Pathologie neuromusculaire
Pathologie neuromusculaire
La Lettre du Neurologue - Vol. XI - n° 4 - avril 2007
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Stratégie diagnostique des neuropathies périphériques
G. Said*
* Service de neurologie, CHU de Bicêtre.
L’
exploration dun patient présentant une neuropathie
périphérique doit se faire par étapes successives. Lorien-
tation diagnostique dépend des antécédents du patient,
du type et de l’évolutivité de la neuropathie.
La prise en charge d’un tel patient devra d’abord déterminer
si les manifestations cliniques sont bien en rapport avec une
atteinte du système nerveux périphérique, localiser aussi préci-
sément que possible les lésions, présicer la nature des lésions
anatomiques, le pronostic et la cause de la neuropathie, et enfi n
décider du traitement.
Le degré d’urgence à entreprendre des examens ou des mesures
thérapeutiques est fonction de l’allure évolutive des manifesta-
tions cliniques. Chaque étape de ce processus est de diffi culté
variable. Dans de nombreux cas, tout est solutionné très rapide-
ment, sans investigations complémentaires, tandis que d’autres
situations peuvent poser des problèmes qui resteront non résolus
malgré la compétence des investigateurs et la multiplication
des examens complémentaires. Dans ce bref aperçu, nous nous
proposons de schématiser les étapes successives de la prise en
charge d’un patient atteint de neuropathie périphérique.
Le patient a-t-il une neuropathie périphérique ?
Les manifestations cliniques font-elles suspecter l’existence
d’une neuropathie périphérique ?
Quelle est l’histoire des symptômes : paresthésies, douleurs,
manque de sensibilité, atteinte motrice, etc. ?
Quels sont les antécédents personnels et familiaux ?
Lexamen : troubles moteurs, sensitifs et réfl exes.
Lexamen clinique déterminera la qualité, la topographie des
défi cits et l’évolutivité de la neuropathie.
– Défi cit moteur : en évaluer l’intensité et la topographie.
– Les troubles sensitifs “objectifs” : examen des différentes
sensibilités (sensibilité thermique, douleur, tact fi n, sensibilité
proprioceptive).
– Topographie des défi cits sensitivo-moteurs.
Au terme de l’examen clinique, on doit avoir une idée du
type de neuropathie en cause et avoir écarté un défi cit non
neurologique ou une atteinte centrale.
On peut préciser le type d’atteinte et l’existence de manifestations
végétatives éventuellement associées.
Schématiquement :
– atteinte prédominante des petites fi bres myéliniques et des
bres amyéliniques : perte des sensibilités thermique et doulou-
reuse, respect relatif du tact fi n et des sensibilités proprioceptives,
pas d’atteinte motrice, longue conservation des réfl exes ;
– atteinte prédominant sur les grosses fi bres : troubles sensi-
tifs superfi ciels et profonds, aréfl exie précoce, ataxie, atteinte
motrice fréquente ;
Un examen électrique vient compléter l’examen clinique, dont
il représente en fait un prolongement. Il permet de préciser la
topographie éventuelle d’un défi cit et le type d’atteinte des fi bres
nerveuses, et d’orienter si besoin la biopsie.
De quel type de neuropathie s’agit-il ?
Formes topographiques
La distribution des défi cits en est l’élément déterminant.
Les investigations complémentaires
Elles ne sont pas toujours nécessaires.
Dans certains cas, le diagnostic est évident : tableau clinique
et étiologie évidents et compatibles – diabète ancien négligé
et tableau compatible, chimiothérapie récente avec un produit
neurotoxique, alcoolisme patent, etc.
Les polyneuropathies distales symétriques dites “longueur-
dépendantes”.
Les neuropathies non longueur-dépendantes.
Atteintes focales et multifocales des racines et des troncs nerveux :
atteintes radiculaires, atteintes plexiques et atteintes tronculaires
(les mono- et multinévrites).
Les dé cits non longueur-dépendants non systématisés :
les polyradiculonévrites (atteinte mixte, distale et proximale),
les ganglioneuronopathies (atteinte asymétrique des quatre
membres mais pouvant avoir un début focal).
Formes selon la prédominance des  bres atteintes : prédominance
motrice ou purement motrice (polyradiculonévrites, maladie dégé-
nérative du motoneurone) ; prédominance sensitive ou purement
sensitive, soit sur les petites  bres (deux causes principales : diabète et
amylose), soit sur les grosses  bres : formes démyélinisantes ou mixtes
(les polyradiculonévrites aiguës, subaiguës et chroniques ; les neuro-
pathies dysglobulinémiques), formes axonales (les ganglioneurono-
pathies) ou polyneuropathie mixte, longueur-dépendante ( toxiques,
alcool, insu sance rénale dialysée, etc.) ; évolutivité (formes aiguës et
subaiguës ; chroniques progressives ou rémittentes ; stables).
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La Lettre du Neurologue - Vol. XI - n° 4 - avril 2007
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Neuropathie familiale connue
Objectifs des examens complémentaires :
confi rmer l’existence de la neuropathie et la distribution de la
dénervation ; préciser la physiopathologie et le pronostic des
lésions nerveuses ; identifi er la cause de la neuropathie ; conseiller
au mieux le patient et, si possible, le traiter.
Moyens :
les études électrophysiologiques : quasi systé matiques.
Les investigations à visée étiologique : elles sont nombreuses et,
dans la mesure du possible, fonction du tableau clinique.
Bilan biologique standard incluant NFS, ionogramme sanguin,
glycémie, créatinine, VS, CRP, électrophorèse et immunoélec-
trophorèse des protéines sanguines, transaminases.
Liquide céphalo-rachidien (LCR) : l’indication dépend du
contexte : polyradiculonévrite aiguë ou chronique, méningo-
radiculonévrite, recherche de cellules malignes dans le LCR.
Les anticorps et dosages spécialisés ne sont demandés qu’en
fonction du contexte.
La biopsie nerveuse ou neuromusculaire est à réserver à des
indications particulières, proportionnellement rares.
La recherche d’une cause traitable en représente la principale
indication. Cest le cas essentiellement des vascularites nécro-
santes du type de la périartérite noueuse, qui représente l’indi-
cation majeure des biopsies neuromusculaires. Dans 75 % des
cas, les vascularites nécrosantes sont responsables de défi cits
focaux ou multifocaux, axonaux, aigus ou subaigus, mais dans les
autres cas l’atteinte est distale et symétrique. Les signes infl am-
matoires font défaut dans un tiers des cas. Plus rarement, on
sera en présence d’une autre cause de multinévrite.
En pratique, une neuropathie tronculaire multifocale – multi-
névrite – est une indication formelle à la biopsie neuromus-
culaire. Il convient de s’assurer que l’on n’est pas en présence
d’une atteinte radiculaire multiple, ce qui est souvent le cas aux
membres inférieurs. Il est nécessaire de pratiquer une biopsie
sur un nerf d’un territoire cliniquement atteint. Cela augmente
les chances de trouver des lésions causales et diminue le risque
de séquelles désagréables.
Attention : ne pas trouver la vascularite ou les dépôts anormaux
que l’on suspectait à la biopsie n’écarte pas le diagnostic.
Les tests ADN sont à mener en cas de contexte familial suspect,
essentiellement pour les Charcot-Marie-Tooth démyélinisants
et les fragilités des nerfs à la pression.
En l’absence de notion familiale, devant une polyneuropathie
axonale longeur-dépendante s’aggravant progressivement,
prédominant sur les petites fi bres, avec atteinte végétative, il
est nécessaire d’évoquer la possibilité d’amylose familiale s’il
n’y a pas de gammapathie monoclonale, et de demander un
séquençage du gène de la transthyrétine.
CONCLUSION
Les investigations pratiquées chez un patient atteint de neuro-
pathie périphérique doivent être adaptées au contexte, au type
de neuropathie, à l’évolutivité et au handicap.
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