D’autres causes sont plus spécifiquement d’ordre
pharmacocinétique, comme une insuffisance
rénale retardant l’élimination de la sulfonylurée
ou de son métabolite actif ou encore une interac-
tion médicamenteuse par une molécule à forte
liaison aux protéines susceptible de déplacer la
sulfonylurée et d’augmenter sa fraction libre
active (7). Les hypoglycémies induites par les sul-
famides sont d’autant plus dangereuses qu’elles
concernent des molécules avec longue demi-vie
(chlorpropamide) ou avec métabolites actifs (gli-
benclamide) ou qu’elles surviennent chez des
patients âgés, souffrant d’autres pathologies
notamment vasculaires (patients coronariens ou
avec ischémie cérébrale) (8). Un des avantages
des nouveaux insulinosécrétagogues de la famille
des glinides (répaglinide, le seul commercialisé
en Belgique) consiste en un moindre risque d’hy-
poglycémie grave en raison d’une demi-vie extrê-
mement courte (environ 1 heure) et d’une
influence négligeable de l’insuffisance rénale sur
la pharmacocinétique du produit (9).
L’ h ypoglycémie induite par un sulfamide ne
sera pas traitée par l’administration de glucagon,
contrairement à celle provoquée par l’insuline
(4, 6). En effet, l’effet du glucagon sera trop
fugace par comparaison à la durée d’action de la
sulfonylurée. De plus, le glucagon risquerait de
stimuler la sécrétion endogène d’insuline dès
que la glycémie remonte. En cas de coma empê-
chant le resucrage oral, la seule solution consis-
tera donc en l’injection intraveineuse de glucose.
Une autre différence essentielle réside, en
effet, dans le fait que le coma, suite à un surdo-
sage absolu ou relatif en sulfamide, est habituel-
lement beaucoup plus prolongé que le coma
secondaire à l’injection d’insuline. L’insuline a
une demi-vie relativement courte (sauf pour les
préparations retard) alors que le sulfamide a une
demi-vie plasmatique qui peut atteindre 6-12
heures et une demi-vie biologique encore plus
importante. Ainsi, alors que le coma hypoglycé-
mique insulinique est, dans la plupart des cas,
rapidement réversible, le coma sur sulfamide
peut être caractérisé par des épisodes de résur-
gence durant les premières 24 à 48 heures. Dès
lors, il est habituellement conseillé de maintenir
le patient hospitalisé sous une perfusion intra-
veineuse d’une solution de glucosé à 5 ou 10 %
après la phase initiale de resucrage avec du glu-
cosé hypertonique en bolus intraveineux et de
n’autoriser la sortie de l’hôpital qu’après 48
heures de surveillance.
C
ONCLUSION
L’ h ypoglycémie sévère chez un patient diabé-
tique insulinotraité n’est pas rare et demande
l’instauration d’un traitement d’urgence. Celui-
ci doit être administré, si possible par l’entou-
rage immédiat qui doit avoir reçu l’éducation
minimale indispensable. Cette dernière vise à
reconnaître l’accident hypoglycémique et à
appliquer le traitement le plus approprié, soit
l’administration orale d’une solution riche en
glucides à index glycémique élevé, soit l’injec-
tion de glucagon. Si nécessaire, il sera fait appel
à un médecin qui, dans la plupart des cas, fera
une injection intraveineuse d’une solution de
glucosé hypertonique. Rapidement diagnosti-
quée, l’hypoglycémie, même apparemment
grave, est toujours rapidement réversible, habi-
tuellement en quelques minutes, et sans
séquelle. Les hypoglycémies secondaires à la
prise de sulfamide nécessitent une prise en
charge spécifique et, en cas de coma, une sur-
veillance plus prolongée à l’hôpital, avec une
perfusion de glucose pendant environ 48 heures.
Enfin, tout accident hypoglycémique doit faire
l’objet d’une enquêt minutieuse à la recherche
de la cause puis, si nécessaire, d’un ajustement
thérapeutique pour prévenir toute récidive.
R
ÉFÉRENCES
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cours de l’insulinothérapie intensive. In : Journées de
Diabétologie de l’Hôtel-Dieu, Flammarion, Médecine-
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R.P. RADERMECKER ET COLL.
Rev Med Liege; 58 : 3 : 119-122
122
Les demandes de tirés à part sont à adresser au Pr.
A.J. Scheen, Service de Diabétologie, CHU Sart Til-
man, 4000 Liège.