REVUE DE PRESSE
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La Lettre du Gynécologue - n° 254 - septembre 2000
Prediction de la faisabilité
d’une cytoréduction optimale
des cancers épithéliaux de l’ovaire
au stade IIIc par le taux sérique
préopératoire de CA 125
Y. Ansquer
(Hôpital Edouard-Herriot, service du Pr Dargent, 5, place
d’arsonval, 69437 Lyon Cedex 03.)
The ability of preoperative serum CA 125 to predict optimal
primary tumor cytoreduction in stage IIIc epithelial ovarian
carcinoma. Chi DS, Venkatraman ES, Masson V, Hoskins
WJ. Gynecol Oncol 2000 ; 77 : 227-31.
Résumé
L’équipe du Memorial Sloan-Kettering Cancer Center a étu-
dié, sur une série rétrospective de 100 patientes opérées pour
un cancer épithélial de l’ovaire au stade III, la possibilité de
prédire par le taux sérique préopératoire de CA 125 la réséca-
bilité de la tumeur.
La médiane du taux préopératoire de CA 125 était de
819 UI/ml (min. 5,6, max. 26 200). Une cytoréduction opti-
male (définie par un plus grand diamètre tumoral résiduel
1cm) a été obtenue dans 45 cas (45 %). La probabilité de
cytoréduction optimale diminuait avec l’augmentation du taux
plasmatique préopératoire de CA 125. En choisissant un seuil
de CA 125 à 500 UI/ml, une cytoréduction optimale était obte-
nue pour 33 des 45 patientes ayant un taux inférieur au seuil
(73 %), alors qu’elle n’était obtenue que pour 12 des
55 patientes ayant un taux supérieur au seuil. La sensibilité
d’un taux seuil du CA 125 plasmatique à 500 UI/ml pour pré-
dire une cytoréduction optimale était de 78 %, la spécificité de
73 %, la valeur prédictive positive de 78 % et la valeur prédic-
tive négative de 73 %.
Les auteurs concluent que lorsque le taux préopératoire de CA
125 plasmatique est supérieur à 500 UI/ml, une cytoréduction
optimale ne peut être obtenue que chez une patiente sur cinq
atteinte d’un cancer épithélial de l’ovaire au stade III. Ces
patientes pourraient être soumises à une cœlioscopie afin de
juger la résécabilité de la tumeur.
Commentaire
La discussion autour des indications de chimiothérapie néo-
adjuvante pour les tumeurs épithéliales de l’ovaire au stade
avancé relance l’intérêt de l’évaluation préopératoire de la
“résécabilité” tumorale. Depuis l’étude du GOG (1), nous
savons que le pronostic du cancer de l’ovaire est inversement
proportionnel au plus grand diamètre tumoral laissé en fin
d’intervention, mais aussi que cette relation de proportionna-
lité disparaît lorsque les résidus tumoraux en fin d’intervention
sont supérieurs à 2 cm de plus grand diamètre.
Dans ces conditions, il est discutable de soumettre une patiente
à une chirurgie lourde si elle ne doit pas en bénéficier en
termes de survie, c’est-à-dire si la chirurgie n’est pas optimale
(si le plus grand diamètre tumoral en fin d’intervention est
supérieur à 2 cm). C’est pour cette raison que l’utilisation de la
chimiothérapie néoadjuvante est évoquée. Avant d’envisager
une chimiothérapie néoadjuvante, deux questions doivent être
résolues : quel est le sous-groupe de patientes qui peut bénéfi-
cier de ce traitement ? Quelles sont, autrement dit, les patientes
vec ce premier numéro de rentrée, La Lettre du
Gynécologue inaugure une nouvelle rubrique.
Désormais vous retrouverez la revue de presse tous
les deux mois dans ces colonnes. Y. Ansquer, O. Dupuis et
C. Poncelet analysent huit revues internationales de réfé-
rence* dont les meilleurs articles seront résumés et commen-
tés par leurs soins.
À cette première occasion, la revue de presse s’accorde au
thème général de ce numéro, soit la cancérologie gynécolo-
gique.
La Lettre du Gynécologue espère ainsi par ce nouveau ser-
vice répondre aux souhaits de ses lecteurs.
La rédaction
* American Journal of Obstetrics and Gynecology - Cancer - Fertility and Sterility - Gynecologic
Oncology - Lancet - Obstetrics and Gynecology - New England Journal of Medicine
A
pour lesquelles la chirurgie première ne permettra pas une
cytoréduction optimale ? Par ailleurs, cette chimiothérapie
néoadjuvante est-elle efficace ?
Les moyens dont nous disposons pour évaluer la “résécabilité”
tumorale avant la laparotomie sont le taux plasmatique du CA
125, le scanner abdomino-pelvien et la cœlioscopie. Dans cette
étude, Chi et al. ont testé plusieurs seuils de CA 125 plasma-
tique et recherché celui qui offrait le meilleur compromis entre
sensibilité et spécificité. En choisissant un seuil de 500 UI/ml,
les auteurs observent 78 % de cytoréduction optimale lorsque
le taux de CA 125 est inférieur au seuil contre seulement 27 %
lorsqu’il est supérieur. Ils proposent, dans ces conditions, de
soumettre les patientes ayant des taux supérieurs à 500 UI/ml à
une cœlioscopie pour préciser la résécabilité.
Comme le souligne Berek dans son éditorial, cette étude
devrait susciter la mise en place d’études prospectives de la
prédiction de la “résécabilité” tumorale par le CA 125, le scan-
ner et la cœlioscopie. Ces résultats seront ensuite intégrés à
ceux obtenus par les études portant sur la chimiothérapie
néoadjuvante afin de définir les meilleures indications de cette
thérapeutique.
RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES
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residual disease on survival after primary cytoreductive surgery in patients with
suboptimal residual epithelial ovarian carcinoma. Am J Obstet Gynecol 1994 ;
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rian cancer using CA 125. Gynecol Oncol 2000 ; 77 : 225-6.
Chirurgie et radiothérapie
postopératoire versus chirurgie seule
dans le traitement des cancers
de l’endomètre au stade I :
essai randomisé multicentrique
Y. Ansquer
(Hôpital Edouard-Herriot, service du Pr Dargent, Lyon.)
Surgery and postoperative radiotherapy versus surgery alone
for patients with stage-1 endometrial carcinoma : multicentre
randomised trial. Creutzberg CL, Van Putten WLJ, Koper
PCM et al. Lancet 2000 ; 355 : 1404-11.
Résumé
Cet essai randomisé multicentrique avait pour objectif de
déterminer si la radiothérapie pelvienne postopératoire aug-
mente le contrôle locorégional et la survie des patientes trai-
tées pour cancer de l’endomètre au stade I.
Les critères d’inclusion étaient : adénocarcinome de l’endo-
mètre au stade I, grade 1 avec profondeur d’infiltration myo-
métriale 50 %, ou grade 2 quel que soit le degré d’infiltration
myométriale, ou grade 3 avec une invasion myomé-
triale < 50 %. La randomisation était réalisée après hystérecto-
mie totale avec annexectomie bilatérale sans lymphadénecto-
mie pelvienne. Sept cent quinze patientes provenant de
19 centres ont été randomisées pour recevoir une radiothérapie
adjuvante (46 Gy) versus abstention. Les critères de jugement
principaux étaient les récidives locorégionales et la survie. Les
critères de jugement secondaires étaient la morbidité induite
par les traitements et la survie après récidive.
L’analyse a été conduite en intention de traitement. Parmi les
715 patientes, 714 étaient analysables. La médiane de suivi
était de 52 mois. Le taux actuariel de récidive locorégionale
était, à 5 ans, de 4 % dans le groupe radiothérapie versus 14 %
dans le groupe contrôle (p < 0,001). Le taux actuariel de survie
globale à 5 ans n’était pas différent dans les deux groupes :
81 % (radiothérapie) et 85 % (groupe contrôle), p = 0,31. Le
taux de décès liés au cancer de l’endomètre était de 9 % dans
le groupe radiothérapie et de 6 % dans le groupe contrôle
(p = 0,37). Le taux de complications liées au traitement était de
25 % pour le groupe radiothérapie versus 6 % dans le groupe
témoin (p < 0,0001). Les deux tiers de ces complications
étaient de grade 1. Les complications de grades 3-4 étaient
observées chez 8 patientes, parmi lesquelles 7 appartenaient au
groupe radiothérapie (2 %). La survie à 2 ans après récidive
vaginale était de 79 % contre 21 % après récidive pelvienne ou
métastases à distance. La survie après récidive était significati-
vement meilleure dans le groupe contrôle (p = 0,02). L’analyse
multivariée a montré que la radiothérapie postopératoire et un
âge inférieur à 60 ans étaient associés à une diminution signifi-
cative du risque de récidive locorégionale.
En conclusion, pour les cancers de l’endomètre au stade I, la
radiothérapie adjuvante diminue le risque de récidive locoré-
gionale mais n’a pas d’impact sur la survie. La radiothérapie
augmente la morbidité liée aux traitements. La radiothérapie
postopératoire n’est indiquée ni pour les patientes de moins de
60 ans atteintes d’un adénocarcinome de l’endomètre au
stade I, ni pour les patientes atteintes de tumeurs de grade 2
avec invasion myométriale superficielle.
Commentaire
Cette étude met en évidence le paradoxe entre un meilleur
contrôle local dû à la radiothérapie (4 % de récidives locales
dans le groupe radiothérapie versus 14 % dans le groupe
contrôle, p < 0,001) et l’absence de traduction de ce bénéfice
en termes de survie. Les auteurs expliquent ce résultat par le
bon pronostic des récidives locales après chirurgie exclusive,
qui influent donc peu sur la survie, alors que le taux de méta-
stases à distance n’est pas différent dans les deux groupes.
Ainsi, la radiothérapie postopératoire ne permet pas de contrô-
ler les formes à haut risque métastatique, laissant supposer que
des métastases microscopiques sont déjà présentes au moment
de la radiothérapie. La radiothérapie adjuvante n’est donc pas
à retenir pour ces cancers de l’endomètre au stade I, et ce
d’autant plus que la morbidité des traitements n’est pas négli-
geable (25 % dans le groupe radiothérapie versus 6 % dans le
groupe témoin, p < 0,0001). La plupart de ces complications
sont digestives, liées à l’association radiochirurgicale, mais les
deux tiers en sont cependant de grade 1.
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La Lettre du Gynécologue - n° 254 - septembre 2000
Dans cette étude, les patientes n’étaient pas soumises à une
lymphadénectomie pelvienne. Les auteurs justifient cette abs-
tention par un taux d’envahissement ganglionnaire de moins
de 10 % pour les stades I, une augmentation du risque de com-
plication en particulier lorsqu’une radiothérapie est associée, et
enfin l’absence de bénéfice prouvé dans la littérature. La ques-
tion peut cependant être posée de savoir si le curage pelvien ne
pourrait pas aider à identifier les cas qui développeront des
métastases à distance. Le taux de positivité des ganglions pel-
viens d’environ 10 % pour les cancers de l’endomètre de stade
I est à mettre en parallèle avec les 7,9 % de métastases à dis-
tance à 5 ans dans le groupe radiothérapie et avec les 7 % du
groupe témoin. La plupart des équipes qui pratiquent un
curage ganglionnaire pour le cancer de l’endomètre n’en
excluent que les stades I grade 1 avec invasion myométriale
limitée au tiers ou à la moitié interne (1). Aux États-Unis, le
curage est recommandé par la SGO (Society of Gynecologic
Oncologists) en raison du risque beaucoup plus important de
récidive en cas d’atteinte extra-utérine, mais aussi des coûts
engendrés par les traitements adjuvants systématiques (2). Au
concept de traitement adjuvant pour tous, la tendance serait
plutôt de substituer une stadification préthérapeutique opti-
male, c’est-à-dire chirurgicale.
Enfin, les alternatives à l’hystérectomie abdominale, hystérec-
tomie vaginale ou cœlio-préparée, associée ou non à un curage
pelvien cœlioscopique (3), pourraient diminuer les complica-
tions de la radiothérapie en générant moins d’adhérences post-
opératoires.
RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES
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Gynecologic Oncology. Burghardt E Editors. Thieme Medical Publishers. New
York, 1993, p 365.
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and vaginal or laparoscopic hysterectomy with bilateral salpingo-oophorectomy
for endometrial cancer : morbidity and survival. Am J Obstet Gynecol 1999 ;
181 : 376-81.
Les cancers du sein diagnostiqués
sous Traitement Hormonal
Substitutif
O. Dupuis
(Hôpital Bichat, service du Pr Madelenat, 46, rue Henri-Huchard,
75018 Paris.)
Breast cancer diagnosed during hormone replacement the-
rapy. Gajdos C, Tartter PI, Babinszki A. Obstet Gynecol
2000 ; 95 : 513-8.
Résumé
L’objectif de cette étude est de comparer les cancers du sein
selon qu’ils surviennent chez des femmes qui ont ou qui n’ont
pas eu de traitement hormonal substitutif (THS).
L’équipe de l’hôpital du Mont Sinaï à New York a étudié les
502 dossiers des patientes opérées d’un cancer du sein qui
étaient ménopausées au moment du diagnostic et qui avaient
un cancer au stade I, II ou III entre 1982 et 1998. Ces cas ont
été séparés en deux groupes : celui des 455 femmes qui n’ont
jamais reçu de THS et celui des 47 patientes qui avaient reçu
un THS.
Ces deux groupes étaient constitués de deux types de patientes
significativement différentes. Celles qui ont reçu un THS sont
plus jeunes ; (59 versus 62 ans) elles sont plus souvent de race
blanche, ont un morphotype distinct (BMI 24,7 kg/m2versus
27,4 kg/m2), un cancer du sein qui est plus souvent diagnosti-
qué par la mammographie (57 % versus 38 %). Les cancers
des femmes qui ont eu un THS sont plus souvent de type lobu-
laire invasif ou canalaire in situ et ont une composante inva-
sive plus petite (1,4 versus 2,1 cm), un envahissement gan-
glionnaire plus rare (19 % versus 29 %), et contiennent plus
souvent des récepteurs hormonaux. Les femmes qui ont reçu
un THS ont plus souvent un traitement conservateur. À 5 ans,
aucune utilisatrice de THS n’a de récurrence, contre 8 % de
celles sans THS, et le taux de métastases générales est de 7 %
dans le groupe des utilisatrices contre 10 % dans le groupe des
non-utilisatrices.
Cette étude met en évidence le biais de détection qui existe en
cas de cancer du sein chez des femmes sous THS. Le meilleur
pronostic des cancers du sein dépistés chez la femme sous
THS traduit probablement l’efficacité accrue du dépistage du
cancer du sein dans cette population.
Commentaire
Le traitement hormonal substitutif de la ménopause permet
non seulement d’éliminer les symptômes climatériques (bouf-
fées de chaleur, irritabilité) mais aussi de prévenir les séquelles
liées à l’ostéoporose et aux maladies cardiovasculaires. Malgré
ce constat, le THS est encore perçu par certains praticiens
comme dangereux. En effet, les études de cohorte réalisées ont
démontré qu’il existait une augmentation minime mais signifi-
cative du risque de cancer du sein après utilisation prolongée
du THS (1).
Malheureusement, les études de cohorte sont sujettes à des
biais : biais de sélection et biais de détection qui sont indépen-
dants de la taille de l’échantillon.
Cette étude a deux mérites : premièrement, celui de mettre
clairement en évidence cette différence entre les patientes sous
THS et celles qui ne le sont pas et, deuxièmement, celui d’être
pragmatique. Ainsi, même s’il a été démontré que le THS aug-
mentait la densité des seins et, de ce fait, pouvait théorique-
ment diminuer l’efficacité du dépistage (2), cette étude montre
que, chez les femmes sous THS, les cancers sont diagnostiqués
par la mammographie plus souvent que par la clinique !
Cette étude permet de mieux comprendre le paradoxe suivant :
même si l’utilisation d’un traitement hormonal substitutif est
statistiquement associé à une élévation du risque, et donc de
l’incidence du cancer du sein, les cohortes de femme sous THS
ont une mortalité liée au cancer du sein plus faible que celles
qui ne sont pas sous THS (3).
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La Lettre du Gynécologue - n° 254 - septembre 2000
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Le fait que les cancers du sein des femmes sous THS soient
plus souvent de type lobulaire et contiennent plus souvent des
récepteurs hormonaux permet de penser que le THS stimule la
croissance des tumeurs contenant des récepteurs hormonaux ;
ceci permet d’expliquer en partie l’augmentation de l’inci-
dence des cancers du sein observés sous THS.
Mais même si les patientes sous THS ont un risque de cancer
du sein très légèrement supérieur, le suivi dont elles bénéfi-
cient induit un bénéfice nettement supérieur au risque encouru.
RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES
1. Collaborative Group on Hormonal factors in Breast Cancer. Breast cancer
and hormone replacement therapy : collaborative reanalysis of data from 51
epidemiological studies of 52 705 women with breast cancer and 108 411
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2. Berkowitz JE et al. Hormonal replacement therapy : mammographic mani-
festations. Radiology 1990 ; 174 : 199-201.
3. Schairer C et al. Cause specific mortality in women receiving hormonal
replacement therapy. Epidemiology 1997 ; 8 : 59-65.
Pronostic carcinologique
et fertilité des patientes traitées
de manière conservatrice
pour tumeur borderline de l’ovaire
O. Dupuis
(Hôpital Bichat, service du Pr Madelenat, Paris.)
Outcome and reproductive function after conservative sur-
gery for borderline ovarian tumors. Morris RT, Gershenson
DM, Silva EG, Follen M, Morris M, Wharton T. Obstet
Gynecol 2000 ; 95 : 541-7.
Résumé
L’objectif de cette étude est de rapporter le devenir carcinolo-
gique et la fertilité des femmes traitées de manière conserva-
trice pour une tumeur de l’ovaire de type borderline.
Entre les années 1956 et 1996, 518 patientes ont été adressées
au MD Anderson Cancer Center pour tumeur borderline de
l’ovaire. Parmi celles-ci, les patientes dont le diagnostic histo-
logique était certain, qui n’avaient pas d’antécédent de ligature
tubaire ou de radiothérapie, qui avaient moins de 45 ans et qui
avaient bénéficié d’un traitement conservateur ont été incluses,
soit un total de 43 patientes.
Vingt-six avaient une tumeur séreuse et 17 une tumeur muci-
neuse. Sur les 18 patientes qui ont eu un staging, 15 étaient au
stade I et 3 au stade III. Tous stades confondus, 33 % des
patientes ont développé une récurrence ; 13 % des patientes au
stade I ont eu une récurrence. Tous stades confondus, les taux
de récurrence étaient de 58 % après kystectomie et de 23 %
après ovariectomie (p < 0,04).
Après l’intervention, 81 % des patientes étaient réglées régu-
lièrement. Enfin, 12 des 24 patientes qui désiraient une gros-
sesse l’ont obtenue ; 16 enfants viables sont nés 10 à 90 mois
après le diagnostic. Dans cette série, 44 % des patientes ont été
réopérées après un délai moyen de 32 mois. La médiane de
suivi était de 5-7 ans. Deux patientes sont décédées : l’une
d’une maladie intercurrente et l’autre d’une récurrence de la
tumeur.
Commentaire
Les tumeurs borderline de l’ovaire ont été décrites il y a
70 ans mais n’ont été reconnues et classifiées comme telles par
la FIGO qu’en 1971. Ces tumeurs se distinguent par leur sur-
venue chez des femmes jeunes (la moitié des patientes ont
moins de 40 ans au moment du diagnostic), leur caractère sou-
vent limité à l’ovaire (plus de la moitié de stade I ), leur excel-
lent pronostic et leur récurrence tardive. Les patientes atteintes
de tumeurs séreuses ont une survie à 7 ans de 99 % au stade I
et de 92 % au-delà du stade I (1). Pour les tumeurs muci-
neuses, la survie est de 80 % à 20 ans.
Dans la littérature, le taux de récurrence après traitement radi-
cal (annexectomie bilatérale) est d’environ 5 % alors qu’il
varie entre 0 et 30 % après traitement conservateur.
En 1988, la série de Lim-Tam (2) a montré qu’après kystecto-
mie le taux de récidive dépendait de deux paramètres : le statut
des berges de résection et le caractère uni- ou multifocal du
kyste. Dans cette série, le taux de récidive après kystectomie
(58 %) est significativement supérieur à celui retrouvé après
ovariectomie (23 %). Le taux élevé de récurrences dans cette
série est probablement lié au fait que de nombreuses patientes
étaient à un stade supérieur à I.
En effet, si l’on considère uniquement les patientes au stade I,
on retrouve un taux de récurrences de 13 %, identique aux
autres séries.
Cette série confirme également le fait que la grande majorité
des récurrences de tumeurs borderline sont ovariennes (12 sur
14 dans cette série) et accessibles à une réintervention.
Il apparaît que la grande majorité des tumeurs borderline de
l’ovaire ne sont pas de véritables cancers. Des auteurs comme
Edward Timble pensent que le risque de dégénérescence d’une
tumeur borderline serait de l’ordre de 1 %, comparable au
risque de degénérescence d’un fibrome en léiomyosarcome.
Ces tumeurs semblent donc être une entité à part entière et non
pas un état précancéreux. Cette affirmation est corroborée par
le fait que les tumeurs borderline ne sont pas plus fréquentes
dans les familles où se développent des syndromes héréditaires
de cancer de l’ovaire (3).
L’étude norvégienne de Kaern (4) a montré qu’en analyse mul-
tivariée seuls trois facteurs avaient un impact sur la survie : le
stade de la tumeur, le type histologique et l’âge. Dans la série
du MD Anderson, seul un tiers des patientes ont eu un staging
optimal avec biopsies péritonéales multiples, biopsie épi-
ploïque, biopsie rétropéritonéale. Au stade I, la survie à 5 ans
est supérieure à 95 %. Aux stades II, III et IV, les taux de
récurrences s’élèvent et la survie diminue tout en restant excel-
lente.
La moitié des patientes qui ont souhaité une grossesse l’ont
obtenue. Cette série démontre donc qu’il n’est pas illusoire
d’obtenir des grossesses chez ces patientes.
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La Lettre du Gynécologue - n° 254 - septembre 2000
Pour l’équipe du MD Anderson, deux conditions doivent être
remplies avant de proposer un traitement conservateur : un sta-
ging initial de qualité et l’acceptation d’un suivi régulier. Une
fois les grossesses désirées obtenues, une intervention radicale
pourra être discutée.
RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES
1. Kurman RJ, Trimble CL. The behavior of serous tumors of low malignant
potential : are they ever malignant ? Int J Gynecol Pathol 1993 ; 12 : 120.
2. Lim-Tam SK, Cajigas HE, Scully RE. Ovarian cystectomy for serous border-
line tumors : a follow up study of 35 cases. Obstet Gynecol 1988 ; 72 : 775.
3. Russel P. Borderline epithelial tumors of the ovary : a conceptual dilemma.
Clin Obstet Gynecol 1984 ; 11 : 259.
4. Kaern J, Tropé CG, Abeler VM. A retrospective study of 370 borderline
tumors of the ovary treated at the Norwegian Radium Hospital from 1979 to
1982. Cancer 1993 ; 71 : 1810.
Intérêt pronostique
de l’expression de la cytokératine
dans la moelle osseuse des patientes
ayant une première récurrence
de cancer du sein
C. Poncelet
(Hôpital Saint-Louis, service du Pr Clot, 1, avenue Claude Vel-
lefaux, 75475 Paris Cedex 10.)
Prognostic significance of an increased number of microme-
tastatic tumor cells in the bone marrow of patients with first
recurrence of breast carcinoma. Janni W, Gastroph S, Hepp
F et al. Cancer 2000 ; 88 : 2252-9.
Résumé
L’étude de l’expression de la cytokératine, un marqueur des
cellules épithéliales, dans la moelle osseuse de patientes por-
teuses d’un carcinome mammaire primitif a permis d’isoler un
sous-groupe de patientes ayant une survie diminuée. Utilisant
la même méthodologie, les auteurs ont étudié la fréquence et
l’intérêt pronostique de la mise en évidence de ce type cellu-
laire chez des patientes ayant une première récurrence de car-
cinome mammaire. La recherche de cellules exprimant la cyto-
kératine a été réalisée de façon prospective sur des aspirations
de moelle osseuse chez 65 patientes, dont 32 avaient une
récurrence locorégionale et 33 une récurrence à distance.
L’analyse immunohistochimique quantitative, utilisant un anti-
corps monoclonal anti-cytokératine A45-B/B3, portait sur plus
de 2 x 106cellules médullaires. Dans le sous-groupe des
patientes ayant une récidive locorégionale, l’expression médul-
laire de cytokératine n’était pas un marqueur pronostique. Au
contraire, dans le sous-groupe des patientes ayant une récur-
rence à distance, celles dont la moelle osseuse contenait plus
de 2,5 x 10-6 cellules exprimant la cytokératine avaient une sur-
vie significativement diminuée (6 mois) par rapport à celles
dont la moelle contenait moins de 2,5 x 10-6 cellules marquées
(17 mois) (p < 0,0001). Une analyse multivariée a démontré
que la présence de micrométastases médullaires osseuses
constituait un facteur pronostique indépendant.
Commentaire
Lors du diagnostic de carcinome mammaire primitif, plusieurs
facteurs pronostiques existent : taille tumorale, existence ou
non de métastases ganglionnaires axillaires, critères histolo-
giques et présence ou absence de récepteurs hormonaux. Ils
permettent de déterminer les meilleures options thérapeu-
tiques. En cas de récurrence, ces facteurs pronostiques ne sont
plus utilisables et seuls quelques facteurs, comme l’intervalle
libre entre tumeur primitive et récurrence, et le nombre de
métastases ainsi que leurs répercussions cliniques, permettent
d’évaluer le pronostic et d’adapter la stratégie thérapeutique.
Il s’agit de la première étude évaluant l’intérêt pronostique de
la recherche de micrométastases osseuses au moment d’une
récurrence de carcinome mammaire.
Dans le groupe de patientes ayant une récidive locorégionale,
l’expression de la cytokératine n’était pas un facteur pronos-
tique. Cependant, une forte tendance à la diminution de la sur-
vie existait quand l’expression de la cytokératine touchait plus
de 2,5 x 10-6 cellules. Ce manque de significativité peut être en
rapport avec la taille de l’échantillon.
Dans le groupe de patientes ayant une récidive à distance, la
recherche de micrométastases médullaires osseuses, avec cette
valeur seuil de 2,5 x 10-6 cellules, a prouvé son intérêt pronos-
tique tant en analyse univariée qu’en analyse multivariée.
Si ces données sont confirmées, la prochaine étape consistera à
savoir si une intensification thérapeutique permet d’obtenir un
bénéfice, chez les patientes ayant plus de 2,5 x 10-6 cellules
cytokératine positive dans leur moelle osseuse.
RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES
Coleman RE, Smith P, Rubens RD. Clinical course and prognostic factors
following bone recurrence from breast cancer. Br J Cancer 1998 ; 77 : 336-40.
Braun S, Pantel K, Janni W, Hepp F, Kentenich CRM et al. Cytokeratin-posi-
tive occult metastatic cells in bone marrow and survival of breast cancer
patients with stage I-III desease. N Engl J Med 2000 ; 342 : 525-33.
Trachélectomie radicale vaginale
laparoscopique. Un traitement
préservant la fertilité de patientes
ayant un carcinome cervical utérin
C. Poncelet
(Hôpital Saint-Louis, service du Pr Clot, 1, avenue Claude Vel-
lefaux, 75475 Paris Cedex 10.)
Laparoscopic vaginal radical trachelectomy. A treatment to
preserve the fertility of cervical carcinoma patients.
Dargent D, Martin X, Sacchetoni A, Mathevet P. Cancer
2000 ; 88 : 1877-82.
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