces éléments soulignent l’importance du contexte
clinique dans le diagnostic d’asthme ou de BPCO.
certaines formes sévères ou vieillies d’asthme dans lesquelles le caractère réversible
de l’obstruction disparaît ne peuvent en pratique pas être distinguées de la BPCO si
3
Dans l’emphysème centro-lobulaire ou centro-acinaire, la destruction est centrée sur la bronchiole
respiratoire, située à l’entrée de l’acinus ; il prédomine plutôt aux apex et les capillaires périalvéolaires sont longtemps préservés (d’où une hypoxémie précoce par effet court-circuit, aussi
appelé effet shunt, conséquence caractéristique de la présence de zones perfusées mais non ou mal
ventilées).
Dans l’emphysème pan-lobulaire ou pan-acinaire, l’ensemble des structures de l’acinus sont
touchées : bronchiole respiratoire, alvéoles ; cette forme d’emphysème est caractérisée par une
atteinte prédominant aux bases, une hypoxémie précoce à l’exercice mais tardive au repos, une
hypercapnie plus tardive que dans l’emphysème centro-lobulaire.
4/32
le patient est ou a été fumeur.
Les dilatations des bronches
L’atteinte pulmonaire de la mucoviscidose4
Les bronchiolites obstructives (exceptionnelles).
Figure 1 : les grands types d’emphysème
4
La présence de dilatations des bronches est possible dans la BPCO mais elles ne constituent pas alors
l’élément central de la pathologie.
5/32
I.2. Classification de la sévérité de la BPCO en 4 stades (tableau 1).
Stade de sévérité
Tous stades
Définition
VEMS/CVF<70%
Symptômes habituellement présent
+/- bronchite chronique
II modéré
VEMS 50-80%
Dyspnée dans la vie quotidienne
Exacerbations altérant la qualité de vie
III sévère
VEMS 30-50%
Dyspnée pour des efforts limités
Exacerbations altérant fortement la qualité de vie
IV très sévère
VEMS<30%
Dyspnée au moindre effort
OU <50% ET insuffisance
Qualité de vie très altérée
respiratoire ou cardiaque droite Exacerbations mettant en jeu le pronostic vital
I
léger
Tableau 1 :
classification de la sévérité de l’obstruction bronchique dans la BPCO et
traitements selon les stades5.
Le rapport VEMS/CVF est exprimé en valeur absolue ; le VEMS est exprimé en % de la
valeur prédite. Les symptômes mentionnés ci-dessous sont donnés à titre indicatif mais ne
font pas partie de la définition des stades de sévérité. Seul le niveau de VEMS/CVF et de
VEMS est pris en compte. En effet, pour un même niveau de VEMS la symptomatologie peut
varier notablement d’un individu à l’autre.
II. EPIDEMIOLOGIE
II.1. Epidémiologie descriptive
II.1.1. Prévalence
Elle est, dans la population générale adulte des pays industrialisés, de 5-10% soit, en
France, environ 3,5 millions de sujets atteints de BPCO dont environ 1 million est
symptomatique6.
Dans notre pays, 80 000 à 100 000 malades ont une insuffisance respiratoire chronique
suffisamment sévère pour justifier l’administration au long cours d’une oxygénothérapie
nasale.
5
Comme mentionné plus haut, la bronchite chronique simple, sans TVO, n’en fait pas partie de ce tableau, mais
est considérée comme une situation « à risque », justifiant une surveillance des symptômes et de la fonction
respiratoire.
6
Le diagnostic de BPCO est souvent méconnu (le diagnostic est connu chez seulement 1/3 des
malades).
6/32
II.1.2. Mortalité
La mortalité liée à la BPCO est évaluée à au moins 16 000 personnes par an en France.
II.2. Epidémiologie analytique
On distingue les facteurs de risque environnementaux et génétiques, qui interagissent entre
eux.
II.2.2. Facteurs de risque environnementaux
Le tabac est de loin le principal facteur de risque de BPCO
Plus de 20% des fumeurs développent un syndrome ventilatoire obstructif.
La moitié des sujets qui fument encore à l’âge de 65 ans ont une BPCO
Les expositions professionnelles constituent au moins 15% de l’étiologie des BPCO
voir tableaux de reconnaissance des BPCO professionnelle (cf chapitre BPCO dans
maladies respiratoires d’origine professionnelles - item 109)
Les fumées domestiques de combustion des systèmes de chauffage ou de cuisine peuvent
aussi être des facteurs de risque dans les pays émergents.
La pollution atmosphérique particulaire ou photooxydante joue un rôle dans le
déclenchement d’exacerbations, son rôle éventuel dans le développement d’une BPCO est
incertain.
Le tabagisme passif in utero puis dans l’enfance est incriminé. Il en est de même des
infections respiratoires de la petite enfance.
II.2.1. Facteurs génétiques
Le déficit en alpha1 antitrypsine est le seul facteur de risque génétique clairement identifié de
BPCO7. L’emphysème pan-lobulaire qui résulte de son déficit est d’autant plus fréquent,
précoce et grave qu’il existe un tabagisme surajouté.
D’autres facteurs génétiques sont en cours d’étude8.
7
Cette protéine est un inhibiteur physiologique de protéases dont l’élastase sécrétée par les polynucléaires
neutrophiles ; elle est produite essentiellement par les hépatocytes.
8
Des polymorphismes d’autres gènes impliqués dans le métabolisme oxydatif, la balance protéasesantiprotéases ou l’inflammation pourraient constituer des facteurs de risque d’emphysème ou plus largement de
BPCO ou de BPCO sévère, mais leur rôle exact selon les populations reste à préciser.
7/32
III.
HISTOIRE NATURELLE ET PRONOSTIC
La BPCO est caractérisée par un déclin progressif de la fonction respiratoire (VEMS), que
seul l’arrêt du tabac peut freiner.
Lorsque le VEMS s’abaisse en dessous de 50% de la valeur théorique, la dyspnée
d’exercice peut devenir invalidante et le risque d’insuffisance respiratoire devient réel : c’est
le stade du handicap respiratoire.
Au dessous de 30%, il existe un risque de décès lié à la BPCO, lors d’une exacerbation avec
détresse respiratoire aiguë ou dans un tableau de c ur pulmonaire chronique.
Si la sévérité du TVO mesurée par le VEMS est le facteur pronostique principal, un certain
nombre d’autres facteurs pronostiques ont été mis en évidence qui, associés avec le VEMS,
sont résumés par le score pronostique composite BODE : Body mass index, Obstruction,
Dyspnea, Excercise (tableau 2).
Figure 2 : déclin de la fonction respiratoire chez le sujet normal avec l’âge, en cas de BPCO
et selon l’arrêt du tabagisme.
8/32
Facteur pronostique
Paramètre
Clinique
Etat nutritionnel (IMC)
Sévérité de la dyspnée
VEMS
Distance parcourue en 6-minutes
Indice de masse corporelle
Degré d’obstruction
Performance à l’exercice
Etat nutritionnel
Tableau 2 : Facteurs prédictifs de la mortalité chez les patients atteints de BPCO
IV.
DIAGNOSTIC ET EVALUATION
Il fait appel aux symptômes et signes physiques, à l’exploration fonctionnelle respiratoire et à
l’imagerie, et enfin au bilan des co-morbidités et conséquences systémiques de la maladie.
IV.1. Symptômes
La dyspnée
c’est le maître symptôme
doit être recherchée à l’interrogatoire pour dépister la BPCO chez tout fumeur.
survient initialement à l’effort
est très fréquemment sous estimée par le patient et l’amène rarement à consulter.
peut être évaluée au moyen d’échelles9 comme l’
échelle de dyspnée du Medical Research Council modifiée (MMRC) :
Stade 0 : dyspnée pour des efforts soutenus (montée 2 étages) ;
Stade 1 : dyspnée lors de la marche rapide ou en pente ;
Stade 2 : dyspnée à la marche sur terrain plat en suivant quelqu’un de son âge ;
Stade 3 : dyspnée obligeant à s'arrêter pour reprendre son souffle après quelques
minutes ou une centaine de mètres sur terrain plat ;
Stade 4 : dyspnée au moindre effort.
Les exacerbations
en pratique, il est habituel que le diagnostic de BPCO ne soit évoqué pour la 1ère fois
que lors d’une exacerbation de la maladie
caractérisées par :
la majoration d’une dyspnée,
une majoration du volume de l’expectoration et/ou de sa purulence
une majoration de la toux
9
L’échelle NYHA est très subjective, tant dans la façon de poser les questions que de répondre pour les patients.
De fait, elle est peu reproductible dans les pathologies respiratoires, sauf pour les dyspnées les plus sévères.
9/32
IV.2.
Signes physiques
Absents au début ou limités à des râles bronchiques (ronchi).
Plus tardivement (et, souvent, bien après l’apparition du TVO) seront notés :
un allongement du temps expiratoire avec parfois une expiration à lèvres pincées
(visant à augmenter la pression dans les voies aériennes pour éviter leur collapsus),
une diminution du murmure vésiculaire et une atténuation des bruits du c ur,
une distension thoracique avec notamment un thorax en tonneau
A un stade avancé, les modifications de la géométrie et de la mécanique thoracique sont
responsables d’une posture assez caractéristique :
malade très distendu
adoptant la position dite du tripode :
patient assis, un peu penché en avant, prenant appui sur ses mains posées en
rotation interne sur ses cuisses ou ses genoux.
cette position optimiserait la mécanique ventilatoire en facilitant le travail des
muscles respiratoires accessoires et la ventilation à haut volume thoracique (cf cidessus)
Figure 3 : on distingue classiquement deux présentations cliniques: une forme dite « blue
bloater» (à droite) correspondant à des patients plutôt corpulents, franchement
hypoxémiques, cyanosés, présentant fréquemment des signes cliniques
d’insuffisance cardiaque droite, et une forme « pink puffer » (à gauche)
correspondant à des patients maigres, distendus, sans retentissement cardiaque
droit.
Encore plus tardivement et notamment lors des exacerbations on peut mettre en évidence
La mise en jeu des muscles respiratoires accessoires
10/32
Inspiratoires (sterno-cléido-mastoïdiens notamment)
Expiratoires (expiration abdominale active)
Un signe de Hoover témoignant d’une distension sévère
Une cyanose témoignant de l’hypoxie,
Et enfin, apparaissent les signes d’hypercapnie, d’hypertension pulmonaire, de dysfonction
cardiaque droite.
IV.3.
Exploration fonctionnelle respiratoire
Elle permet le diagnostic positif, aide au diagnostic différentiel avec un asthme, évalue la
sévérité, et participe ainsi aux choix thérapeutiques et à l’appréciation du pronostic.
Pour une explication détaillée on recommande de se référer au document rédigé par le
Collège
des
Enseignants
de
Pneumologie
http://www.splf.org/s/spip.php?article1276
ou
chez
pour
S
l’ECN
Editions
(accessible
2010 :
sur
Explorations
Fonctionnelles Respiratoires aux ECN)
IV.3.1 La spirométrie et la courbe débit-volume identifient
le TVO caractérisé par un rapport VEMS/CVF < 0,721
L’existence d’un aspect concave de la phase descendante de la courbe expiratoire
traduit une limitation des débits à bas volume pulmonaire ; ceci se traduit en pratique
par un débit expiratoire moyen entre 25 et 75 % de la capacité vitale (DEM25-75)
50% des valeurs de référence.
IV.3.2 La pléthysmographie (ou à défaut les techniques de dilution à l’hélium)
Permettent de mesurer le volume pulmonaire non mobilisable ou "statique", en pratique le
Volume Résiduel (VR = ce qui reste dans le thorax quand on a fini d’expirer) et peuvent
identifier
Une distension pulmonaire, souvent associée au TVO, définie par une
augmentation des volumes statiques totaux et une modification des rapports volumes
mobilisables et non mobilisables :
CPT > 120% de la valeur prédite
et VR/CPT > 30%
IV.3.3. Test pharmacodynamiqiues
Permettent d’évaluer la réversibilité du TVO
On parle de réversibilité significative d’un TVO quand le VEMS augmente :
De plus de 200 ml par rapport à la valeur initiale
21
ATTENTION à la classique source de confusion : bien qu’on exprime souvent le résultat du rapport VEMS
mesuré/ CVF mesurée en pourcentage (voir exercices) il ne s’agit pas un pourcentage par rapport à une
quelconque valeur prédite. Par exemple, quand on divise un VEMS mesuré à 1,2 L par une CVF mesurée à 1,9 L
on obtient la valeur de 0,63 qu’on peut exprimer sous la forme 63%, en pratique ce rapport VEMS/CVF est bien <
0,7 (ou < 70%).
11/32
et de plus de 12% par rapport à la valeur initiale ((VEMS post – VEMS pré)/VEMS
pré > 0,12)
On parle de réversibilité complète d’un TVO en cas de normalisation :
du rapport VEMS/CVF (> 0,7)
et du VEMS (VEMS > 80 % de la valeur prédite)
Evaluation de la réversibilité
Test pharmacologique "rapide" aux bronchodilatateurs : la réversibilité peut être
étudiée lors de la réalisation des EFR en réalisant une 1ère spirométrie avant
l’administration de bronchodilatateurs (BD) d’action rapide (
2
agonistes ou
anticholinergiques) puis une 2ème spirométrie 10-15 minutes après. On aura ainsi la
valeur du "VEMS pré BD" et celle du "VEMS post BD"
Test pharmacologique "lent" aux corticoïdes : on peut aussi dans certains cas (doute
sur le diagnostic d’asthme) étudier la réversibilité après une corticothérapie
systémique (prednisone = 0,5 mg/k/j) de durée brève (10-15 jours)
Même si dans certains cas la réversibilité peut atteint les critères de significativité, en
aucun cas le VEMS ne se normalise dans la BPCO, par opposition à l’asthme.
Figure 4 : ancien fumeur (60 PA), TVO très sévère (Gold IV) sans réversibilité significative.
12/32
IV.3.4. Transfert du CO
La mesure de la capacité de transfert de l’oxyde de carbone (qui reflète la surface
d’échanges gazeux disponible) permet d’évaluer la part d’emphysème
Elle est réduite (< 80% de la valeur théorique) dans l’emphysème
IV.3.5. autres tests
Chez les malades les plus sévères (VEMS <50% de la théorique ou dyspnée importante), on
recommande d’effectuer :
une mesure des gaz du sang artériel
un test d’exercice maximal (mesure de la consommation d’O2 maximale à l’effort), ou
sous maximal (le test de marche de 6 minutes est alors le plus fréquemment utilisé)
IV.4.
Imagerie et biologie
Figure 5 : homme de 68 ans, ancien fumeur (60 PA), TVO très sévère (Gold IV) sans
réversibilité significative, diaphragme aplati, augmentation des espaces clairs
rétro-sternal et rétro-cardiaque, thorax en tonneau, l’hyperclarté des apex.
IV.4.1. Radiographie
La radiographie thoracique cherche un carcinome bronchique ou une cardiopathie associés
mais a peu d’intérêt dans le diagnostic de la BPCO ; elle peut montrer (mais avec une
sensibilité et une spécificité faibles) :
la distension:
aplatissement des coupoles diaphragmatiques (de profil)
13/32
augmentation des espaces clairs rétro-sternal et rétro-cardiaque (de profil)
augmentation du diamètre thoracique antéro-postérieur = thorax en tonneau (de
profil)
horizontalisation des côtes de (face)
l’hyperclarté pulmonaire (de face)
IV.4.2. Tomodensitométrie
La tomodensitométrie thoracique en haute résolution est l’examen qui permet d’affirmer la
présence d’un emphysème
Elle n’a pas lieu d’être systématique, mais est utile :
en cas de doute diagnostique (à la recherche de bronchectasises notamment)
en cas d'indication chirurgicale (ex : tumeur)
dans les formes sévères.
L’emphysème apparaît sur le scanner comme des zones avasculaires qui sont parfois
cerclées par une paroi fine, on parle alors de bulles (figure 6)
Figure 6 : de gauche à droite, hémichamp pulmonaire gauche au niveau de la carène, chez
un sujet normal, chez un patient souffrant d’un emphysème diffus, chez un patient
souffrant d’un emphysème bulleux.
IV.4.3. Evaluation cardiaque
L’ECG doit être systématique lorsque le VEMS est <50% de la valeur prédite (Gold III ou IV)
L’échographie cardiaque cherche chez les sujets hypoxémiques ou très dyspnéiques :
des signes d’hypertension pulmonaire
ou une insuffisance ventriculaire gauche qui peut aggraver la condition respiratoire.
IV.4.4. La NFS recherche :
14/32
une polyglobulie réactionnelle à l’hypoxémie
une anémie (co-morbidité fréquente et de mauvais pronostic) susceptible d’aggraver
la dyspnée.
IV.4.5. Le dosage d’alpha1 anti-trypsine est indiqué lorsqu’un emphysème est mis en
évidence,
BPCO précoces (< 45 ans)
ou ayant des antécédents familiaux d’emphysème,
ou n’ayant pas ou peu fumé.
IV.4.6. Bilan des co-morbidités
Les principales comorbidités à chercher en raison de facteurs de risque commun et/ou des
conséquences systémiques de la maladie, sont :
les maladies cardiovasculaires (recherche d’une cardiopathie ischémique au moindre
doute)
le cancer bronchique (scanner thoracique, fibroscopie bronchique parfois)
la dysfonction musculaire,
l’ostéoporose,
la dénutrition,
l’anémie,
l’anxiété et la dépression
IV.5. Diagnostics différentiels principaux
Ce sont les autres causes possibles d’obstruction bronchique non ou peu réversibles ::
l’asthme avec obstruction bronchique fixée « à dyspnée continue » (clinique, niveau
de réversibilité, TDM, biologie-tests allergologiques)
les dilatations des bronches (hypersécrétion, TDM)
les bronchiolites (EFR, TDM)
certaines formes d’insuffisance cardiaque gauche (BNP, ECG, échocardiographie)
V.
TRAITEMENT
Les objectifs du traitement de la BPCO sont les suivants :
Améliorer la fonction respiratoire et réduire la vitesse de son déclin
Prévenir les complications (exacerbations, handicap, insuffisance respiratoire…)
15/32
Réduire les symptômes (dyspnée)
Augmenter la capacité d’exercice
Améliorer la qualité de vie
Réduire la mortalité
Compte tenu de l’absence de traitement modifiant notablement le déclin du VEMS (hormis
l’arrêt du tabac) ou la mortalité (sauf l’arrêt du tabac et, dans les cas les plus sévères,
l’oxygénothérapie), le principal objectif du traitement des BPCO est l’amélioration de la
qualité de vie par l’amélioration de la dyspnée, l’amélioration des capacités d’exercice et la
réduction des exacerbations.
Les indications thérapeutiques selon le stade sont résumées dans le tableau 3.
V.1.
Sevrage tabagique
Il fait l’objet d’une question spécifique (item 45).
Ses grands principes peuvent être résumés comme suit :
L’arrêt du tabagisme, principale mesure susceptible d’interrompre la progression de
l’obstruction bronchique et de retarder l’apparition de l’insuffisance respiratoire, est un
objectif prioritaire, quel que soit le stade de la maladie.
Le conseil minimal doit être proposé à tout fumeur et renouvelé régulièrement.
L’évaluation doit porter sur la dépendance physique (test de Fagerström), la
motivation, l’état psychologique (anxiété, dépression).
Les 3 traitements recommandés d'aide au sevrage tabagique (isolés ou associés)
sont :
les substituts nicotiniques
le bupropion
la varénicline.
Il est recommandé de prescrire les substituts nicotiniques en 1ère intention, la
varénicline en 2ème intention et le bupropion en 3ème intention, compte tenu des
rapports bénéfice/risque spécifiques de chacun de ces médicaments.
Les thérapies cognitivo-comportementales peuvent également être proposées.
Chez les sujets qui ne peuvent s’arrêter complètement de fumer, la réduction du
tabagisme partiellement compensée par substitution nicotinique peut être envisagée
(niveau de preuve faible) dans un objectif final de cessation définitive du tabagisme.
16/32
V.2.
Bronchodilatateurs
Trois familles de bronchodilatateurs peuvent être utilisées : les anticholinergiques, les bêta 2
agonistes et les méthylxanthines (théophyllines).
Anticholinergiques (ipratropium) et bêta2 agonistes (salbutamol sont disponibles par
voie
inhalée,
voie
d’administration
privilégiée
du
fait
de
son
rapport
efficacité/tolérance élevé22
L’utilisation de cette voie d’administration implique un apprentissage du malade pour
utiliser correctement les dispositifs d’inhalation et la vérification régulière que la
technique d’inhalation reste satisfaisante23.
Anticholinergiques et bêta2 agonistes ont une efficacité globalement équivalente dans
la BPCO24.
Anticholinergiques et bêta2 agonistes ont un effet bronchodilatateur additif 25.
Les formes à longue durée d’action sont disponibles pour les bêta2 agonistes
(salmétérol ou formotérol en 2 prises par jour) et pour les anticholinergiques
(tiotropium, une prise par jour), elles permettent un traitement moins contraignant.
Les anticholinergiques comme les bêta2 adrénergiques de longue durée d’action ont
fait la preuve de leur efficacité symptomatique même en l’absence de réversibilité
significative du TVO sur les EFR. Cette amélioration porte sur :
la dyspnée,
la capacité d’exercice
le nombre d’exacerbations,
la qualité de vie.
En pratique, les traitements à courte durée d’action sont à prendre à la demande, dès lors
que le patient ressent une dyspnée.
un bêta2 agoniste (Ventoline®)
ou une combinaison bêta2 agoniste & anticholinergique de courte durée d’action
(Bronchodual®).
________________
22
23
24
25
Rapport efficacité / tolérance favorable lié à l’obtention de fortes concentrations locales de principe actif au
prix d’un passage systémique limité
Le choix entre les dispositifs d’inhalation tient compte des dispositifs d’inhalation disponibles et des capacités
de chaque sujet à les utiliser, en sachant que l’efficacité des formes poudres et des formes en aérosols
doseurs est identique si la prise est satisfaisante.
Au contraire de ce qui est observé dans l’asthme où l’effet bronchodilatateur des bêta2 agonistes est
nettement supérieur à celui des anticholinergiques. Mais individuellement, un malade amélioré par l’un des
agents ne le sera pas forcément par l’autre
Leur association permet d’augmenter l’efficacité du traitement sans en majorer les effets adverses.
17/32
Lorsque la dyspnée est continue, plusieurs choix sont possibles :
anticholinergique de longue durée d’action : tiotropium (Spiriva®),
bêta2 agoniste de longue durée d’action : formotérol (Foradil®), salméterol
(Serevent®)
ou association des deux en cas de persistance de la dyspnée avec une
monothérapie.
Bêta2 agonistes et anticholinergiques peuvent être associés avant de recourir, en cas
d’efficacité restant insuffisante, aux théophyllines.
Le maniement des théophyllines doit être prudent en raison de leur marge thérapeutique
étroite, de leurs multiples interactions médicamenteuses et de leurs nombreux effets
secondaires potentiels digestifs, cardio-vasculaires ou neurologiques.
V.3.
Corticostéroïdes
La corticothérapie orale au long cours n’est jamais indiquée dans la BPCO en raison de son
inefficacité et de ses effets adverses.
Il n’y a pas non plus de place pour la corticothérapie inhalée utilisé seule dans la BPCO (à la
différence de l’asthme).
En revanche, chez les malades atteints d’une BPCO sévère à très sévère (VEMS<50% de la
théorique), la corticothérapie inhalée associée aux bêta2 agonistes de longue durée d’action,
sous forme d’associations fixes : salmétérol + fluticasone (Sérétide®) ou budésonide +
formotérol (Symbicort®)
permet une réduction des symptômes et du nombre d’exacerbations,
et améliore la qualité de vie.
Ces associations ne sont actuellement recommandées que chez les malades qui :
ont un VEMS<50% de la normale26
souffrent d’exacerbations fréquentes (au moins 2 par an),
et présentent des symptômes (dyspnée) persistants malgré l’administration de
bronchodilatateurs de longue durée d’action.
V.4.
Vaccins
La vaccination grippale annuelle est recommandée chez les patients présentant une BPCO.
Il est aussi recommandé de proposer une vaccination par le vaccin polyosidique
pneumococcique aux patients ayant une BPCO, à répéter tous les 5 ans.
________________
26
VEMS< 60% pour l’association salmétérol + fluticasone
18/32
V.5.
Mucomodificateurs
Leur effet bénéfique n’est pas démontré, que ce soit en état stable ou lors des
exacerbations.
V.6.
Antileucotriènes
Ils n’ont aucune indication dans la BPCO
V.8.
Précautions en rapport avec les traitements associés
Les antitussifs sont contre-indiqués dans la BPCO.
En cas d’indication cardio-vasculaire, les
bloquants cardiosélectifs peuvent être utilisés.
S’ils sont indiqués par l’état clinique du patient (anxiété, troubles du sommeil, douleur), les
médicaments susceptibles de provoquer une dépression respiratoire (benzodiazépines,
neuroleptiques sédatifs, opiacés notamment) peuvent être utilisés mais avec prudence en
cas d’insuffisance respiratoire chronique
VI.
Réhabilitation respiratoire
Le terme « réhabilitation respiratoire » désigne une approche globale, multidisciplinaire, de la
BPCO. Elle comprend :
l’optimisation du traitement pharmacologique,
l’aide à l’arrêt du tabac,
le réentraînement à l’exercice,
la kinésithérapie respiratoire de drainage bronchique
la prise en charge psychosociale
l’éducation27
et la prise en charge nutritionnelle.
Cette approche peut être proposée à des malades externes28 ou pris en charge pour
quelques semaines (4 à 8 habituellement) dans des centres spécialisés. Son efficacité à long
terme (jusqu’à 2 ans) a été démontrée sur
la dyspnée,
la capacité d’exercice,
la qualité de vie
et la consommation de soins.
________________
27
28
Composantes de l’éducation : activité physique régulière, nutrition suffisante et équilibrée, prise des
traitements, maniement des dispositifs d’inhalation, reconnaissance et prise en charge des exacerbations.
Réhabilitation en ambulatoire : en centre, en cabinet ou à domicile. Des réseaux de santé peuvent être
utiles pour coordonner la prise en charge ambulatoire. Les associations de patients peuvent favoriser
l’activité physique.
19/32
Elle est recommandée quel que soit le stade de la maladie à partir du moment où il existe un
handicap malgré le traitement pharmacologique.
Par ailleurs, chez tout malade, il est extrêmement important de conseiller d’entretenir
une activité physique régulière.
Stades
Traitement
VEMS 30-50%
VEMS<30% OU
VEMS<50% ET
insuffisance
respiratoire ou
cardiaque droite
Oxygénothérapie de
longue durée si
insuffisance
respiratoire
chronique
Stade IV
très sévère
Glucocorticostéroïdes inhalés en
association avec un 2 agoniste
si exacerbations répétées
Stade III
sévère
Bronchodilatateur(s) de longue durée d’action
en traitement de fond :
anticholinergique et/ou 2 agoniste
VEMS/CVF < 70%
VEMS 50-80%
Réhabilitation respiratoire
Stade II
modéré
Réduction des facteurs de risque (arrêt du tabac)
Vaccination antigrippale
Bronchodilatateur de courte durée d’action (à la demande)
Stade I
léger
Tableau 3: schéma général du traitement de la BPCO
V.10.
Support instrumental (oxygénothérapie et ventilation assistée) au long cours
V.10.1. L’oxygénothérapie au long cours29
Elle est indiquée dans les situations où elle a fait la preuve de son efficacité sur la survie,
efficacité qui est conditionnée à une administration durant 15 h par jour au moins, incluant la
nuit.
Ces situations sont :
une PaO2 < 55 mmHg mesurée en air ambiant, à distance d'une exacerbation,
OU si PaO2
60 mmHg avec présence :
d’une polyglobulie ou
de signes d’hypertension pulmonaire ou
de signes d’insuffisance ventriculaire droite ou
20/32
Les gaz du sang conduisant à porter l’indication doivent avoir été répétés au moins 2 fois à
au moins 3 semaines d’intervalle, à distance d’une exacerbation
V.10.2. La ventilation assistée au long cours
Elle peut être proposée dans deux circonstances :
à l’issue d’une décompensation aiguë avec impossibilité de sevrage de la ventilation
mécanique ;
à
l’état
stable
chez
les
insuffisants
respiratoires
chroniques
sévèrement
hypercapniques présentant des exacerbations fréquentes.
Elle est le plus souvent non invasive administrée par masque nasal, beaucoup plus rarement
par trachéotomie.
V.11. Chirurgie
V.11.1. Chirurgie de réduction de volume pulmonaire
Elle consiste à réséquer les zones pulmonaires les plus emphysémateuses (1/3 du volume
pulmonaire en moyenne) selon des modalités variables.
Son but est de diminuer la distension et ainsi d’améliorer les conditions mécaniques de
fonctionnement des muscles respiratoires (diaphragme en particulier) et d’améliorer les
rapports ventilation-perfusion.
Elle a un objectif symptomatique (réduire l’intensité de la dyspnée, améliorer capacités
d’exercice et la qualité de vie) en l’absence de démonstration actuelle d’un effet bénéfique
sur la survie.
V.11.1. Chirurgie des bulles
Concerne les bulles d’emphysème « géantes » (plus d’un tiers de l’hémithorax) ou
compliquées
(pneumothorax,
hémorragie,
infection,
douleurs)
ou
compressives
(compression de parenchyme pulmonaire sain, du diaphragme, de vaisseaux pulmonaires
ou de structures médiastinales).
__________________________
29
L’administration de l’oxygène se fait généralement par voie nasale, au moyen de canules courtes montées
sur un tuyau souple supporté par les oreilles. L'oxygène peut être administré à partir d’un concentrateur ou
de cuves d’oxygène liquide ; plus rarement, des bouteilles d’oxygène gazeux sont utilisées. Des bouteilles
d’oxygène gazeux de secours doivent toujours être laissées au domicile du malade.
21/32
V.11.1. Transplantation
Les indications de la transplantation se limitent aux malades jeunes (<65 ans) et présentant
par la sévérité de leur atteinte des contre-indications absolues ou relatives à la réduction de
volume : hypercapnie importante, hypertension pulmonaire, trop grande dégradation
morphologique et fonctionnelle,...
VI.
EXACERBATIONS DE BRONCHOPNEUMOPATHIE CHRONIQUE OBSTRUCTIVE
VI.1.
Définitions
L’exacerbation aiguë des symptômes respiratoires et l’altération concomitante de la fonction
respiratoire est l'accident évolutif le plus fréquent de la BPCO.
Les exacerbations sont légères, modérées ou sévère selon qu’elles s’accompagnent ou non
de signes de gravité (cf infra) et qu’elles mettent donc en jeu ou non le pronostic vital.
Les exacerbations sévères sont aussi appelées "décompensations".
elles correspondent à la rupture de l’équilibre entre charge respiratoire (accrue) et
capacité de compensation (compromise)
des mesures d'assistance respiratoire (oxygénothérapie / ventilation assistée) seront
le plus souvent nécessaires
VI.2.
Diagnostic
Chez un patient dont le diagnostic de BPCO est connu
le diagnostic d’exacerbation est simple et repose sur la majoration de la dyspnée
majoration de la toux et de l’expectoration
Chez un patient dont le diagnostic de BPCO n’est pas connu
le diagnostic peut être plus complexe car l’exacerbation, souvent inaugurale, peut
être sévère
la stratégie diagnostique s’intègre alors dans l’approche plus globale du diagnostic
d’une détresse respiratoire aiguë.
VI.3.
Signes de gravité immédiate
Ils ne sont pas spécifiques à la BPCO.
Il s’agit des signes de détresse respiratoire aiguë (voir chapitre II. - item 193).
Leur présence doit conduire à adresser le malade à l’hôpital (tableau 3).
22/32
Tableau 4 : critères d’hospitalisation des exacerbations de BPCO
Signes de gravité immédiate (cf item 193)
Absence de réponse au traitement médical initial
Incertitude diagnostique
Sujet âgé
Absence de soutien à domicile
Oxygénothérapie au long cours
Comorbidités : cardiopathie gauche, alcoolisme, atteinte neurologique…
VI.4.
Facteurs d’exacerbation
Il s’agit en réalité de poser le diagnostic de la pathologie qui a conduit au tableau
d’exacerbation de BPCO. Elles sont en nombre limité ce qui en simplifie la recherche.
Les trois principales pathologies à considérer sont
infection respiratoire basse : bronchite ou pneumonie ;
dysfonction cardiaque gauche ;
embolie pulmonaire.
Viennent ensuite :
pneumothorax ;
prise de traitements à visée sédative (benzodiazépines) ou d’opiacés ;
chirurgie abdominale susmésocolique ;
traumatisme thoracique ou tassement vertébral ou chirurgie thoracique.
Lorsque aucune cause n’est identifiée, la question posée est celle de la probabilité d’une
infection respiratoire basse d’origine bactérienne, par opposition à une cause virale. Cette
question est importante si l’on veut rationaliser la prescription d’antibiotiques et limiter ainsi
l’apparition de résistances microbiennes.
Le principal argument en faveur d’une infection bactérienne est la purulence récente
ou majorée de l’expectoration.
Les germes les plus souvent en cause en cas d’origine bactérienne sont Hemophilus
influenzae, Streptococcus pneumoniae et Moraxella catarrhalis.
D’autres bactéries comme Staphylococcus aureus, Pseudomonas aeruginosa ou
des entérobactéries peuvent être en cause, essentiellement chez les malades
ayant une obstruction bronchique sévère (VEMS < 35% de la valeur théorique).
VI.5.
Explorations
Dans la grande majorité des exacerbations sans signe de gravité prises en charge en ville,
aucune exploration paraclinique n’est justifiée.
23/32
Chez le patient hospitalisé les examens complémentaires ont pour but
d’apprécier la gravité de l’exacerbation (gaz du sang à la recherche d’une
hypercapnie)
d’identifier les pathologies à l’origine de l’exacerbation (voir chapitre VI.1 - item 193)
-
bilan biologique « de base »10 :
-
la C-réactive protéine, le Brain Natriuretic Peptide en cas de doute sur un facteur
cardiaque, la Pro-Calcitonine pour éliminer une origine bactérienne.
VI.6.
Traitement
L’identification et le traitement précoce des exacerbations réduit leur mortalité.
Le traitement des exacerbations de BPCO est codifié (figure 7).
Figure 7 :
prise en charge des exacerbations de BPCO en ambulatoire
VI.6.1 Bronchodilatateurs
En s’assurant de la bonne technique d’utilisation des dispositifs d’inhalation pour les malades
pris en charge à domicile
Les doses de bronchodilatateurs peuvent être aussi élevées que lors des exacerbations
d’asthme (voir item 226).
10
hémostase et les plaquettes (avant héparinothérapie préventive), ionogramme (du fait des effets
hypokaliémiants des bêta2 agonistes et des corticostéroïdes et des effets hyponatrémiants des diurétiques
éventuels), fonction rénale (insuffisance rénale fonctionnelle satellite de l’insuffisance cardiaque droite ou liée à
l’utilisation de diurétiques), bilan hépatique (signes de foie cardiaque), numération (polyglobulie) et formule
sanguine (hyperleucocytose),
24/32
Les bêta2 agonistes à courte durée d’action seront administrés en 1ère intention, seuls ou
associés aux anticholinergiques.
A l’hôpital, la nébulisation est le mode d’administration le plus fréquent.
Purulence franche de l’expectoration
+ dyspnée et/ou augmentation du volume de l’expectoration
OUI
NON
Facteurs de risques
VEMS< 35% en état stable
Hypoxémie de repos (<60 mmHg)
surveillance,
pas d’ATB
Corticothérapie systémiqueau long cours
Comorbidité(s)
Antécédent de pneumonie
OUI
amox–ac clavulanique
FQAP (lévofloxacine,
moxifloxacine)
C3G° (cefpodoxime– proxétil,
céfotiam–hexétil)
C2G° (céfuroxime axétil)
NON
pristinamycine
amoxicilline
doxicycline
macrolide
télithromycine°°
aggravation ou
apparition d’une
purulence franche
de l’expectoration
échec*
ECBC (recherche de pseudomonas)
Radio de thorax
_______________________________________________________________
° C2G = céphalosporine de 2ème génération ; C3G = céphalosporine de 3ème génération
* persistance ou aggravation d’une purulence franche de l’expectoration associée ou non à de la fièvre après 4
jours de traitement
°° L’utilisation de la télithromycine a été restreinte en 2007 au seul traitement des exacerbations documentées ou
suspectées à bactéries résistantes aux bêta-lactamines et/ou aux macrolides
Figure 8 :
indications et choix de l’antibiothérapie des exacerbations
VI.6.2 Antibiotiques (figure 8)
La décision d’antibiothérapie dépend du caractère purulent de l’expectoration
Le choix de l’antibiothérapie dépend des facteurs de risques présents
Le traitement, réévalué au plus tard à J3, a une durée d’environ 7 jours.
25/32
VI.6.3 Corticothérapie systémique
Elle ne fait pas l’objet d’un consensus
A domicile
elle n’est pas indiquée dans le cas général, y compris en présence de râles sibilants
à l'auscultation
elle ne se justifie en 1ère intention que s'il existe une forte suspicion de composante
asthmatique
elle sera envisagée en 2ème intention en l’absence d’amélioration après 48 heures de
traitement.
Chez les malades hospitalisés
elle accélère légèrement la récupération du VEMS, et pourrait raccourcir la durée
d'hospitalisation de 24 heures environ
elle doit être conduite à dose
0,5 mg/kg/j, (au maximum 40 mg/j) et sur une durée
courte (une semaine).
VI.6.4 Oxygénothérapie
Chez les malades hospitalisés du fait de signes de gravité, une oxygénothérapie nasale à
débit faible (1-2 l/min) est indiquée, adaptée de façon à obtenir une saturation pulsée en
oxygène de 88-92% en surveillant la gazométrie de façon à détecter l’apparition d’une
hypercapnie.
Chez ces malades, la prévention de la maladie thrombo-embolique par héparine de bas
poids moléculaire est indiquée.
VI.6.5 Ventilation non invasive (VNI)
En cas de décompensation avec acidose respiratoire (pH < 7,35)
Par l’intermédiaire d’un masque facial
La ventilation non invasive réduit
le recours à la ventilation endotrachéale
la durée de séjour en réanimation,
le risque d’infection nosocomiale
la mortalité.
Ventilation endo-trachéale en présence de contrindication à la VNI
Arrêt respiratoire
Nécessité d’intubation immédiate (coma, choc)
Troubles de déglutition, hypersécrétion
Agitation, absence de coopération pour l’utilisation d’un masque de VNI
26/32
VI.8.
Suivi
Toute exacerbation est un motif de renforcement du suivi clinique (symptômes, handicap) et
fonctionnel respiratoire (spirométrie).
Une éducation doit être apportée sur la reconnaissance et la prise en charge des
exacerbations ultérieures.
Tableau 5 : traitement des exacerbations de BPCO
Ambulatoire
-
Oxygène
(SpO2 > 90 %)
Hospitalisation
« Lunettes » ou masques à mélangeurs
Surveillance saturation et gaz du sang
Bronchodilatateurs
Aérosol-doseur
2 mimétiques (ex Ventoline 2
bouffées 4 à 12 fois /j)
OU anticholinergiques (ex
Atrovent 2 bouffées 4 à 12 fois /j)
Kinésithérapie
Antibiothérapie
Désencombrement
Désencombrement
Ne doit pas être systématique ; uniquement si apparition ou augmentation de la
purulence des crachats ou documentation microbiologique
Corticothérapie
Pas de bénéfice prouvé
Assistance
ventilatoire
mécanique
Héparinothérapie
préventive (HBPM)
Théophylline
Mucomodificateurs
Analeptiques
respiratoires
Antitussifs
Neurosédatifs
dose faible, durée courte
(0,5 mg/kg prednisolone, 7j)
Ventilation « non invasive »
- si acidose respiratoire (pH < 7,35)
ère
- au masque en 1 intention sauf contreindication
Selon la cause : traitement cardiotrope,
anticoagulants, drainage pleural
-
Traitement d’une
cause identifiée de
décompensation
Aérosol-doseur ou nébulisation
2 mimétiques systématiques (ex Bricanyl 5 mg
4 à 8 fois/j)
± anticholinergiques (ex Atrovent 0,5 mg 3-4
fois/j)
Non
Oui
Pas d’indication
Pas d’indication
Contre-indiqués
Contre-indiqués
27/32
Pour en savoir plus : Physiopathologie de la BPCO
III.1.
Les composantes du trouble ventilatoire obstructif dans la BPCO (figure 9 et 10)
Le TVO a une double composante :
Maladies des petites voies aériennes11 associant inflammation le remodelage
bronchique responsable d’une obstruction bronchique intrinsèque (figure 2)
Maladie du parenchyme pulmonaire (emphysème) responsable d’une diminution du
calibre bronchique (figure 3)
Figure 9 : mécanismes de l’obstruction bronchique dans la BPCO
11
Le remodelage bronchique est caractérisé par une hyperplasie glandulaire (au niveau des bronches centrales),
un dépôt de collagène sous épithélial (au niveau bronchiolaire), une métaplasie malpighienne et glandulaire, une
augmentation de la masse du muscle lisse, une fibrose péri-bronchiolaire.
Le remodelage parenchymateux est caractérisé par l’emphysème (lié à un déséquilibre de la balance protéases –
antiprotéases et de un déséquilibre de la balance oxydants – antioxydants) et des dépôts de collagène dans les
parois alvéolaires.
Les infections sont favorisées par l’altération de la clairance muco-ciliaire, les modifications biochimiques du
mucus, des anomalies immunitaires locales. Les infections bactériennes sont sources d’exacerbations et
pourraient accélérer le déclin fonctionnel respiratoire par la recrudescence des phénomènes inflammatoires
induits.
28/32
III.2.
Les principaux mécanismes de la dyspnée dans la BPCO (figure 4 et 5)
Le principal symptôme de la BPCO est la dyspnée. Elle est d’origine multifactorielle :
obstruction bronchique limitant les débits aériens12
nécessité de raccourcir les temps inspiratoire pour pouvoir allonger le temps
expiratoire (diminution du rapport I/E)
distension statique13 (figure 10) et dynamique14
dysfonctionnement des muscles locomoteurs (en raison de la baisse d’activité liée à
la dyspnée)
hypoxémie définissant l’insuffisance respiratoire chronique
déconditionnement cardio-vasculaire et musculaire ;
anxiété, dépression
Figure 10 : Obstruction bronchique et emphysème.
Schéma d’une lumière bronchique (en coupe) dans un thorax vu de profil. A
gauche à l’état normal ; à droite chez le patient qui souffre d’emphysème. A l’état
normal la lumière des bronches est ouverte car les bronches traversent le du tissu
élastique pulmonaire qui exerce une traction sur leurs parois mais aussi sur la
paroi thoracique ( forces de rétraction élastique). En cas de raréfaction du tissu
pulmonaire (emphysème), ces forces de rétraction élastiques diminuent. La
lumière des bronches diminue (trouble ventilatoire obstructif) et le thorax se
distend (thorax en tonneau).
12
augmente la charge mécanique imposée aux muscles respiratoires
l’aplatissement du diaphragme qui en résulte a un effet délétère sur sa fonction
14
pour pouvoir augmenter le calibre bronchique le patient ventile à de plus hauts niveaux de volumes, pour
« retendre l’élastique » (cf. figure 3).
13
29/32
Figure 11 : principaux mécanismes respiratoires de la dyspnée dans la BPCO
Figure 12 : principaux mécanismes extra-respiratoires de la dyspnée dans la BPCO
III.3.
Altération des échanges gazeux dans la BPCO
Elles sont liées avant tout aux inégalités des rapports ventilation-perfusion15 :
effet shunt, lié à la mauvaise ventilation de territoires recevant une part importante du
débit sanguin (principale cause de l’hypoxémie)
effet espace mort, lié à la faible perfusion de zones bien ventilées (source
d’hypercapnie).
15
A un moindre degré les altérations des échanges gazeux sont liées à l’altération de la zone d’échange liée à la
destruction alvéolaire par l’emphysème, l’hypoventilation alvéolaire, l’augmentation du shunt anatomique
secondaire à l’hypertension pulmonaire.
30/32
Figure 13 : A) rapport ventilation/perfusion
(V/Q) normal ; B) l’unité alvéolocapillaire
de gauche a un V/Q normal : le contenu
artériel en oxygène (CaO2) issu de ce
territoire est normal. L’unité alvéolocapillaire de droite est une zone à bas
rapport V/Q car la ventilation est diminuée
en raison d’une limitation de débit dans les
voies aériennes : le CaO2 issu de ce
territoire est abaissé. Le mélange du sang
des deux territoires conduit à une
diminution globale du CaO2 et donc à une
hypoxémie.
Dans
cette
situation
l’augmentation de la fraction inspirée d’O2
(FiO2) corrige l’hypoxémie car l’oxygène
parvient quand même aux espaces
alvéolaires et peut normaliser la PAO2
L’hypoxémie induit :
une
hypertension
pulmonaire
par
vasoconstriction
hypoxique
des
artères
pulmonaires : ce phénomène ne survient d’abord que lors de l’exercice, puis au cours
du sommeil, puis en permanence.
la production de facteurs de croissance par l’endothélium vasculaire qui peuvent
induire des lésions fibreuses artériolaires et fixer l’hypertension pulmonaire.
III.4.
Retentissement cardiaque droit et rétention hydro-sodée
La post-charge ventriculaire droite augmente en raison de l’hypertension pulmonaire et à un
moindre degré en raison
des grandes variations de pression intra-thoracique liées à l’augmentation de la
31/32
charge respiratoire.
d’une polyglobulie liée à l’hypoxémie chronique (viscosité accrue du sang).
Les anomalies des échanges gazeux qui caractérisent l’insuffisance respiratoire chronique
peuvent entraîner une rétention hydro-sodée par :
diminution de production de facteur atrial natriurétique
et stimulation du système rénine angiotensine par l’hypoxémie et l’hypercapnie.
III.4.
Mécanismes des conséquences extra-respiratoires
Il existe une inflammation systémique détectable dans le sang circulant (élévation de la CRP,
des taux de TNF-alpha par exemple). Parmi ses conséquences, on peut trouver :
altération de l’état nutritionnel évoluant vers la cachexie16 ;
atrophie et dysfonction musculaire avec modifications métaboliques, au niveau des
muscles striés squelettiques17 ;
anémie (normochrome normocytaire) ;
risque cardio-vasculaire accru ;
ostéoporose.
Enfin, les difficultés respiratoires s’associent fréquemment à des symptômes anxieux ou
dépressifs (un malade sur deux environ).
16
La dénutrition est de mauvais pronostic au cours de la BPCO. Elle est multifactorielle : réduction des apports
alimentaires, augmentation des dépenses énergétiques de repos et d’exercice (en partie liée à l’augmentation de
charge respiratoire), inflammation systémique et anomalies hormonales (réduction de la production de
testostérone chez l’homme). La dénutrition est délétère pour la fonction musculaire respiratoire et non
respiratoire. Les facteurs exogènes favorisant doivent être évités (corticostéroïdes par exemple).
17
La structure et la fonction des muscles striés squelettiques est aussi altérée en raison de la réduction d’activité
due à la dyspnée : c’est le « déconditionnement » : ces muscles passent en métabolisme anaérobie plus tôt au
cours de l’exercice. Il s’ensuit une production de lactates dont le métabolisme produit du dioxyde de carbone,
facteur supplémentaire de dyspnée.
32/32
Téléchargement