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Mise au point
Act. Méd. Int. - Gastroentérologie (17), n° 2, mars 2003
Mise au point
Surface Nombre de cellules
Côté séreux 0,4 m2100 à 200 000
Côté muqueux (surface “utile”) 250 m2300 millions
Tableau II.
Au niveau du côlon, il semble bien que
la flore du côlon droit et gauche ne soit
pas la même (1, 2) : les activités méta-
boliques prédominantes sont la fer-
mentation (liée à l’oxydation des glu-
cides) dans le cæcum et le côlon droit,
et la putréfaction (en rapport avec
l’oxydation des protides) dans le côlon
gauche. Cela semble lié à des types de
populations différentes. Ainsi, le côlon
gauche est riche d’une flore méthano-
productrice.
La muqueuse intestinale
Deux éléments essentiels la caractéri-
sent.
●Un grand nombre de cellules
(tableauII) : l’intestin grêle est orga-
nisé anatomiquement de façon à multi-
plier considérablement la surface utile
côté muqueux : pour 4 m d’intestin
grêle, la surface, côté séreux, est de
0,4 m2. Elle est de 250 m2côté
muqueux ! De replis visibles (les val-
vules conniventes) en replis microsco-
piques (villosités muqueuses, microvil-
losités cellulaires), c’est près de 300
millions d’entérocytes qui “couvrent”
la muqueuse.
●Un renouvellement rapide. Un
chiffre en témoigne : les 300 millions
d’entérocytes sont renouvelés en quatre
à cinq jours chez l’homme.
●L’organisation spatiale est connue.
La muqueuse comporte une couche
d’entérocytes (ou de colocytes) et de
quelques cellules à mucus côté lumière.
Les entérocytes, cellules dédiées à l’ab-
sorption, sont polarisées : elles ont un
pôle apical muni de microvillosités, de
systèmes de transport de molécules et
d’enzymes “canne à pêche”. Ces enté-
rocytes sont organisés : ils recouvrent
la surface de villosités de grande taille
(500 µm). Selon leur place sur la villo-
sité, ils ont des fonctions différentes:
dédiés aux phénomènes d’absorption
active au sommet de la villosité (lors-
qu’ils sont matures donc), ils partici-
pent surtout aux passages “passifs” à la
base de la villosité. En dessous de la
couche d’entérocytes et de cellules à
mucus, on trouve un milieu interstitiel
hydrique parsemé de vaisseaux et de
cellules immunitaires (“infiltrat inflam-
matoire”). Cette couche interstitielle a
une hauteur variable : il y a des endroits
où les villosités sont très parsemées ; les
cellules immunitaires y sont donc beau-
coup plus “proches” des substances
exogènes.
La musculaire muqueuse, entre
muqueuse et sous-muqueuse, permet le
plissement de la muqueuse. Ses
contractions, limitées, permettent d’of-
frir aux nutriments un plus ou moins
grand espace d’absorption.
Le système de défense intestinal
●Le système immunitaire. Appelé
GALT (pour Gut Associated Lymphoid
Tissue), il est organisé en citadelles (les
follicules lymphoïdes et plaques de
Peyer) et en milices de patrouille (les
lymphocytes). Quantitativement, l’in-
testin est l’un des organes les plus
riches en cellules lymphocytaires et en
anticorps. Ces cellules sécrètent même
un anticorps “spécifique”, l’IgA sécré-
toire (IgAs), qu’on ne trouve que dans
le tube digestif.
De façon caricaturale, l’intestin est
organisé comme une frontière. Des
citadelles parsèment, de place en place,
la muqueuse intestinale (1, 2) : ce sont
les follicules lymphoïdes et les plaques
de Peyer. Les lymphocytes T et B y sont
bien séparés. Là où siègent ces plaques,
la muqueuse est “appauvrie” : la couche
entérocytaire est mince et les villosités
sont très courtes ou absentes. Un type
particulier d’entérocytes, les cellules
M, couvrent cette zone. Ainsi, les lym-
phocytes des plaques de Peyer sont-ils
informés tôt et efficacement des entrées
de corps et substances exogènes. Tout
se passe comme si l’intestin “privilé-
giait l’entrée passive” de ces sub-
stances, pour pouvoir mieux les
connaître et en rendre compte. Partant
de ces plaques de Peyer, ou y arrivant,
des lymphocytes (surtout les T) par-
courent la muqueuse (lamina propria)
et la sous-muqueuse, se dirigent vers le
premier rempart, les ganglions lym-
phatiques mésentériques, puis vers la
circulation générale. Ils reviennent
ensuite au tube digestif. Ils sont deve-
nus matures : mémoire des antigènes
qui se sont fixés à leurs récepteurs,
capacités de prolifération, sécrétions de
cytokines et d’IgAs. Ces navettes ont
pour but d’informer le système immu-
nitaire général de ce qui transite habi-
tuellement par le tube digestif et de
mettre en phase les deux systèmes,
général et intestinal.
Le tissu lymphoïde associé à l’épithé-
lium digestif (le GALT) est la “masse
lymphoïde” la plus importante de l’or-
ganisme, tant en nombre de cellules
qu’en termes de travail effectué : 60 %
de la masse lymphoïde totale se situe
à ce niveau.
Là où les cellules immunitaires sont les
plus abondantes, le rempart muqueux
que forment les villosités est aminci
(c’est la zone T). Mieux, les entérocytes
qui recouvrent cette zone, peu nom-
breux, sont particuliers (cellules M).
Les plaques de Peyer représentent le
réservoir à cellules lymphoïdes imma-
tures.
IgA intestinales : les lymphocytes B
intestinaux fabriquent un IgA particu-
lier, l’IgA sécrétoire. C’est un IgA poly-
mérisé, où les monomères sont liés par
la chaîne J. Cet IgAs, en pénétrant dans
l’entérocyte, se lie avec un composant
sécrétoire, longue chaîne peptidique
qui permet son incorporation au sein de