M I S E A U P O I N T Spasticité : actualités dans la physiopathologie et la prise en charge Recent concepts in spasticity pathophysiology and management ● D. Mazevet*, S. Deffontaines* P O I N T S P O I N T S F O R T S F O R T S ■ La spasticité est le seul élément du syndrome pyramidal pour lequel il existe un traitement spécifique. ■ Seule la spasticité gênante justifie un traitement. ■ La gêne du patient provient plus souvent du déficit moteur que de la spasticité. ■ Le traitement de choix d’une spasticité focalement gênante est la toxine botulique. ■ L’indication du baclofène intrathécal est posée dans le cadre d’une consultation spécialisée. ■ Les mécanismes physiopathologiques responsables de la spasticité peuvent être différents en fonction du siège de la lésion neurologique. intérêt de l’étude de la spasticité réside dans le fait qu’il s’agit du seul élément du syndrome pyramidal actuellement accessible à un traitement, qu’il soit médical ou médico-chirurgical. Des progrès ont été réalisés au cours de la dernière décennie, tant dans l’étude des mécanismes neurophysiologiques responsables de la spasticité que dans les modalités de prise en charge, avec l’amélioration de l’accès à certaines thérapeutiques. L’ PHYSIOPATHOLOGIE De multiples circuits contrôlent la sensibilité du réflexe monosynaptique Ia (figure), et une perturbation d’un seul de ces circuits peut entraîner son exagération. Mots-clés : Spasticité – Toxine botulique – Baclofène intrathécal – Physiopathologie. Faisceaux descendants Ib SUMMARY SUMMARY In the past decade, advances have been made in knowledge of physiology of spasticity: presynaptic inhibition of Ia fibers, group II pathway, homosynaptic depression are extensively studied. Therapeutic strategies are improved and require a multidisciplinary approach using oral medications, botulinum toxin, surgery, and less frequently intrathecal baclofen. Keywords: Spasticity – Botulinum toxin – Intrathecal baclofen – pathophysiology. MN Inhibition présynaptique Ia Ia Cellule de Renshaw Exc. Muscle Inh. * Consultation “spasticité”, service de médecine physique et de réadaptation, hôpital de la Pitié-Salpêtrière, Paris. La Lettre du Neurologue - vol. IX - n° 10 - décembre 2005 Figure. Représentation schématique des différents mécanismes contrôlant le réflexe d’étirement. 369 M I S E A Plusieurs d’entre eux ont été étudiés chez des patients spastiques, le plus souvent au repos et non au cours du mouvement. Certains ne sont pas modifiés après une lésion du système nerveux central (SNC) [inhibition récurrente, activité des neurones gamma, etc.], d’autres sont perturbés [afférences du groupe II (1)], et certains le sont différemment selon la localisation de la lésion [inhibition présynaptique diminuée dans les lésions médullaires, mais pas dans les atteintes encéphaliques unilatérales (2)]. Jusqu’à présent, les perturbations neurophysiologiques observées n’ont pu être corrélées à l’importance clinique de la spasticité, mais des études en cours montrent qu’il existe un lien avec l’intensité d’un phénomène de déplétion du transmetteur observé au niveau de la synapse Ia-motoneurone et appelé “dépression homosynaptique” (3). Des perturbations de l’inhibition réciproque ont également été décrites chez les patients spastiques. La physiopathologie de la spasticité ne se limite pas aux perturbations des circuits médullaires et de leur contrôle descendant. Il existe aussi des modifications et des adaptations des fibres musculaires après lésion du SNC : diminution des fibres de type II (fibres phasiques) au profit des fibres de type I (fibres toniques), modifications histochimiques et morphologiques. ÉVALUATION DE LA SPASTICITÉ La principale caractéristique de la spasticité est sa variabilité au cours du temps, de la position et de l’état du patient (fatigue, maladie intercurrente, etc.). Son évaluation clinique pose donc d’importants problèmes de reproductibilité, d’où la difficulté qu’il y a à mettre en évidence de façon objective l’efficacité d’un traitement. Toutes les échelles de spasticité ont leur défaut ; la plus utilisée reste celle d’Ashworth (4) [encadré 1] ou sa version modifiée (5). U P O I N T tique quotidienne. Les méthodes instrumentales (pendulum test, mesure par appareil isocinétique, calcul du rapport H/M, etc.) supposées évaluer la spasticité ont également de nombreuses imperfections et n’apportent guère de fiabilité supplémentaire. FORMES CLINIQUES Spasticité des atteintes médullaires C’est souvent la spasticité la plus marquée et la plus spectaculaire. Elle prédomine sur les groupes musculaires extenseurs aux membres inférieurs (quadriceps, triceps sural) et sur les fléchisseurs aux membres supérieurs (biceps brachial, flexor carpi radialis et ulnaris, flexor digitorum profundis et superficialis). Il s’ajoute à l’hypertonie spastique proprement dite des réponses réflexes se manifestant par des spasmes, essentiellement aux membres inférieurs, en flexion ou en extension. Spasticité de l’hémiplégique par AVC ou traumatisme crânien Globalement, même si la spasticité peut être marquée sur tout un hémicorps chez l’hémiplégique (7), elle est surtout gênante de façon focale : main macérée par défaut d’extension passive des doigts, varus équin du pied par hypertonie ou hyperactivité du triceps sural et du tibial postérieur. L’efficacité et la tolérance du traitement antispastique par voie générale sont souvent décevantes chez l’hémiplégique, et des traitements plus ciblés sont nécessaires. Il est parfois cliniquement difficile de différencier certaines dystonies ou une hyperactivité musculaire de la spasticité proprement dite, à laquelle elles sont souvent associées. C’est notamment le cas pour la griffe des orteils qui gêne la marche et le chaussage des patients hémiplégiques. Encadré I. Échelle d’Ashworth 0 : pas d’augmentation du tonus musculaire 1 : augmentation discrète du tonus musculaire se manifestant par un ressaut à la mobilisation de l’articulation 2 : augmentation plus marquée du tonus musculaire touchant la majeure partie de l’amplitude articulaire, l’articulation pouvant être mobilisée facilement 3 : augmentation importante du tonus musculaire rendant la mobilisation passive difficile 4 : l’articulation concernée est fixée en flexion ou en extension Comme beaucoup d’échelles, celle d’Ashworth (modifiée ou non) est criticable : elle ne permet pas dans sa cotation haute de distinguer l’hypertonie musculaire de la rétraction musculo-tendineuse, et sa reproductibilité inter- et intra-individuelle est médiocre. Enfin, ce n’est pas une échelle linéaire, et l’addition ou la moyenne des scores obtenus pour les groupes musculaires des différentes articulations d’un membre ne peuvent théoriquement pas être effectuées [comment additionne-t-on le 1+ de l’échelle d’Ashworth modifiée ?] (6). Malgré tout, c’est la plus simple à utiliser en pra370 ARSENAL THÉRAPEUTIQUE, CRITÈRES DE CHOIX ET MODALITÉS DU TRAITEMENT ANTISPASTIQUE Traitements médicamenteux • Traitement par voie générale Plusieurs molécules sont disponibles pour un traitement par voie orale. ✓ Le baclofène est un analogue du GABA dont le mode d’action porte sur l’inhibition présynaptique des fibres Ia, qui, selon la localisation des lésions responsables de la spasticité, peut être modifiée (5). Il n’est donc pas logique de choisir le baclofène en traitement de première intention lorsqu’il s’agit de patients hémiplégiques, chez lesquels l’inhibition présynaptique (figure, p. 369) est normale. De plus, son effet d’abaissement du seuil épileptogène n’encourage pas toujours à l’utiliser chez les patients porteurs de lésions encéphaliques. C’est en revanche le traitement de choix de la spasticité d’origine médullaire. En raison d’une demi-vie courte, la répartition doit se faire en 3 prises au moins. Les doses La Lettre du Neurologue - vol. IX - n° 10 - décembre 2005 peuvent être augmentées si nécessaire jusqu’à 90 à 120 mg par jour. Dans certaines spasticités sévères, on peut être amené à proposer le baclofène par voie intrathécale. ✓ Le dantrolène sodium a une action périphérique sur les fibres musculaires. Malgré cela, il peut entraîner des effets indésirables à type de somnolence, de troubles digestifs et d’hépatite cytolytique dose-dépendante. La posologie doit être augmentée très progressivement pour une meilleure tolérance. ✓ Le diazépam (Valium®) est le plus anciennement utilisé, avec une bonne efficacité mais une sédation excessive. Il est intéressant de l’employer dans les spasticités nocturnes gênantes. ✓ La tizanidine est un 2 bloquant central dont l’effet antispastique semble intéressant dans certaines indications. Cette molécule peut entraîner une somnolence gênante. En France, la prescription passe par une autorisation temporaire d’utilisation (ATU), ce qui ne simplifie pas son utilisation. ✓ La gabapentine (Neurontin®) est initialement un médicament antiépileptique, également utilisé dans certaines douleurs. Il n’a pas l’autorisation de la mise sur le marché (AMM) dans l’indication de la spasticité, mais a fait l’objet d’études contrôlées tout à fait intéressantes dans la spasticité de la sclérose en plaques et des atteintes médullaires traumatiques (8, 9). Sa tolérance est très bonne, mais il est légitime de ne l’utiliser qu’en deuxième intention du fait de l’absence d’AMM. ✓ Les spécialités utilisées classiquement pour leur effet “myorelaxant” (telles que méthocarbamol, chlorproéthazine, thiocolchicoside, etc.) n’ont pas leur place dans le traitement de la spasticité, où elles sont inefficaces. • Traitement par voie intrathécale Quand la spasticité devient trop diffuse et n’est pas contrôlée par les traitements par voie orale, on peut être amené à proposer la mise en place d’une pompe à infusion intrathécale continue de baclofène. L’indication de ce dispositif coûteux et parfois astreignant doit tenir compte des complications infectieuses possibles chez des patients fragiles porteurs de multiples portes d’entrée (escarres, infections urinaires et pulmonaires). L’objectif de la mise en place de ce dispositif lourd doit être évalué et discuté avec le patient dans le cadre d’une consultation spécialisée. Il est rare que l’indication soit posée chez un patient ayant encore des capacités de marche ou de verticalisation. Il s’agit le plus souvent d’une indication de confort d’installation au fauteuil ou au lit, ou pour améliorer les soins infirmiers et d’hygiène (comme les sondages). Une hospitalisation est nécessaire pour pratiquer des injections-tests (par ponction lombaire ou après la pose d’un cathéter intradural) permettant d’évaluer le gain fonctionnel et la tolérance du produit. Ce n’est qu’à l’issue de ces tests que la pompe à baclofène sera posée en milieu neuro-chirurgical. Un suivi médical rapproché est ensuite nécessaire, notamment pour le remplissage régulier du réservoir de la pompe. La mise en route d’un traitement antispastique n’est pratiquement jamais urgente et il faut se laisser le temps de bien analyser le trouble moteur avant de décider de prescrire un traitement antispastique. Il peut être difficile pour le patient de distinguer dans La Lettre du Neurologue - vol. IX - n° 10 - décembre 2005 sa gêne ce qui est lié à la spasticité ou au déficit moteur, car il englobera ces deux déficiences sous le terme de “raideur”. Ce n’est pas parce qu’il existe une spasticité du triceps sural qu’il est nécessaire de la traiter si, à l’examen clinique, on constate que le patient est essentiellement gêné par un déficit moteur du psoas ne lui permettant pas le passage du pas. Le traitement antispastique doit être prescrit sur des objectifs fonctionnels ou de confort (encadré II). Le traitement antispastique par voie orale est utilisé avec prudence dans les spasticités diffuses du fait du risque d’aggravation fonctionnelle, en particulier chez le patient “marchant”. Idéalement, il serait souhaitable de traiter la spasticité d’un patient en fonction des perturbations neurophysiologiques associées : par exemple, il est plus logique de traiter la spasticité d’un patient hémiplégique par du dantrolène (agissant sur la fibre musculaire) que par du baclofène (agissant sur l’inhibition présynaptique, qui est normale chez l’hémiplégique). Mais les mécanismes et les sites d’action de toutes les molécules ne sont pas encore identifiés, et tous les patients ne peuvent avoir une exploration neurophysiologique complète. Le traitement antispastique par voie générale doit commencer de préférence par une monothérapie, en augmentant les doses par paliers suffisamment longs pour améliorer leur tolérance clinique (notamment pour le dantrolène). On ne peut pas conclure à l’inefficacité d’une molécule si elle n’a pas été utilisée à une posologie suffisante pour être efficace ou avec une répartition des prises adéquate. Si la posologie efficace n’a pas été obtenue en raison de la survenue d’effets indésirables, peut-être faut-il reprendre ce traitement avec une augmentation des doses plus progressive. L’association de plusieurs molécules antispastiques est possible si l’efficacité d’une monothérapie à bonne dose est insuffisante. Encadré II. Critères de traitement de la spasticité. Il faut que la spasticité entraîne des douleurs ou qu’elle soit gênante pour au moins une des activités suivantes : – l’installation au lit ou au fauteuil – l’expression de capacités motrices préservées (préhension, marche, etc.) – les soins d’hygiène, d’habillage ou d’élimination • Traitement antispastique par voie locale ✓ Toxine botulique L’utilisation de la toxine botulique dans la spasticité a été une grande avancée dans la rééducation neurologique. L’efficacité des injections est bonne, sous réserve d’une analyse clinique pertinente permettant l’identification des muscles hyperactifs ou spastiques, d’une injection sous repérage électromyographique et de l’utilisation de doses suffisantes. Bien que le gain fonctionnel soit difficile à mettre en évidence par les échelles à notre disposition, le confort des patients spastiques est souvent amélioré. Le principal inconvénient est le coût du produit, car les quantités utilisées dans la spasticité sont très supérieures à celles utilisées dans les autres mouvements anormaux. La durée d’action est 371 M I S E A courte, d’environ 3 mois, nécessitant donc une répétition des injections 3 à 4 fois par an. Le coût engendré par l’utilisation de la toxine botulique dans la spasticité limite ainsi sa disponibilité aux centres possédant un budget suffisant. La réversibilité de son action peut être un avantage si on veut l’utiliser comme test thérapeutique et fonctionnel avant, par exemple, un geste neuro-chirurgical, et évaluer la part de la spasticité et des rétractions musculo-tendineuses dans des limitations d’amplitude articulaires. L’utilisation de la toxine botulique dans la spasticité se fait essentiellement hors AMM chez l’adulte (limitée actuellement à la spasticité du membre supérieur après AVC), mais de nouveaux cadres réglementaires sont en cours d’élaboration. ✓ Alcoolisation des troncs nerveux ou aux points moteurs Cette technique a été progressivement abandonnée en raison du risque de survenue de douleurs de désafférentation. On la réserve maintenant à certains troncs innervant des muscles volumineux qui nécessiteraient des doses importantes si l’on utilisait de la toxine botulique, comme le nerf obturateur pour une spasticité des adducteurs de hanche ou le nerf crural pour le quadriceps. Traitement chirurgical La tendance actuelle est à l’utilisation croissante de la chirurgie dans le traitement de la spasticité et de son retentissement orthopédique et fonctionnel. Le recours à la chirurgie est proposé dans le cadre de consultations multidisciplinaires avec le chirurgien, le spécialiste de médecine physique et de réadaptation et le neurologue. Dans le cadre de l’hémiplégie, le geste neuro-chirurgical le plus utilisé pour la spasticité est la neurotomie partielle sélective (nerf médian, soléaire, etc.). Il est souvent intéressant de réaliser dans le même temps un geste orthopédique : allongement tendineux, arthrodèse, transfert tendineux (exemple : transfert d’une partie du tendon du tibial antérieur quand ce muscle entraîne un varus gênant à la marche). U P O I N T Encadré III. Piège : un varus du pied à la marche n’est pas obligatoirement lié à une spasticité du tibial postérieur. Il peut être lié à la présence, le plus souvent syncinétique, d’une commande sur le tibial antérieur qui, en l’absence de commande sur les muscles fibulaires et extenseurs des orteils, entraînera une bascule du pied en varus (du fait de la localisation médiale de son insertion distale). Le varus du pied ne se traite donc pas systématiquement par un geste local sur le muscle tibial postérieur. CONCLUSION Une meilleure maîtrise des techniques de traitement et la création de consultations spécialisées ont permis d’améliorer la prise en charge des patients consultant pour une spasticité gênante. Mais il reste encore beaucoup à faire pour mieux comprendre les différents mécanismes en cause en fonction des pathologies impliquées et de leur localisation, déterminer les sites d’action des différentes molécules et développer de nouveaux traitements. ■ R É F É R E N C E S B I B L I O G R A P H I Q U E S 1. Marque P, Simonetta-Moreau M, Maupas E et al. Facilitation of transmission in heteronymous group II pathways in spastic hemiplegic patients. J Neurol Neurosurg Psychiatry 2001;70(1):36-42. 2. Faist M, Mazevet D, Dietz V et al. A quantitative assessment of presynaptic inhibition of Ia afferents in spastics. Differences in hemiplegics and paraplegics. Brain 1994;117(6):1449-55. 3. Aymard C, Katz R, Lafitte C et al. Presynaptic inhibition and homosynaptic depression: a comparison between lower and upper limbs in normal human subjects and patients with hemiplegia. Brain 2000;123(8):1688-702. 4. Ashworth B. Preliminary Trial of Carisoprodol in Multiple Sclerosis. Practitioner 1964;192:540-2. 5. Bohannon RW, Smith MB. Interrater reliability of a modified Ashworth scale of muscle spasticity. Phys Ther 1987;67(2):206-7. 6. Johnson GR. Outcome measures of spasticity. Eur J Neurol 2002;9(1):10-6; dicussion 53-61. 7. Sommerfeld DK, Eek EU, Svensson AK et al. Spasticity after stroke: its occurrence and association with motor impairments and activity limitations. Stroke 2004;35(1): 134-9. 8. Gruenthal M, Mueller M, Olson WL et al. Gabapentin for the treatment of spasticity in patients with spinal cord injury. Spinal Cord 1997;35(10):686-9. 9. Mueller ME, Gruenthal M, Olson WL et al. Gabapentin for relief of upper motor neuron symptoms in multiple sclerosis. Arch Phys Med Rehabil 1997;78(5):521-4. EXEMPLES PRATIQUES Cas n°1. Patiente de 60 ans présentant depuis 4 mois une hémiplégie à prédominance brachio-faciale. Elle consulte pour une demande d’ouverture de sa main hémiplégique qui est macérée, sent mauvais et entraîne des douleurs ne lui permettant plus de se couper les ongles, lesquels commencent à lui blesser la paume. À l’examen, pas de commande volontaire sur les muscles de la main, du poignet et du coude. On arrive à ouvrir passivement la main, avec difficulté et lenteur, dans toute son amplitude. Il n’existe pas d’hypertonie spastique sur les autres groupes musculaires du côté hémiplégique. Il s’agit donc d’une spasticité prédominant sur les fléchisseurs des doigts et du poignet, donc plutôt focale. On peut proposer à cette patiente des injections de toxine botulique dans les muscles spastiques, dans un objectif hygiénique et antalgique, et non fonctionnel. Si l’hémiplégie était plus ancienne, l’alternative à discuter serait celle d’une neurotomie sélective du nerf médian. S’il avait existé une composante de rétraction sur les muscles fléchisseurs, il aurait été possible de proposer un geste chirurgical d’allongement. 372 Cas n°2. Patient de 35 ans présentant depuis un an une hémiplégie gauche après AVC et consultant pour un varus équin occasionnant une sensation d’insécurité à la marche et un défaut d’appui du talon. L’examen montre l’absence de commande sur les extenseurs des orteils et les fibulaires, un tibial postérieur déficitaire, mais une commande efficace sur le tibial antérieur qui entraîne le pied en varus. La spasticité est marquée sur le triceps sural. La mobilisation passive de la cheville montre une limitation de la flexion plantaire, surtout lorsque le genou est étendu. Un bloc anesthésique à la xylocaïne est réalisé, confirmant l’existence d’une rétraction sur les muscles gastrocnémiens. L’objectif chez ce patient est d’obtenir un pied à plat et stable permettant une marche efficace et en sécurité. On peut lui proposer une chirurgie comprenant un geste d’allongement des gastrocnémiens et le transfert d’une partie du tendon du muscle tibial antérieur sur la partie latérale du pied permettant à ce muscle de relever le pied dans l’axe en l’absence de commande sur les fibulaires et les extenseurs des orteils. En fonction de l’importance de la spas- ticité sur le triceps sural, on pourra proposer, d’emblée ou dans un deuxième temps, des injections de toxine botulique dans le triceps sural ou une neurotomie sélective. Cas n°3. Patiente de 45 ans présentant une paraplégie spastique en rapport avec une sclérose en plaques, confinée au lit ou au fauteuil depuis 2 ans. La spasticité des membres inférieurs s’aggrave progressivement. Elle ne permet plus l’habillage et la toilette, rend difficiles les hétérosondages urinaires pluriquotidiens et peut entraîner parfois une chute du fauteuil roulant. La patiente a perdu toute capacité de transferts et de marche depuis plusieurs mois. L’installation au lit devient de plus en plus inconfortable. Il n’y a pas de foyer infectieux évolutif. On peut proposer à cette patiente la réalisation d’injections-test de baclofène intrathécal. En fonction de l’efficacité sur la spasticité et de la tolérance de ces injections, la pose d’une pompe pourra être envisagée. Si des rétractions musculaires sont mises en évidence, un geste orthopédique pourra y être associé. La Lettre du Neurologue - vol. IX - n° 10 - décembre 2005